Parole de Dieu
L'annonce à Marie
Marie et l'Église
P.
Arsène Aubert, spiritain
Le P. Arsène Aubert a été missionnaire en Afrique et
en Guadeloupe. Professeur d’Ecriture sainte,
il a été formateur de prêtres et animateurs de nombreuses sessions de
prêtres, de religieuses et de laïcs.
Le “ Je vous salue, Marie ” reprend les paroles de
l’ange Gabriel. La scène a inspiré des musiciens et des peintres. Après un cyclone,
un marin pêcheur a baptisé son bateau “ Sancta Maria ”. Telle
employée imagine une ménagère qui sent battre son cœur à la joie du secret,
frêle et déjà si important, qu’elle porte et à qui elle donne un nom et un
avenir. La liturgie place la fête au 25 mars, neuf mois avant Noël, calendrier
oblige ! Des missionnaires et autres “ chrétiens engagés ” y
lisent leur histoire. Dans cet article, “ l’annonce à Marie ” guide
nos réflexions sur “ Marie et l’Église ”, soulignant le lien entre
les paroles de l’ange (réjouis-toi, le messie, l’Esprit Saint) et la mission de
l’Église aujourd’hui.
“ Au sixième mois, Dieu a envoyé le messager Gabriel
dans une ville de Galilée nommée Nazareth auprès d’une jeune femme fiancée à un
homme nommé Joseph. Il appartenait à la maison de David. La jeune femme se nommait
Marie.
Il s’est approché d’elle et a dit : Salut, toi que le Seigneur
favorise et accompagne. Ces mots l’inquiétaient. Elle cherchait à comprendre le
sens de cette salutation.
Le messager lui a dit : N’aie plus peur, Marie. Tu as
attiré la faveur de Dieu : tu seras enceinte et tu accoucheras d’un fils.
Nomme-le Jésus. Il sera grand et on l’appellera fils du Très-Haut. Dieu le
Seigneur lui donnera le trône de David, son père. Il règnera sur la maison de
Jacob, éternellement. Il n’y aura pas de fin à ce règne.
Marie a demandé au messager : Comment est-ce possible
puisque je ne vis auprès d’aucun homme ?
Le messager a dit : un souffle saint viendra sur toi et
une force du Très-Haut te couvrira d’ombre. C’est pourquoi celui qui va naître
est saint et sera appelé fils de Dieu. Élisabeth ta parente est enceinte, elle
aussi, dans ses vieux jours, d’un fils. Elle le porte depuis six mois et
pourtant on l’avait dite stérile. Car rien n’est impossible à Dieu.
Marie a répondu : Je suis l’esclave du Seigneur. Qu’il
m’arrive selon ce que tu dis. Le messager l’a quittée. ” (Luc 1, 26-38) (1)
Réjouis-toi, bien aimée, le Seigneur est avec toi.
Les paroles de l’ange Gabriel font allusion au message que le
prophète Sophonie adressait aux pauvres, au “ petit reste ” de son
peuple, rescapé d’une série de malheurs : guerres, invasions, exil, ruine
du temple et de la royauté. Les plus belles promesses de Dieu et les cris de
joie pour ses bienfaits sont souvent chez ceux qui, humainement sans espoir,
“ trouvent refuge dans le nom du Seigneur ”.
“ Je laisserai en ton milieu les humiliés, les opprimés
ils trouveront refuge dans le nom de Yhwh. […] Crie de joie, fille de Sion,
crie d’allégresse Israël. Le cœur en liesse, crie ta victoire. […] Ne crains
rien, Sion. […] Yhwh ton Dieu est dans ton sein, la force qui te libère, il
débordera de joie pour toi, fera silence pour dire qu’il t’aime, sautera de
joie devant toi dans les hourras et les vivats. J’ai réuni les affligés, bannis
de la fête, ils étaient loin de toi. […] Je sauverai les estropiés,
rassemblerai les expulsés, ferai leur louange et leur renom par toute la terre
et sur le sol de leur exclusion ” (Sophonie
3, 12…19).
