En Mission   
sur le continent américain
Hot" Du Mexique


Jubilé: 2000 et Canonisation des CRISTEROS

Aujourd'hui,21 mai 2000, au Mexique, le Jubilé va atteindre son sommet : la canonisation à Rome de 27 saints dont 25 " cristéros " martyrs. Que représente ce mouvement dans l'histoire de l'Eglise mexicaine ?
D'après certains historiens la " cristiada " peut être considérée comme le mouvement le plus aigu de la guerre entre l'église et l'état mexicains des années 1926 à 1929. Quelques années après la révolution menée par Zapatta -1910-1921 qui, au nom de " Terre et Liberté " souleva les paysans surexploités contre la dictature de Porfirio Diaz. Finalement Zapatta tomba dans une embuscade tendue par les militaires.

Après Diaz, ce fut le Président Plutarco Elias Calles qui imposa son joug à un peuple frustré dans ses revendications légitimes. De plus, suite à la Constitution de 1917 qui réduisit l'exercice du culte, Calles et son armée empêchèrent même les cloches de sonner et les célébrations de mariages ou autres sacrements.
Devant une telle répression, un mouvement se forma, composé de prêtres, religieuses et laïcs, appelé " los cristéros " ou encore " la cristiada " , entre 1926 et 1929. Certains historiens pensent que Calles voulait en finir avec l'église mexicaine. Il tenta même la formation d'une église nationale. Au nom de quelle idéologie ? Mystère. On dit même qu'il était croyant....

De nombreux prêtres, religieuses et laïcs furent fusillés, dont les 25 canonisés aujourd'hui. Une bombe éclata à l'archevêché de Mexico.
Le mouvement " cristéro " s'organisa dans les états de Jalisco, Michoacan, Guanajuato, Zacatécas et Quérétaro. Il sera défendu ouvertement par l'Asociacion catolica de la juventud mexicana, ou ACJM qui fut fondée entre 1913 etl9l7. Certains optèrent pour la lutte armée contre le gouvernement.
Ce fut aussi l'époque de l'église des catacombes : les messes se célébraient dans des lieux secrets. Si les participants étaient surpris en flagrant " délit " ils étaient tous exécutés! S'ils étaient armés, ils se défendaient jusqu'au dernier.
Pour appuyer ce mouvement " cristéro ", les catholiques organisèrent de nombreuses manifestations, pèlerinages et processions. Pour le gouvernement cela ne représentait guère plus qu' " une réaction des indiens abrutis et fanatisés par le clergé "!!!

Un triste exemple de cette sale guerre : le 31 juillet 1926 voulut occuper " l'église des 7 principes " à Oaxaca . Comme le peuple se souleva, deux soldats furent tués. Réaction brutale du gouvernement : plusieurs personnes furent fusillées. Ainsi, au nom du Christ-Roi et de la Vierge de Guadalupe, les cristéros défendirent leurs églises et leur clergé en utilisant les mêmes armes que le régime de Calles.

DAVID ROLDAN LARA, CRISTERO-MARTYR

David Roldan Lara,le patron de notre paroisse de Tampico fut même le secrétaire de l'ACJM. Né à Chalchihuites le 2 mars 1907 dans l'état de Zacatécas, il travailla dans une mine toute proche et devint l'homme de confiance du patron, un allemand. Chrétien engagé dans l'action catholique, il devint vice-président de la Ligue Nationale de la Défense de la Liberté Religieuse - LNDLR. Avec son curé, le père Batis et les jeunes du village il organisa de nombreuses activités pacifiques. Le maire les accusa de subversion. Le 15 août 1926 un groupe de militaires vinrent le chercher chez lui et l'emmenèrent avec le curé et 2 autres jeunes de la paroisse dans les environs du village. Le curé Batis fut exécuté devant eux, puis ce fut le tour de David et de ses 2 amis. Le biographe précise que David mourut le sourire aux lèvres. Il avait 19 ans.

Fête paroissiale à Tampico

Nous avons fêté David à la mode mexicaine, ce qui veut dire un mélange surprenant de kermesse laïque et de religiosité populaire. Saupoudré de quelques danses techno animées par les ados. de la paroisse.

Durant toute la semaine, nous avons eu droit à plusieurs conférences de religieuses sur la sainteté, sur David et les cristéros et le vendredi une adoration durant toute la journée. Le soir ce sont les séminaristes d'Altamira qui ont animé l'heure sainte avec " Tantum ergo " en espagnol. Je me croyais revenu aux années 60. Mais surprise, après cette journée de prière intense, les ados étaient invités à la disco du coin pour fêter David. Techno jusqu'à une heure du matin.

Samedi : Kermesse toute l'après-midi. Jeux divers. Beaucoup de manger et boissons non alcoolisées, tamales, sopes, tacos divers, avec salade, fromage blanc et chile -piment fort - et coca cola. Spectacle avec les comiques du coin : Los Payasos " Mayin y Chilindrin " .
A minuit mananitas - chants d'anniversaires- chants religieux traditionnels et mariachis. Procession avec bougies etc...

