Les billets    
du P. Armel Duteil


VOYAGE EN GUINEE



JEUDI 14 JUILLET 2016 :

Tôt le matin, je pars en voiture avec des confrères pour assister à l’ordination sacerdotale d’un de nos diacres. Je le connais bien : c’est le troisième des jeunes prêtres que j’ai formés et baptisés quand j’étais à MONGO dans la Guinée Forestière, au sud du pays. Nous y avons vécu ensemble des expériences très fortes. En effet, je suis allé rouvrir une ancienne Mission après trente ans de fermeture, sous la dictature de Sékou Touré. Et en même temps, assurer un suivi et un soutien à plus de 150.000 réfugiés du Libéria, puis de Sierra Léone, répartis en plus de 50 camps, chassés par une guerre civile atroce, marquée par l’exploitation des richesses naturelles (les diamants de la mort), la drogue, mais surtout les exécutions, les mutilations et les tortures, accomplies par des enfants soldats endoctrinés et forcés, sans parler de l’esclavage sexuel des jeunes filles prises en otage, et tant d’autres choses. Et en 2001, nous avons subi nous-mêmes les attaques rebelles qui ont brûlé les camps de réfugiés et dévasté les villages guinéens. Toutes les ONG et même les autorités locales ayant fui, nous avons dû assurer la prise en charge du déplacement des réfugiés vers le nord, la distribution de la nourriture fournie par le PAM (Projet Alimentaire Mondial) et le matériel du HCR (Haut Commissariat pour les Réfugiés) des Nations-Unies. Et en même temps lancer des projets socio-économiques et des actions humanitaires pour reconstruire les villages guinéens. Jusqu’à ce que les ONG reviennent peu à peu. Cela avec le soutien des Caritas de différents pays, en particulier le Secours Catholique français. Vous pouvez trouver tout cela dans mon site : http://armel.duteil.free.fr. Bien sûr, tout cela a créé des liens très forts et une très grande amitié entre nous. Aussi je suis très heureux de cette opportunité qui m’est donnée de pouvoir y retourner.

Parti tôt le matin, nous arrivons à Tambacounda à midi. Nous y faisons une pause pour saluer les Sœurs, car j’ai été le curé non seulement de la ville mais de toute la région en 1979-80. Les sœurs et les prêtres ont changé depuis, mais nous sommes heureux de nous rencontrer, d’autant plus que nous avons continué les relations entre nous.

Le passage à la frontière nous prend beaucoup de temps. D’abord les douaniers sont en pause jusqu’à 15 heures, puis il nous faut repasser trois fois de suite (en trois endroits différents) les formalités de police, de gendarmerie et de douane. Nous n’arrivons à KOUNDARA qu’en fin de soirée. Nous allons laisser notre voiture de tourisme, pour continuer avec la voiture tout terrain de la Mission. Nous avons d’ailleurs apporté cinq pneus neufs de Dakar, que nous montons aussitôt. Pendant ce temps, je prends un bon moment pour parler avec un de nos étudiants qui vit une année de stage pour sa formation missionnaire pratique. C’est un journaliste de formation, nous parlons donc des émissions à la radio locale. Et aussi du Collège où il assure l’éducation et des cours. Après le repas, je vais passer un moment chez les Sœurs. Leur responsable de Dakar est justement de passage. Elle me demande de préparer la profession religieuse, en Septembre à GUECKEDOU, d’une jeune fille de la région Kissi, que je suis depuis le temps où elle était au Collège.

VENDREDI 15 JUILLET :

Nous sommes au nord de la Guinée. Nous allons traverser tout le pays en diagonale jusqu’à Kissidougou, au sud-est. Je revis, tout au long de la route que j’ai fait souvent, des tas de souvenirs. Je suis heureux de constater que l’on a beaucoup travaillé sur la route : il ne reste que 30 km de mauvaise piste. Même là, on a construit un pont, ce qui nous évite de passer par un bac problématique et dangereux, avec plusieurs heures d’attente.

Un autre convoi de spiritains vient de Conakry. N’ayant pas de véhicule, ils ont emprunté une voiture. Mais ils ont des problèmes de route. D’abord, ils aident les journalistes, venus pour l’ordination, dont la voiture a fait plusieurs tonneaux. Heureusement, il n’y a pas de blessé grave, mais la voiture est inutilisable. Et par chance elle a été arrêtée par un arbre, ce qui lui a évité de tomber dans le ravin. Ensuite, nos confrères tombent en panne. Heureusement que maintenant il y a les téléphones portables, et par chance il y a de la connexion là où ils sont arrêtés. Nous nous étions justement donné rendez-vous à 30 km plus loin, dans la ville de FARANAH. Nous cherchons donc un mécanicien et nous allons les rejoindre. Mais la réparation ne tient pas et ils tombent à nouveau en panne : pas de démarreur. Nous les prenons donc en remorque pendant 30 km et nous n’arriverons à KISSIDOUGOU qu’après minuit, fatigués mais heureux.