Qui sont les pauvres dans la Bible ? D’abord ceux qui,
souvent victimes de l’injustice, sont privés du nécessaire pour vivre (maison,
nourriture, santé, vêtement, champs), ils sont ignorés par la loi, la justice,
la société. La parabole du jugement dernier parle d’eux : sans nourriture
ni boisson, malades, étrangers, prisonniers car la fidélité à l’alliance se
mesure sur l’attitude envers eux. Ensuite de cette pauvreté
“ sociale ”, on passe à “ la pauvreté devant Dieu ”, l’homme
conscient de sa fragilité, de sa misère se sait humble, petit, pauvre devant
Dieu en qui il met son espoir. Dieu danse de joie pour les humiliés et les
opprimés dans les hourras et les vivats ! Image peu habituelle, mais
message du prophète aux pauvres de son temps (7è siècle avant JC) et de
toujours.
En Amérique latine, des diocèses choisissent “ l’option
préférentielle pour les pauvres ” et l’expression fait maintenant partie
du langage chrétien. Toujours, des chrétiens ont porté secours aux malheureux.
Les pauvres sont “ nos maîtres ”, disait M. Vincent. Mais il est
arrivé aussi que l’Église soit plus attentive aux conditions de la pratique
religieuse qu’à la justice sociale. Nul ne peut ignorer les appels à la justice
dans le monde. La misère en un pays peut entraîner une crise dans le monde
comme le montrent des événements récents, lutter pour “ Justice et
Paix ” devient une condition de survie pour l’humanité. “ Think
globally, act locally ” (Pense le globe, le monde, agis sur place), dit-on
pour nous inviter à situer chaque problèmes dans une vision globale et à nous
engager là où nous vivons.
L’humble jeune femme de Nazareth fait partie de ces pauvres.
L’ange lui redit le message de Sophonie : “ Réjouis-toi, le Seigneur
est en toi ! ”. Marie montre que les pauvres ne sont pas seulement
les destinataires mais les premiers agents de la mission de l’Église.
L’Évangile de Luc le dit à sa manière en montrant soit la prédilection de Jésus
pour ceux qui sont “ à bout de souffle ”, blessés par la vie, soit
ceux qui comme la “ pécheresse ” ou le “ bon larron ” ont
accueilli Jésus !
Tu concevras un fils ; son règne n’aura pas de fin
La seconde parole de Gabriel à Marie renvoie à la promesse
messianique du prophète Nathan. Vers l’an 1000, le roi David, heureux d’avoir
vaincu ses ennemis, réuni les douze tribus d’Israël sous son autorité et
conquis Jérusalem pour capitale, veut couronner son œuvre par un Temple pour
remercier Dieu et attirer sa bénédiction sur sa royauté. Dieu envoie le
prophète Nathan lui annoncer :
“ Tu n’étais qu’un petit berger et je t’ai fait devenir
guide de mon peuple Israël. Partout où tu es allé, j’ai été avec toi. Tous tes
ennemis, je les ai détruits devant toi. […] Yhwh t’annonce qu’il te fera une
maison.[…] Je ferai surgir après toi un descendant issu de tes reins,
j’affermirai sa royauté. C’est lui qui construira une maison à mon nom et
j’affermirai pour toujours le trône de sa royauté.[…] Devant moi ta maison sera
solide, ta royauté définitive, ton trône à jamais stable ” (1 Samuel 7,8-16).
Nathan joue sur le mot “ maison ” : demeure où
l’on habite, Temple, dynastie comme la maison des Habsbourg. David veut
construire une maison, un Temple à Dieu ; celui-ci lui promet que sa
maison, sa descendance, règnera à jamais. L’alliance de Dieu avec son peuple
comprend désormais l’alliance de Dieu avec la descendance de David.
