MEXIQUE : Pélerinage spiritain chez les Huaxtèques 
                  
                 
                  (paru dans bulletin JPIC, mars 2009)
                  
                  
                  Un pélerinage spiritain dans le monde des pauvres et des exclus a souvent été le thème des documents de nos récents Chapitres généraux. 
Michel Besse Mendy ( 
miguelbessemendy@gmail.com ), de la Province de France, travaille auprès des Huaxtèques du Mexique. Son partage nous permet de mettre un visage sur ce que nous trouvons dans nos documents.
 
Depuis qu’ils sont arrivés dans la Huasteca mexicaine, les spiritains ont été marqués par le contexte social et économique de cette société indienne traditionnelle. Nos prédécesseurs, débarquant à Tanlajas un jour de marché de février 1972, contemplaient, admiratifs, les paysans descendant des montagnes, courbés sous le poids du café, du maïs, du pain de sucre et des poules qu’ils allaient vendre sur la place du village. Les spiritains qui aujourd’hui se promènent au marché ne voient plus que des vendeurs venus de la ville. Et ce sont les indiens qui viennent, dès que les quelques allocations familiales reçues du gouvernement le leur permettent, acheter les produits de première nécessité. Ce qu'ils produisaient pour la subsistance et pour la vente il y a 35 ans, suffit à peine aujourd’hui pour maintenir ceux de la famille qui n’ont pas encore émigré !
 Le contexte a changé, l'économie s'est mondialisée, le Mexique a passé à marche forcée les étapes de cette modernisation. Quinze ans après l’entrée dans le Traité de Libre Echange d’Amérique du Nord, les taxations sur les produits tels que le maïs et le haricot, dont 30 millions d’Indiens et de paysans mexicains dépendent pour leur survie, ont été supprimées. L’agriculture industrielle a le champ libre, et menace l’agriculture alimentaire. La Huasteca mexicaine, chère au cœur des spiritains, vit cette menace au quotidien.
 Avec son châle sur les épaules, sous l’auvent de sa maison traditionnelle, cette mère indienne huaxtèque médite sur le sort de sa famille. Auprès d’elle son mari, silencieux, écoute. " 
De nos 11 enfants, 9 sont partis travailler à Monterrey et aux Etats-Unis : 5 filles, qui se sont mariées là-bas, et 4 garçons, dont deux ne donnent plus jamais de nouvelles. Des 15 hectares de notre parcelle, 2 sont cultivés : nous n’avons plus la force ". Le père approuve, la tête basse et les épaules courbées sous les regrets. La maman poursuit : " 
Je suis allée a Monterrey pour me faire soigner : celui de mes fils qui est soldat m’a fait entrer à l’hôpital militaire. Il a tout payé, il a une assurance. " Puis, pensive : " 
Là-bas, il a toutes les commodités; ici : rien. Mes fils ne reviendront plus ".
 Au détour d’une conversation avec un jeune papa de deux enfants, qui participe a la chorale paroissiale : " 
Le maïs que j’ai semé cette année ne sèche pas bien. Je ne peux pas le garder comme semence pour l’an prochain. Le maïs traditionnel d’ici passait 6 mois suspendu au dessus de l’âtre, et se conservait bien. Celui-ci ne sèche pas, il se pique et les insectes le rongent. Je ne sais pas pourquoi... et pourtant le programme gouvernemental qui l’a distribué disait que c’était une variété ‘améliorée’. Améliorée, Padre, ça veut dire quoi exactement ? "
 " 
Nous, on veut améliorer notre rendement. Nos enfants sont partis. Nous, on a pris des cheveux blancs... et nos mules aussi ! ", rigolent en chœur les membres d’une équipe de l’Action Catholique Agricole. " 
La canne à sucre est là, nous aussi, avec nos moulins traditionnels à traction animale. Mais on voit clair : la main d’œuvre est rare, et sans moulin mécanisé, on n’entrera pas sur le marché du sucre granulé mascobado. Alors soit on reste les bras croisés et on est finis, soit on se bouge et on obtient ces moulins mécaniques. " Actifs, pleins d’audace pour aller dans les bureaux du Ministère de l’Agriculture, ils ont déjà obtenu la moitié du coût de chaque machine pour les 34 associés !
