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Des bougies pour soigner

Christian Choquereau, originaire de Lille, est arrivé au Mexique en 1988.
Il a été envoyé dans la Huastéca (État de San Luis Potosí).
Aujourd’hui dans la pastorale de la santé, il préside l’association Los Talleres del Espíritu Santo basée à Tampico qui vient en aide aux malades les plus défavorisés


Cérémonies religieuses et dévotion populaire au Mexique sont grandes consommatrices de bougies. Beaucoup de petites entreprises les fabriquent par millions. Toi aussi, depuis 2001, tu t’es lancé dans la fabrication de cierges. Le marché n’est-il pas saturé ?
La fabrication de bougies reste une fabrication artisanale. Ce sont de petits ateliers qui ne produisent pas un grand volume. Mais ils sont très nombreux. Les bougies se vendent sur les marchés pour les particuliers, les fidèles. Nous, nous essayons de créer un marché à partir des paroisses, pour les paroisses.

Tu vends donc des bougies pour gagner de l’argent ?
Oui, et cet argent va à notre association Los Talleres del Espíritu Santo pour aider les malades les plus pauvres. Nous avons imaginé cette source de revenus. Et puisque nous fabriquons pour vendre, nous avons besoin de travailleurs. Les malades, bien souvent, ne trouvent pas de travail à cause de leur maladie (sida, cancer, attente d’une transplantation) mais sont capables de travailler. Ils peuvent donc venir à l’association. Ou bien nous employons quelqu’un qui a besoin d’aider un malade. Actuellement nous offrons 5 postes de travail durant toute l’année ou quinze postes de travail durant quatre mois. Nous aimerions arriver à 15 postes pour une année. Une fois que nous avons réglé tous les frais (matières premières, salaires, équipe de base), il reste encore 700 € par mois que nous utilisons pour payer des traitements. Nous voudrions passer de 700 à 2500 €.

Ce projet est-il appuyé par le diocèse ?
Dans un certain sens, oui, car le diocèse considère notre association comme une œuvre d’Église. Le jour de l’inauguration, l’évêque est venu bénir les installations. Mais c’est quelque chose de nouveau. Une petite entrepris ! Les prêtres ne sont pas habitués à ça !

Et la Congrégation ?
L’association est appuyée par les spiritains, bien sûr. Elle est reconnue comme une des œuvres du groupe spiritain du Mexique. Pour ma part, j’y suis engagé à temps plein. Nous recevons aussi un appui financier de certaines provinces. Aider les plus démunis, les plus abandonnés comme le sont les malades d’origine indigène, n’est-ce pas notre mission ?

En quoi ce service pour des malades est-il un service missionnaire ?
Ce service est vraiment dans la ligne des gens pour lesquels les spiritains sont venus au Mexique. Le pays est catholique. Il est relativement riche. Mais la population d’extrême pauvreté reste la population indienne. Elle devient de plus en plus pauvre. L’écart se creuse avec les Mexicains d’origine espagnole ou métisse. Depuis notre arrivée, nous travaillons avec les Indiens. Le 1er objectif de l’association est l’aide aux familles indigènes. Mais il y a aussi d’autres catégories de gens extrêmement pauvres. Nous prenons ainsi en charge des personnes sidéennes parce que les traitements sont très chers.

L’Association fonctionne maintenant depuis 4 ans. Quelle aide effective a-t-elle apportée ?
Le bénéfice de nos ventes permet d’acheter des médicaments. Les travailleurs, eux, grâce au salaire 2 à 3 fois supérieur au salaire minimum que donne l’État, peuvent aider celui des leurs qui est malade. Il faut savoir qu’au Mexique la famille doit prendre en charge tout le traitement d’un malade hospitalisé. La première année, nous avons aidé 88 personnes. Nous avons tenu ce rythme chaque année. En tout, nous avons pris en charge directement ou indirectement plus de 300 malades.

Les malades ou les membres de leur famille restent combien de temps sur Tampico ?
C’est variable. Cela peut aller d’1 semaine jusqu’à pratiquement un plein temps. Ainsi Josefina est engagée à temps plein. Elle attend un second transplant de rein et travaille à la fabrique depuis trois ans. Dernièrement, nous avons embauché le père d’une fillette. Mais la fillette est décédée au bout de cinq jours. Nous avons donc aidé ce père durant cinq jours. Il est ensuite reparti dans sa communauté.

Tu travailles également dans la pastorale de la santé. Est-ce que cela t’aide par rapport à l’Association ?
Oui, ce sont 2 choses qui vont de pair. Parce que je suis aumônier de l’hôpital général, celui des pauvres, je peux prendre en charge un traitement ou proposer un travail à des gens en grandes difficultés. Avec les contacts que j’ai à l’hôpital, les services sociaux en particulier, je peux connaître ceux qui sont réellement dans le besoin. Je reçois pas mal de demandes d’aide des services sociaux et de la psychologue de l’hôpital. Elle m’envoie des jeunes malades du sida. Avec l’hôpital psychiatrique, c’est pareil. On connaît notre projet. C’est important qu’il y ait cette collaboration. Le contact avec les médecins permet aussi de savoir quelle est la situation exacte des malades. Ainsi nous voyons ensemble comment les aider au mieux et souvent dans l’urgence. Mais nous prenons en compte ce que les familles, de leur côté, peuvent apporter. C’est de l’aide qui se veut respectueuse, non de l’assistanat.

J’ai cru comprendre que vous connaissiez des difficultés ?
Il s’agit de mettre en route une entreprise. Ce n’est jamais évident. Les 1res années sont toujours difficiles pour une entreprise, même petite. Nous devons nous développer encore et fidéliser un certain nombre de clients pour atteindre un point d’équilibre. Il y aura encore des sacrifices et des efforts.

L’association est donc appelée à se développer. Quels sont vos projets?
Une fois que nous aurons atteint notre point d’équilibre, j’espère d’ici quatre ans, nous ne chercherons pas à croître davantage parce qu’en restant petits, nous restons proches.
Cette proximité avec les malades fait aussi partie de l’aide que nous pouvons leur offrir. Pour l’instant, nous devons augmenter notre structure, notre surface pour pouvoir ouvrir les 15 postes de travail dont je parlais. Il faut aussi mieux faire connaître l’association, qu’elle soit davantage appuyée par les laboratoires, les pharmacies, les donateurs ici sur la ville. Nous avons beaucoup d’espoir. Lorsque nous aurons atteint l’autofinancement, nous serons moins dépendants des dons.

As-tu un appel à adresser aux lecteurs de Pentecôte sur le monde ?
L’aide économique est toujours la bienvenue ! Surtout que nous sommes en période de croissance. L’appui économique est important. Le soutien spirituel également !
Propos recueillis par Gilles Pagès

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