Le même Nathan reprochera à David d’avoir fait tuer un
officier pour lui prendre sa femme. Plusieurs prophètes ont soutenu le
messianisme, mais tous ont critiqué les injustices et les infidélités du
pouvoir politique. “ N’ont-ils donc pas compris, ces gens qui font le
mal ? Quand ils mangent leur pain, ils mangent mon peuple. Jamais ils
n’invoquent le Seigneur ” (Ps 13, 4 selon la traduction liturgique). Entre
le roi et le prophète, les relations sont difficiles, souvent
conflictuelles !
L’attente messianique est vive chez les Juifs au temps de
Marie, mais la Légion romaine veille et intervient à la moindre menace de
révolte. Pour beaucoup Jésus Messie va libérer son peuple de la domination
étrangère. Les disciples d’Emmaüs disent : “ Nous espérions que
c’était lui qui délivrerait Israël ” (Luc 24,21). Le jour de l’Ascension,
des disciples demandent : “ Seigneur, est-ce maintenant que tu vas
restaurer la royauté en Israël ? ” (Actes 1,6). L’ange annonce à
Marie : tu seras la mère du messie, Dieu lui donnera le trône de David et
son règne n’aura pas de fin ! Pour Luc, c’est clair, Jésus est le Messie
par sa Passion et sa Résurrection, sa couronne royale est une couronne d’épines.
À la Pentecôte, Pierre déclare : “ Ce Jésus que vous, vous avez
crucifié, Dieu l’a fait Christ et Seigneur ” (Actes 2,36), écho de l’Ange
aux bergers à Bethléem : “ Je vous annonce une grande joie, qui sera
celle de tout le peuple : aujourd’hui, dans la cité de David, un Sauveur
vous est né, qui est le Christ Seigneur ” (Luc 2,10s). Par son comportement et surtout par sa
Passion, Jésus rejette le messianisme politique, tentation pour toute religion,
au moins à certaines périodes.
Lors des guerres de religion en Europe, il fut décidé que
chacun suivrait la religion de son roi. Seule la religion catholique (et
royale) était autorisée aux Colonies françaises pour les esclaves. L’alliance
entre le trône et l’autel fut longtemps une réalité de notre histoire, comme ailleurs.
La religion a servi pour justifier la guerre, l’esclavage, la colonisation.
“ Il faut que les personnes et les communautés
religieuses manifestent le rejet le plus net et le plus radical de la violence,
de toute violence, à commencer par celle qui prétend se parer de religiosité,
allant jusqu’à faire appel au nom très saint de Dieu pour offenser l’homme.
Offenser l’homme revient en définitive à offenser Dieu. Aucune finalité
religieuse ne peut justifier la pratique de la violence de l’homme sur l’homme. ”
(Jean Paul II, Assise le 26 janvier 02).
“ Comment cela se fera-t-il, puisque je ne connais
point d’homme ? ”
Question mystérieuse ! Certains voient dans la question
un signe de l’engagement de Marie à la chasteté consacrée. D’autres
précisent : “ A cette époque, le mariage juif se déroulait en deux
étapes. L’engagement, ou fiançailles, consistait en l’échange formel des
consentements devant témoins. Bien que demeurant encore une année chez ses
parents, la fiancée était déjà considérée comme mariée, et l’union ne pouvait
être rompue que par un divorce légal. Après le délai fixé, l’époux prenait chez
lui son épouse et leur vie commune commençait. Marie est donc ici légalement
mariée à Joseph mais n’habite pas encore chez lui ”.(2)
Mais tel est le sens de la question, Marie aurait pu dire : Oui, dans
quelques mois !
