CHEMINS DE VIE


La prière du P. Laval

Le P. Laval a été homme de prière. Il a connu la plus grande ferveur et des moments de vide et de sécheresse. Mais quel que soit son état intérieur, la prière a toujours été la source de sa vie personnelle et apostolique.

Des années de grande ferveur

Jacques Désiré Laval, jeune médecin à St-André, est un chrétien généreux pour les pauvres, mais il pratique très peu sa religion. Il n'accorde pas toujours le temps nécessaire à son employée de maison pour pouvoir assister à la messe le dimanche. Lorsqu'il se convertit à Ivry-la-Bataille dans l'automne de l'année 1834, il se met à aller régulièrement à la messe le dimanche, il respecte les jours de jeûnes. Il prie et médite beaucoup. Le soir, après ses tournées auprès des malades, il va à l'église où il reste de longs moments à faire oraison. Beaucoup trouvent qu'il en fait trop. Un certain nombre de personnes pieuses déclarent que cela ne durera pas, c'est seulement les premiers temps de la ferveur.
Cette ferveur n'a pas été un feu de paille. Elle a habité le P. Laval pendant tout son temps de séminaire et pendant ses années de ministère à Pinterville. Elle est encore vivante quand il arrive à Maurice en 1841, mais elle va être éprouvée par l'abondance de l'apostolat, et par la fatigue. Elle sera purifiée, et deviendra une force qui animera le P. Laval.

De longs temps de prière quotidiens

Dans une lettre de 1842, début de son ministère à Maurice, le P. Laval écrit : "Tout mon temps libre, je le passe au pied du St Sacrement, et c'est là que je vais me délasser". En 1844, dans une lettre à son supérieur, le P.Libermann, nous trouvons son petit règlement de vie de chaque jour. (p.59-60)
Il se lève à 5h du matin, se rend à la prison pour la prière avec les prisonniers. A 6h moins le quart il entre à l'église pour y faire 1/2h d'oraison, puis 1/2h de préparation à la sainte messe. A 7h il célèbre la messe, après cela il y a 1/2h d'action de grâce. De 9h30 à 10h, il confesse. A 10h30 il récite les petites heures du bréviaire, et lit un peu de la Parole de Dieu. Il prend un quart d'heure pour le déjeuner. Le reste de la journée est consacré à apprendre les prières aux catéchumènes, à confesser, à marier, à baptiser et à visiter les malades. A 4h du soir il s'installe de nouveau au confessionnal. A 7h c'est le chapelet et l'instruction, à 8h il y a une grande prière, suivie de quelques cantiques. Après celle-ci, ceux, qui ne savent pas leurs prières, ou les mystères et les sacrements, restent. Jusqu'à 9h, le P. Laval les enseigne. Puis il ferme l'église, fait une petite prière, prend son souper, et va se coucher.
Depuis trois ans le P. Laval vit sur ce rythme. Le dimanche n'amène pas beaucoup de modification. Il va plus tard à la prison : à 7h, pour la prière et une instruction. Il en revient à 8h30. Il dit son office. Après la grand-messe, il confesse les gens qui viennent des quartiers et des villages des environs. A midi, il célèbre la messe pour les Affranchis, avec une instruction de 3/4h à 1h. Après la messe, chapelet et instruction jusqu'à 3h. Là, il prend un peu de nourriture, puis il retourne à la prison pour la prière, ensuite il y a les vêpres à l'église, puis de 5h à 7h, confessions. A 7h, chapelet et prière du soir.