 Au cours d’une assemblée de doyenné, rassemblant les prêtres de 9 paroisses indiennes de la Huasteca, dont deux sont confiées aux spiritains, le thème d’étude tournait autour de la situation économique à l’heure de la crise financière de fin 2008. Un des prêtres diocésains, de l’ethnie 
nahuatl, rappelait son enfance : " 
Les dindons étaient plus gros que nous, les gosses ! On leur jetait du maïs par brassées, maman avait en réserve du sucre et du café pour toute l’année, et papa, des bras nombreux en la personne de ses fils pour prendre soin des orangers. Aujourd’hui, nous avons peur que reviennent ceux qui ont émigré et qui n’ont plus de travail de l’autre coté (USA), car on s’est habitué à voir les terres sans travail, et à attendre des aides gouvernementales incertaines. On nous a appris à ne plus aimer notre terre, à mépriser le travail des champs. Nos jeunes étudient : c’est pour mieux s’en aller ! Quand ils le peuvent, ils partent en ville... et quand ils ne le peuvent pas, ils partent dans la drogue et l’alcool ! Qui sèmera le maïs de nos pères ? "
 Nous avons entendu que la vie spiritaine est un pélerinage avec un peuple, en présence du Christ. Le pélerinage qui revient aux spiritains de la Huasteca est fait des inquiétudes et des coups que reçoivent des paysans indiens fragilisés par une économie qui les marginalise. Les causes de ces pauvretés sont multiples et complexes. Les réponses, elles aussi, sont multiples et complexes. Formations, associations, accompagnement dans les dédales administratifs, ateliers, ... les quelques moyens dont disposent les spiritains sont mis au service de ces plus pauvres.
 " Sin mais no hay pais ", ("sans maïs, pas de pays"). Cette rime amusante est devenue le slogan d’une campagne de la Caritas Mexicaine. En quelques mots, elle résume la croisée des chemins à laquelle se trouve un pays à l’heure de la mondialisation. Ce qui fait un pays, une terre et sa culture, sa mémoire et la survie alimentaire de ceux qui la peuplent, est-ce une marchandise et un négoce, ou au contraire un patrimoine et une source d’identité ? Vous, confrères spiritains, qui vivez des situations semblables, qu’en pensez-vous ? Quelles solutions avez-vous trouvées ? Comment pourrions-nous nous en inspirer ?
  
              
     
                  
                  HAITI : Interview du P. 
                  Jean-Yves Urfié
                  (parue dans Haïti 
                  Observateur)
                  
                  Père Jean-Yves Urfié est un 
                  prêtre de la congrégation des Pères du Saint Esprit. Il 
                  travailla avec la communauté Haïtienne du diocèse de Brooklyn, 
                  de 1972 a 1986. Il a également été Ancien supérieur 
                  des Spiritains en Guyane et aumônier des immigrants de langue 
                  créole en Guyane. Dans sa longue carrière il a été fondateur 
                  du journal Liberté en Haïti, Ancien Directeur de la section 
                  secondaire du collège St Martial de Port-au-Prince, Ancien 
                  Adjoint du Secrétaire Général à Rome. Il a fondé une 
                  paroisse de montagne à Furcy en Haïti. De France, il a accepté 
                  de répondre à nos questions pour les lecteurs de la colonne 
                  Religion et Société du Journal Haiti Observateurs et les amis 
                  du Centre National.
1) Père Urfié, pourriez-vous 
                  nous donner une brève description de votre enfance et qu’est 
                  ce qui vous a motivé à entrer dans la vie 
                  sacerdotale?