Les textes de Luc sur Marie suggèrent peut-être une autre
piste. Les bergers à Bethléem “ ont fait savoir les choses qu’on leur
avait dites sur l’enfant. Tous ceux qui entendaient les bergers étaient étonnés
de leurs propos. Marie retenait soigneusement toutes ces choses et elle les
méditait ” (Luc 2,17-19). Après la présentation de Jésus au
temple : “ Son père et sa mère étaient étonnés de ce qu’on disait
de lui ” (Luc 2,33). Jésus, à douze ans, reste au Temple, “ sa
mère lui demande : Enfant, pourquoi as-tu agi de cette façon envers
nous ? Dans l’inquiétude, ton père et moi nous t’avons cherché. Il
répond : Pourquoi m’avez-vous cherché ? Ignorez-vous qu’il faut que
je m’occupe des affaires de mon Père ? Ils ne comprennent pas ce qu’il
dit. Il est reparti avec eux pour Nazareth. Il leur a obéi. Sa mère a gardé
toutes ces choses dans son cœur ” (Luc 2,48-51). Pendant le ministère
de Jésus, “ sa mère et ses frères sont alors venus le rejoindre. Mais
la foule les a empêchés de l’approcher. On lui dit alors : Ta mère et tes
frères sont dehors, ils veulent te voir. Il leur répond : Ceux qui
entendent et vivent selon la parole de Dieu sont ma mère et mes frères ”
(Luc 8,19-21). Luc ne parle plus de Marie sauf lors de l’attente de la
Pentecôte : “ Tous étaient constants et unanimes dans la prière.
Des femmes se tenaient à leurs côtés, parmi lesquelles Marie, la mère de Jésus,
ainsi que ses frères ” (Actes 1,14).
Marie interroge, s’étonne, médite, ne comprend pas, garde tout
en son cœur, veut voir, prie avec les disciples. Dans la foi, l’obéissance et
la prière, la mère “ cherche ” la mission de son fils.
“ Cherchez-moi et vous vivrez ” (Amos 5,4). Marie a une place
éminente parmi ces “ chercheurs de Dieu ”, Dieu et son fils ! Sa
question à l’ange : “ Comment est-ce possible ? ” (Luc
1,34) semble une étape décisive dans sa “ recherche de Dieu ”(3),
pas encore la dernière ?
L’Église, en pèlerinage, fait partie des “ chercheurs de
Dieu ”. Elle annonce l’Évangile, non comme une vérité mathématique (deux
et deux font quatre !) mais en faisant entendre la voix d’un autre :
“ Viens, suis-moi ” ; à nous aussi, Jean Baptiste dit :
“ Il y a parmi vous quelqu’un que vous ne connaissez pas ”. Signe
d’un Royaume qui la dépasse, sacrement de l’unité toujours à faire entre les
hommes, elle scrute le mystère du Christ et de son projet sur le monde sans
jamais les réduire à des formules, même dogmatiques. Comme Marie, l’Église
donne chair et naissance aux promesses de Dieu dans l’histoire mouvementée des
hommes, cheminant dans la foi, l’obéissance et la prière.
“ L’Esprit viendra sur toi et te couvrira de son
ombre ”
Troisième parole de Gabriel à Marie. Plusieurs y voient une
allusion à la nuée qui remplissait la tente au désert ou au temple.
“ La nuée couvrit la tente de la convocation, et la
gloire de Yhwh emplit la Demeure. Moïse ne pouvait pas entrer dans la tente de
la convocation : oui, la nuée demeurait sur elle, et la gloire de Yhwh
emplissait la Demeure ! Quand la nuée s’élevait au dessus de la Demeure,
les fils d’Israël partaient pour tous leurs départs : si la nuée ne
s’élevait pas, ils ne partaient pas, jusqu’au jour où elle s’élevait. Oui, la
nuée de Yhwh était sur la Demeure tout le jour, et la nuit c’était un feu en
elle aux yeux de toute la maison d’Israël, pour tous leurs
départs ! ” (Exode 40,34-38 ;
cf. Nb 9,15-23).