Nous sommes reçus dans une Communauté de religieuses malgaches, que j’avais moi-même accueillies il y a 15 ans lors de leur arrivée en Guinée. C’est une très grande joie de nous retrouver. Nous sommes une quinzaine de confrères : 5 viendront demain, 3 religieuses sont arrivées de Conakry, Boffa et Kataco où j’ai également travaillé. C’est la joie des retrouvailles. Nous mettons des matelas et des nattes par terre et il n’y a pas besoin de nous bercer pour nous endormir.

SAMEDI 16 JUILLET :

Après la messe entre nous, je pars faire un tour en ville, pour m’imprégner de l’ambiance actuelle. En route, des tas de gens m’interpellent : guinéens et réfugiés restés sur place. Nous échangeons des nouvelles de part et d’autres.

A midi, avec notre Supérieur, je suis invité à manger par l’Evêque. Nous prenons un bon temps pour parler de la vie du diocèse et de mes activités au Sénégal.

L’après-midi, je rencontre la mère d’une détenue guinéenne que je visite chaque semaine en prison au Sénégal. Elle est évidemment très triste et se met à pleurer en me voyant. J’essaie de la consoler le mieux possible, je lui donne des nouvelles de sa fille et la rassure en lui disant qu’elle va bien et qu’elle n’est pas abandonnée. En effet, sa fille est très courageuse. Elle a appris la couture en prison et m’a remis toute une valise d’habits et une autre de broderies à vendre pour aider sa mère à vivre. En plus, elle m’a remis tout son pécule. Cela est une grande consolation pour sa mère.

Après le repas chez l’Evêque, nous allons dans un quartier où vient de s’ouvrir une nouvelle paroisse, pour assister à une veillée préparatoire aux ordinations. Après un temps de prière, nous passons à la veillée culturelle : chants, danses, ballets, théâtre. Ils ont bien préparé les choses. Mais je regrette beaucoup qu’au lieu de chanter au son des instruments traditionnels, ils se contentent de danser sur des chants d’artistes, enregistrés. La technique moderne est en train de tuer la culture et toute créativité. De même, je remarque qu’à la messe les gens ne chantent plus. Ils se contentent d’écouter la chorale. Et pourtant presque tous les chants sont dans leur propre langue, le kissi. C’est vraiment triste.

DIMANCHE 17 JUILLET :

Ils sont 4 jeunes à être ordonnés prêtres : 3, pour le diocèse et 1 pour les Spiritains. C’est une grande messe solennelle et très festive, comme les kissiens savent les organiser avec chants, procession, danses, battements des mains et instruments traditionnels. Et aussi des grands moments d’émotion et un grand temps de silence pendant la longue imposition des mains par les prêtres venus très nombreux (une cinquantaine). Sont venus également, le Secrétaire général (protestant) de l’Union des religions chrétiennes de Guinée, et aussi le Ministre (catholique) du Commerce. Après la cérémonie, je prends un bon moment pour parler avec chacun d’eux, avant le repas partagé dans la grande cour, tous ensemble. Ce qui me permet de rencontrer de très nombreuses personnes, car toutes les paroisses ont envoyé des représentants. Et pendant 10 ans je les ai parcourues toutes, en tant que responsable de la catéchèse, puis de l’OCPH (Office Catholique de la Promotion Humaine) et de la Commission Justice et Paix. La plupart m’appellent par le nom traditionnel que l’on m’a donné : « SAA MONGO MILLIMOUNO ». Les rencontres se poursuivent jusqu’à la nuit.

LUNDI 18 JUILLET :

Après la messe et le petit déjeuner, nous continuons notre descente vers le sud, jusqu’à MONGO, le village d’origine de notre confrère, qui va y célébrer sa première messe. L’après-midi, il est accueilli par tout le village et les autorités locales.

C’est la saison des pluies. La nuit, nous avions prévu une veillée de prière, mais une grosse pluie se déclare. Nous nous réfugions dans l’église, où nous attendons plus d’une heure avant de pouvoir commencer la prière, avec l’aide du haut-parleur portatif à piles. Ici, à Mongo, il n’y a ni courant électrique ni connexion Internet. Mais, grande innovation qui transforme et améliore beaucoup de choses, il y a maintenant la connexion pour les téléphones portables.

Après la veillée de prière, tous se rassemblent pour la veillée culturelle qui se termine tard dans la nuit. Et qui se prolonge jusqu’au matin dans les chants et les danses.

MARDI 19 JUILLET :

Première Messe de Martin TONGUINO. Il m’a demandé de lire l’Evangile et de faire l’homélie dans la langue kissi. J’ai pris soin de la préparer sérieusement, avec l’aide d’un ami prêtre guinéen. Après dix ans sans pratique de cette langue, parlant maintenant ouolof, ça ne sort plus aussi facilement qu’avant et je n’ai plus le ton et l’accent local. Malgré tout, les gens sont très heureux et étonnés aussi de m’entendre parler clairement dans leur langue. Et après l’accueil local de hier, ce sont les retrouvailles avec les gens des communautés de toute la paroisse.