J'ai eu une enfance difficile, car mon 
                  père était prisonnier de guerre en Allemagne. Ce qui m'a 
                  motivé à devenir prêtre, c'est l'exemple d'autres prêtres a la 
                  vie exemplaire, et des témoignages de 
                  missionnaires.
2) Mon Père, voudriez-vous nous 
                  dresser un bref portrait du Père fondateur des Spiritains et 
                  nous parler de sa vision et du but qu'il poursuivait en 
                  fondant votre congrégation? Claude-François 
                  Poullart des Places était le fils d'un homme très riche. Il 
                  renonça à la richesse pour ouvrir un séminaire pour les 
                  séminaristes qui étaient trop pauvres pour devenir prêtres, et 
                  les forma pour aller vers les personnes les plus abandonnées. 
                  J'aime l'appeler "le Saint François d'Assise breton". Il 
                  mourut à 30 ans, tellement pauvre qu'il fut enterré dans une 
                  fosse commune. Son procès de béatification est en cours à 
                  Rome.
 
3) Pour le bénéfice de nos lecteurs, 
                  pourriez-vous nous dire pourquoi vous avez choisi 
                  d’aller exercer votre ministère sacerdotal en Haïti? 
                  Comment est né cet amour extraordinaire 
que vous 
                  portez à notre pays?
Je n'ai pas choisi Haïti. J'y ai 
                  été envoyé par mes supérieurs. L'amour du pays est né de la 
                  vision du courage des paysans et ouvriers haïtiens qui luttent 
                  pour leur survie, et du courage d'un peuple qui s'est libéré 
                  de la dictature des Duvaliers, de Namphy, Sédras, 
                  etc. 
4) Voudriez-vous nous dire les 
                  circonstances qui ont forcé les Spiritains à laisser Haïti et 
                  
nous rappeler les faits des premières heures de cette 
                  expulsion. ?
Les Spiritains étaient très engagés aux 
                  côtés du peuple haïtien pour sa libération. Nous risquions 
                  notre vie en cachant des gens menacés de mort. C'est ainsi que 
                  j'ai hébergé dans ma paroisse un ancien élève de Saint Martial 
                  en le déguisant en diacre. Plus tard, sous la dictature 
                  Sédras, j'ai aidé des personnalités recherchées par l'armée à 
                  s'échapper en République Dominicaine, déguisés en prêtres. Je 
                  crois que le témoignage de l'Eglise doit aller jusqu'à prendre 
                  des risques pour sauver des vies. "Il n'y a pas de plus grand 
                  amour que de donner sa vie pour ceux qu'on aime."
Après 
                  notre expulsion par Duvalier en 1969, nous avons été dispersés 
                  en Afrique et en Amérique. J'étais directeur du Séminaire 
                  Saint Kisito au Gabon, d'où je suis allé rejoindre le Père 
                  Adrien à Brooklyn, ainsi qu'un autre confrère, le Père Emile 
                  Jacquot. Il y avait aussi un prêtre du diocèse des Cayes, le 
                  Père William Smarth. 
 5).- Vous avez été 
                  responsable de la section secondaire de St Martial? Quelles 
                  sont les reformes qu'il faudrait entreprendre pour le 
                  progrès de l'éducation en Haïti? Les réformes 
                  nécessaires sont multiples. Il faudrait d'abord reconnaître 
                  que la langue maternelle des enfants haïtiens est le créole. 
                  Il faudrait faire la maternelle en créole et assurer un 
                  passage progressif au français comme langue secondaire. Ceci 
                  suppose un changement de méthode, de programmes, de mentalité 
                  de la part des parents et de beaucoup de professeurs, qui 
                  s'imaginent que le créole est un "patois" inférieur au 
                  français. Les autres réformes sont également difficiles :
- 
                  il faudrait pour les campagnes des écoles adaptées au milieu 
                  rural, qui permettent aux paysans de passer d'une agriculture 
                  moyenâgeuse à une agriculture qui rapporte, car les jeunes 
                  paysans et paysannes sont trop tentés d'aller grossir les 
                  bidonvilles. Il faudrait en particulier avoir des activités 
                  pratiques sur le reboisement, le bouturage, le greffage, 
                  l'élevage des ovins et bovins, etc.