Cette prière remplit toute sa vie

Voici des journées et des dimanches bien remplis. Nous constatons que chaque jour, le matin, le P. Laval prenait 1h30 de prière personnelle, en plus de la messe. Entre 10h30 et midi, un temps de prière personnelle, et de lecture de la Parole de Dieu, puis sa prière du soir. Le P. Laval, au cœur d'un ministère surchargé, garde ses longs temps de prière, auxquels il s'était habitué après sa conversion. Ils n'ont pas été simplement des excès marquant un début de conversion.
Ceux qui l'ont observé pendant sa prière, ont éprouvé des impressions qu'il est difficile de rendre, selon le témoignage du P. Le Vavasseur. Un autre confrère qui a travaillé avec lui, déclare que le P. Laval, quand il priait, était dans "un recueillement tel qu'on voyait qu'il était, tout en Dieu. Sa vue seule portait à la prière et réveillait dans l'âme des sentiments dont on ne pouvait se rendre compte."
On raconte aussi cette histoire. Le P. Laval était allé se reposer à Poudre d'Or. Il priait dans l'église Ste Philomène. Deux Mauriciens de la haute société, complètement irréligieux, entrent dans l'église. Ils ne songent pas du tout à prier. Ils regardent les objets d'art. Lorsqu'ils virent le P. Laval en prière, l'un des d'eux fut vivement frappé de son attitude, de son recueillement. Un je ne sais quoi, qu'il ne put définir se répandit sur toute sa personne. A partir de ce moment l'image du P. Laval priant ne l'a pas quitté, elle l'a poursuivi jusqu'à ce qu'il se convertisse.
Ces longues heures de prière remplissaient le P. Laval de l'amour de Dieu, qui rayonnait autour de lui. Le P. Le Vavasseur qui a passé la carême de l'année 1846 avec lui, écrit : "On approche de lui ici comme on approche de quelque chose de sacré, avec un respect et une religion dont on ne peut se défendre. Ses enfants le regardent comme le plus grand saint possible..." Cet homme qui impressionne quand il prie, connaît des épreuves dans sa prière. Qui s'en douterait ?

Viennent les temps de la prière difficile

En 1847, dans deux lettres à son supérieur, le P. Libermann, le P. Laval laisse échapper des plaintes et des gémissements, sur ses difficultés dans la prière. Nous retrouvons la même chose dans plusieurs lettres de 1848, puis de temps à autre, plus tard, ces lamentations se répètent, par exemple dans une lettre de 1855.
Mais il semble que dés le début de son apostolat à Maurice, le P. Laval ait ressenti de la difficulté dans sa vie de prière. En 1843, le P.Collin, en route pour la Réunion fit escale à Port-Louis. Il est logé à la cathédrale et passe quelque temps avec le P. Laval. Dans sa correspondance avec le P. Libermann, il rapporte que le P. Laval est accablé par le travail, et qu'il lui a confié que la piété et l'esprit intérieur en souffrent. Dans une lettre à son oncle prêtre, en 1846, le P. Laval signale que sa santé s'est beaucoup affaiblie et "qu'il faut travailler du matin au soir pour les autres et on n'a pas un petit instant pour penser à soi."
Le 4 juin 1847, il écrit au P. Libermann .... " je suis sec et aride, et on ne gagne pas en ferveur dans ces pays de mission où l'on est obligé de se donner tout entier aux autres, sans avoir un tout petit moment pour penser à soi même." L'abondance du travail fait dire au P. Laval qu'il ne trouve pas de temps pour penser à lui-même, alors qu'il prend quotidiennement, chaque matin 1h1/2 de prière, et encore quelques autres moments dans la journée. Il trouve le temps pour prier, mais il ne ressent plus la joie, la ferveur, l'ardeur de la prière comme dans les premiers temps qui ont suivi sa conversion, ou pendant son séjour à Pinterville.
Il exprime cela au P. Libermann dans sa lettre du 14 octobre 1847. "Je n'ai plus cette ancienne ardeur pour la gloire de Dieu et de sa très sainte Mère, me voilà bien affaibli et bien attiédi à cette heure, le corps et l'âme sont fatigués, il me faudrait une bonne année passée au noviciat pour me donner un peu de ferveur, mais cette consolation ne me sera pas donnée, il faudra travailler, piocher jusqu'à la fin de la journée, hélas! quand sera-t-elle finie ? et encore si elle finissait bien pour moi."
Dans sa lettre du 25 janvier 1848, nous trouvons : " Oh ! où sont-ils ces temps si délicieux où le cœur battait continuellement pour le Bon Dieu, où l'on ne vivait que pour Jésus et Marie"
A ce manque de sentiment agréable dans la prière, se joint une autre impression, qui fait terriblement souffrir le P. Laval : il a été infidèle à la grâce de Dieu, à cause du tracas et de l'abondance du travail. Naît en lui la peur de tomber en enfer, d'être damné. Il confie cela à son supérieur, dans la lettre du 25 janvier 1848, après avoir décrit sa lâcheté et son manque d'affection dans la prière.
"C'est le tracas, c'est l'infidélité à la grâce qui nous a mis dans un pareil état, c'est bien dur, mais que la très sainte volonté de Dieu soit faite, pourvu que nous ne tombions pas en enfer, voilà ce que nous demandons, la dernière place du purgatoire nous sommes contents; sacrifier son bien pour le Bon Dieu, ce n'est rien, mais son intérieur, voilà le plus pénible sacrifice."