La nuit, profitant de notre rencontre, nous tenons une réunion entre spiritains de Guinée et des autres pays de la région, présents à cette ordination, pour réfléchir à nos différentes activités.

MERCREDI 20 JUILLET :

Le matin, je fais le tour du village pour saluer les gens. Après le repas du midi, c’est la séparation. Chacun retourne chez soi. Pour moi, j’ai décidé de rester encore trois jours sur place. Je prends le temps de parler avec nos deux étudiants qui sont venus à MONGO pour leur stage de vacances. Puis je pars en moto dans une sous-préfecture à 40 km. C’est la saison des pluies. Les pistes sont défoncées et pleines de boue. Mais en moto on arrive quand même à passer. Le soir, de nombreuses personnes viennent me voir, à tour de rôle, et nous échangeons des nouvelles avec joie.

C’est la saison des gros travaux. Les gens sont occupés au repiquage du riz. J’avais donc prévu de dire la messe tôt le matin. Mais la pluie commence à tomber la nuit et nous ne pouvons commencer la messe qu’à 10 heures30. A la sortie, nous apprenons une très mauvaise nouvelle :

Ebola. C’est dans la région qu’Ebola a démarré. Il y a eu beaucoup de morts, en particulier dans le personnel de santé. Si bien que les dispensaires ne fonctionnent plus et que les autres maladies ne sont pas soignées et se développent. D’autant plus que beaucoup, même s’ils ne sont pas morts, ont été affaiblis par Ebola.

Les gens continuent à prendre des précautions : lavage et désinfection des mains en particulier. Et ceux qui ont survécu à Ebola sont suivis régulièrement, car le germe est encore présent. Mais cela ne va pas sans poser de graves problèmes. En effet, ces personnes suivies sont craintes et se sentent rejetées de la société. A la dernière visite du contrôle, l’une de ces personnes suivies a préféré se cacher avec toute sa famille. Et complètement découragée, ce matin elle s’est pendue. Bien sûr, cela fait un grand coup dans toute la sous-préfecture.

L’après-midi, je continue dans une autre sous-préfecture. C’est tout ce que je pourrai faire, car il me faut retourner au Sénégal. Le voyage est difficile car la pluie a recommencé à tomber. Même programme : rencontres le soir et messe le matin. N’étant plus responsable de ces communautés, je me garde bien de donner des conseils et directives, me contentant de donner et de recevoir des nouvelles. Je ne veux pas prendre la place de mes successeurs. Et, en plus, la situation a changé depuis mon départ.

VENDREDI 22 JUILLET :

Nous rentrons, toujours en moto, et sous la pluie. Nous mangeons ensemble puis je prends un long temps de partage avec mon confrère actuellement en charge de la paroisse. Il est seul prêtre depuis deux ans, ce qui bien sûr est très difficile. En avril, un prêtre belge déjà âgé est venu le rejoindre, après une semaine de retraite et un petit séjour dans notre Communauté de Pikine au Sénégal. Malheureusement, il est tombé malade. On l’a évacué à Conakry pour le soigner, mais il est mort à son arrivée. Bien sûr, cela a causé une très grande tristesse et n’a pas arrangé la situation.

En fin d’après-midi, je pars pour la Préfecture, toujours sous la pluie et en moto. A mon arrivée, je suis accueilli par le curé guinéen, un ami de longue date avec qui nous avons longuement travaillé, en particulier pour les traductions en kissi. Avec lui, nous allons saluer la famille de la jeune fille qui doit faire se profession religieuse ici, en septembre, et que je suis actuellement au Sénégal. Je leur donne des nouvelles, et je prends des nouvelles de la famille que je lui transmettrai. Puis nous posons les bases de la cérémonie à venir. Ensuite, je rejoins la Communauté des religieuses guinéennes qui m’accueillent pour la nuit. Là encore, nous avons beaucoup de choses à nous dire.



SAMEDI 23 JUILLET : Tôt le matin, je me rends à la gare routière pour aller à Conakry. Je trouve un « clando » (« taxi clandestin »), c’est-à-dire quelqu’un qui fait le transport avec sa voiture personnelle, en donnant de l’argent au Syndicat officiel des transporteurs. Heureusement, les transactions ne durent pas trop longtemps. Mais ensuite le chauffeur disparaît pendant plus d’une heure, sans explication. Enfin, nous partons. Les trente premiers kilomètres sont très mauvais. Ensuite, la piste s’améliore, jusqu’à l’arrivée au goudron.

En Guinée, depuis la dictature de Sékou Touré et ensuite les attaques rebelles, il faut absolument un ordre de mission pour circuler et les barrages sont très nombreux : pratiquement à chaque ville. Beaucoup de gens, en particulier les transporteurs qui se font rançonner, demandent leur suppression. Mais c’est devenu un moyen, pour les policiers et autres agents, de se faire de l’argent en taxant les voyageurs qui ne sont pas en règle. Heureusement, nous voyageons avec un sous officier de l’armée. Nous sommes sept dans une voiture de tourisme : trois à l’avant, quatre à l’arrière. Le militaire se met à l’avant à la portière et ainsi nous pouvons passer les barrages sans problème !