Après la libération d’Égypte, le peuple traverse le désert
vers la terre promise, longue procession conduite par un “ brouillard
lumineux ”.(4) La
“ tente ” abrite “ l’arche d’alliance ”, coffret contenant
les tables de la loi (Décalogue).(5)
Moïse entre dans la tente et converse avec Dieu “ comme avec un ami ”
(Ex 33,11) et reçoit ses ordres. Quand la “ nuée prend sous son
ombre ” la tente, “ la gloire du Seigneur remplit ” la tente,
“ Demeure de Dieu ”. Des Psaumes chantent Dieu qui “ a choisi
d’habiter son peuple ”.(6)
Le récit de la consécration du temple de Salomon reprend ces symboles :
“ Au moment où les prêtres sortent du sanctuaire, le
brouillard remplit le temple de Yhwh. Les prêtres ne peuvent continuer à
officier à cause du brouillard : c’est la splendeur de Yhwh qui remplit le
temple de Yhwh ” (1 Rois 8,10s).(7)
La Bible souligne l’importance du Temple et critique aussi ses
déviations ! Isaïe y reçoit sa vocation lors d’une cérémonie (Is 6); nous
avons gardé le Sanctus de la messe. Au VIIè siècle, la réforme du roi Josias
interdit les temples de province, accusés de syncrétisme, et centralisa le culte à Dieu au seul Temple de
Jérusalem, “ lieu que Dieu a choisi pour y faire habiter son Nom ”
(Dt 12,4). Jérémie veut restaurer la vérité du culte contre l’hypocrisie et la
magie et faillit y être massacré (Jér 7 et 26) comme Jésus (Lc 19,45s citant
Jérémie). Pour Ézéchiel, l’Exil est un châtiment pour les fautes commises dans
le Temple (Ez 8, 14s) ; mais lors du retour d’Exil jaillira d’un nouveau Temple
un fleuve d’eau vive assainissant la vallée de la mort et la Mer Morte (Ez 47),
symbole repris par Jésus.(8)
Le psautier est le “ livre de chants ” au Temple et reste le
principal livre de prière de l’Église ! Les grandes fêtes d’Israël sont
des pèlerinages à Jérusalem et au Temple. La consécration du temple est
célébrée chaque année (Jn 10,22 : fête de la Dédicace). Le temple, plus
qu’un lieu, est un “ sacrement ” : signe de la Présence de Dieu
au milieu du peuple qu’il s’est choisi ! Aussi chaque destruction du
temple, et particulièrement la dernière par Titus en 70 ap. JC, est un drame,
un scandale : “ Dieu aurait-il oublié son peuple, son
alliance ? ”(9)
Luc parle souvent du
Temple : annonce de Jean-Baptiste (Lc 1), présentation au temple (2,22),
pèlerinage à 12 ans (2,41), Jésus remarque “ l’obole de la veuve ”
(21,1-4), enseigne chaque jour au Temple (19,47 ; 22,53), mais il annonce
aussi la ruine du Temple (Lc 21,6) ! Les chrétiens “ fréquentent
assidûment le temple ” (Act 2,46), les apôtres y viennent prier (Act 3,1)
et enseigner (Act 5,21), de même l’apôtre Paul jusqu’à la fin de sa vie (Act
21). On accuse Jésus, Etienne et Paul de vouloir détruire le Temple !
“ L’Esprit te couvrira de son ombre ”, dit Gabriel à
Marie. Une nuée “ recouvre ” les témoins de la transfiguration (Lc
9,34).(10)
A l’Ascension, Jésus promet aux Apôtres : “ L’Esprit
viendra sur vous, vous serez alors mes témoins ” (Act 1,8). “ Comment
cela se fera-t-il ? L’Esprit viendra sur toi… ” Dieu promet son aide
à ceux qu’il appelle, son assistance pour la mission qu’il leur confie, comme
s’il disait : si je demande quelque chose, je donne la force de
l’accomplir.(11) De plus, le
riche symbolisme de la nuée fait de Marie une nouvelle “ arche
d’alliance ”, demeure de Dieu parmi les hommes. Il en sera de même pour
les Apôtres à la Pentecôte, pour l’Église et toute communauté, pour tout
chrétien : “ Vous êtes le temple de Dieu et l’Esprit de Dieu habite
en vous ” (1 Cor 3,16), “ votre corps est un temple du Saint
Esprit ” (1 Cor 6,19).
