LUTTER
CONTRE LES TENTATIONS DANS LE MONDE DU TRAVAIL
Ce
thème m’a été proposé pour une
journée de réflexion avec les étudiants de
l’école normale de Dakar. Dans un premier temps, nous
avons dégagé les
tentations
qui nous guettent dans l’exercice de notre travail
d’enseignement ou d’autres responsabilités :
la tentation du pouvoir, la tentation de la réussite par tous
les moyens en particulier en utilisant le maraboutage, la tentation
de l’individualisme et de la recherche de la promotion
personnelle, la tentation de l’ethnocentrisme et du favoritisme
envers nos parents, ceux qui parlent la même langue que nous,
ou ceux qui sont du même groupe social que nous. Et enfin pour
les chrétiens la tentation du repli sur l’Eglise et sur
la paroisse. Pour ces différentes tentations dont nous parlons
aujourd’hui, il s’agit simplement de quelques réflexions,
que nous avons faites dans notre courte rencontre. Ceux qui sont
intéressés peuvent me demander des documents plus
approfondis sur ces différentes questions.
Dans
un 2° temps, nous avons cherché comment dépasser
ces tentations,
pour
construire avec tous une société meilleure.
Tout de suite, nous avons noté que la première chose
pour lutter contre toutes ces tentations c’est d’
aimer
Jésus Christ
de toute notre cœur et le plus possible, l’aimer pour
vivre comme lui, mais surtout de vivre avec lui. C’est cela qui
nous permettra de réussir notre vie. Pendant l’eucharistie,
nous avons lu la lettre de Pierre (1 P 1, 13-21) sur la vie nouvelle
dans le Christ et pour l’évangile Mt 4, 1-11 comment
Jésus Christ a résisté à Satan et aux
tentations.
La
tentation de la corruption
Par
rapport à l’argent,
nous connaissons tous ces paroles de Jésus : »
vous
ne pouvez pas servir à la fois Dieu et l’argent »,
la parabole du mauvais riche et du pauvre Lazare et ce proverbe :
il est plus facile à un chameau de passer par le trou d’une
aiguille, qu’à un riche d’entrer dans le royaume
des cieux ».
Et en même temps, Jésus nous dit dans une autre
parabole : «
faites-vous
des amis avec l’argent malhonnête ».
Nous avons reconnu d’abord que l’argent est bon et il
est important d’avoir de l’argent. Le problème
c’est : comment nous gagnons cet argent, et comment nous
l’utilisons. Est-ce que nous gagnons notre argent par notre
travail, et d’une manière honnête ?
L’argent
est bon,
c’est avec l’argent que nous pouvons faire une vivre
notre famille, et aussi que nous pouvons pas seulement aider les
pauvres, mais aussi construire et faire avancer notre société,
lutter pour le développement. Si tu lances un atelier ou une
entreprise, tu donnes du travail à quatre ou cinq personnes
qui pourront alors faire vivre leur famille. Cela est très
important. Il ne suffit donc pas de faire l’aumône. Nous
connaissons tous ce proverbe de Jésus que saint Paul
rapporte : «
il
y a plus de joie à donner qu’à recevoir ».
Il s’agit de mettre notre joie dans le partage et l’amour
de nos frères.
Pour
résister à cette tentation de la corruption,
il faut prendre une décision ferme solide et définitive,
après avoir sérieusement réfléchi, à
la fois pour ne pas nous laisser corrompre,
ne
pas nous laisser acheter
et pour ne pas corrompre les autres, pour ne pas leur donner de
l’argent, pour notre intérêt personnel ou pour de
mauvaises choses.
Pour
les enseignants, nous avons noté des choses qui se font. Cette
semaine des enseignants ont été condamnés car
ils avaient vendu des épreuves corrigées à des
candidats aux examens. Des enseignants se font payer par les parents
pour donner de bonnes notes aux élèves ou pour accepter
leur enfant dans leur école ou dans leur classe, quand bien
même les effectifs sont surchargés. Il y a aussi des
enseignants qui détournent l’argent de la caisse des
parents d’élèves. C’est dans la vie de tous
les jours que nous détournons l’argent.
