QU’EST-CE QU’UN THEOLOGIEN ?
Au
cours de mon voyage en Guinée, je retrouve trois de nos
étudiants en théologie et un de nos jeunes prêtres.
Nous nous demandons qu’est-ce qu’un théologien ?
Au grand séminaire, leurs mémoires sont souvent de la
compilation. On enfile des citations et des extraits des lectures :
« comme l’a dit Y. selon la conception de Z. et ce
qu’avait déjà dit X ». etc…Je
trouve que la réflexion personnelle et la recherche originale
font souvent défaut. On risque ainsi de s’enfermer dans
les répétitions et dans le passé. De plus ces
citations sont souvent des citations d’auteurs occidentaux et
donc la réflexion n’est adaptée ni à notre
culture ni à nos problèmes. Ils me répondent
qu’il faut tenir compte du passé, qui nous enrichit et
qui nous instruit. C’est un moyen d’enseignement et de
formation. Je leur dis que je suis tout à fait d’accord
à condition de saisir l’esprit dans lequel les gens ont
écrit, leur but et leurs orientations. Et de voir comment
vivre leurs réflexions et cet esprit
dans les situations actuelles, car le monde
avance et les choses changent. Comme le dit un proverbe « on
ne peut pas arroser le riz d’aujourd’hui, avec les pluies
d’autrefois » et « quand le rythme du
tam-tam change, le pas de la dance doit aussi changer
». Sinon on risque de s’enfermer dans des répétitions
stériles. Ou au moins inadaptées.
Pour
moi, le théologien c’est d’abord quelqu’un
qui vit et qui est enraciné dans une communauté, qui
voit le positif et les pistes d’espoir que cette communauté
vit. C’est quelqu’un qui est capable d’analyser ce
qui est caché (sous-jacent), et de comprendre ce qui est vécu
en profondeur avec un regard positif. Quelqu’un qui est capable
de faire découvrir ce qui est en jeu, et de proposer des
chemins qui répondent aux situations et aux besoins actuels,
et qui sont des routes d’avenir. Cela ne peut se faire qu’en
étant vraiment enraciné dans une
communauté, en voyant le positif de ce
qu’elle vit, en sachant lire les signes des temps comme nous
l’a d’ailleurs demandé le Concile Vatican 2. Et
surtout en écoutant ce que l’Esprit, qui parle non
seulement aux théologiens, mais à tous les membres de
la communauté.
C’est d’ailleurs là la condition
d’une véritable inculturation de l’Evangile, dont
on parle tant et que l’on pratique si peu :
vivre l’Evangile incarné dans les valeurs culturelles
actuelles du milieu, sans se limiter aux
danses liturgiques et aux processions d’offertoire qui,
d’ailleurs, par leur longueur déforment complètement
le sens du sacrifice eucharistique. Et sans rêver à un
passé qui n’existe plus, et sans l’idéaliser.
Comme le dit Pierre : « Nous
espérons un ciel nouveau et une terre nouvelle où la
justice habitera » (2ème
Pierre 3, 13).
Armel Duteil