L'épreuve du P. Laval dans la prière, se compose de l'abondance du travail qui enlève la tranquillité pour la prière, même s'il garde ses temps de prière. De là, vient le regret des moments agréables, auquel se joignent le sentiment d'avoir été infidèle à Dieu, et la crainte d'être damné. Mais au milieu de tout cela, il garde l'attitude essentielle de la prière : faire la volonté de Dieu - "que la sainte volonté de Dieu soit faite" , écrit-il. S'ajoutera plus tard l'expérience de ne plus pouvoir exprimer une prière. Nous avons cela dans sa lettre du 17 septembre 1855 : "Pour nous autres, nos provisions spirituelles sont beaucoup diminuées et presque finies. Il ne nous reste que la foi et la pure foi. Plus de belles et magnifiques pensées ni sentiments. Ce que nous pouvons encore prononcer, c'est le nom de Jésus et de Marie. Ayez pitié de nous" . Relevons ces paroles: " Il ne nous reste que la foi, que la pure foi" et retenons bien que la prière doit nous conduire là.

Viennent aussi les conseils d'un maître spirituel

Dans son épreuve spirituelle, le P. Laval recevra au cours de l'année 1848, une réponse du P. Libermann, qui le réconfortera. Celui-ci l'invite à la foi et à l'abandon en Dieu. E ne s'agit pas de s'arrêter à ses sentiments et à ses pensées dans la prière. Il faut s'émerveiller de la miséricorde de Dieu qui se sert de nous malgré notre faiblesse et notre pauvreté. Plus nous connaîtrons notre nullité, plus nous louerons la bonté de Dieu. Face à nos misères: nous abandonner totalement à Dieu, devenir un instrument entre ses mains, accomplir ce qu'il nous demande de faire, sûrs qu'il nous sanctifiera.
Voici un paragraphe de la lettre du 18 février 1848, du P. Libermann au P. Laval. " Plus vous irez, plus vous comprendrez combien Dieu est toujours miséricordieux. Plus nous connaissons notre pauvreté et notre faiblesse, plus nous devons louer et bénir la bonté divine pour nous, comme aussi plus, nous voyons que Dieu daigne se servir d'un pauvre et misérable instrument pour sauver les âmes qui lui sont chères, plus nous devons nous confondre dans notre néant, et nous fortifier dans le fond de notre âme par une confiance sans bornes à sa divine miséricorde pour nous. S'il sait sauver les âmes en se servant d'instruments aussi misérables que nous sommes, il saura bien aussi sanctifier ses instruments malgré nos pauvretés et nos misères. Usons-nous entre les mains de celui qui nous emploie comme un instrument qui s'use entre les mains de l'ouvrier. Que vous êtes heureux, cher frère, de vous user dans un travail de zèle et d'amour."
 
La vie de prière est un chemin à parcourir

Nous qui admirons tant le P. Laval et qui avons été frappés par sa vie de prière, nous sommes peut-être étonnés qu'il ait connu des difficultés dans la prière. Sachons que celles-ci sont même normales et obligatoires pour quelqu'un qui persévère dans la prière. Que cette découverte nous rassure au milieu de nos difficultés. Et ne rêvons pas d'une prière sans épreuve.
Notre prière doit arriver à la foi pure. Pour cela il nous faut quitter le plaisir de la prière, les sentiments agréables, et les grandes idées sur Dieu. Cela se fera en acceptant la réalité de la vie, et en persévérant dans la prière. Il y aura un temps de regret en se souvenant de l'ardeur et de la joie des débuts, mais il faut s'en arracher. Ensuite vient la crainte d'avoir été infidèles à Dieu, alors que nous maintenons nos temps de prière, et que nous faisons ce que Dieu nous demande d'accomplir dans notre vie. Nous ne sommes pas tombés dans une vie de désordre ou de non-pratique religieuse. Puis arrive une quatrième difficulté, l'impossibilité de formuler une prière. C'est un temps heureux, car c'est le moment où Dieu commence à venir pour agir en nous. Restons calmes. Ayons le courage, comme le P. Laval, de parcourir tout le chemin de la prière.
Sur la fin de sa vie, le P. Laval était plein d'humour et de foi sur ses difficultés dans la prière, surtout, sur celle du sommeil. Il lui arrivait parfois de s'endormir devant le St Sacrement. Il disait : " Mais j'espère que ce sommeil ne déplaît pas à Notre Seigneur; le maître laisse bien dormir son chien à ses pieds .... Comme on se repose bien aux pieds de Notre Seigneur ! Ce paisible repos fait du bien au corps et à l'âme. Quelques minutes seulement suffisent à se remettre; on se réveille l'âme pleine de bonnes dispositions pour le Bon Dieu."