La
sexualité
La
sexualité est une force que Dieu a mise en nous pour aimer,
pas seulement dans notre corps mais d’abord dans notre esprit
et dans notre cœur. Il s’agit de vivre sa sexualité
dans l’amour, d’abord dans les relations amicales et
ensuite dans le mariage, pour ceux qui se marient. Il est donc
important pour les étudiants d’apprendre à vivre
une véritable amitié mixte claire, d’apprendre à
regarder les autres avec respect en reconnaissant dans l’autre
un fils ou une fille de Dieu. Et donc nous conduire
comme
Jésus qui a respecté tous les hommes et toutes les
femmes et les
a tous aidés à sortir de leur péché et à
grandir dans l’amour. Il y avait des femmes qui accompagnaient
Jésus dans tous les villages, en même temps que les
apôtres, dans une vraie amitié. Rappelons-nous le regard
de Jésus sur la prostituée (Jean 8). Simon ne voyait en
elle qu’une femme de péchés. Jésus voit
en elle non une femme prostituée mais une femme qui cherche à
aimer, une femme qui veut changer sa vie, même si elle n’est
pas encore arrivée. Il voit plus le désir de son cœur
que les mauvaises choses qu’elle a faites.
Pour
vivre notre sexualité, la première des choses bien sûr,
c’est
d’éviter
la pornographie
que l’on retrouve même involontairement sur les médias.
Et décider à l’avance lorsque nous tombons sur un
de ces documents pornographiques d’arrêter aussitôt,
et de ne pas les regarder. Il y a aussi pour les enseignants qui
profitent de leur pouvoir, de leur autorité et de leurs
relations continues dans les classes, pour faire des relations
sexuelles avec des élèves. Cette semaine trois
enseignants ont été condamnés à la prison
parce qu’ils avaient enceinté neuf de leurs élèves
dans un collège. Il faut
être
maître de soi,
car il y a aussi des filles qui cherchent à faire des
relations sexuelles avec leur professeur pour avoir de bonnes notes.
Ou ensuite quand elles travaillent, pour avoir des avantages ou des
promotions. Ce que l’on appelle la « promotion
canapé ».
Les
mauvaises compagnies
Nous
connaissons ce proverbe, ‘
’dis-moi
qui tu hantes, je te dirai qui tu es’’ .
Sortir avec des mauvais amis, c’est le risque de se laisser
entrainer à faire la même chose qu’eux. Il est
important de savoir choisir nos relations, d’avoir de bons
camarades et de bon amis. Bien sûr, certains d’entre nous
cherchent à rencontrer des personnes qui se sont lancés
dans la drogue, la prostitution, le libertinage ou la délinquance,
non pas pour les suivre mais les aider à changer et à
s’en sortir. Cela est possible mais à certaines
conditions. D’abord être sérieusement motivé
pour pouvoir rester sérieux et ne pas se laisser entrainer, ne
pas agir par orgueil, mais dans l’humilité, en gardant
en tête la difficulté de la chose. Deuxième
chose,
ne
pas agir tout seul ,
mais être dans un groupe où on est soutenu et où
on peut partager ce que l’on vit, faire le point des actions,
les évaluer et éviter les erreurs. Et si c’est un
groupe de prière pour vivre cet engagement dans la foi,
La
tentation du pouvoir
En
tant qu’enseignant ou cadre supérieur, vous aurez un
pouvoir. Il faut donc apprendre à bien le vivre et à
bien exercer l’autorité que ce pouvoir donne. Le pouvoir
c’est bon, cela permet de faire de bonnes choses lorsqu’on
est décidé. Car il nous donne des moyens d’agir.
La question est :
comment
exerces-tu ton pouvoir,
et l’autorité que tu as reçue ? Nous avons
parlé à ce sujet du mariage. Si Paul dit que l’homme
est le chef de la famille, mais il ajoute de suite : »
comme
le Christ est le chef de l’Eglise : il a donné sa
vie pour elle . »
Il faut affirmer la phrase dans sa totalité. Si l’homme
est le chef de famille, c’est pour donner sa vie, se mettre au
service de sa femme, de ses enfants et de toute la famille et non pas
pour se faire servir. Nous avons chanté le chant :
«
garde
nous tout petit devant ta face, garde nous petit devant nos frères » .
De même si la femme est soumise o son mari, ce n’est pas
par peur ou pour avoir des avantages : que son mari lui donne de
l’argent ou des habits. Elle est soumise par amour comme
l´Eglise se soumet au Christ, volontairement et librement.
D´ailleurs, dans cette épitre aux Ephésiens 5,
Paul commence par dire
:
« soyez soumis les uns aux autres. »
Jésus nous a dit très clairement (Jean 13,13) :
ceux qui ont le pouvoir,
les
chefs et les rois de la société se font servir par les
autres. Chez vous ce ne sera pas la même chose » .
