Vie chrétienne
Dialogue
La rencontre des jeunes de
Taizé.
Dialogue avec le Père Jean Varone, spiritain
Esprit Saint: Père Jean Varone, vous exercez votre
ministère à Genève et vous avez reçu 220 jeunes du pèlerinage de Taizé, à Noël
dernier, dans votre paroisse. Pouvez-vous nous dire votre impression générale?
P. Jean Varone: Je venais d'arriver
dans une paroisse de Genève en septembre dernier et on me dit aussitôt qu’un
grand événement était prévu en fin d’année : la venue de 40 000
jeunes de Taizé pour leur
pèlerinage de
confiance. On a donc préparé cette venue jusqu’à qu'à Noël en nous
demandant comment cela allait-il se passer. La préparation s’est faite avec
toute la paroisse et les gens se sont vraiment mis en route pour préparer cette
grande arrivée de jeunes. Mais nous savions bien que c'était un événement
important d'abord pour la communauté de Taizé car Roger Schultz a commencé ici
à Genève, et un événement important aussi pour les chrétiens de Genève car le
but de ce pèlerinage était d'éveiller les communautés chrétiennes.
ES: Cette rencontre de jeunes
sur des questions religieuses a-t-elle produit un grand impact ?
JV: L'impact premier est
certainement sur les gens qui les ont reçus, car ces jeunes logeaient dans les
familles et ce sont les familles qui ont été les premières bousculées et
heureusement étonnées de voir tant de jeunes prier ensemble et donner un tel
témoignage de paix et de réconciliation.
ES:Tous les gens ont-ils
accepté cette démarche de paix de réconciliation ?
JV: oui, l'impression que j’ai
eu moi-même, c’est de rencontrer des jeunes au coeur très ouvert et au visage
souriant. Malgré la fatigue du voyage et l’agitation de l'installation, aucun
énervement n'est apparu ; tout est resté calme, tout est resté sourire.
ES : ces jeunes situent-ils
leur démarche dans une simple rencontre entre eux ou à un niveau plus spirituel ?
JV : ce que j'ai constaté c'est qu’ils s’impliquent dans la rencontre
des autres au niveau fraternel mais celle-ci amorce une relation plus
spirituelle. J'ai été très étonné de voir dans la paroisse tous les matins des
jeunes qui logeaient chez nous, assister à la prière : tous étaient
présents et le moment de partage sur les thèmes proposés était très suivi.
ES : dans le contenu du
pèlerinage, quels thèmes ont été développés.
JV : Le fond de la session
avait été préparé par une lettre du frère Alois, responsable actuel de Taizé,
sur la pauvreté et la réconciliation
.
Même si le contexte venait d’Amérique latine, chacun pouvait transposer à la
réconciliation dans sa vie et à la réconciliation autour de lui. La lettre
portait sur la pauvreté mais elle invitait à une conversion personnelle, pour
être actif dans cette pauvreté. Ce qui a beaucoup frappé nos paroissiens c’est
que les jeunes ne se posaient pas tant la question de savoir qui était
protestant, qui catholique, ou qui orthodoxe ; mais comment pouvons-nous
vivre une vie intense entre nous et devant Dieu, sans mettre des étiquettes sur
les personnes. Leur préoccupation était bien une rencontre spirituelle. Dans
leur prière, une grande place était toujours faite au silence. 40 000 jeunes
en silence, méditaient sur un texte proposé, pendant près d'un quart d'heure,
c'était vraiment impressionnant.
ES : On sent bien que ces
jeunes vous ont laissé une profonde impression. Comment expliquer cette
influence si profonde auprès des gens de Genève ?
JV : c'est certainement la
préparation de leur venue dans nos paroisses qui a fait naître beaucoup
d’attente de la part des paroissiens l'arrivée des jeunes a provoqué une
certaine contagion d’ouverture, les uns par rapport aux autres. Les gens ont vu
qu'on pouvait communiquer sur des
choses essentielles sans même toujours se comprendre, parce qu’on portait tous
la même foi et le même désir de vivre.
Le plus important était donc cette fraternité humaine qui a frappé les
paroissiens et qui les a même bousculés. Ils ont été mobilisés et bousculés
dans leur foi en constatant que notre manière de prier oublie parfois le
silence de la méditation, c'est-à-dire l'essentiel. Ils ont découvert aussi ,
qu’on peut apprendre à méditer la parole de Dieu.
ES : Ce quart d'heure de
silence, les jeunes en ont-ils fait un quart d'heure de prière ?
JV : Oui, la prière était très
simple : on commence par une lecture biblique, on poursuit par un
chant avec un refrain. Une parole très
courte ou une antienne introduit à la prière et le silence commence sur le
thème de la réconciliation entre chrétiens et entre peuples.