- il faudrait favoriser 
                  l'enseignement technique: nous manquons d'ouvriers 
                  spécialisés, mais les métiers manuels sont dépréciés...
- 
                  il faudrait une formation permanente des maîtres, dont 
                  certains ne savent même pas écrire une lettre - que ce soit en 
                  français ou en créole -. Certaines écoles borlettes ne 
                  méritent même pas de fonctionner : c'est un vrai 
                  "racket". 
Tout ceci suppose évidemment un État 
                  fort, capable d'appliquer des décisions parfois 
                  impopulaires. 
 6) Pourriez-vous nous 
                  parler de votre expérience à Brooklyn?
et de votre 
                  engagement auprès des refugiés haïtiens des années 
                  70-80? Notre équipe, surnommée les "Haitian 
                  Fathers", travaillait en liaison avec d'autres prêtres 
                  haïtiens, tels que les Pères Carl et Guy Sansaricq , Lubin, 
                  Darbouze, Paddy Poux, etc. Nous avons axé notre ministère vers 
                  les immigrés les plus pauvres, et nous résidions à Cambria 
                  Heights. L'afflux de réfugiés, fuyant la dictature des 
                  Duvaliers, était mal perçu par le gouvernement américain, qui 
                  prétendait qu'il n'y a avait pas de réfugiés politiques 
                  haïtiens, mais qu'ils étaient des réfugiés "économiques". 
                  Pendant ce temps, les USA mettaient en place le corps des 
                  "Léopards" pour renforcer la répression déjà violente des VSN. 
                  Nous avons donc fourni une aide légale aux réfugiés, en 
                  particulier ceux qui étaient en prison, comme à Immokalee 
                  (Floride) ou à Miami. A cette époque, j'accompagnais Maître 
                  Ira Gollobin comme interprète dans les prisons, pour rédiger 
                  les "affidavits" des prisonniers. Le Père Antoine Adrien était 
                  le fer de lance de ce ministère.
Nous aidions aussi les 
                  réfugiés en organisant des cours d'anglais (ESL), en les 
                  accompagnant aux bureaux de l'INS (Immigration and 
                  Naturalization Service), etc. Nous visitions les réfugiés en 
                  prison, surtout à Brooklyn Navy Yard.
Certains nous 
                  critiquaient comme trop engagés politiquement, mais nous 
                  n'avons jamais négligé la pastorale. Au contraire, nos 
                  réunions bibliques hebdomadaires dans plusieurs paroisses 
                  (Saint Teresa, Saint Augustine, Saint Blaise, Saint Francis, 
                  Fourteen Holy Martyrs, Sacred Heart...) ont permis de former 
                  des laïcs engagés dont la foi avait une fondation solide. Nous 
                  avons publié des livres de cantiques et de liturgie très 
                  appréciés, qui étaient rédigés ou révisés par les Père Adrien 
                  et Smarth. Je viens d'ailleurs de rééditer les volumes des 
                  années A et B. 
7) Pourriez-vous nous 
                  rappeler l'origine et l'orientation du journal 
                  " Sèl ". Ce journal a-t-il répondu à l’attente du 
                  peuple de Dieu du Diocèse de Brooklyn et du public 
                  haïtien? Le journal "Sèl" est né d'une décision 
                  d'une douzaine de prêtres de l'Apostolat Haïtien qui 
                  souhaitaient une approche pastorale commune dans le diocèse de 
                  Brooklyn. Il était apprécié jusqu'en Haïti, où on se le 
                  passait sous le manteau, car il n'y avait pas de presse libre 
                  en Haïti sous les Duvaliers. Au début, il était bilingue : 
                  créole-français. Très vite, nous avons publié en créole 
                  seulement, car notre engagement pastoral nous montrait que le 
                  français divise la communauté entre "les gens bien" qui 
                  parlent "la langue de la Sorbonne" et la masse du peuple qui 
                  ne parle que "le patois". L'une des fonctions de l'Eglise est 
                  de libérer les hommes et les femmes de tout 
                  préjugé. 