Et il a été jusqu´à laver les pieds de ses
apôtres, avant de donner sa vie pour tous les hommes sur la
croix (Paul explique que
« Jésus
n´a pas retenu égoïstement le pouvoir que l´égalait
á Dieu. Mais il s´est abaissé, en devenant homme
comme nous. Jusqu´a la mort, comme un esclave, pour nous
sauver « ( Ph
2).
La
tentation du maraboutage
Il
y a des gens qui vont marabouter leur camarade d’études
ou de travail par jalousie ou par méchanceté, pour
prendre leur place ou pour les envoyer le malheur. C´est le
lieu de compétition par tous les moyens y compris la
malédiction, le maraboutage et la sorcellerie. Pour nous
Chrétien, face à tout cela, il s´agit d´augmenter
notre foi et notre confiance en Jésus Christ, pour
ne
pas avoir peur .
Nous sommes dans les mains de Dieu, «
même
les cheveux de notre tête sont comptés ».
Jésus nous dit
: »
Ne craignez pas ceux qui peuvent tuer le corps et ne peuvent pas tuer
l´âme ». Si
notre âme est solidement attachée à Jésus
et fixée en Dieu, nous n’aurons pas peur du maraboutage
et des mauvais esprits, ni des pratiques traditionnelles.
Mais
la première chose c’est
de
refuser absolument
d´utiliser ces moyens, contre les autres aussi bien que pour
nous même. Nous voulons réussir notre vie, mais la
solution n´est pas le maraboutage. C´est le travail
comme le dit ce proverbe en Wolof, ‘
’il
ne suffit pas de prier Dieu, commence d´abord à cultiver
ton champ : Yala, Yalla, bèyil sa tool’’. Cet
autre proverbe dit : » Dieu est bon mais il ne donne
rien à celui qui ne fait pas ses propres efforts. Si tu veux
qu´on t´aide, il faut qu´on te trouve au travail. :
Ndimbali, na ca fekk lôxol borom »
La
tentation de l´individualisme et la promotion personnelle
En
tant qu´étudiant, il est important de vous former le
mieux possible, et d´être le plus compétents
possible. Pas pour écraser les autres, pour les dominer ou
pour les humilier, mais au contraire pour les aider. Nous connaissons
tous des étudiants qui refusent d´aider leur camarade,
par peur que ceux-ci les dépassent et prennent leurs places.
Nous voulons nous former le mieux possible, parce que c´est
l´appel que Dieu nous a adressé. Nous connaissons la
parabole des talents (Mat 25,14-30). Dieu dit : »
Tu es heureux bon et fidèle serviteur, parce que tu as été
fidèle dans les petites choses, tu as fait grandir les talents
qui je t´ai donnés, je vais te donner une place encore
plus grande. Entre dans la joie de ton maître ».
Cette joie, il faut la partager avec les autres. Les qualités
et, les responsabilités que nous recevons, c’est pour
mieux servir nos frères et sœurs et
mieux
servir la société.
Nous nous demandons : quel est le plus grand ? Celui qui
méprise les autres parce qu´il est plus fort et qu’il
les a dépassés ? Ou bien celui qui agit avec les
autres, pour avancer tous ensemble ? Même si pour cela, il
faut s´abaisser et avancer moins vite. Notre idéal, ce
ne sont pas les joueurs de tennis qui jouent l´un contre
l´autre, mais l´équipe de football où l´on
joue ensemble en se faisant des passes. Jésus nous dit :
«
ce
que tu as reçu gratuitement donne le gratuitement ».
La
tentation de l´ethnocentrisme
Cela
nous guette tous. C´est normal d’aider ses parents. C´est
un des commandements de Dieu que Moise nous a donnés, et qui
est commun à tous les hommes. Mais nous sommes guettés
par la tentation d´aimer d´abord ceux qui parlent
la
même langue
que nous. Et pour vous qui êtes appelés à avoir
une situation importante dans la vie, il y a aussi la tentation de
vous retrouver entre vous, de
la
même classe sociale .
Nous connaissons tous des gens qui sont chefs d´entreprise ou
qui ont des responsabilités dans la société, qui
ont des moyens de vivre, et qui se retrouvent en ville dans les
beaux quartiers entre eux. Ils ne pensent même pas à
leurs parents qui sont restés au village et qui vivent dans
des conditions misérables : le toit de leur maison
coule, ils n´ont pas de quoi manger normalement et encore
moins de quoi se soigner.
