M. JACQUES-MAGDELEINE BERTOUT
RESTAURATEUR ET 6e SUPÉRIEUR DE LA CONGRÉGATION
ET DU SÉMINAIRE DU SAINT-ESPRIT[1] (1)
(23 Mars 1805-26 sept. 1809)
(3 févr. 1816-10 déc. 1832
Naissance. - Études. - Prêtrise. - Admission. - Émigration.
M. Jacques-Magdeleine Bertout naquit le 3 mai 1753, au hameau de Niembourg, paroisse de
Halinghem, Artois, diocèse de Boulogne, d'Antoine et de Benoîte Duflos, soeur de MM.
Duflos : il était donc, le neveu du cinquième Supérieur de la Congrégation. Après ses
premières études, il vint à Paris pour y faire sa rhétorique. Son oncle, alors
directeur au Séminaire, voulant l'avoir sous les yeux pour le préserver des dangers de
la vie de collège, obtint de M. Becquet la permission de le loger dans la maison. Sa
rhétorique achevée, à la rentrée d'octobre 1773, il compta parmi les séminaristes et
commença son cours de philosophie. Il éprouvait un vif attrait pour les Missions
étrangères et, à la fin de ses études, il alla soumettre cet attrait au jugement de
son évêque Mgr de Pressy ; ce sage prélat lui conseilla de s'essayer d'abord dans les
Missions coloniales. Ordonné prêtre à Boulogne le 24 mai 1777 par Mgr de Pressy, il
rentra au Séminaire du Saint-Esprit et fut admis à l'épreuve en juillet 1777. C'est
pendant ce temps de probation qu'il fut, en 1778, destiné à accompagner à la Guyane
française l'un des membres de la Congrégation, M. Deglicourt, à l'effet d'y prendre,
possession d'un domaine offert par le ministre de la Marine et des Colonies pour
l'entretien de la Mission et du collège[2]. Leur naufrage au cap Blanc, le 20 mai 1778,
et l'affreux esclavage qui s'ensuivit, firent évanouir ses projets de Mission. De retour
au Séminaire le 26 septembre, M. Bertout, continua son noviciat et fut admis au nombre
des associés le 23 juillet 1779. Professeur de théologie, d'abord au séminaire de
Paris, puis, de 1785 à 1787, à celui de Meaux, il fut, le 17 juillet 1787, nommé second
assistant.
Contraint de quitter la capitale par le décret tyrannique et spoliateur du 18 août 1792,
il se retira dans sa famille. « Caché dans la ferme paternelle à Niembourg, écrit
l'abbé Lefebvre, ce bon prêtre se dévoua au bien spirituel des habitants, baptisant et
instruisant les enfants et portant en secret les derniers sacrements aux malades. La
tradition du pays rapporte que, pendant la nuit, il réunissait dans une grange les
fidèles qui désiraient entendre la messe et recevoir la communion. Les patriotes le
dénoncèrent : il fut obligé de s'éloigner. » Pour se mettre en sûreté, il trouva le
moyen d'obtenir à Boulogne, un passeport qui le mit en état de passer en Angleterre.
C'était le 10 septembre 1792, une époque des plus terribles pour les prêtres. Bien que
le danger d'être arrêté fût sans cesse devant ses yeux, il parvint néanmoins à
embarquer et à traverser la Manche sans aucun accident fâcheux.
Arrivé en Angleterre, M. Bertout se mit à étudier la langue anglaise avec la plus
grande ardeur, moins pour se créer des ressources que pour se rendre utile aux âmes. Le
Séminaire conserve encore, dans ses Archives, des cahiers qui témoignent du zèle
apostolique que le saint prêtre déploya dans son exil. Ce sont quatorze instructions,
écrites en anglais de sa propre main. Le comté d'York fut le principal théâtre de son
apostolat. Son séjour en Angleterre fut assez long, près de dix ans. Mais, après la
signature du Concordat de 1801, M. Bertout, comprenant que le devoir le rappelait en
France, quitta l'Angleterre, probablement au début de 1802, car, parmi les sermons en
anglais, il y en a encore un pour le dimanche de l'octave de Noël 1801.
