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du P. Armel Duteil


LA VIOLENCE

Lutter contre la violence à notre niveau

Une société sans violence ne descend pas du ciel. Elle se construit dans la vie de tous les jours et elle demande la participation de tous. Pour nous, bien sûr, en s’appuyant sur la Parole de Dieu, comme nous l’avons expliqué plus haut. Il y a de nombreuses paroles que nous pouvons partager avec ceux qui nous entourent, en particulier les musulmans. Par exemple déjà dans l’Ancienne Alliance, Moïse disait : « Tu ne feras pas souffrir la veuve et l’orphelin, l’esclave et l’étranger ». Ces paroles s’adressent à tous les croyants. Nos frères et sœurs musulmans connaissent Moïse autant que nous. Et Moïse ajoutait : « Tu as été toi-même esclave et étranger en Egypte. Tu aimeras ton prochain comme toi-même ».

Il s’agit donc de regarder chaque personne avec un regard d’amitié et d’amour comme Jésus a regardé les personnes en voyant leurs souffrances et surtout en comprenant la souffrance de leur cœur qu’ils ne pouvaient même pas exprimer mais en les laissant libres comme il a laissé le jeune homme riche partir, librement, sans lui faire des reproches, alors qu’Il l’avait regardé avec beaucoup d’amour, comme il n’a pas fait violence à Pierre quand il a sorti son épée contre le serviteur ou quand il se préparait à le renier. Il lui a parlé calmement pour le faire prendre conscience de sa situation. Dans tout cela, il suffit de voir le positif dans les personnes qui nous entourent. Lorsque Jean a voulu empêcher quelqu’un de chasser les démons parce qu’il n’était pas de leur groupe des apôtres, Jésus lui a dit : « Qui n’est pas contre nous est avec nous ». Voilà l’attitude qui peut construire la paix et qui peux dépasser la violence. Trop souvent nous voyons les défauts, les mauvaises choses qu’ils font et nous leur faisons des reproches au lieu de voir les belles choses, leurs qualités, de les encourager, de les féliciter. C’est pour tout cela qui peut supprimer la violence autour de nous.

Dans la famille :

Pour dépasser la violence dans le couple mais également entre parents et enfants, il y a ce qu’on appelle le devoir de s’asseoir. S’asseoir au moins une fois par mois, commencer par prier, établir un climat de paix, laisser les distractions, la radio et les autres agitations et ensuite chacun parle à l’autre, non pas pour lui faire des reproches, pour lui dire ce qui ne va pas mais au contraire, lui dire ce qu’il voit de bien en lui et ensuite lui demander : qu’est-ce que tu as à me dire ? Et alors je l’écoute sans chercher à me défendre, sans répondre mais en laissant les paroles de l’autre entrer dans mon cœur pour que je puisse comprendre son point de vue et sa souffrance. Et à son tour l’autre fera la même chose. Et également les enfants avec leurs parents car les enfants ont eux aussi des choses à nous dire et peuvent nous dire à dépasser la violence. Il est très important aussi de parler avec les enfants par rapport à ce qu’ils voient à la télévision, pour les éduquer à la paix, mais d’abord les éduquer dans la paix. Bien sûr il faut éduquer les enfants, quand ils font le mal il faut les punir mais les punir et non pas les frapper. Il y a plusieurs façons de punir sans frapper. D’abord me faire réparer ce qu’on m’a cassé, le mal qu’on a fait. C’est cela qui est positif et qui fait grandir. Eduquer nos enfants pour qu’ils vivent en paix avec les autres. A l’école il y a trop d’insultes, trop de bagarres, trop de moqueries pour ceux qui ne travaillent pas bien, qui ont des mauvaises notes, trop d’insultes et de mépris pour les enfants plus pauvres et qui sont moins bien habillés ou qu’ils n’ont pas les mêmes moyens. C’est tout cela qui entraîne la violence. Et aussi les disputes entre frères et sœurs qu’il faut leur apprendre à gérer. Les disputes sont inévitables mais ce qu’il faut c’est s’en sortir.