Nous
aimons nos parents, c´est bien normal. Mais Jésus nous a
fait entrer dans une autre famille, une famille ouverte à tous
les hommes et à toutes les femmes, une famille beaucoup plus
grande que notre famille humaine dans laquelle nous sommes nés
:
l’Eglise, au service du Royaume de Dieu. Comme
Jésus le disait lui-même, quand ses frères sont
venus le chercher : «
Qui
est mon frère, qui est ma mère, qui est ma sœur ?
C’est celui qui fait la volonté de mon Père qui
est aux cieux ».
Et la volonté de notre Père, c’est que nous
aimions tout le monde, même nos ennemis. Il s’agit
d’ouvrir notre cœur. D’abord dans l’Eglise,
de l’ouvrir à tous nos frères et sœurs
chrétiens quelle que soit leur langue, leur origine, leur
niveau social. C’est pour cela qu’on a mis sur place les
Communautés
ecclésiales de Base (CEB
ou CCB) qui ressemblent sans faire de différence, tous les
chrétiens du quartier, de tous les âges et de toutes
les conditions. Catholique, cela veut dire universel et donc
ouvert à tous. Mais il est aussi nécessaire d’ouvrir
notre cœur à tous les hommes, à tous les citoyens
de notre pays, spécialement à ceux qui ont le plus
besoin, ceux qui ont la vie le plus difficile. Quand Jésus
dit : mon frère, c’est celui qui fait la volonté
de mon Père, Il ne parle pas des chrétiens mais de
tous les hommes, quelle
que soit leur religion, qui écoutent la voix du Seigneur dans
leur cœur. Et aussi les non-croyants qui font le bien et
cherchent la paix, parfois mieux que les chrétiens. Dieu est
le père
de
tous. Jésus est mort pour tout le monde, sans distinction
et
l’Evangile est pour tous.
Mais
parf
ois
nous tombons dans l’injustice. Par
exemple quand nous donnons une place a quelqu’un de notre
ethnie, même si nous savons qu’il est incompétent.
Ou si nous refusons de donner une place à quelqu’un
d’autre, même s’il en est capable. C’est la
tentation du favoritisme. Ce danger nous guette dans toute la
société et
aussi
dans l’Eglise .
Certains chrétiens voudraient que la Caritas n’aide que
les chrétiens, alors que c’est une organisation de
l’Eglise pour tous les nécessiteux, quelle que soit
leur religion. Il y a des intellectuels qui se croient supérieurs,
simplement parce qu’ils parlent français (parfois très
mal d’ailleurs). C’est vrai qu’ils ont fait des
études et qu’ils ont des diplômes. Mais ils
confondent intellectuel et intelligent. Il y a des Intellectuels qui
ne sont pas intelligents. Et nous connaissons tous, des analphabètes,
des gens qui n’ont pas eu la chance d’aller à
l’école, mais qui sont des sages.
Ces
dangers et tentations nous les retrouvons en politique, où
nous donnons la place aux gens de notre parti. Et aussi
dans
les syndicats.
C’est important quand on travaille d’entrer dans un
syndicat, et les travailleurs ont le devoir de défendre
leurs droits et de chercher une vie meilleure. Mais le danger est
parfois de rechercher des avantages personnels ou du groupe syndical
en question, et de demander des avantages parfois irraisonnables et
exagérés : exiger des choses que la situation du
pays ne permet pas de satisfaire. Et d’oublier les autres
travailleurs moins favorisés, et surtout ceux qui n’ont
pas de travail, ceux qui travaillent dans le secteur informel, et
tous ceux qui n’ont pas les moyens de s’organiser et de
se défendre.