S'est-il, alors, rendu directement dans sa famille à Niembourg? Nous l'ignorons; quoi
qu'il en soit, il devait lui tarder de se diriger vers Paris, pour se rendre compte de la
situation du séminaire ainsi que de celle de son oncle et de ses autres confrères. Comme
son âme dut être désolée à laspect des immeubles en la possession d'étrangers,
en voyant son Supérieur infirme, aveugle, presque tombé en enfance, la Congrégation
dispersée ! Mais, plein de confiance en Dieu, il conçut le dessein de faire revivre ce
cher Institut et de reconstituer l'oeuvre du séminaire du Saint-Esprit. A cet effet, il
eut recours à l'influence de diverses personnes; il fit démarches sur démarches auprès
du Gouvernement du Premier Consul. Des difficultés qui paraissaient insurmontables se
dressèrent devant ses projets; mais rien ne fut capable de l'arrêter ou de le
décourager. Une lettre, adressée à M. Portalis le 22 mai 1804, semble indiquer qu'il
avait pris son logement chez Fabbé Guérin, rue des Postes, n°13, c'est dans cette même
maison qu'avait logé M. Pichon, procureur du Séminaire, du 18 octobre 1797 à 1800,
époque à laquelle celui-ci put y rentrer et où il décéda pieusement, le 14 novembre
1810, à l'âge de soixante-trois ans. M. de Boulogne publia, dans ses Mélanges de
Philosophie... suite des Annales Catholiques, etc. t. IX, p. 464, un article nécrologique
des plus élogieux sur cet ancien membre de la Congrégation
Décret du 2 germinal an XIII. - Petit Séminaire.
Lorsque Pie VII vint à Paris (28 novembre 1804), pour le sacre de Napoléon, il était
accompagné de plusieurs cardinaux et prélats de sa Cour. M. Bertout eut des rapports
avec quelques-uns d'entre eux, en particulier avec les cardinaux di Pietro, Oppozoni,
Gabrielli, Gregorio, etc., et Mgr Fontana, secrétaire de la Congrégation des Affaires
ecclésiastiques extraordinaires. Conformément aux désirs du Souverain Pontife, sur la
proposition de M. Portalis, la Congrégation des Lazaristes venait d'être rétablie par
un décret du 7 prairial an XII (27 mai 1804). Après le sacre (2 décembre 1804), Pie VII
fit rédiger en langue italienne, par un prélat de sa suite, un mémoire où étaient
articulées ses propositions. D'après le rapport qu'en fit à l'Empereur le même
Portalis, chargé des Cultes depuis le 10 juillet 1804, quelques-unes de ces demandes
subirent de vives oppositions, celles-là surtout qui concernaient le retrait de la
Déclaration de 1682 et la suppression des articles organiques. Le Pape fit alors rédiger
un nouveau mémoire sur lequel Portalis fut également chargé de présenter un rapport
(19 février, 21 mars 1805). Bien que l'article 7 du mémoire stipulât le rétablissement
des Congrégations, il n'y était pas nommément question du SaintEsprit. Mais la
réponse de Portalis à l'article 10 étendait aux deux Séminaires des Missions
Étrangères et du SaintEsprit la faveur accordée à Saint-Lazare.
Voici le texte de cette réponse :
ART. 10. - « Il existait en France trois établissements consacrés aux Missions : les
prêtres Lazaristes, le Séminaire des Missions Étrangères et celui du Saint-Esprit.
Indépendamment de ces établissements, plusieurs Ordres religieux, tels que les
Récollets, les Capucins et autres s'étaient voués aux Missions. Le décret impérial du
7 prairial an XII (27 mai 1804) a rétabli la Mission des Lazaristes... Sa Majesté, ayant
égard à la demande des membres du Séminaire des Missions Étrangères, vient de le
rétablir par un décret impérial, et, par le même décret, elle lui accorde
l'autorisation qu'ils sollicitaient. Sa Majesté, par un autre décret, met à la
disposition des anciens membres du Séminaire du Saint-Esprit la maison qu'ils occupaient
près Orléans, et ses dépendances; elle les autorise également à recevoir des legs et
des fondations, etc. »
Le même jour (21 mars 1805), M. Portalis adressa à l'Empereur un rapport relatif à ce
double rétablissement, et le 2 germinal an XIII (23 mars 1805), parut le décret suivant
:
ARTICLE PREMIER. - « Les établissements connus sous les dénominations de Missions
Étrangères et du Séminaire du Saint-Esprit sont rétablis... -
ART. 3. - La maison de campagne, située près la forêt d'Orléans, et ses dépendances,
provenant du Séminaire du Saint-Esprit, lui sont rendues... Ils demeurent autorisés à
recevoir les fondations et donations, etc. »
C'était assurément chose considérable que cette restauration du Séminaire du
Saint-Esprit; mais elle n'était, au bout du compte, qu'une autorisation de recommencer
l'oeuvre et n'assurait à M. Bertout ni le personnel, ni le local, ni les ressources
indispensables pour la réalisation complète de ce dessein.
