Accueillir le mystere



Suivre le Christ jusqu’au bout



  P. Jean Savoie, spiritain


            Le Christ Jésus dans l’Evangile appelle à le suivre, en ajoutant parfois de le « suivre jusqu’au bout ». Cette précision exprime certes la manière radicale que mérite la suite du Christ. Il nous faut cependant éviter de la réserver à quelque circonstance exceptionnelle, qui ne nous arrivera peut-être jamais. C’est la loi de l’Evangile, tout simplement parce que c’est la loi de l’amour véritable. Et donc l’invitation s’adresse à nous tous aujourd’hui, comme elle s’est adressée à tant d’autres, en telle ou telle circonstance biblique. Aimer n’a pas de bout, ni spatial, ni temporel. L’amour est comme Dieu, toujours là et toujours au delà.

I.Dans la Bible

       « Jusqu’au bout » se trouve souvent dans le contexte de la « suite du Christ » comme une vocation spécifique : « ils restèrent avec lui ce jour là » (Jn 1,35) ; « Laissant tout, ils le suivirent » (Mt). C’est le « suis-moi » de la vocation apostolique. Jésus vit Pierre et lui dit « suis-moi »
          Quand les gens ne veulent plus écouter Jésus ‘et cessent de marcher avec lui’ après l’annonce du mystère du pain de vie qui est son corps à manger, Jésus dit à ses disciples : « et vous, voulez-vous aussi me quitter ? », voulez vous vous arrêter là, sans aller jusqu’au bout ? Je suis le bon pasteur, mes brebis écoutent ma voix et elles me suivent, je veux les mener à la vie…

          Saint Jean (Jn 13, 1) présente Jésus à la veille de  sa passion,  « ayant aimé les siens qui étaient dans le monde, il les aima jusqu’au bout ». À Pierre encore (Jn 20 et 21), Jésus adresse un deuxième suis-moi : Jésus dit à Pierre : « un jour vient où quelqu’un te mettra la ceinture pour te conduire où tu ne voudrais pas : suis-moi ! À propos de St Jean  qui disait-on ne mourra pas, Jésus dit encore à Pierre : « s’il me plait de le laisser sur terre, que t’importe, toi, suis-moi ».

II. Accueillir cette Parole de Dieu 

a) Suivre le Christ est la marque de toute vie chrétienne. Cette suite est faite d’écoute de sa parole, de confiance en Lui, de paroles de la vie éternelle. Elle est faite aussi d’adhésion effective à lui, de communion affective et même d’incorporation, pour être, en Eglise, le Corps du Christ, gage de vie éternelle. Quitter le Christ, c’est ne plus croire !

b) Il y a beaucoup de façons de suivre le Christ : ce sont les degrés de la radicalité de l’Evangile.  Certains l’ont suivi dans la radicalité de la prière : des croyants, des religieux et religieuses, des moines et des mystique. D’autres ont choisi de le suivre dans la radicalité de la pauvreté : celle du riche, celle du pauvre, jésuite ou chartreux
            D’autres encore ont voulu le suivre dans la radicalité de l’obéissance : le  dominicain ou la carmélite, par exemple. Ou dans la radicalité de la charité : comme Mère Teresa ou Charles de Foucault.
            D’autres enfin sont allés très loin dans la radicalité du témoignage : comme les martyrs d’hier et d’aujourd’hui ou les moines de Tibhirine

c) Suivre le Christ « jusqu’au bout » est une forme de la radicalité évangélique : jusqu’au bout du chemin, tout le parcours de l’existence avec ses détours, méandres etc ; jusqu’au bout du temps, toute sa vie ; jusqu’au bout de l’appel : ne plus s’appartenir mais laisser l’Esprit nous conduire ;    jusqu’au bout de soi-même ; jusqu’au bout de l’offrande pascale du Christ. Il y a pourtant un bout à cette suite du Christ : c’est l’état d’union parfaite avec lui dans la résurrection et l’état des bienheureux, mais c’est là un don de l’Esprit, et non une attitude morale.

d) Suivre le Christ jusqu’au bout  en communauté.
            Il me semble qu’à l’intérieur d’une même communauté, il n’y a pas de différence de principe dans l’appel entre les personnes : chaque membre suit l’appel de tous, selon la règle de vie, la consécration, la mission. Mais, bien sûr, chacun le suit à sa façon, au rythme de sa grâce, de son appel personnel, plus qu’au rythme des fonctions confiées. Là, plus qu’ailleurs, il nous demande la fidélité les uns pour les autres, et les uns par les autres.
            C’est bien là le fin mot ou le mot de la fin que cette fidélité, elle est à inventer tous les jours. Fidélité à Dieu Trinité, à l’Esprit, au Christ, à l’Eglise, à la communauté, à notre vocation, à notre mission.

III. Des fidélités d’aujourd’hui.

            La fidélité à l’appel du Christ prend des formes diverses selon les lieux et les époques de la vie de l’Eglise. Nous sommes à un moment où la grâce de l’Esprit touche des personnes de tout âge, de toute condition et de tous les continents. Nous en avons retenu quatre. Puissent ces exemples nous renforcer dans la foi en l’action de Dieu partout dans le monde, et particulièrement chez les jeunes. La préface liturgique des Saints nous y invite : « Dieu, tu es glorifié dans l’assemblée des saints. Dans leur vie, tu nous procures un modèle, dans la communion avec eux, une famille, et dans leur intercession, un appui : afin que, soutenus par cette foule immense de témoins, nous parcourions jusqu’au bout l’épreuve qui nous est proposée et recevions avec eux l’impérissable couronne de gloire, par le Christ Notre Seigneur. »  ¨