La
tentation de se replier sur l’Eglise et la paroisse, et de se
retrouver entre chrétiens
Bien
sûr la paroisse et déjà la CEB, la communauté
de quartier, a besoin de chrétiens engagés, par exemple
dans le mouvement des CVAV pour l’éducation des
enfants, la JEC ou le SCOUTISME pour l´éducation des
jeunes et des élèves. Les associations des femmes
catholiques sont nécessaires, et l´on peut regretter
qu´il n´y ait pas d´association des hommes
catholiques. C’est donc important d’être unis, de
s´aider et de se soutenir, entre chrétiens. Mais Jésus
nous demande de
ne
pas nous limiter aux chrétiens,
en oubliant les autres. Il nous dit (Mzt 5,12-15) : »
vous
êtes le sel de la terre
(pas seulement de la paroisse),
vous
êtes la lumière du monde » ,
pas seulement la lumière de l´Eglise. Au contraire le
rôle et la responsabilité de l´Eglise c’est
d´éclairer tous les hommes. Jésus nous dit (Marc
16,15): «
allez
dans le monde entier, annoncer la bonne nouvelle de l’Evangile
à toute la création » :
pas seulement à tous les hommes, mais à
toute
la création
et donc aimer et respecter les plantes, les animaux, et protéger
notre terre d’une manière responsable, en agissant avec
tous les hommes sensibles à ce problème, et en
conscientisant les autres. C’est le respect de l´environnement
et de l´écologie, pour garder et rendre meilleure cette
terre que Dieu nous a donnée. Jésus nous dit (Mt
13,33) : «
vous
êtes la levure dans la pâte »,
(et non pas à côté).
Lorsqu´on
parle d´engagement dans la société, souvent on
pense à l´
engagement
politique .
C’est vrai qu´il est important que les chrétiens
s´engagent dans la politique. En respectant des conditions
pour cela. Il ne suffit pas de vouloir s´engager et d´être
intéressé par cela, ni même être décidé
à rester sérieux malgré les tentations. Il fait
commencer pzr se former pour être compétent. Trop de
gens se lancent dans la politique sans avoir les qualités pour
cela. Il s’agit aussi d´être patient et commencer
par s´engager á la base. C´est peu à peu
quand on est formé et reconnu par les gens, que l´on
peut monter. Il y a ensuite l´
engagement
dans le milieu professionnel :
se former, être sérieux et prendre ses responsabilités
dans son métier et sa profession.
Mais
l´engagement
dans la société ,
c´est d´abord d´être un bon citoyen. Tu ne
peux pas être un bon chrétien, si tu es un mauvais
citoyen. Cela suppose donc d´abord que tu aies une nouvelle
carte d´identité de la CEDEAO. Et que tu ailles
voter
en réfléchissant sérieusement pour qui tu y vas
voter. Cela veut dire surtout que tu sais vivre
dans
le quartier
en créant des liens d´amitié avec tes voisins, en
connaissant le chef de quartier et aussi l´imam, la marraine du
quartier et tous ceux qui sont engagés, pour être prêt
à les soutenir, et á participer aux actions qu´ils
vont mener. Et nous engager nous-mêmes dans les associations et
amicales du quartier : les ASC (Associations Socio-Culturelles)
et les autres organisations de jeunes et d’adultes. Soutenir et
participer aux actions des ONG, qui interviennent dans les différents
domaines : Santé, développement, lancement de
petits projets, l´alphabétisation… sans oublier
les boutiques de droit et les maisons de justice. Etre citoyen c´est
aussi soutenir et chercher à mettre en pratique
les bonnes décisions du gouvernemen t,
qui sont souvent détournées ou qui restent en état
de déclarations et de vœux pieux sans être
réalisés : la couverture médicale
universelle (pour la santé de tous), le plan CESAME (pour les
personnes âgées), la carte d´égalité
des chances (pour les handicapés), les soins gratuits des
enfants de 0 à 5ans, les césariennes gratuites, les
bourses familiales (pour les familles nécessiteuses). Vous
pouvez me demander des documents á ce propos. Nous savons que
tout cela n´est pas totalement mis en pratique, ou bien est
détournés au profit de certains. C’est une raison
supplémentaire de nous engager dans ces différents
domaines, au lieu de rester assis…ou de critiquer sans rien
faire !
2°
PARTIE : comment lutter contre ces tentations
L´amour
de Dieu et l´amour de nos frères
Dans
toute cela, il s´agit d´être positif, Il ne suffit
pas de résister aux tentations et de garder les commandements
de Dieu, mais de faire le bien, et d´aimer le mieux possible,
d´aimer comme Jésus nous a aimés,
grâce
à Jésus et avec lui
comme nous le disons à la messe, ‘’par lui, avec
lui et en lui’’.