 8) Vous êtes également connu 
                  pour votre intérêt a l'art Haïtien: la peinture, le 
                  théâtre, la musique. Y a-t-il quelque chose que vous désirez 
                  dire à ce sujet? Le peuple haïtien regorge 
                  d'artistes. C'est d'ailleurs un sujet de débat : pourquoi 
                  Haïti plus que la Jamaïque et Cuba (qui ont de bons musiciens, 
                  mais pas de peintres aussi illustres qu'Hippolyte, Philippe 
                  Auguste, Levoy Egzil et les peintres de Saint Soleil, etc.)? 
                  Comme peintre et musicien, j'ai été ébloui par la richesse de 
                  toutes les formes d'art haïtien. J'étais membre-fondateur d'un 
                  groupe, "Kalfou Lakay" où travaillaient ensemble des peintres 
                  (tels que William Descilien et André Pascal...), des chanteurs 
                  et chanteuses (telle que Myriam Dorismé..), des photographes, 
                  des danseurs et danseuses (telles que Nadine Suréna, Lodz 
                  Deetjen, Martine et Poupette Duval, Wilhel et Marlène 
                  Rouzeau...), des musiciens (Tinès Jean-Louis, Richet 
                  Matthieu...). J'ai aussi fondé une troupe de danse pour 
                  enfants, "Krik Krak", où, en liaison avec Kalfou Lakay, nous 
                  avons pu créer des chorégraphies intéressantes, basées sur les 
                  rythmes traditionnels haïtiens, dont des danses liturgiques 
                  beaucoup plus évoluées que la plupart des "mimes" que l'on 
                  voit pendant les offertoires. A ce sujet, je regrette que les 
                  évêques haïtiens ne poussent pas cette recherche dans le cadre 
                  des commissions liturgiques. C'est une source inépuisable 
                  d'enrichissement de la liturgie, encouragé par les documents 
                  conciliaires. En tout cas, là aussi, l'Église, si elle se veut 
                  incarnée, doit être présente  
 
9) 
                  Pourriez vous nous informer de votre ministère à 
                  Cayenne, en Guyane?
Avez vous été le premier à faire des 
                  émissions créoles dans ce pays?
A combien peut on estimer 
                  la population haïtienne en Guyane?
Il est difficile 
                  d'évaluer la population haïtienne de Guyane. Quand j'y étais 
                  (85-89), ils étaient entre 20 et 25.000, dont les deux tiers 
                  au moins étaient sans papiers, donc vivant dans des conditions 
                  très difficiles. Le ministère ressemblait à celui de Brooklyn, 
                  puisque je m'occupais surtout des sans papiers, c'est-à-dire 
                  des plus vulnérables. Mais je voyageais beaucoup dans les 
                  endroits où ils vivaient, en dehors de Cayenne, i.e. Kourou, 
                  Saint Laurent du Maroni, Maripasoula, Sinnamary... J'avais 
                  deux émissions en créole : l'une d'information à la radio du 
                  parti socialiste le samedi soir, et une émission religieuse a 
                  RFO-Guyane le dimanche matin. C'était le meilleur moyen de 
                  toucher un maximum de gens.
J'ai également fondé la 
                  Paroisse Saint Paul, où j'essayais de mettre ensemble 
                  Guyanais, Haïtiens, Français, Brésiliens, Surinamiens... car 
                  il ne faut pas favoriser les ghettos, mais une insertion 
                  progressive basée sur le respect mutuel des 
                  cultures. 