Il était là, seul, pauvre, presque abandonné de ses anciens confrères, lesquels, ne
comptant plus sur le rétablissement de l'Institut, avaient trouvé à se placer ailleurs.
Que faire dans de pareilles circonstances? Tout semble devoir déconcerter le courage le
plus éprouvé; mais M. Bertout, comptant sur le secours de Dieu et l'assistance de la
Sainte Vierge, ne lâchera pas prise : il saura souffrir, s'humilier, travailler et
attendre avec force et douceur, avec paix et perséverance, la bénédiction qui donnera
de nouveau la vie à son oeuvre : cette bénédiction ne lui fit pas défaut.
Vers le commencement de 1805, avait été rétablie la grande Aumonerie de France; le
cardinal Fesch, archevêque de Lyon depuis 1802, à qui elle fut confiée, avait pour
vicaire général M. Jauffret, qui s'employait avec zèle à faire revivre la foi et la
religion, tant en France que dans les Colonies. En avril 1805, le grand Aumônier avait
alors dans ses attributs les Missions d'outre-mer, ainsi que les établissements qui en
étaient chargés en France. Il institua un « Conseil supérieur des Missions », dont
les membres, nommés par lui, les évêques de Versailles et de Quimper, M. Brunet,
Supérieur des Lazaristes; M. Bellières, Supérieur des Missions Étrangères; M.
Bertout, Supérieur du Saint-Esprit, et M. Emery, Supérieur de Saint-Sulpice, qui ne crut
pas pouvoir accepter. Profitant de la situation, M. Bertout insista beaucoup auprès du
Gouvernement et de la grande Aumônerie pour qu'on le fît rentrer en possession des
bâtiments de l'ancien Séminaire et qu'on lui accordât une allocation suffisante à
l'entretien de l'oeuvre. Le 18 février 1806, M. Jauffret proposa d'installer
provisoirement le Séminaire dans la maison Sainte Aure, rue des Postes. C'était un
ancien couvent de Religieuses, dont le loyer était de 4.000 francs. La grande Aumônerie
s'offrait à en payer la moitié; ce projet ne fut pas mis à exécution.
Le 14 juillet 1806, le grand Aumônier ouvrit une souscription en faveur des trois
Congrégations et autorisa M. Bertout à établir, en attendant, un petit séminaire.
L'abbé Jauffret, qui venait d'être nommé évêque de Metz, adressa à M. Bertout, en
date du 10 septembre, ces lignes si bienveillantes : « Monsieur, vous connaissez tous mes
voeux pour votre rétablissement absolu. Vous savez que je n'ai cessé d'agir pour y
arriver. Je voudrais, sans doute, ne pas partir que vous n'eussiez reçu quelque faveur
spéciale de Sa Majesté, soit en maison, soit en revenus. J'espère qu'il en sera ainsi,
si nous avons la paix; mais si nous avons la guerre, vous pourriez souffrir encore quelque
retard. J'avoue que ce serait pénible. Mais jetteriez-vous le manche après la cognée
après avoir si bien combattu? Votre vocation est grande aux yeux de Dieu et des hommes ;
elle ne peut exister sans traverses, sans épreuves : ici, la persévérance l'emportera.
- Je ne perds pas de vue les souscriptions; je vais m'en occuper dès le retour de Son
Éminence, qui est, à ce moment, à la campagne. Par les souscriptions, on pourra faire
quelque chose et vous aurez un pied-à-terre chez MM. Bernard et Auger, etc. »
La souscription n'eut aucun succès; mais, autorisé à établir un petit Séminaire, M.