Dans
ce domaine de l´amour qui est la première condition, il
ne faut pas seulement se limiter á l’aumône. Bien
sûr, il est important d´aider les gens, mais pas
seulement dans leurs besoins matériels. Egalement dans leurs
besoins de l´esprit et du cœur, et les besoins spirituels
de la foi. En tant que futurs enseignants et futur cadres, nous avons
la responsabilité, pas seulement d’aider les gens au
niveau matériel, par l´argent que nous allons gagner,
mais aussi de les former, de les faire grandir dans leur esprit et
dans leurs connaissances.
Il
ne s´agit pas de donner des choses, mais de
nous
donner nous-mêmes .
Comme Jésus, il s’agit de donner notre vie. Non pas
attendre le jour de la mort, mais aider les gens chaque jour de notre
vie dans les petites choses ordinaires.
Il
s’agit
eu
priorité d’aider les pauvres
pas seulement en leur donnant des habits, de la nourriture et de
l’argent mais beaucoup plus en leur apportant une formation et
en leur donnant des moyens de travailler, pour qu’ils
puissent travailler et s’en sortir par eux-mêmes. C’est
cela leur dignité. Sinon nous faisons des gens des assistés
perpétuels et des mendiants. Nous avons pris l’exemple
de la Caritas et du PARI (Programme d’Acceuil pour les Réfugiés
et les Immigrés) ou l’on ne donne pas aux migrants de
l’argent, mais on voit avec eux qu’est-ce qu’ils
peuvent faire pour choisir un projet économique. Ensuite on
leur apporte la formation et les moyens nécessaires. La
première chose c’est toujours d’accueillir avec
respect, et d’écouter les pauvres et les nécessiteux.
Le Pape François l´a dit avec force à la
FAO : »
plus encore que d’aide matérielle, les pauvres ont
besoin de dignité et de respect » .
Ecouter les pauvres, cela veut dire, écouter ce qu’ils
veulent faire. Car ceux qui connaissent le mieux la pauvreté
et donc les moyens adaptés pour s´en sortir, ce sont
les pauvres, parce que ce sont eux qui vivent dans la pauvreté.
Trop souvent nous voulons aider les pauvres, mais avec nos idées
à nous, à notre manière, en venant proposer
notre solution sans les écouter. Cette écoute sera très
importante lorsque nous aurons des responsabilités dans la
société. Le gouvernement veut faire beaucoup de
choses. Il lance des projets pour les jeunes, pour l’emploi
des jeunes du monde rural ; pour le soutien aux femmes et jeunes
filles. C’est très important. Mais trop souvent, ces
projets sont mis en place par des techniciens dans les bureaux, sans
que la population soit écoutée, encore moins
responsabilisée. Alors ça ne marche pas. Notre devoir
c’est de soutenir les pauvres dans leurs projets et non pas
dans ce que nous avons décidé à leur place.
Il
s’agit d’aller vers les plus pauvres .
Depuis 2012, les Nations Unies ont adapté les
« principes directeurs sur l’extrême pauvreté
et les droits des hommes ».
Ces principes ont été signés par le Sénégal,
mais on doit bien reconnaitre qu’ils ne sont pas mis en
pratique, même pas dans notre Eglise. En effet, par exemple à
la Caritas, nous aidons vraiment les pauvres et les nécessiteux.
Mais nous ne rejoignons pas le plus pauvres, » les plus
fatigués », ceux que vivent dans l’extrême
pauvreté. Car ces personnes ont été tellement
écrasées et humiliées, qu’elles sont
découragées et n’ont plus confiance en
elles-mêmes. Elles n’ont plus le courage d’aller
demander de l’aide à la Caritas ou à la Mairie,
ni même de se présenter au dispensaire quand elles sont
malades, parce qu’elles ont été trop souvent
rejetées. Ces personnes n’enverront jamais leurs enfants
à l’école, car elles n’ont pas les moyens
d’acheter les tenues et les fournitures. Mais d’abord
parce que leurs enfants doivent se débrouiller pour manger,
car leurs parent n’ont pas les moyens de les nourrir. Ce sont
ces personnes que nous devons rejoindre en premier
Le
Seigneur ne nous demande pas de faire des choses extraordinaires,
mais simplement
d’aimer
dans les petites choses de notre vie de tous les jours.