ES : Ne pensez-vous pas que ce
genre de rencontre à un impact sur la vie de l’Église et sur la vie du
monde ?
JV : tous les chrétiens qui ont
participé à ces rencontres se sont trouvés marqués par l’atmosphère. Comment
tant de jeunes peuvent-ils être réunis sans le moindre débordement ? Les
gens ont été frappés de cette ambiance et du bon esprit qui a régné pendant les
4 jours dans la ville. Un chauffeur de tram m’a exprimé son étonnement devant
le bon déroulement de la rencontre, alors qu’il éprouve plus d’inquiétude pour
la rencontre de football du mois de
juin prochain
Dans beaucoup de paroisses, les gens
ont été interpellés et se demandent comment faire pour qu’ils puissent
recevoir la Parole de Dieu comme ces jeunes l’ont reçue ? Nous allons
avoir dans les mois qui viennent, une prière ressemblant à celle de Taizé, de
manière oecuménique car les jeunes de nos paroisses veulent continuer cette
manière de prier et ces témoignages oecuménique des jeunes. La majorité des
gens de la paroisse sont entrés dans cette esprit. Catholiques et protestants
ont accueilli cet événement comme un cadeau des jeunes. Nous avons apprécié le
fait que le 30e anniversaire de ces rencontres de Taizé, qui avaient commencé à
Genève, soit célébré ainsi à Genève.
ES : -- On constate parfois
dans l'Église aujourd'hui une certaine torpeur
et même une baisse de la
pratique chrétienne, le passage des jeunes rassemblés par Taizé peut-il adresser
un signal à notre Église ?
JV : C'est même plus qu'un
signal, c'est un véritable réveil de conscience pour sortir de cette torpeur,
qui nous a été adressé par les 220 jeunes qui logeaient chez nous. D’ailleurs
tous les jours des paroissiens sont aussi venus prier avec ceux qui logeaient
chez nous. Il y avait beaucoup à recevoir dans la foi de la part des jeunes
nous avons bien vus ; le mot d'ordre à la sortie était : « ce que
vous avez vécu ici, allez le vivre dans vos paroisses ». Nous avons déjà
constaté que les paroissiens de Genève ont commencé à vivre cela. En le
reproduisant là où nous sommes, l'esprit et le contenu des journées de Genève
pourront se continuer
ES : Que votre conclusion mobilise aussi les lecteurs de la revue
Esprit Saint. Merci aux jeunes et à vous, Père Varone.
Taizé Genève 2007 en chiffres
. Participants: 38475 jeunes issus de 55 pays étaient inscrits à la
Rencontre européenne. Environ 10000 venaient de Suisse, 9131 de Pologne, 2800
de France, 2205 de Roumanie, 2151 d'Italie et 2078 de Croatie. Citons encore
1200 Allemands, 1267 Lituaniens, 1400 Serbes et 1168 Ukrainiens. D'autres
participants sont venus de destinations plus exotiques, comme la
Nouvelle-Zélande [1], le Kenya [4], les Philippines (5) ou le Mexique [1 J. A
la grande satisfaction des frères de Taizé, 90% des jeunes ont été hébergés
dans des familles jusqu'à Montreux et Yverdon-les-Bains.
. Transports: sans l'effort
des CFF, le rassemblement n'aurait pu avoir lieu à Genève, «Alors que le budget
moyen de l'ensemble des cinq jours tournait autour de 40 euros (66 francs) par
jeune, les transports par les CFF et les autres compagnies n'ont coûté que 22
francs», se félicite Mgr Rémy Berchier, vicaire général du diocèse de Lausanne,
Genève et Fribourg et membre du groupe de pilotage pour l'organisation de la
Rencontre.
. Nourriture: avec un budget d'un euro par repas et par personne,
aucune entreprise suisse n'a pu fournir la subsistance qui a finalement été
importée d'Italie. Une grande chaîne de restauration suisse a accepté de
réchauffer et de livrer les repas à Palexpo, le service étant assuré par les
jeunes eux-mêmes. Pour le thé, le matériel mis à disposition par l'armée a
coûté quelque 18 centimes par personne et par jour, sans entorse aux lois et
règlements militaires.
. Palexpo: le directeur de Palexpo, Claude Membrez, a fourni
l'outil essentiel: un lieu de rassemblement pouvant accueillir 40000 personnes
dans une seule salle. Une collaboration qualifiée de «géniale» par les
organisateurs: M, Membrez leur a ouvert les portes et a loué les locaux à prix
coûtant.
. Audience TV: en plus des participants, 26 000 personnes ont suivi
la veillée de prière du dimanche soir à 19h sur TSR2, soit 5% de parts de
marché. Benoït Dumas
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