Sur la route, je repense à cette jeune femme très engagée dans la communauté. Elle s’occupe en particulier du Mouvement des Enfants (les CV-AV). Du fait de ses qualités d’animatrice, elle a été choisie par les villages de la sous-préfecture comme agent communautaire chargée des différents projets mis en place. Elle ne reçoit pas de salaire régulier, mais simplement des gratifications et seulement quand elle dirige un projet. Elle s’est formée peu à peu sur le tas dans les actions de développement que nous avions lancées après les attaques rebelles. Elle s’est beaucoup investie dans la lutte contre Ebola. Elle est veuve et a trois enfants. Sa grande soeur est décédée, et elle a accueilli chez elle ses quatre enfants. Elle fait tout pour les envoyer à l’école, ce qui coûte cher. Un commerçant a fourni un groupe électrogène pour apporter l’électricité à la sous-préfecture. Elle a monté une installation pour charger les téléphones portables. Avec les petits bénéfices, elle vient de lancer un petit commerce. C’est ainsi que de nombreuses personnes arrivent à survivre en se débrouillant et grâce aussi à la solidarité. Par exemple, une religieuse amie qui porte le même prénom qu’elle a accepté d’accueillir son fils chez elle, et de prendre en charge les frais scolaires. En effet, quand on a le même prénom on est « homo » (homonyme) et on se considère comme de la même famille. Cela résout bien des problèmes.

Je pense aussi à cet agent agronome déflaté qui nous avait aidés, quand je suis arrivé à Mongo, à planter des bananiers, à trouver des plants de café sélectionnés et à faire venir des semences de palmiers nains de Côte d’Ivoire pour faire de l’huile de palme et faire vivre la Mission. Par la même occasion, il s’est formé au lancement et à l’organisation de petits projets de développement. Jusqu’à maintenant, il assure l’animation des écoles maternelles, l’aménagement des sources pour avoir une eau propre et la mise à niveau des bas-fonds pour la culture irriguée du riz, grâce au soutien continu d’une association (Appel Détresse) qui nous a aidés dès le début pour ces différents projets. Cela fait ma joie de constater que ces nombreuses actions se poursuivent jusqu’à maintenant grâce à de nombreuses personnes engagées et l’encadrement de ceux qui m’ont succédé.

Au niveau du pays, les choses avancent aussi. Ainsi, dans toutes les sous-préfectures, on a installé des lampadaires à panneaux solaires pour l’éclairage public, ce qui transforme complètement la vie sociale. A GUECKEDOU où j’ai dormi, une ONG fournit du matériel à des groupes de jeunes volontaires pour l’aménagement de leur quartier. Il y a ainsi des tas de choses qui se mettent en place.

Quand le militaire est descendu, je passe devant et le chauffeur, musulman, engage avec moi une discussion religieuse. Il commence par me dire que nous avons les mêmes prophètes et me demande « pourquoi on ne parle pas de Mohammed dans l’Evangile ? » Je lui explique que l’Evangile a été écrit six siècles avant la naissance du Prophète. Alors il me pose la question classique : « Pourquoi vous les chrétiens vous ne reconnaissez pas le prophète Mohammed, alors que nous les musulmans nous reconnaissons Jésus ? ». Je lui réponds que nous respectons Mohammed, mais que c’est Jésus que nous suivons ». Il continue : « Mais si vous croyez en Dieu, pourquoi vous n’êtes pas musulmans ? » Je lui dis que dans le Coran, on affirme « qu’il ne faut forcer personne en matière de religion ». Et que « c’est Dieu qui a voulu plusieurs religions, pour qu’elles se concurrencent dans le bien ». Mais évidemment cela ne le convainc pas. Convaincu de sa foi, il n’arrive pas à comprendre qu’on puisse être croyant d’une autre religion. Mais cette discussion se passe avec beaucoup de respect. Et nous continuons en parlant de la prière.

A 50 km de Conakry, la capitale, contrôle des papiers. On me demande de descendre et d’aller me présenter au poste de police. Mais nous sommes arrêtés dans une grande flaque d’eau. Finalement, le policier a pitié de moi et il nous laisse partir.

Le chauffeur m’explique qu’il est chauffeur de bus. Mais la Société a des problèmes financiers et il y a une compression du personnel. Alors il fait du transport avec se voiture personnelle en attendant.