Comment le P. Laval vit son ministère

Lettre du P. Laval à son Supérieur Général, le 25/01/1848

"… Monsieur le Supérieur, ici nous vivons en paix et en union parfaite dans les Sacrés Cœurs de Jésus et de Marie, nous nous aimons les uns les autres comme les enfants de Jésus et de Marie, il manque une seule chose c’est le Supérieur. M. Levavasseur m’a nommé (supérieur), mais le choix n’a pas été bon, et voici pourquoi : 1° parce que je n’ai pas été formé à la vie communautaire ; 2° parce que je ne connais pas la règle ; 3° parce que je ne suis pas un observateur fidèle et exact de la règle, ne l’ayant point pratiquée au noviciat ; 4° parce que je ne me sens pas assez de fermeté de caractère, je préférerais mille fois obéir que de commander ; 5° parce que je trouve ce poste-là très dangereux, si le nombre des missionnaires vient à augmenter ; il me semble qu’un autre serait beaucoup mieux à ma place ; que la très sainte volonté de Dieu s’accomplisse !…
Je ne vous parle pas de ma pauvre âme, elle est bien fatiguée et bien lâche, ne pense presque plus au Bon Dieu, n’aime presque plus Notre Seigneur Jésus, n’est plus tendre et affectueuse envers sa très bonne Mère. Oh ! où sont-ils les temps délicieux où le cœur battait continuellement pour le Bon Dieu, où l’on ne vivait que pour Jésus et pour Marie ? Quelquefois, Monsieur le Supérieur, je regrette beaucoup ces temps-là; … sacrifier son bien pour le bon Dieu, ce n’est rien, mais son intérieur, voilà le plus pénible sacrifice.

Lettre du P. Laval à son beau-frère et à sa sœur, le 13/09/1853

Port-Louis au milieu duquel j’exerce mes fonctions est une grande ville avec ses environs que nous sommes obligés de visiter, contenant environ 30 mille âmes. Il faut instruire, catéchiser, consoler, visiter, et administrer les sacrements à tout ce monde. Jugez maintenant de notre travail. Le bon Dieu pour lequel nous travaillons a béni nos efforts et nous comble de bien grandes consolations et faisant fructifier sa sainte parole ; le pays et surtout les pauvres noirs pour lesquels nous avons été envoyés ici avec quatre de mes confrères, ne savaient pas même s’il y avait un bon Dieu, à notre arrivée…

Lettre du P. Laval à son supérieur général le 17/12/1854.