Bertout alla demeurer chez MM. Bernard et Auger. Ces deux Messieurs avaient, dès 1801,
ouvert un petit collège pour les jeunes gens, rue du ChercheMidi, n° 33. Un acte
d'association fut signé, le 27 octobre 1808. « Déjà, MM. Bernard, Auger et Bertout,
est-il dit dans cet acte, conçoivent le doux espoir de voir se réaliser le plan qu'ils
se sont tracé : des élèves, formés par leurs soins, pourront devenir des ministres
précieux à la Religion ou donner à la société de vertueux citoyens, qui en
affermiront les bases par la pratique de leurs devoirs et y propageront les principes
religieux qui leur auront été enseignés. »
M. Bertout, de son côté, avait fait des démarches, d'abord auprès de M. Portalis
père; et après le décès de celui-ci (août 1807), auprès de M. Portalis fils, chargé
provisoirement des affaires du culte. « Je prends aussi la liberté, écrivait-il à ce
dernier le 8 octobre 1807, de solliciter les bontés du Gouvernement en faveur de notre
établissement. Le Gouvernement n'a encore rien fait pour nous : cependant, nous sommes en
pleine activité. Toutes les sciences s'enseignent chez nous (rue du Cherche-Midi), même
la philosophie, que nous commençons cette année. Nous avons un assez bon nombre de
jeunes gens qui se destinent à l'état ecclésiastique, plusieurs aux Missions. Tous sont
pauvres; nous les recevons malgré leur pauvreté : il y en a que nous sommes obligés
d'habiller. Le bénéfice du pensionnat est entièrement employé à cette bonne oeuvre;
mais, vous comprenez, Monsieur, que c'est une ressource bornée et qui ne suffit pas pour
faire le bien que nous désirerions, et répondre aux voeux du Gouvernement, qui ne
manquera pas de nous demander des Missionnaires au premier moment... Nous avons donc
besoin de secours. Si, en attendant que le Gouvernement nous donne une maison et des
fonds, vous avez entre les mains quelque argent dont vous puissiez disposer pour les
bonnes oeuvres, ayez, Monsieur, la charité de vous souvenir de nous... Il parait, que la
souscription projetée en faveur des Missions dont vous et M. Portalis avez bien voulu
être les protecteurs, na point eu lieu; au moins, nous n'avons reçu aucun secours
pécuniaire »
Le 4 janvier 1808, le ministère des Cultes fut confié à M. Bigot de Préameneu. M.
Bertout s'empressa de lui présenter un mémoire ayant pour objet la rétrocession de
l'ancien Séminaire et le rétablissement de l'allocation. Dans un rapport fait par un des
employés du ministère des Cultes, en aout 1809, il est dit : « M. Bertout, Supérieur
général des Missions du Saint-Esprit, demande une maison pour y transporter son
Séminaire. Il est aujourd'hui établi dans une maison louée par la Congrégation; mais
le local est insuffisant. Cette maison est située rue du Cherche-Midi; le loyer est de
6.500 francs. Elle renferme cent trente élèves, dont vingtcinq se destinent à l'état
ecclésiastique. Les Missions du Saint-Esprit sont établies en Afrique et en Amérique.
M. Bertout a besoin d'une maison de cent missionnaires et de cinq cents francs pour chaque
sujet. »
Décret du 26 septembre 1809. - Ordonnance du 3 février 1816.
Réouverture du Séminaire.
Depuis l'éloignement de Mgr Jauffret, la grande Aumônerie n'était plus aussi favorable
à M. Bertout : le cardinal Fesch avait même conçu l'idée de n'avoir qu'un seul
établissement pour former les prêtres destinés aux Missions françaises d'outre-mer; et
cet établissement devait être à Rome sous la direction des Lazaristes. Le projet,
était sur le point de se réaliser, quand, tout à coup, l'État pontifical fut envahi
par les troupes françaises commandées par le général Gouvion Saint-Cyr. Le cardinal
Casoni, ministre d'État de Pie VII, protesta contre cet attentat; mais l'Empereur, au
lieu de rentrer en lui-même, donna ordre au général Miollis d'envahir Rome elle-même,
et Miollis en prit possession le 2 février 1808, malgré les protestations du Pape et de
ses ministres. Napoléon ler ne s'arrêta pas là : le 17 mai 1809, se trouvant au camp
impérial de Vienne (Autriche), il rendit un décret dont l'article premier réunissait
les États du Pape à l'Empire français. Ce décret fut promulgué, à Rome par le
général Miollis, au bruit de l'artillerie du fort Saint-Ange. Pie VII lança la Bulle
d'excommunication Quam memoranda, qui fut affichée dans la nuit du 10 au 11 juin 1809,
sur les murs des églises de Saint-Pierre, de Sainte-Marie Majeure et de Saint-Jean de
Latran. L'Empereur alla plus loin : par son ordre, le général Radet fut chargé
d'enlever le Pape et de le conduire à Savone. Cet odieux enlèvement eut lieu dans la
nuit du 5 au 6 juillet 1809. Le 21, l'auguste captif arriva à Grenoble, puis, le 10 août
à Savone, où il resta prisonnier jusqu'au 20 juin 1812, époque à laquelle il fut
transféré à Fontainebleau.