A l’école :

Dans certaines écoles on a formé des élèves pour qu’ils soient, non pas les conseillers mais les réconciliateurs de leurs camarades. Il faudrait revoir l’éducation civique pour qu’ils soient, non seulement en apprentissage des droits humains mais que l’on aide les enfants à le mettre en pratique et pas seulement à réclamer leurs droits mais d’abord à faire leurs devoirs et à respecter les droits des autres avant de chercher ses propres droits. Il faudrait une véritable éducation à la paix, une véritable éducation civique, pas seulement une instruction qui se contente de donner des conseils de politesse. Pour les adultes, il est possible de créer un climat de paix là où l’on travaille, apaiser les gens, apprendre à se parler calmement en commençant par le faire soi-même. Bien sûr, il est tout à fait normal et même nécessaire de lutter contre les injustices sinon c’est obligé que les gens se révoltent violemment. Mais justement, chercher la justice ne peut se faire que dans la paix et non pas dans la violence. Cela est vrai aussi bien au niveau personnel qu’au niveau international, à la dictature en Irak ou en Lybie, au problème en Syrie on a répondu par la violence et l’on voit que cela n’a fait qu’augmenter celle-ci et entraîner la guerre car la violence appelle la violence et il y a de plus en plus de morts sans aucune solution. Et la première chose au niveau personnel, c’est certainement de bien faire son travail pour arriver à travailler en paix et sans violence. Cela transforme toute la vie. Il faut savoir que ce sera difficile d’être un homme ou une femme de paix, poser des questions aux autres ça les interpelle et souvent au lieu de changer, ils se sentent accusés ils veulent se venger. Il est remarquable que tous ceux qui ont agi pour la non-violence, Martin Luther King, Gandhi, le frère Roger de Taizé et aussi Jésus Christ, des hommes de paix, ont été tué avec violence. Avant de se révolter contre les autres, il est important de voir ses propres torts et de vouloir changer soi-même avant de changer les autres. Un proverbe bambara dit : quand tu pointes du doigt quelqu’un, n’oublie pas que tu as trois doigts tournés contre toi. A côté de l’éducation à la paix, il y a aussi la pratique de la réconciliation. Jésus Christ nous a non seulement demandé cette réconciliation : si tu présentes ton offrande à l’autel, va d’abord te réconcilier avec ton frère. Mais il nous a donné aussi le moyen d’arriver à cette réconciliation : si ton frère a quelque chose contre toi, toi tu n’as rien contre lui, va le trouver seul à seul. S’il n’écoute pas, va lui parler avec deux ou trois personnes. Dans nos CEB nous avons ces personnes, les sages, les conseillers. Jésus continue (Matthieu 18) : « S’il ne veut pas les écouter, alors dis-le à la communauté ». Le travail de la CEB n’est pas seulement d’organiser des prières mais d’éduquer à la paix, de régler les problèmes, de réconcilier les gens et de lutter contre les causes de violences dans les quartiers. Pour lutter contre la violence, il faut avancer par étapes. D’abord prendre conscience de l’existence de cette violence dans la vie de tous les jours. Ensuite nous motiver pour vouloir vraiment la paix et la réconciliation. Commencer par nous convertir nous-mêmes et refuser d’utiliser la violence, offrir une éducation autour de nous, là où nous vivons, d’abord à ceux qui l’accepteront car tous ne le feront pas. Et enfin pour cela nous appuyer sur la prière et sur la Parole de Dieu. Cela veut dire écouter l’Esprit Saint. Ne pas seulement réciter des prières mais nous mettre en paix devant Dieu, nous tenir en silence, méditer la Parole de Dieu et accueillir les idées que le Seigneur nous adressera.

Nous avons vécu l’Année de la Miséricorde, il est important que nous continuions à la mettre en pratique chaque jour, à tous les niveaux. Lorsque l’autre me fait souffrir, non pas lui faire des reproches mais lui dire ma souffrance : tu vois, voilà ce qui me fait souffrir, je suis triste à cause de cela, je souffre, et à ce moment-là l’autre pourra comprendre mon problème et essayer de changer. Mais si je lui fais des reproches, sa réaction naturelle sera de me répondre et de m’attaquer. C’est vrai que la violence est la dernière étape pour ceux qui sont traités injustement. Mais elle est aussi parfois utilisée par ceux qui sont en paix mais qui ont le pouvoir et qui veulent utiliser celui-là pour leur avantage personnel.



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