Signes et témoins


Adorer avec ses frères


Monique Chavanne

" Tu adoreras le Seigneur ton Dieu,
et c'est à lui seul que tu rendras un culte. " ( Luc 4, 8 )


Cette affirmation puissante de Jésus rappelle les paroles réitérées du Pentateuque, ensemble des textes fondateurs contenant la Loi de Moïse. Tous les Israélites contemporains du Fils de Dieu le connaissaient, le vénéraient et transmettaient ses Paroles de génération en génération.
Jésus, messie de la Nouvelle Alliance, n'est pas venu abolir la Loi. Mais il engage désormais les foules à y discerner l'amour du Père. Il insiste sur le bien-fondé de ce l'on appellera " les dix commandements ". Le peuple n'aura pas d'autre Dieu que Celui qui les fit sortir d'Egypte. Seul il sera vénéré, c'est à dire adoré, acte religieux par excellence. Si l'Exode 20; 3, 5 exprime clairement cet ordre: " Tu n'auras pas d'autres dieux face à moi, Tu ne te prosterneras pas devant ces dieux..." , le Deutéronome 5; 7, après avoir répété l'injonction, parle aussi tout simplement d'amour en 6; 5: " Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de tout ton être, de toute ta force... et ajoute en 18: pour être heureux ..." Tant il est vrai que l'amour magnifie l'adoration, épanouissant le cœur qui se donne.
Jésus présent dans le pain consacré, fut, depuis le commencement du christianisme, l'objet de la vénération amoureuse du peuple, et, en particulier, des saints. Le Fils de Dieu s'étant incarné pour le salut du monde, sa présence eucharistique sur terre est évidemment la source indispensable de la vie. Il faut boire à cette source, sous peine de mourir de soif après avoir en vain tenté de se désaltérer près des idoles. Jésus seul nous conduit au Père, insufflant son Esprit et, par là, sauvant perpétuellement les hommes par la foi.
Jésus présent dans l'Hostie invite, selon les inclinations de chacun, à y contempler son Cœur, source de la rédemption voulue par le Père.. Au treizième siècle, sainte Gertrude attirait l'attention sur ce foyer tout dévoué aux hommes. Quelques quatre cents ans plus tard, Marguerite-Marie Alacoque entendra la douloureuse exclamation: "Voilà ce Cœur qui a tant aimé les hommes..." Pour répondre à l'amour passionné du Christ, beaucoup se mettront à pratiquer ce que l'on appellera " les heures d'adoration ".
Il est néanmoins évident que cette vénération, cet amour, peuvent également s'exprimer à travers les moindres actions de la vie, prière, travail ou détente effectuées pour la gloire de Dieu et le salut du monde. Parce que tout acte d'amour, toute prière, vécue isolément ou dans une assemblée, s'unit immanquablement, dans l'assurance de la foi, à ceux de tous les humains qui cherchent Dieu.
Toutefois, actuellement, sous l'impulsion du Concile Vatican II et, plus récemment du Grand Jubilé, de nombreux groupes de chrétiens redécouvrent, avec une grande joie, la prière de louange et, particulièrement, la prière d'adoration. Dans les petits ou grands rassemblements brillent les lampes de la Présence Eucharistique, à l'abri des chapelles ou en plein air, sous les tentes. A Taizé, à Paray le Monial, des dizaines ou des centaines de jeunes ou d'adultes cherchent ce cœur à Cœur qui donne la vie.
Dans beaucoup de paroisses, certaines soirées mensuelles sont dorénavant réservées à la prière d'adoration, c'est à dire vénération de l'Hostie, accueil de Jésus dans le secret de l'âme. C'est ainsi qu'on peut donner, gratuitement, du temps au Seigneur; du temps, cette denrée si chère et qui passe si vite, qu'on ne peut offrir qu'à ceux qu'on aime vraiment. Tout le contraire du temps perdu!
Ainsi en est-il dans notre Essonne déchristianisée. Dans l'Eglise paroissiale de Saintry/Seine, chaque dernier mardi du mois une adoration est proposée, de 20h30 à 22h aux chrétiens du secteur de Corbeil. Un groupe de laïcs prend en charge, à tour de rôle, une veillée d'abord silencieuse puis guidée par un laïc ou un prêtre. Le sacrement de réconciliation est proposé, ainsi que la communion eucharistique.
A Etioles, dans un prieuré bénédictin, tous les mardi soir, une prière de louange réunit une douzaine de personnes
A Tigery, une soixantaine de personnes des environs et venant parfois de soixante kilomètres se réunissent pour une prière guidée pendant laquelle chacun peut néanmoins s'exprimer.
Dans la cathédrale St-Spire de Corbeil, les veillées appréciées du 31 décembre permettent une adoration centrée sur l'action de grâces et la confiance pour l'année commençante. Dans cette même cathédrale, il faut mentionner chaque mois la prière d'enfants de six à douze ans formés à l'adoration.
A Evry, dans la nouvelle cathédrade de même que dans l'église rurale de Soisy/Seine, une nuit entière d'adoration a été consacrée à la prière pour les vocations.
Les rassemblements de prières peuvent porter des intentions diverses: celles du Pape, celles du diocèse, intercessions pour les besoins de l'Eglise.
Chantées ou accompagnées de musiques, ces veillées proposent bien souvent le sacrement de réconciliation avec Dieu. Réconciliations également entre frères ou prière œcuménique avec des chrétiens séparés. Pour supplier, par exemple, avec le Pèlerin russe orthodoxe: " Seigneur Jésus, fils du Dieu vivant, aie pitié de moi pécheur! " Quoi de meilleur que de s'asseoir silencieusement près de l'Etre aimé et de laisser les âmes parler ?