Parole de Vie..   
Cssp et ISLAM


Ce nouveau message de csspislam a pour but de partager avec vous quelques informations du mois en cours sur les initiatives de rencontres et de dialogue entre Chrétiens et Musulmans.

CSSP/ISLAM
;1 04/2009 - Septembre 2009

Chers confrères et ami(e)s,

Cette quatrième lettre cssp/islam de l'année comporte trois parties:

 - La première est constituée d'une traduction de la circulaire de septembre 2009 de Marielle Beusmans, spiritaine associée néerlandaise, ayant une dizaine d'années d'expérience de travail avec les femmes en Afrique de l'Est et depuis un an investie dans une démarche concrète de dialogue inter-religieux et de promotion de la paix à Mombasa (Kenya). Elle nous partage ici des convictions fortes, ainsi que les joies et les difficultés de son nouveau travail. Construire la paix est un travail de longue haleine et les religieux ont à y apporter leur contribution spécifique. La présentation faite par Marielle montre bien comment le dialogue entre croyants rejoint de plein pied une démarche de travail pour la justice, la paix et le respect de l'intégrité de la création (JPIC).

 - La seconde contribution (cf. à la suite du texte de Marielle) reprend un texte publié dans la revue spiritaine L'Echo de la Mission  que je remercie au passage. Quatre photos avaient accompagné ce texte, mais j'ai renoncé à vous les faire suivre afin de ne pas surcharger cet envoi. Le texte ci-dessous se veut lui aussi en relation avec la vie concrète des communautés, puisqu'elle rapporte une expérience de rencontre entre communauté musulmane et communauté chrétienne à Fameck en Moselle (France). Paul Renkes, un paroissien de la paroisse où oeuvrent plusieurs de nos confrères raconte la visite de la mosquée turque survenue comme échange naturel après une visite amicale de l'église par des membres de la communauté musulmane. Se respecter, s'estimer passe toujours par des rencontres directes, personnelles et communautaires, qui, seules, permettent de se connaître. Ce dialogue à la base est le fondement de tout dialogue authentique.

Ces deux textes m'ont paru valoir une large diffusion d'une part par leur qualité, d'autre part parce qu'ils montrent des exemples précis où nous, spiritains, sommes investis dans la rencontre fraternelle avec des croyants musulmans. N'hésitez pas à partager et faire connaître d'autres expériences, les vôtres peut-être!

 - Enfin, comme de coutume en cette fin de mois de ramadhan, le Conseil Pontifical pour le dialogue inter - religieux vient de diffuser une lettre de salutations et de voeux destinée aux musulmans à l'approche de la fête de l' 'Id al-fitr. Cette année le thème développé est: "chrétiens et musulmans, ensemble pour vaincre la pauvreté". Ce texte peut vous être utile afin d'adresser vos voeux à des proches ou des voisins musulmans. Il peut servir aussi d'alibi pour aller rencontrer des responsables de leur communauté ou d'autres officiels. Enfin par son contenu, il permet quelquefois d'aborder des thèmes de discussion de fond (par exemple cette année: pauvreté matérielle à combattre et pauvreté spirituelle à vivre, construire ensemble une même famille humaine, aller de la tolérance vers la rencontre, etc). Vous trouverez le texte français du Conseil Pontifical en document - joint. Pour ceux qui désireraient avoir une version en arabe n'hésitez pas à me le signaler je pourrai vous l'envoyer. Le texte existe enfin en d'autres langues du monde, cf. à cet effet le site officiel de Vatican: www.vatican.va

Fraternellement, Marc Botzung, cssp 

1° LETTRE DE MARIELLE :

Mombasa, septembre 2009                               Advisor Interreligious Dialogue
                                                                  Coast Interfaith Council of Clerics
                                                                  P.0.Box 40466 ; 80100 Mombasa, Kenya
                                                                  mariellebeusmans@hotmail.com
Chers amis,