Nous avons médité à ce sujet l’évangile
de la fin du monde (Mt 25, 32-45). Jésus nous
demandera simplement : »
j’avais faim, j’étais nu, j’avais soif,
j’étais étranger, j’étais en prison,
j’étais malade, qu’est-ce que tu as fait pour
moi ? »
Mais bien sûr il faut comprendre toute la dimension de ce
texte, Il ne suffit pas de partager un jour notre plat de riz avec
quelqu’un qui a faim, il s’agit de mettre en place des
projets de développement, pour lutter contre la famine, pour
permettre à tous les gens de cultiver et de gagner leur
nourriture par eux-mêmes. Il ne s’agit pas seulement de
visiter les malades, pour les encourager et leur famille avec eux.
C’est important, mais il s’agit de mettre en place
un meilleur système de santé pour tous. C’est
pour cela que nous avons parlé de la CMU, Couverture Médicale
Universelle. Il ne suffira pas de donner un bic ou un cahier à
un élève, mais de nous engager le mieux possible pour
un véritable enseignement de qualité. Et non pas nous
contenter de discours et de grands mots comme ‘’école
émergente’’. Qu’est-ce que cela veut dire
concrètement ?
La
charité est inséparable de la justice .
C’est pour cela que dans l’Eglise, à côté
de la Caritas, il y a les commissions de justice, paix et respect de
la Création. C’est de cette façon-là que
Jésus définissait sa mission dans la synagogue, la
maison de prière de Nazareth, son village (Luc 4, 16-21) :
«
L’Esprit
de Dieu repose sur moi ; il m’a envoyé annoncer la
bonne nouvelle de l’Evangile aux pauvres, relever ceux qui sont
écrasés, libérer les prisonniers, rendre la vue
aux aveugles, et annoncer une année de grâce de la part
du Seigneur » .
Il s’agit de donc de relever tous ceux qui sont écrasés,
découragés, humiliés, opprimés, rejetés
autour de nous de toutes les manières. Ils sont tellement
nombreux !
Il
s’agit de libérer tous les prisonniers. Pas seulement
ceux qui sont enfermés dans les prisons, pas seulement aider
leurs familles qui sont dans le besoin, mais aussi de libérer
ceux qui sont prisonniers du péché et les mauvaises
habitudes : libérer nos frères et sœurs de
la drogue, de la prostitution, de la sexualité mal vécue,
de l’amour de l’argent, de l’égoïsme,
de tout ce qui nous enferme, et de toutes ces tentations dont nous
venons de parler. Pour pouvoir vivre tous ensemble une année
de grâce, dans un pays de justice et de paix.
Les
moyens pour cela
Le
premier moyen, c’est pour nous
la
prière :
écouter le Saint Esprit dans notre cœur, et partager
ensemble la parole de Dieu qui nous éclaire et nous montre le
chemin.
Deuxièmement,
participer à la vie de l’Eglise, nous retrouver entre
chrétiens. Normalement, tout chrétien doit faire partie
de sa CEB, la
communauté
chrétienne
de son quartier.
Ensuite,
les
sacrements. L e
sacrement de la réconciliation,quand nous sommes tombés
dans les mauvais comportements et les mauvaises habitudes, pour nous
libérer de tout péché et de tout mal.
L’assistance à la messe, le sacrifice de Jésus
qui nous sauve, et recevoir la communion qui nous remplis de l’amour
de Jésus Christ. Le mariage, le sacrement pour nous rend
saints et aimants, mari et femme, et nous aide à éduquer
nos enfants dans la foi.
Il
s’agira aussi de prendre
les moyens humains ,
en particulier de vivre les valeurs traditionnelles que les anciens
nous ont enseignées. Non pas en leur copiant matériellement,
mais en cherchant à les vivre d’une manière
moderne et réelle dans le monde actuel.
Il
s’agira pour nous d’
aider
les autres à
résister aux tentations et à vivre vrai : nous
sommes responsables les uns des autres. Dieu nous demandera, comme il
a demandé à Caïn : »
qu’as-tu
fais de ton frère ? » :
les aider, les soutenir et les former.
L’évangélisation
et
le Royaume de Dieu
C’est
là que nous trouvons la place de
l’évangélisation.
E n
nous rappelant qu’évangéliser ce n’est pas
seulement baptiser, Saint Paul disait (1° Cor 1,17)
« le
Christ ne m’a pas choisi pour baptiser mais pour évangéliser ».
Evangéliser, c’est aider tous les hommes, quelle que
soit leur religion, à vivre les valeurs de l’évangile,
à vivre à la manière de Jésus Christ. Il
s’agit donc d’abord d’évangéliser
toute notre vie, et pas seulement les pratiques religieuses.