Il fait nuit quand nous arrivons à Conakry. C’est un samedi soir, il y a un bouchon énorme. D’abord, la route est complètement défoncée. De plus, elle est bloquée à cause des nombreuses voitures en panne, arrêtées parfois en plein milieu de la route. Car beaucoup de voitures particulières sont des voitures réformées en Europe, envoyées en Afrique, et donc vieilles et en mauvais état. De plus, il y a de nombreux camions qui veulent sortir de la ville pour voyager la nuit, et qui bloquent la route. Mais surtout il y a la grande indiscipline des conducteurs. Chacun se débrouille pour passer devant les autres, en roulant de tous les côtés, à cinq ou six de front, et les véhicules circulant dans les deux directions se retrouvent face à face et tout est bloqué. Il n’y a aucun policier. Ils ont arrêté leur service à 18 heures. Ce sont des jeunes du quartier qui essaient d’arranger les choses, moyennant un peu d’argent. Il nous faut plus de deux heures pour en sortir.

Notre maison d’accueil est en pleine réfection. Les confrères ne peuvent donc pas me loger. Je connais encore beaucoup de gens à Conakry, j’ai prévu les choses et récupéré plusieurs numéros, car ils ont changé depuis mon départ il y a 5 ans. Je téléphone à une famille qui accepte aussitôt de me recevoir. Comme ils ont déménagé, nous convenons d’un point de rencontre et leur grand fils vient me récupérer. Ils m’ont attendu jusqu’à plus de minuit et m’ont préparé un bon repas. J’en ai bien besoin, car nous ne nous sommes arrêtés qu’une seule fois pour faire rapidement le plein d’essence et nous n’avons rien mangé de la journée.

Il y a de l’électricité, ce qui est un progrès par rapport aux années passées, même si les coupures de courant sont encore nombreuses. Mes amis habitent au 3ème étage et l’eau n’y arrive pas. Un musulman du quartier a fait un forage et il distribue de l’eau gratuitement entre 17 et 19 heures à tout le quartier. Mais il faut aller la puiser, et la monter 3 étages sur la tête chaque jour.

DIMANCHE 24 JUILLET :

Je me lève tôt car je veux assister à la messe dans mon ancienne paroisse. Comme c’est assez loin, mes amis m’ont trouvé un chauffeur qui va me transporter avec leur propre voiture. Nous arrivons juste à temps pour la messe. J’y trouve un prêtre âgé (86 ans) que je connais bien, qui continue à rendre des services. Malheureusement, le curé, mon ancien vicaire, est absent. Il est parti assister à la première messe d’un nouveau prêtre, un de nos jeunes. J’essaierai de le rencontrer plus tard, et je laisse mon numéro de téléphone. A la sortie de la messe, ce sont les nombreuses salutations avec les paroissiens. Ils sont surpris de ma présence non annoncée, mais très heureux de me revoir… et moi aussi ! Ensuite, je pars dans une autre paroisse dont j’avais aussi la responsabilité. Là, il y a une grande célébration : Fête des enfants et anniversaire de la chorale. Le curé me donne la parole à la fin de la messe, et je leur dis un mot de salutation et d’encouragement, en soussou, avant de continuer en français pour leur expliquer mon travail actuel au Sénégal. Nous en reparlons avec plusieurs après la messe. Je partage avec tous le repas de la fête (très simple mais plein d’amitié), mais je ne reste pas au théâtre des enfants, ni au concert des sept chorales qui se sont réunies, car j’ai besoin de me reposer.

LUNDI 25 JUILLET :

Je pars à l’Archevêché en ville pour rencontrer mes anciens collaborateurs. Ils sont très surpris, mais aussi très joyeux, car ma venue n’a pas été annoncée. Je fais ainsi le tour des différents services, accompagné par l’un ou l’autre. A chaque fois, ils prennent soin de m’expliquer où ils en sont. Je passe un bon moment à l’OCPH (Office Catholique pour la Promotion Humaine), l’équivalent de la Caritas/Secours Catholique. Nous parlons de leurs projets. En particulier de l’atelier des enfants de la rue à relancer, et des centres aérés pour les enfants des banlieues, car le temps des vacances est arrivé. Bien sûr, ils me gardent pour le repas.

Je veux rentrer en « taxi » : voitures qui prennent deux clients devant et quatre derrière, mais elles sont rares, en particulier dans la direction où je vais, et les clients nombreux. Finalement, je me rabats sur un minibus, complètement bourré, où j’arrive à me faufiler. Je suis debout au milieu, mais tout de suite quelqu’un me cède sa place. J’entends deux personnes qui parlent en kissi. Je les salue dans leur langue et nous continuons la conversation, à leur grande joie, et au grand étonnement des autres voyageurs qui ne nous comprennent pas. Ce n’est pas souvent qu’ils voient un blanc dans ces moyens de transport populaire, et encore moins l’entendre parler une de leurs langues.

Enfin arrivé, j’écoute les nouvelles, car là où j’étais, à MONGO, je ne pouvais pas les recevoir sur mon petit téléphone. Ici, j’apprends avec stupeur l’assassinat du Père Jacques HAMEL, en Normandie. Bien sûr, je partage la tristesse de tous. Je prie pour lui et je suis révolté par cet acte barbare, mais je ne peux m’empêcher de me poser un certain nombre de questions. D’abord, on ne parle pratiquement que de cela aux informations pendant deux jours. One ne peut avoir aucune autre nouvelle du monde. Bien sûr, cette mort est dramatique, mais chaque jour des prêtres et des chrétiens (mais encore plus de musulmans) sont assassinés par l’Etat islamique DAECH au Moyen Orient, par Boko Haram au Nigéria, ou Al Qaïda (AQMI) au Mali. Et nous-mêmes, nous avons eu plusieurs confrères tués, mais comme ce n’est pas en France, on n’en parle pas. Ces pays n’ont pas la même influence, ni les mêmes moyens médiatiques ou autres.