« Frontières », entre délice et fardeau
Dans mon travail comme conseillère au dialogue interreligieux pour l’organisation « Conseil Inter-Foi des Responsables religieux de la Côte » (Coast Interfaith Council of Clerics (CICC), à Mombasa, Kenya) je suis souvent confrontée à des « frontières ». Lors d’ateliers et de réunions, j’invite des responsables religieux à parler de foi. J’apprécie énormément de voir des responsables religieux franchir leurs frontières en étant ouverts pour parler, partager et essayer de se comprendre les uns les autres. Franchir ces frontières ne demande pas seulement de la connaissance et un savoir-faire, mais cela requiert également foi et réflexion. Il y a une manière de croire qui aide les gens à franchir les frontières et de même il y a une manière de croire qui empêche les gens de franchir les frontières. Il y a une manière de croire qui aide les gens à déplacer les frontières pour (se) rapprocher les uns des autres et il y a une manière de croire qui ne respecte pas les frontières des autres. Les frontières nous aident à marquer nos identités, individuelles et sociales, mais elles peuvent aussi exclure. Dans mon travail, je fais l’expérience de ces « frontières » comme un défi pour découvrir de nouveaux horizons, pour découvrir jusqu’où nous sommes capables de regarder au-delà de nos propres frontières et d’étendre nos relations avec des gens de foi différente. Dans cette lettre, je voudrais partager quelques impressions au sujet de ces frontières et de nouvelles initiatives qui se profilent à l’horizon.

Ateliers de dialogue interreligieux
Les comités d’organisation de trois districts pilotes se sont donnés pour tâche de mobiliser les leaders religieux (chrétiens, musulmans, religions traditionnelles africaines (RTA)), ainsi que quelques femmes qui se sentent en situation de responsabilité dans une église ou une mosquée. J’ai utilisé des méthodes créatives pour leur permettre de discuter davantage de leur foi. Et ça marche ! C’est extraordinaire de voir des participants, assis en petits groupes, discuter très sérieusement et de manière très vivante au sujet de la foi et de sujets religieux en rapport avec leur vie quotidienne. Les visages rayonnent et, à chaque fois, le temps prévu est ressenti comme trop court. Il est clair pour moi que les gens ont besoin de lieux comme ceux-là pour partager avec des personnes de religions différentes au sujet de leur foi et de ses implications pour leur vie. Ils parviennent à s’ouvrir et à parler, sans peur que l’autre ne se mette à attaquer leur foi.

Rôles et positions des leaders religieux
Après les ateliers avec les leaders religieux dans les trois districts pilotes, nous visitons les leaders religieux dans les villages. Dans ces réunions, nous parlons du rôle spécifique et de la position des leaders religieux dans le processus de bâtir la paix. Les responsables religieux n’ont pas le même rôle que les dirigeants politiques ou les travailleurs humanitaires au service de la paix. Les responsables religieux ont une position originale : ils vivent une solidarité avec leur communauté et en connaissent - comme personne d’autre - les contextes, les liens et les relations dans la communauté. De plus, ils ont la grande chance de prêcher chaque semaine à leurs fidèles dans la mosquée ou dans l’église. Nous discutons de ce rôle particulier, de leurs atouts, mais aussi des pièges, qu’ils peuvent rencontrer dans le processus de bâtir la paix. Durant la réunion suivante, nous parlons des nouveaux aspects qu’ils expérimentent dans leur environnement religieux et quelles sont les causes qui poussent des groupes religieux à s’impliquer dans des conflits au point que ceux-ci seront qualifiés finalement de « conflits religieux ».