La prière fait partie de la mission de l’Église et du chrétien
“ dans l’esprit d’Assise ” : Nous sommes venus à Assise en
pèlerinage de paix. Nous sommes ici, en tant que représentants des différentes
religions, pour nous interroger devant Dieu sur notre engagement en faveur de
la paix, pour Lui demander de nous en faire le don, pour témoigner de l’ardent
désir que nous avons tous d’un monde plus juste et plus solidaire. Nous voulons
apporter notre contribution pour éloigner les nuages du terrorisme, de la
haine, des conflits armés, nuages qui se sont particulièrement accumulés ces
derniers mois à l’horizon de l’humanité. […] On ne dissipe pas les ténèbres
avec les armes; on éloigne les ténèbres en allumant des sources de lumière(12).
Nous ne savons pas prier comme il faut ; alors l’Esprit
vient à notre aide. “ Mon âme exalte le Seigneur. Il renverse les
puissants de leur trône, il élève les humbles. Il comble de biens les affamés,
renvoie les riches les mains vides ”. Marie dans le Magnificat et l’Église
dans sa prière ne séparent pas la louange de Dieu et un regard critique sur le
monde, “ pour un monde plus juste et plus solidaire ”. Dieu alors
dansera de joie au mil
Notes :
-1- Selon la récente traduction :
La bible, Bayard,
Paris, 2001. “ Notre traduction cherche à concilier deux mouvements en
sens inverse : amener le texte dans la culture actuelle et transporter le
lecteur dans le monde de jadis. La langue se veut simple, claire, le plus
possible exempte de technicité, comme il convient à un texte dont les origines
sont populaires ” (A. Myre p. 2995). Cette traduction, qui n’est pas pour
la liturgie, fait réfléchir. J’ajoute parfois la ponctuation pour faciliter la
lecture et donne les sous-titres selon les traductions plus habituelles.
-2- P. Létourneau, dans
Bible de Bayard p. 3008.
-3- Le récit de l’annonciation rappelle les vocations
bibliques. De plus Luc rapproche divers textes bibliques. Cette manière de
raconter en citant divers textes bibliques, fût-ce par allusion, est nommée
midrash,
dérivé de
darash qui signifie
chercher.
-4- La nuée conduit le peuple vers la terre promise,
l’Esprit conduit les chrétiens vers la pleine vérité de Jésus (Jn 16,13)
-5- Du latin “ tabernaculum ” (tente) vient
“ tabernacle ” : pour le chrétien “ le Christ est la fin de
la Loi ” (Rom 10,4).
-6- On connaît le refrain : “ Voici la demeure
de Dieu parmi les hommes ” et aussi : “ Le Verbe s’est fait
chair et il a habité parmi nous ”, bien traduit dans la
Bible
Bayard : “ La parole a pris chair, parmi nous elle a planté sa
tente ” (Jean 1,10).
-7- La prière de Salomon (1 Rois 8, 22-53) dit le sens du
temple : signe de la présence de Dieu au milieu du peuple choisi.
-8- “ Si quelqu’un a soif, qu’il vienne à moi et
qu’il boive celui qui croit en moi, selon le mot de l’Écriture : de son
sein couleront des fleuves d’eau vive ” (Jn 8,37s).
-9- Cette nostalgie du temple se voit au “ Mur des
lamentations ” à Jérusalem. Jean-Paul II a prié devant le Mur des
Lamentations et déposé dans une fissure de ce Mur une prière de pardon. Ce fut
un des gestes symboliques les plus forts de son pèlerinage au Proche Orient.
“ Le Pape s’est fait, d’une certaine manière, ‘juif avec les juifs’ en
entrant dans leur symbolique religieuse ”, écrit le Cardinal Martini.
-10- Une note de la TOB explique : “ Comme en Lc
1,35 [annonce à Marie], ce mot indique une venue de Dieu à la manière de ses
manifestations au peuple de l’Exode (Ex 40,35 ; Nb 9,18.22 ;
10,34) ”.
-11- St Augustin disait : Commande ce que tu veux,
donne ce que tu commandes ! Jube quod vis, da quod jubes !
-12- Pape Jean Paul II lors de la rencontre de prière à
Assise le 26 janvier 2002.