Je suis frappé aussi par la légèreté et la banalité des questions des journalistes, qui en plus se contentent tous de répéter sans cesse pratiquement les mêmes choses. Je suis aussi scandalisé par l’utilisation politique faite par certains de cette mort tragique. Par contre, j’apprécie les déclarations pleines de bon sens, de confiance, de recherche de paix et de foi des évêques de Rouen et Paris, mais aussi des responsables religieux musulmans et juifs, et de la population du village, chrétiens, musulmans et non croyants ensemble.

Une autre chose qui me frappe, ce sont les solutions proposées : augmenter le nombre de policiers et de gendarmes, comme si c’était une solution, contre des terroristes prêts à se faire sauter pour tuer d’autres personnes. Certes, on a besoin de sécurité, et les gros efforts faits sont nécessaires, mais je suis frappé par cette recherche de sécurité et d’assurance à tout prix de certians français et de leur difficulté à dépasser la peur.

Après tout, il y a beaucoup plus de morts dans les accidents de circulation, et ils sont tout autant imprévus que les attentats. Ne faudrait-il pas faire le même effort d’éducation et de prévention que contre les accidents routiers ? Mais je n’ai entendu parler que de protection, mais pas d’attaquer les vraies causes : les problèmes des banlieues, la marginalisation, le manque d’éducation et le chômage des jeunes. Car la plupart de ces gens qui font des attentats sont des francophones et même des français nés en France. Ce ne sont pas des réfugiés qui viennent de Syrie ou d’ailleurs. Au contraire, ce sont nos jeunes Français qui partent en Syrie. Ces jeunes ne cherchent pas à vivre la foi musulmane, ils utilisent l’Islam comme moyen pour exercer leur soif de vengeance et de nihilisme. Et c’est dramatique pour la religion musulmane. D’où l’importance de rester unis. Car DAECH tue beaucoup plus de musulmans que de chrétiens et fait tout pour opposer chiites et sunnites. Comme il fait tout pour casser la société française et exacerber les oppositions entre droite et gauche, entre français « de souche » (quelle souche ?) et les autres. Et nous risquons de tomber dans le panneau.

Un détail personnel, anecdotique et sans importance. Je reçois plusieurs coups de téléphone de gens qui en entendant le nom du Père HAMEL ont pensé que c’était moi (le Père Armel). Déjà, quand le Frère Joseph avait été assassiné à KATACO où j’étais curé, beaucoup avait cru que c’était moi.

MARDI 26 JUILLET :

Je me repose un peu et termine de lire les livres que j’avais amenés. Je les laisse à ma famille d’accueil et en échange ils m’en donnent d’autres. Je vais ensuite faire quelques visites et je rencontre en particulier un enseignant qui m’avait contacté par Face Book. Il veut ouvrir une école élémentaire dans la banlieue et nous en parlons ensemble. Mais celui que je suis venu rencontrer, c’est bien sûr l’Archevêque, avec qui j’ai collaboré pendant 15 ans. Il était parti à une rencontre en Angola. Je lui ai laissé un message ; il me rappelle dès son retour et me donne un rendez-vous pour demain midi.

La nuit, il y a une très forte pluie qui dure et le quartier où je suis est complètement inondé. La population est très en colère et accuse le gouvernement d’être responsable, et de ne pas faire ce qu’il faut. Les jeunes décident de faire un barrage sur l’autoroute pour exiger une intervention des services publics, et les policiers viennent les déloger à coups de grenades lacrymogènes. Je retrouve la même réaction de la population qu’au Sénégal : tout attendre du Gouvernement. C’est vrai que le Gouvernement a une responsabilité  dans cette situation, par manque de prévision et d’organisation et pas seulement par manque de moyens. Et parce que la priorité est donnée au bien-être des classes sociales les plus riches et aux habitants du Centre de la capitale, plus qu’aux gens des banlieues. Mais c’est vrai aussi que la population s’est installée dans les bas-fonds –faute de place ailleurs- qui sont inondés à la saison des pluies. On a bien fait des caniveaux, mais comme il n’y a pas de ramassage des ordures organisé, les gens les jettent dans ces caniveaux qui se retrouvent bouchés. Les choses ne sont jamais simples.