Résultats
Au début du mois de juillet, j’ai terminé ma première année comme conseillère au dialogue interreligieux. Il est bon de réfléchir une fois par an à l’ensemble des activités entreprises. J’ai également eu à écrire le rapport annuel pour l’ONG néerlandaise « Personnes avec une Mission » (People with a Mission) qui m’a envoyé à la CICC. L’an dernier la CICC a débuté officiellement le programme de dialogue interreligieux et de nombreux ateliers ont été organisés afin de permettre aux leaders religieux de se familiariser à différents niveaux au dialogue interreligieux, à la gestion des conflits et à la construction de la paix. 44 leaders religieux (shaykh-s importants et évêques) ont participé au premier atelier.
En août, 4 ateliers furent planifiés et nous avons formé 177 responsables religieux des 13 districts de la Province côtière.
En octobre - novembre 2008 et janvier - mars 2009 nous avons travaillé au niveau de la base. Les 213 lieux d’interventions se répartissent en 49 divisions.
Nous avons touché au total 810 leaders religieux. Après Pâques, un atelier spécial fut organisé pour les leaders religieux et donné dans les trois districts pilotes. Environ 82 leaders ont participé à ces ateliers. C’est vraiment impressionnant de pouvoir atteindre autant de responsables religieux en une année. Ce fut un travail d’équipe ! Tout le personnel du CICC et les membres de son conseil ont pris part à ce travail. A présent nous pouvons apprécier le magnifique résultat.

Lève-toi et resplendis
« Lève-toi et resplendis » (rise and shine) est le thème de la Conférence des femmes organisée par l’Eglise Méthodiste de Mombasa et leurs hôtes appartenant à la Centenary Church du Kentucky (USA). C’est une Conférence très suivie : plus de 100 femmes représentent les Eglises Méthodistes dans la Province côtière. Le thème « Lève-toi et resplendis » est tiré du livre d’Isaïe 60,1 et établit un lien entre les femmes de la Bible et les femmes d’aujourd’hui. Différentes femmes ont préparé des parties du programme : une réflexion sur un passage biblique, un témoignage personnel sur la vie de leur grand-mère, leur mère ou concernant leur propre vie. Il y a eu des jeux de rôle à thème biblique, puis des partages en petits groupes. De temps en temps l’atmosphère sérieuse est interrompue par un moment de créativité : faire une fleur en papier, tisser un écusson pour les bras, écrire une lettre ou entonner des chants. L’ambiance est très ouverte, enthousiaste et, de temps en temps, dansante. Nous terminons la journée en regardant une danse féminine chrétienne traditionnelle et nous célébrons l’eucharistie ensemble : partageant le pain et le vin. Ce fut vraiment un jour de « Lève-toi et resplendis ».

Deux nouvelles initiatives
Nous avons eu des réunions de brainstorming pour exprimer nos propositions afin de mettre en place une petite bibliothèque en annexe d’un Centre de connaissance et de recherche qui fournira des informations sur les thèmes sur lesquels travaille le CICC. Nous voulons rendre les informations disponibles pour les permanents, pour les responsables religieux, les étudiants et autres personnes intéressées. Un organisme comme le CICC doit aménager une place pour l’étude et la recherche, pour offrir du conseil en matière d’affaires religieuses et en vue de promouvoir du matériel didactique sur les thèmes du dialogue interreligieux.
J’ai terminé la première version du livret sur le dialogue interreligieux et je suis contente que cela soit reçu avec beaucoup d’enthousiasme. Je l’ai écrit spécialement pour des leaders religieux de la base afin qu’ils promeuvent le dialogue interreligieux dans leurs communautés. C’est simple, clair, concret et contient beaucoup de travaux pratiques faciles à utiliser dans les communautés. La version anglaise sera maintenant traduite en swahili de sorte que tous les responsables religieux de la Province côtière soient en mesure de la lire et de l’utiliser.

Merci beaucoup, Marielle

PS : Si ceci est la première fois que vous recevez ma lettre d’infos et qu’à l’avenir vous vouliez en recevoir d’autres (3 fois par an), faites-le moi savoir.