Dimanche 21 mai: Jour des Canonisations des 27 saints mexicains à Rome. Grand Messe solennelle. Sr Andréa , qui vient du même village que David, nous fit revivre rapidement les grandes étapes de sa vie et sa mort.
Puis la fête a repris avec un grand Festival artistique organisé par les différents groupes de la paroisse : les jeunes ados ont repris leurs danses techno du vendredi. La Ligue missionnaire des jeunes nous a fait rire avec un sketch sur l'école où les élèves n'avaient pas l'air très sérieux. Le mouvement des Familles Chrétiennes est venu nous rappeler, sous forme humoristique, le machisme des hommes du coin et la violence familiale qui mériterait un traitement sérieux.
A minuit je suis parti ayant eu suffisamment de musique disco.
Dans les fêes mexicaines on mange et boit beaucoup, mais peu d'alcool dans cette fête paroissiale. On se remue au son des musiques rancheras, mais on ne danse pas facilement en public. Dommage. Le monde paraissait bien content et fier de ses nouveaux saints. Le journal du coin titrait que le Mexique a plus de saints que les autres pays de l'Amérique Latine...

R. S.
mai 2000


Haïti
Des mains contre la fatalité

par Franz Lichtlé


Dans la région de Pont-Sondé marquée par la réforme agraire, entre espoirs et incertitude, Franz Lichtlé organise des fraternités d’Église. Priorité : les jeunes. " Men kontre " fait le pari de les épauler.


P. F. Lichtle

Le carnaval bat son plein. Je suis à Port-au-Prince pour vivre cet événement national avec les jeunes de la capitale et tous ceux de la province qui se sont déplacés pour l’occasion. Dès 6 h du soir, le centre ville grouille de monde. Ils sont tous venus oublier, pour quelques heures, les soucis quotidiens, les problèmes de la vie et les incertitudes de l’avenir. C’est l’ensemble de la population haïtienne qui est représentée là, surtout les jeunes. Toutes les couches sociales sont venues suivre en dansant le char de leur groupe musical préféré en criant à tue-tête les chants composés spécialement pour le carnaval. Cette année ce fut le " Carnaval Tafia " : une façon de ridiculiser le président Préval qui aime bien boire un coup (cette année, il est apparu plusieurs fois en public légèrement éméché). Par extension, le carnaval a critiqué les paroles tafia des responsables politiques et administratifs du pays, paroles sans fondement et sans conséquences…

Coup d’épée dans l’eau

L’ensemble de notre paroisse est très marqué par la réforme agraire qui s’y déroule. Il y a des heureux et des insatisfaits. Il y a des gens qui se donnent corps et âme pour que ça réussisse et il y a ceux qui se laissent corrompre.

On constate des progrès dans l’investissement matériel et les gros travaux d’infrastructure, mais le manque de concertation a fait perdre la récolte à plusieurs centaines de paysans. Espoirs et incertitude. La loi de réforme agraire n’est pas encore votée ; tout cet investissement de plusieurs années d’énergie peut n’être qu’un coup d’épée dans l’eau si les parlementaires font preuve de mauvaise foi comme ils savent si bien le faire, pour des raisons partisanes et financières.

Les champs

La paroisse continue à s’organiser autour des petites fraternités d’Église, dynamiques en certains endroits, endormies en d’autres. Un effort particulier est fait pour accompagner les jeunes couples, fragilisés par la situation d’un avenir incertain, et également par un manque de formation humaine. Parallèlement, nous allons lancer un programme d’accompagnement des jeunes 15-30 ans, pour les aider à se situer dans le contexte actuel : conférences vidéo, échanges, sport, etc. Il s’agira aussi, dans un avenir proche, de relancer les groupes des petits enfants qui ont tendance à s’essouffler.

" Men Kontre "

Je viens de recevoir le compte rendu de la première assemblée générale de la nouvelle association " Men Kontre (lire " main contrée ") Haïti Alsace " du 16 janvier à Soultzmatt. Quelques amis ont décidé, après mes rencontres avec les gens du village lors de mon congé, de créer une association pour soutenir des projets que nous lançons dans la zone de Pont-Sondé. " Men Kontre ", expression créole, symbolise la solidarité à travers des mains qui se rencontrent pour se soutenir mutuellement.

Ces mains tendues les unes vers les autres pour se dire qu’il n’y a pas de fatalité, que nous ne sommes pas seuls dans ces luttes que nous menons, luttes solidaires pour la dignité de l’Homme. Ces mains nous diront aussi que la mondialisation des finances et des biens ne peut pas se faire sans une mondialisation des cœurs des hommes et des femmes.Haiti Ces mains pour briser ces nationalismes stupides et racistes qui gouvernent nos sociétés. Des mains pour dire qu’il n’y a de préférence que pour ceux qui subissent, qui souffrent, qui se meurent, quel que soit l’endroit où ils sont nés, où ils vivent, la couleur de leur peau, l’épaisseur de la bouche, la longueur du nez ou des oreilles, quelles que soient la religion, la conviction philosophique ou la culture… Des mains pour s’opposer aux armes qui tuent, des mains pour s’élever contre les pouvoirs financiers et politiques qui décident de nos existences par simple signature au bas d’un accord. Des mains pour faire exister des utopies, loin des calculs, des chiffres, des obligations de résultats. Des mains pour faire se lever des enfants, des femmes et des hommes, des mains de l’amitié, des mains pour semer la vie.

Vous pouvez contacter Anne-Marie et André Débénath, Association Men Kontre Haïti-Alsace, 14a, rue Wagenbourg, 68570 Soultzmatt.

Franz Lichtlé


Sommaire           Page précédente           Accueil site