MERCREDI 27 JUILLET :

Il continue à pleuvoir. Et plusieurs quartiers ont fait des barrages, comme dans le nôtre. Il y a d’énormes bouchons dans toute la ville. Au bout de trente minutes, j’arrive enfin à trouver un « taxi » qui se faufile sans aucun respect du Code de la route, comme beaucoup d’autres, ce qui ne fait qu’augmenter les bouchons ! Finalement, je descends et continue à pied, jusqu’à ce que j’attrape un autre taxi qui me laisse pas trop loin de l’Archevêché. Je suis très en retard, mais l’Evêque a eu les mêmes problèmes, ce n’est pas grave ! J’ai même le temps de parler avec le Vicaire général et plusieurs prêtres de passage.

L’Archevêque m’a invité à manger. Nous sommes très heureux de nous rencontrer, après 5 ans. Ce n’est pas une séance de travail, mais une rencontre amicale. Nous parlons de choses et d’autres, et en particulier d’Ebola et des moyens mis en place pour se protéger et éviter son retour. Nous parlons aussi du Comité national pour la Réconciliation, dont il est le co-président, avec l’imam de la grande mosquée de Conakry. C’est ce qui se fait dans plusieurs pays d’Afrique, en particulier la Centrafrique. D’ailleurs, après le repas, les deux co-présidents doivent rencontrer le Président de la République, avant d’animer une rencontre demain avec les parlementaires de la région de KINDIA. Il me prend avec lui en voiture une partie du chemin, ce qui me permet de sortir des bouchons et d’arriver plus facilement à notre communauté, toujours en travaux, mais pour une nuit nous nous débrouillons en mettant des matelas par terre. J’y retrouve l’ancien curé de Pikine où je travaille actuellement, et un de nos étudiants sénégalais venu en stage de vacances en Guinée. Comme nous, ils ne vont en famille que tous les trois ans. Nous parlons de son stage. Je retrouve aussi un de mes anciens étudiants ghanéens ; il travaille actuellement dans un quartier populaire du nord de la Belgique : après avoir appris le français, il lui faut apprendre le flamand. Il est venu en congés en Guinée où il a travaillé il y a quelques années. Je parle aussi avec un autre confrère ghanéen qui travaille en Guinée. Un de nos frères guinéens travaillant au Sénégal l’a emmené dans sa famille, en Guinée Forestière qu’il ne connaissait pas encore, et nous échangeons ses impressions. Nous vivons toujours en communauté internationale, ce qui est une grande richesse, même si ce n’est pas toujours facile de se comprendre entre gens de cultures différentes.

JEUDI 28 JUILLET :

Il est temps pour moi de retourner au Sénégal. J’ai pris mon billet du taxi depuis hier et suis sur place dès 6 heures 30. Mais il faut le temps de remplir la voiture et de charger ; nous quittons la ville vers 9 heures. La sortie est toujours aussi difficile, pas seulement à cause de l’état de la route. Plusieurs policiers nous demandent le « mot de passe », c’est-à-dire une somme d’argent pour nous laisser passer. C’est devenu une habitude. Et cela se continue au poste de contrôle suivant. La voiture est arrêtée parce que la photo du permis de conduire du chauffeur a été altérée par la pluie et elle n’est pas claire. Après discussion et remise d’argent, nous pouvons continuer. Nous sommes dans une Renault 21 (break) 10 adultes (3 devant, 4 au milieu, 3 derrière sur un siège remplaçant le coffre) et 5 enfants sur les genoux, serrés beaucoup plus que des sardines et sans huile pour amortir les pressions et les chocs ! Les premiers kilomètres sont en goudron, mais ensuite c’est une piste de latérite, très dure, pleine de trous et de crevasses, remplies d’eau. Nous roulons la plupart du temps en 1ère et en 2ème. Partis à 9 heures de Conakry, nous arrivons à la frontière (environ 700 km) à 3 heures du matin. Les postes de contrôle sont fermés. Nous nous couchons par terre en attendant 8 heures. Heureusement il ne pleut plus. Il nous faudra passer à nouveau trois fois de suite les mêmes contrôles de gendarmerie, de douane et de police. A chaque fois, il nous faut descendre de voiture, et faire contrôler les bagages, ce qui est toute une expédition. Et ceux qui ne sont pas en règle sont à nouveau taxés.

Frontière du Sénégal. Nouvelles formalités et nouvelles complications. D’abord, lavage des mains et prise de température : prévention d’Ebola. C’est une très bonne chose ! Puis contrôle du carnet sanitaire contre la fièvre jaune. Je suis en règle. Mais l’agent remarque sur mon carnet une ancienne vaccination contre le DT TAB quand j’étais au Congo, et qui bien sûr n’est plus valable. Après une longue discussion et promesse de vaccination, il me laisse enfin passer. Mais c’est notre voiture qui est retenue ! Son assurance CEAO pour entrer au Sénégal est périmée. Il nous faut trouver une autre voiture pour rejoindre le garage sénégalais et prendre un nouveau taxi pour Dakar. Comme on ne la trouve pas, je pars à pied. Je trouve un bus en partance…. mais il faut deux heures avant qu’il soit rempli, ce qui est impératif pour qu’il parte. Nous sommes 77 passagers. Arrivé tard, je suis sur un strapontin, mais quand même moins serré que dans un taxi. L’inconvénient, c’est que tout est plus long.