2° LA VISITE DE LA MOSQUEE TURQUE DE FAMECK :
Belle expérience de dialogue interreligieux sur le secteur paroissial où travaillent nos quatre confrères : Adam Wedmann, Claude Brehm, Jean-Michel Gelmetti et Pierre Gaschy. Témoignage d’un participant.
Invités à participer à notre repas paroissial, les musulmans turcs avaient manifesté le désir de visiter notre église de Fameck. Ils furent plus de 80, dont de nombreux enfants. À cette occasion, l’imam nous avait offert un bel arrangement de fleurs. À l’issue de cette visite, nous leur avons proposé de nous recevoir dans leur lieu de culte de Fameck, ce qui s’est fait le 4 avril dernier.
Nous attendions une quarantaine de personnes ; finalement nous sommes environ 70 catholiques  intéressés par cette visite.
Dès notre arrivée, nous sommes accueillis par l’imam et par les responsables du centre socio-éducatif attenant à la salle de prière.
Comme toutes les religions, l’islam a des traditions qui se perpétuent dans la vie quotidienne des personnes. On nous explique que lorsque les familles se rendent visite, il est de coutume de déposer sur les mains de chaque invité quelques gouttes de parfum et d’offrir des friandises. En franchissant le seuil de la mosquée, nous sommes tous accueillis de cette façon-là, dans un grand esprit de convivialité.
Après nous être déchaussés et avoir porté un regard vers la salle des ablutions, comme le veut encore la tradition et en signe de respect, nous sommes reçus au premier étage, habituellement réservé aux femmes, mais également accessible aux hommes lorsque la salle de prière ne suffit plus. De ce balcon, nous pouvons admirer dans sa globalité le chef-d’œuvre que représente ce lieu de prière.
         Suspendu au dessus de la salle de prière, un lustre en cristal attire immédiatement le regard par sa beauté. Ce lustre pèse 500 kgs et ses ors ne font que donner plus d’éclat à un ensemble magnifiquement décoré de couleurs vives et de sourates du Coran. La vue sur la salle de prière est unique. Ce qui frappe le plus dans cette salle, ce sont les magnifiques carrelages qui garnissent l’ensemble des murs dans leur intégralité. Les vitraux sont d‘inspiration turque, mais les formes de leurs encadrements rappellent le style lorrain. De très beaux tapis délimitent les places de prière destinées aux fidèles.
L’imam nous explique en détail le rôle des différents endroits :
- Le mirhäb*, cavité creusée dans le mur Est  qui indique la direction de La Mecque, celle vers laquelle se tournent tous ceux qui prient,
- Le minbar*, la chaire à prêcher d’où parle l’imam, dans l’angle droit de ce même mur Est, l’angle gauche étant occupé par une petite estrade qui permet le dialogue avec les fidèles.
Le vendredi est le jour le plus sacré pour les musulmans et c’est aussi celui où le plus grand nombre se réunit. L’imam et les responsables sociaux de la mosquée nous parlent longuement des rites essentiels, notamment le sacrifice d’Abraham (Aïd-el-Kébir), la naissance du Prophète, le Ramadan (dont la fin est célébrée par l’Aïd-el-Fitr) et tous les temps forts de leur religion. Ils répondent aussi à nos questions.
Ce sont là les points essentiels de l’espace cultuel qu’un large corridor sépare de l’espace culturel. En effet, plusieurs salles annexes jouxtent les lieux de prière. Appartenant à la partie socio-éducative, elles sont destinées à la formation des jeunes : une salle d’informatique et d’apprentissage des langues étrangères, notamment anglais et allemand, et une seconde salle destinée à l’enseignement religieux des jeunes et comportant une bibliothèque, en cours d’aménagement pour l’instant. Des cours de rattrapage scolaire ouverts à tous sont également dispensés.
Il faut noter que ces sections se veulent socio - culturelles. Cet aspect est fortement mis en valeur par la présence de drapeaux français et turcs peints sur les murs des divers bâtiments. À cela s’ajoutent une salle de détente, une grande cafétéria, un magasin de produits d’origine turque, un coiffeur et une cuisine pour collectivités.
Notre visite s’achève par un verre de thé de l’amitié, accompagné de petits biscuits et gâteaux, le tout dans la plus grande convivialité.