Evangéliser, ce n’est pas une question de parole, c’est
une question d’engagement et de témoignage. Il ne s’agit
pas de discuter pour savoir quelle est la vraie religion. Cela ne
peut que nous conduire qu’à des disputes et à des
incompréhensions. Paul VI disait :
»
les hommes n’ont pas besoin des maîtres, ils ont besoin
des témoins et lorsqu’ils écoutent les maîtres
c’est parce qu’ils sont en même temps des
témoins ».
Il
ne s’agit pas de parler sans arrêt de Jésus Christ
mais de vivre l’Evangile. Si nous vivons en chrétiens,
si nous sommes heureux et si nous avons la paix, les autres nous
rejoindront, et ils vivront comme nous. Car eux aussi veulent être
heureux, eux aussi ils cherchent la paix. S’ils sont d’une
autre religion, ils ne viendront pas prier les dimanches dans nos
églises, ils ne se feront pas baptiser, mais ils vivront à
la manière de l’évangile. Ils mettront en
pratique ce que Jésus demande aux hommes. Ils écouteront
la voix de Dieu dans leur cœur. Ils ne seront pas baptisés,
mais ils seront évangélisés. Ils ne seront pas
dans l’Eglise, mais
ils
seront dans le Royaume de Dieu .
Paul nous dit (Rom 14,17) : »
Le
Royaume de Dieu est justice, paix et joie dans l’Esprit Saint »
Le Royaume de Dieu, c’est à chaque fois qu’il y a
la justice et la paix, l’amour, le pardon et la réconciliation,
comme nous le rappelle la préface de Christ-Roi. Le Christ est
le roi de tous, pas seulement des chrétiens. Il s’agit
de nous engager et d’agir pour le bien de la société,
en agissant tous ensemble avec les personnes des autres religions.
Nous nous soutenons et nous nous entrainons à faire le bien,
nous aidons chacun à mieux vivre. Et quand il y a de l’amitié
peu à peu, nous sommes amenés à
partager
nos convictions,
à nous expliquer les uns les autres les raisons pour
lesquelles nous agissons de cette manière, et pourquoi nous
cherchons à faire le bien. C’est à ce moment-là
que le partage spirituel peut se vivre, et une véritable
évangélisation. Il n’y a pas d’évangélisation
sans amitié, et sans action commune. Quand Jésus envoie
ses 12 apôtres puis ses 70 disciples (Luc 9 et 10), il leur
dit : »
Ne
passez pas de maison en maison. Si vous rencontrez une maison où
il y a la paix, demeurez dans cette maison ».
Il n’y a pas d’évangélisation sans amitié.
Au contraire si nous sommes amis, à ce moment-là nous
pouvons partager les raisons qui nous font vivre, et parler de notre
foi. Il n’y a pas d’évangélisation sans
action. Jésus nous dit, allez partager la vie des pauvres : »
n’emportez
ni sac ni argent ni nourriture, l’ouvrier mérite son
salaire «.
Il nous dit en même temps : »
guérissez
les malades ».
Nous avons médité le texte de Paul sur le fruit de
l’Esprit (Gal 5,22-25)
La
vie et les paroles du Pape François .
Nous
avons la chance d’avoir un tel Pape. Dans tous ses écrits,
à chaque fois il nous demande la joie. C’est cela la
base de notre engagement pour l’évangélisation.
C’est cela qui nous permettra de résister aux
tentations :
la
joie du Saint Esprit dans toute notre vie :
la joie de l’amour, la joie de la famille, la joie de
l’évangélisation, la joie de la sainteté,
la joie de la création (Laudato si...)
Nous
avons rappelé l’engagement du Pape François pour
le respect de la création, pour les pauvres, pour les migrants
et pour ceux qui vivent dans les souffrances et dans le besoin. Nous
avons médité ses paroles « Allez dans les
périphéries (vers ceux qui sont loin, rejetés et
oubliés), luttez contre la société du déchet
(où on traite les personnes qui ne sont pas « rentables
et opérationnelles » comme des ordures),,
construisez des ponts et non pas des murs, que l’Eglise soit un
hôpital de campagne, sur le terrain pour soigner tous les
blessés de la vie dans leurs cœur et dans leur corps
etc... (Vous pouvez me demander des documents sur ces questions et
sur la nouvelle évangélisation).
Bon
courage et bonne chance pour résister aux tentations, dans
votre vie professionnelle et dans toute votre vie !
Père Armel Duteil