A mi-route, nous sommes arrêtés par un contrôle douanier. En effet, beaucoup de passagers qui viennent de Guinée, du Mali, de Gambie, de Sierra Léone, de Côte d’Ivoire et de beaucoup plus loin, en profitent pour faire du commerce, car certains produits coûtent moins cher dans ces pays. Sans parler des objets chinois. On contrôle la valise d’une femme qui n’a pas déclaré ses tissus. Les douaniers font alors descendre tous les bagages. Cela prend beaucoup de temps, car il y en a beaucoup. Ils découvrent qu’une commerçante a chargé huit sacs de fruits, taros et ignames à vendre, mais elle n’en a déclaré que trois ! Alors commence un gros palabre comme on sait le faire ici. D’abord la femme cherche à se défendre. Elle n’est pas écoutée bien sûr. Alors les anciens qui parlent sa langue, le poular, se rassemblent. Ils choisissent un porte parole qui parle ouolof (la langue nationale) et le français (la langue officielle) pour s’expliquer avec le douanier de grade inférieur qui a arrêté le bus et fait descendre les affaires. Avec lui, les anciens remontent les douaniers un par un, en suivant leur grade. Comme ils n’arrivent pas à s’entendre, nouvelle concertation. Finalement, il va y avoir trois heures de va et vient, jusqu’à ce que les douaniers acceptent une amende de 60.000 Fr CFA (85 euros, ce qui est énorme par rapport au niveau de vie et des bénéfices espérés). C’est sûr que cette commerçante va en être pour ses frais ! Et je ne pense pas qu’on lui ait donné un reçu ! Il faut bien s’occuper pendant ce temps-là. Les douaniers ouvrent les sacs et valises un par un, sur la route. Tout le monde est autour et en regarde le contenu. Mais sans commentaires et avec respect. Ils savent bien qu’ils ont intérêt à se taire.

L’un du groupe des apprentis dit à ses camarades : « Le blanc là, il parle ouolof », mais ils n’osent pas s’approcher de moi ; je suis, le seul blanc du voyage. Alors je vais leur parler. D’autres personnes peuhles me testent en me saluant dans leur langue. Alors d’autres viennent me parler en soussou et en baga (langues que je connais aussi, ayant travaillé chez eux). Puis une famille sierra léonaise s’adresse à moi en anglais local (créole). Tout cela avec beaucoup de joie et d’exclamations. Du coup, le chauffeur me paye les trois verres de thé traditionnel. Et les anciens viennent me tenir au courant des tractations. Enfin, on rembarque les bagages et on repart. Il fait nuit déjà.

Une fois encore j’admire la patience et la bonté des gens. Personne ne fait le moindre reproche à la commerçante qui nous a causé un tel retard. Pour moi, cela fait trois jours de voyage très fatigants, mais plein de partages et d’amitié. Des gens m’ont demandé : pourquoi tu ne prends pas l’avion ? (1 heure 15 de vol). D’abord, les lignes africaines coûtent très cher. Et pour le travail que je fais, un tel voyage me semble très important pour partager la vie des gens, connaître leurs difficultés et approfondir leur culture.

Une passagère est malade et a envie de vomir. On s’arrête dans un petit village pour qu’elle puisse vomir. Arrivés dans une ville, on lui propose de se faire soigner dans le dispensaire du lieu. Mais elle préfère recevoir des médicaments et continuer le voyage avec nous. Avant de repartir, les apprentis du bus me prennent en photo avec eux sur leur téléphone mobile « pour avoir un souvenir ».

Nous sommes arrêtés par des policiers ou gendarmes. Nous avons nos papiers en règle, mais c’est énervant parce que cela nous fait perdre beaucoup de temps et surtout nous nous demandons ce qu’ils vont encore trouver.

Nous subissons une très grosse pluie. Et en arrivant à la grande ville du Centre (KAOLACK) nous voyons des maisons et des quartiers complètement inondés. En effet, venus tenter leur chance en ville, des gens ont construit des baraques dans les bas-fonds. Suite à la grande sécheresse des années 1970, ces bas-fonds étaient secs. Mais les pluies sont revenues. Et les gens n’ont pas les moyens d’aller construire ailleurs. Que faire ?

La ville de KAOLACK est complètement inondée. En plus, des gros camions partent pour des travaux. Nous mettons deux heures pour traverser la ville. A la sortie, grosse question : doit-on s’arrêter pour manger, car nous n’avons rien pris depuis ce matin. Mais certains sont pressés d’arriver. Finalement, on trouve un marchand de pain et on s’arrête pour manger. Avec tout cela, nous arrivons à 1 heure du matin. Je voulais rentrer à pied, puisque je connais bien la ville et que je n’étais pas trop chargé. Mais les gens de la gare routière m’arrêtent à cause de la grande insécurité du quartier. Et un chauffeur de taxi me ramène jusqu’à l’église. Je ne le connais pas, mais lui me connaît !







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