Voilà pour ce que nous avons vu. Mais c’est bien peu à côté de ce que nous avons ressenti les uns et les autres au cours de cette rencontre. Nous ne pouvons pas rester insensibles aux paroles de l’imam qui nous apprend que cette magnifique réalisation est l’œuvre de bénévoles (à l’exception des carrelages). Cela nous interroge sur le fonctionnement de notre Eglise…
Dans leurs interventions, le prêtre et l’imam soulignent tous deux la qualité de  l’accueil et du partage. Je dois avouer que je suis sorti de ce lieu de culte et centre socio-éducatif avec beaucoup de questions …
         Cette main tendue par des cultures et des rites différents, n’est-ce pas une formidable occasion de construire un monde plus humain en se connaissant mieux?
N’est-ce pas aussi l’occasion pour nos jeunes, comme pour les adultes, de se respecter mutuellement et de voir en l’autre un frère plutôt qu’un étranger qui dérange notre quotidien ?
Alimenter le dialogue interreligieux pour mieux comprendre et respecter la religion de l’autre, n’est-ce pas être fidèle à l’Evangile ou au Coran ?
Nous avons ressenti cela très fort durant cette rencontre :  volonté des musulmans turcs de nous tendre la main dans le plus grand respect des différences, volonté aussi de poursuivre ensemble en d’autres occasions ce dialogue à présent amorcé.  L’Amicale franco-turque nous a invités à la fête de la naissance du Prophète célébrée à la Cité sociale de Fameck le dimanche 19 avril. Elle nous a fait également savoir que nous pouvons leur rendre visite à tout instant : nous serons toujours bien accueillis.
Malgré toutes nos animosités, malgré une société qui nous déboussole, malgré notre tendance à dire - et nous le disons souvent - : « Qu’est-ce que je peux faire pour que ça change ? »,  nous avons eu la preuve du possible si les hommes veulent bien dépasser leurs préjugés et accepter les mains qui leur sont tendues. C’est ce que j’ai vécu en ce matin du 4 avril.  Ce n’étaient pas des vœux pieux ni un rêve, mais une réalité que j’ai été heureux d’avoir pu vivre.
Après tout, comme nous ont dit nos amis turcs : « Nous sommes tous les descendants d’Adam et Eve ! ».
Paul Renkes

3° MESSAGE DU CARDINAL TAURAN AUX MUSULMANS POUR LA FIN DU RAMADAN (1) : Chrétiens et musulmans : ensemble pour vaincre la pauvreté :

Chers Amis Musulmans,
  
1. À l'occasion de la conclusion du mois du Ramadan, je désire adresser à vous tous mes voeux de paix et de joie et, par ce Message, vous proposer une réflexion commune sur le thème : Chrétiens et Musulmans : Ensemble pour vaincre la pauvreté.

2. Il faut sans doute nous réjouir de constater que ce Message du Conseil Pontifical pour le Dialogue Interreligieux est devenu non seulement un usage, mais un rendez-vous attendu. Dans plusieurs pays, il est une occasion de rencontre amicale entre de nombreux Chrétiens et Musulmans. Il n'est pas rare, non plus, qu'il corresponde à un souci partagé, propice à des échanges confiants et ouverts. Tous ces éléments ne constituent-ils pas d'emblée des signes d'amitié entre nous pour lesquels rendre grâce à Dieu ?