J’ai grand désir, Très Révérend Père, d’entrer dans vos vues par rapport à la consolidation de la Congrégation, d’y affermir l’esprit religieux et la régularité aux Constitutions, mais je vous avoue avec franchise que je n’ai pour moi que la bonne volonté. En voici les raisons:
1° Je n’ai point été formé à la vie religieuse, n’ayant point fait de noviciat. J’ai fait mon Séminaire à St Sulpice, maisons sans doute très régulière, et puis j’ai mené la vie de missionnaire occupé du matin au soir à catéchiser et confesser de pauvres ignorants.
2° Je n’ai pas non plus assez de fermeté dans le caractère pour imposer un commandement ferme lorsqu’il y a besoin ; il y a en moi une grande timidité, fruit de l’éducation de mes premières années.
3° Je n’ai pas non plus les talents que l’on demande d’un Supérieur ; il faudrait au moins être au niveau de ses confrères, et quant à moi je suis au-dessous ; ce n’est pas de l’humilité à crochet. De là je conclus que pour faire entrer la petite communauté de Maurice dans la réforme désirée, il faudrait nommer un supérieur formé à l’esprit religieux et capable. Si un de mes confrères prenait ma place, j’en rendrais de grandes actions de grâces au bon Dieu et à la très sainte Vierge Marie. Cependant si c’est la volonté de Dieu que je reste à ma place, je tâcherai avec l’aide de Notre-Seigneur de faire le moins mal possible.
4° Pour ce qui est des misères que vous avez apprises… il est vrai qu’elles existent, mais je crois que l’on a un peu exagéré. Ces jeunes missionnaires, arrivant fraîchement, croient qu’ils sont capables de mieux faire que nous autres vieux, ils reçoivent difficilement les avis et conseils, ils veulent marcher un peu par eux-mêmes. Si on veut les conduire avec autorité, on risque de briser tout, il faut beaucoup de condescendance et de patience ; avec ça on vient à bout de beaucoup de choses…
En finissant… permettez-moi de vous demander pardon, dans toute la sincérité de mon cœur, des peines que vous ont fait éprouver les réflexions que j’ai pu faire dans mes lettres… J’ai promis au bon Dieu de ne plus à l’avenir rien dire sur les décisions du Supérieur Général ; je les regarderai comme l’expression de la volonté de Notre-Seigneur ; pardon, pardon, Très Révérend Père, oubliez à mon égard le passé

Lettre P. Laval à son Supérieur Général, 06/09/1859.

J’ai eu le bonheur de faire mes vœux perpétuels à notre église de la Sainte-Croix en la présence de notre Révérend Père Visiteur. Il me semble devant Notre-Seigneur que je les ai faits de bon cœur et avec un bon désir d’être un bon religieux et missionnaire en vivant conformément à nos saintes Règles et Constitutions. Enfant prodigue, me voilà donc de retour à la maison paternelle pour y commencer une vie toute nouvelle et avec la grâce de N.S. Jésus-Christ et le St-Cœur de Marie, réparer toutes les fautes commises comme particulier et surtout comme supérieur contre les règles. Permettez à votre nouveau fils en Jésus-Christ de vous ouvrir franchement son cœur, et de vous exposer toutes les misères passées, sûr que je suis de trouver auprès de vous mon pardon.
Me voilà donc rendu par l’infinie miséricorde de Notre-Seigneur et la divine bonté du très saint Cœur de Marie à la place de simple missionnaire et religieux. Je vais, ouvrier de la onzième heure, m’efforcer de réparer toutes les fautes de ma trop longue supériorité par une vie toute d’obéissance à nos saintes règles et constitutions. Heureux et bienheureux… qui les observera fidèlement

Lettre du P. Laval le 03/11/1860

L’état de ma santé est toujours bien misérable ; manque de force, état nerveux allant chaque jour croissant ; ma grande inquiétude et crainte est que d’ici à quelque temps, à cause de ces accidents nerveux, il me soit impossible de dire la Ste-Messe, la seule consolation qui me reste ; cependant, alors même, que la sainte volonté de Dieu soit faite !
Quant à l’exercice du saint ministère il me devient chaque jour plus difficile, il se réduit à quelques rares confessions. Catéchisme deux fois la semaine pour la première communion du vieux monde. Je garde le parloir où je fais l’office de portier ; ce qui me donne occasion de donner quelques petits conseils aux allants et venants, ce qui est encore un ministère qui n’est pas infructueux tout à fait.
Puis le reste du temps est employé à la méditation de l’Ecriture sainte, lecture de la vie des saints, Office. Et ainsi s’écoulent les jours, les semaines et les mois, un peu trop lentement à mon avis. Le temps paraît bien long à un soldat désarmé ne pouvant plus rien faire pour la gloire de son maître et le salut de ses frères ; …

P. Laval à sa sœur Mme Cadot, 05/09/1864 (il meurt le 9 septembre).

Que le Seigneur Jésus, sa très sainte Mère, vous consolent, ma très chère sœur; eux seuls sont notre consolation sur la terre et dans l’éternité. Ah! puissions-nous jouir promptement de la claire vue de Jésus et de Marie ! J’ai grande hâte de voir la fin des misères de la vie. Je ne crois pas que la fin soit bien éloignée, car je me vois mourir à petit feu. Mes respects, mes amitiés à votre mari, ainsi qu’à tous les parents. Au revoir, chère sœur, dans l’éternité bienheureuse