LA TOUSSAINT
Quand l'Église invite à fêter tous les Saints il est possible de regarder dans le lointain pour y découvrir toutes les belles figures qui nous ont inspirés. Il y en a pour tous les goûts, chacun peut s'accorder avec l'un ou l'autre tant le Seigneur a répandu sa beauté sur la multitude de ses enfants. Mais aujourd'hui, peut-être parce que les yeux se fatiguent, je m'attarde sur ce qui est près pour discerner les signes de la présence agissante de Dieu, dans les tout proches... Figure toi que tu es du nombre !
Lorsque je parle de sainteté, je ne pense pas du tout à un idéal, à une perfection finalement irréelle. Je bénis simplement pour la foi bien concrète vécue au coeur de difficultés, de souffrances et même chargée de limites profondes. Je me laisse toucher par l'expression de l'amour tantôt délicat et plein de douceur, tantôt fort et ferme. Quelque fois, il suffit d'un simple regard, d'un sourire complice, d'autres fois d'une larme, d'un cri... le service discret, la parole qui réconforte ou qui exprime la confiance... le geste fraternel, la main proposée pour un bout de route, pour une communion silencieuse... le temps offert gratuitement, l'humble écoute ou la parole qui déborde... Parfois la présence se fait insistante, d'autre fois elle se transforme en effacement discret... Délicatesse du coeur qui trouve son expression dans la parole et dans le geste, dans le regard, dans les yeux qui s'embuent... dans les yeux qui s'éclairent et qui brillent... Amour fort, amour humble, amour pur, il vérifie sa qualité dans la gratuité... il s'efface derrière un autre amour.
Les mains peuvent être trop rudes ou trop chaleureuses, les paroles vives ou insistantes, les gestes gauches, maladroits... dès lors que le désir de donner la première place à celui qui est source, l'emporte sur tout autre sentiment humain, soyons assurés que passe le Saint, qu'il se fait reconnaître. Il est venu chez nous, dans notre pauvreté, il s'est fait mendiant de nous jusqu'en nos situations de péchés pour imprimer sa marque, pour que transparaisse sa présence agissante, aimante, sa présence de Ressuscité.
Beauté de ce vêtement, plus léger quand l'été brille de tous ses feux, il s'adapte si bien au corps de chacun. Le tissu se fait plus épais quand souffle le vent froid, il nous protège ! N'y a t'il pas la sainteté des jours sans nuage et celle des moments de tempêtes. Contemplation paisible et grande lutte... et toujours l'Ami qui rappelle sa présence. Il nous laisse la joie de nous dévoiler, il nous recouvre pour se faire défense !
Alors j'ose te regarder les yeux dans les yeux pour découvrir en transparence celui qui t'anime. En toute discrétion laisse moi te suivre un peu pour savoir quel est ta demeure, peut-être vais-je apprendre mieux encore celui qui t'accueille ou celui qui t'habite ? Et si je tends l'oreille je t'entends murmurer son nom, je l'entends murmurer le tien !
Saints et saintes de Dieu priez pour moi.
De tout coeur en Lui et en eux.
P. Louis (1).
Toussaint,
Un vrai temps de toussaint,
Un vrai temps de tout-vent,
Un vrai temps de tout-pluie.
Cimetière, chrysanthèmes,
Tombes, souvenirs de morts
Froid aux pieds, froid au cœur.
Fête des morts, fête des saints !
Les saints de tous les jours,
Les saints de rien du tout,
Les saints du quotidien,
Les saints des tout-petits,
Fête de mes amis, fête de la vie !
Ils sont une foule, anonymes
Et pourtant bienheureux,
Connus de peu, connus de Dieu,
Amis des sans grades, des sans noms,
Toujours à la tâche,
Toujours à l’amour.
Pauvres de tout,
Surtout pauvres d’eux-mêmes,
Ils sèment la joie
Dans le partage d’eux-mêmes,
Mains ouvertes pour l’accueil,
Mains offertes pour donner.
Riches de leur faiblesse offerte,
Ils s’effacent devant l’unique,
Vide d’eux-mêmes, plein de Lui,
Sans fard, ils présentent
Ce trésor qui captive leur cœur,
Le geste le plus banal
Se fait porteur d’eau vive.
Louis.
Le P. Louis Cesbron est chapelain de la chapelle Sainte-Thérèse d'Auteuil à Paris