3. Pour en venir au thème de cette année, la personne humaine en situation d'indigence est incontestablement au coeur de préceptes qu'à divers titres, nous chérissons. L'attention, la compassion et l'aide que tous, frères et soeurs en humanité, nous pouvons offrir à celui qui est pauvre pour lui redonner sa place dans la société des hommes est une preuve vivante de l'Amour du Très-Haut, puisque c'est l'homme comme tel qu'Il nous appelle à aimer et à aider, sans distinction d'appartenance.
Nous savons tous que la pauvreté humilie et qu'elle engendre des souffrances intolérables ; elles sont souvent source d'isolement, de colère, voire de haine et de désir de vengeance. Ceci pourrait pousser à des actions d'hostilité par tous les moyens à disposition, cherchant à les justifier même par des considérations d'ordre religieux : s'emparer, au nom d'une prétendue « justice divine », de la richesse de l'autre, y compris de sa paix et de sa sécurité. C'est pour cela que repousser les phénomènes d'extrémisme et de violence implique nécessairement la lutte contre la pauvreté à travers la promotion d'un développement humain intégral que le pape Paul VI définissait comme « le nouveau nom de la paix » (Lettre encyclique Populorum Progressio, 1975, n. 76).
Dans sa récente Lettre encyclique Caritas in Veritate sur le développement humain intégral dans la charité et dans la vérité, le pape Benoît XVI, prenant en compte le contexte actuel de l'engagement en faveur du développement, met en lumière, entre autres, la nécessité d'une « nouvelle synthèse humaniste » (n. 21). Sauvegardant l'ouverture de l'homme à Dieu, lui redonne sa place « au centre et au sommet » de la terre (n. 57). Un véritable développement, alors, ne pourra qu'être ordonné à « tout homme et à tous les hommes » (Populorum Progressio, n. 42).
4. Dans son homélie du 1er janvier dernier, lors de la Journée Mondiale de la Paix 2009, Sa Sainteté le pape Benoît XVI distinguait deux types de pauvreté : une pauvreté à combattre et une pauvreté à embrasser.
- La pauvreté à combattre est sous les yeux de tous : la faim, le manque d'eau potable, la pénurie de soins médicaux et de logements adéquats, la carence de systèmes éducatifs et culturels, l'analphabétisme, sans toutefois passer sous silence aussi l'existence de nouvelles formes de pauvreté « par exemple dans les sociétés riches et avancées, ...des phénomènes de marginalisation, de pauvreté relationnelle, morale et spirituelle » (Message pour la Journée Mondiale de la Paix 2009, n. 2).
- La pauvreté à choisir est celle d'un style de vie simple et essentiel qui évite le gaspillage et respecte l'environnement et tous les biens de la Création. Cette pauvreté est aussi, au moins pendant certaines périodes de l'année, celle de la frugalité et du jeûne. La pauvreté choisie prédispose à sortir de nous-mêmes et dilate le coeur.

5. Comme croyants, désirer la concertation pour chercher ensemble des solutions justes et durables au fléau de la pauvreté signifie aussi réfléchir sur les graves problèmes de notre temps et, quand cela est possible, vivre un engagement commun pour en venir à bout. En cela, il incombe que la référence aux aspects de la pauvreté liés à la mondialisation de nos sociétés revête un sens spirituel et moral, car nous partageons la vocation à construire une seule famille humaine dans laquelle tous - individus, peuples et nations - règlent leurs comportements sur les principes de fraternité et de responsabilité.


6. Un regard attentif sur le phénomène complexe de la pauvreté nous conduit à en voir fondamentalement l'origine dans le manque de respect de la dignité innée de la personne humaine et nous appelle à une solidarité globale, par exemple à travers l'adoption d'un « code éthique commun ». (Jean-Paul II, Adresse à l'Académie Pontificale des Sciences Sociales, 27 avril 2001, n. 4). Les normes de ce code commun n'auraient pas seulement un caractère conventionnel, mais seraient enracinées dans la loi naturelle inscrite par le Créateur dans la conscience de tout être humain (cf. Rm 2, 14-15).

7. Il semble que dans divers endroits du monde nous soyons passés de la tolérance à la rencontre, à partir d'un vécu commun et de soucis partagés. C'est là un cap important qui a été franchi.
En mettant à la disposition de tous la richesse de la prière, du jeûne et de la charité des uns et des autres, n'est-il pas possible que le dialogue mobilise les forces vives de ceux qui sont en marche vers Dieu ? Le pauvre nous interpelle, nous défie, mais surtout il nous invite à collaborer pour une noble cause : celle de vaincre sa pauvreté !
Bon et heureux ‘Id al-Fitr !
Jean-Louis Cardinal Tauran          Président
Archevêque Pier Luigi Celata        Secrétaire


(1) ROME, Vendredi 11 septembre 2009 (ZENIT.orghttp://www.zenit.org/french - « Chrétiens et Musulmans : ensemble pour vaincre la pauvreté », c'est le thème du message adressé aux Musulmans du monde à l'occasion de la fête de l' « ‘Id al-Fitr » - qui conclut le mois du Ramadan, par le cardinal Jean-Louis Cardinal Tauran, président du conseil pontifical pour le Dialogue interreligieux, et Mgr Luigi Celata, secrétaire du même dicastère. Je souhaite envoyer cette information á un ami  http://www.zenit.org/article-21964?l=french


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