 10) Pourriez-vous 
                  nous parler du Journal Liberté et des circonstances qui 
                  ont provoqué sa fermeture? 
Il y a presque un 
                  million d'Haïtiens qui lisent le créole, mais les journaux 
                  haïtiens (sauf "Bon Nouvèl") sont publiés en français. C'est 
                  un choix culturel et politique. Je regrette la fermeture de 
                  "Libète" et j'espère que d'autres journalistes haïtiens 
                  reprendront le flambeau, car les créolophones, eux aussi, ont 
                  droit à un journal dans leur langue. Mais cela devient de plus 
                  en plus difficile de publier, car les produits nécessaires 
                  sont liés aux variations du prix des carburants (transport du 
                  papier, encres, électricité, delco, etc...). Peut-être 
                  faudrait-il un site d'information en créole? En tout cas, je 
                  ne regrette pas cette expérience, où j'ai risqué ma vie 
                  plusieurs fois, et qui m'a forcé à me cacher, à cause de la 
                  dictature de Cédras. Chapeau bas devant les journalistes 
                  haïtiens qui ont risqué leur vie à cette époque pour que la 
                  vérité soit dite.  
 11) Vous avez reçu 
                  une fois une décoration des mains du Président Mitterrand. 
                  Vous plairait-il de nous dire pourquoi? 
                   
 "Vanité des vanités. Tout est vanité" 
                  (Proverbes). Je préfère ne pas en 
                  parler.
12) Voulez vous bien nous parler 
                  de votre ministère dans la paroisse de Furcy?
et de votre 
                  engagement dans le reboisement? Ce ministère est 
                  continué par mon successeur, le Père Habens Simon, Spiritain. 
                  Les quatre cyclones récents montrent l'importance de former 
                  les enfants aux techniques de reboisement. Ce travail devrait 
                  être multiplié dans toutes les paroisses et écoles du 
                  pays.
La Paroisse a malheureusement beaucoup souffert des 
                  cyclones : nous avons deux chapelles sans toit, et les paysans 
                  ont perdu presque tous leurs légumes, leur seule source de 
                  revenus. 
13) Voudriez-vous nous parler de 
                  votre expérience d’assistant du Secrétaire Général à 
                  Rome? Rien de bien extraordinaire, car c'est un 
                  travail administratif, mais il m'a permis, au cours des 
                  nombreuses visites des confrères travaillant sur les cinq 
                  continents, d'apprendre beaucoup sur le travail remarquable 
                  que font les Spiritains, avec des ministères qui demandent un 
                  charisme missionnaire spécial, par exemple, auprès des 
                  musulmans au Pakistan et en Algérie, auprès des pygmées en 
                  Afrique, auprès des Vietnamiens, dans les camps de réfugiés en 
                  Tanzanie et ailleurs, auprès des Indiens du 
                  Paraguay... 
14) Avez vous encore des projets 
                  en perspective?
Je travaille maintenant pour aider les 
                  sans-papiers (comme à Brooklyn et à Cayenne). Je suis 
                  également chargé de préparer le tricentenaire de la mort du 
                  Père Poullart des Places, notre fondateur (2 octobre 
                  2009). 
Avez vous un message particulier pour 
                  le peuple de Dieu de la Diaspora et d’Haiti ?
 Mon 
                  message au peuple de Dieu et d'Haïti, c'est d'abord un grand 
                  merci pour tout ce que les Haïtiens et les Haïtiennes m'ont 
                  appris, et pour leur amitié. Je leur souhaite bien du courage, 
                  surtout à ceux qui viennent de subir les 4 cyclones et 
                  tempêtes. J'espère que ceux de la diaspora ne se laissent pas 
                  prendre par la société de consommation, mais qu'ils les aident 
                  toujours généreusement. 
  Merci Père 
                  Urfié de votre gentillesse à répondre à nos 
                  questions.  
                  Frère Buteau (Brother Tob)
;Pour le Centre 
                  National de l'Apostolat Haitien à L’étranger