Les trois Congrégations qui venaient d'être rétablies eurent à essuyer le contre-coup
de cette usurpation sacrilège. Le 26 septembre 1809, Napoléon signa au château de
Schoenbrunn, à six kilomètres de Vienne, un décret qui les supprimait de nouveau :
ARTICLE PREMIER. - « Les Missions à l'intérieur sont défendues... »
ART. 2. - « Nous révoquons aussi tous décrets par nous précédemment rendus, portant
établissement ou confirmation de prêtres pour les Missions étrangères, et notamment
celui du 7 prairial an XII, portant établissement d'une association de prêtres
séculiers qui, sous le nom de prêtres des Missions Étrangères, seraient chargés des
Missions hors de France, et celui du 2 germinal an XIII, portant établissement des
Missions Étrangères et du Séminaire du SaintEsprit... »
Ce fut un véritable coup de foudre pour M. Bertout; néanmoins, cette nouvelle épreuve
ne lui ôta pas tout espoir de réaliser son dessein, et il continua à s'occuper de son
petit séminaire de la rue du Cherche-Midi, sauf qu'en 1814 il quitta MM. Bernard et
Auger, pour aller prendre son logement au Séminaire des Missions Etrangères. Les choses
en étaient là lorsque l'avènement de Louis XVIII permit de recommencer auprès de son
Gouvernement des démarches couronnées de succès. En effet, une Ordonnance royale du 2
mars 1815 rétablit le Séminaire des Missions Étrangères; une autre, du 3 février
1816, les deux Congrégations des Lazaristes et du Saint-Esprit; la Société de
Saint-Sulpice, supprimée le 10 janvier 1810, fut rétablie par l'Ordonnance du 3 avril
suivant.
Voici un extrait de l'Ordonnance du 3 février 1816
ARTICLE PREMIER. - « Notre Ordonnance du 2 mars 1815 en faveur des Missions dites
Missions Étrangères, rue du Bac, applicable aux Missions de Saint-Lazare et du Saint
Esprit. » -
ART. 2. - « La Congrégation de Saint-Lazare est réintégrée dans son ancienne maison,
rue du Vieux-Colombier. - La Congrégation du Saint-Esprit est réintégrée dans son
ancienne maison, rue des Postes, à la charge de s'entendre avec l'Université pour la
translation de lÉcole Normale dans un autre édifice. Elle ne pourra requérir sa
mise en possession qu'après que ladite translation aura été consentie et effectuée. »
Mais le rédacteur de cette Ordonnance avait perdu de vue tout à la fois et l'acte du 4
floréal an V, par lequel le Directoire avait vendu l'immeuble à la veuve Angar, et
l'article 13 du Concordat de 1801, qui ratifiait l'aliénation des biens ecclésiastiques.
Aussi cette Ordonnance provoqua-t-elle des réclamations : d'abord, de la part de
l'Université qui, par lorgane de Royer-Collard, président de la Commission de
l'Instruction Publique, dénonça l'illégalité de cette Ordonnance (4 juillet 1816) -
l'École Normale occupait le Séminaire en vertu d'un bail; puis, de la part des
héritiers Angar, qui exhibèrent leur titre de propriété (15 juillet 1816). L'erreur
fut reconnue et admise : c'est ce qui donna lieu à l'Ordonnance du 10 octobre 1816, ainsi
conçue :
« Considérant que la maison sise à Paris, rue des Postes, appartenant anciennement à
cette Congrégation, a été aliénée et n'a pu être affectée que par erreur au service
de ladite Congrégation...
ARTICLE PREMIER. - La partie de l'article 2 de notre Ordonnance du février 1816 ainsi
conçue : La Congrégation du Saint-Esprit est réintégrée dans son ancienne maison, rue
des Postes,... est révoquée et annulée dans toutes ses dispositions, etc. »
Bien que le bail de l'Université expirât en mai 1817, M. Bertout, soit qu'il ignorât
cette circonstance, soit qu'il rencontrât des obstacles insurmontables, crut devoir
louer, en attendant, dans la rue Notre-Dame-des-Champs, n°15, une maison assez convenable
pour y installer le Séminaire du Saint-Esprit. Ce loyer eut lieu le 26 juin 1817 pour
cinq ans et demi, au prix de 3.300 francs, que le ministre de l'Intérieur et des Cultes,
M. Laîné, voulut prendre à sa charge, pour favoriser l'Université. Celle-ci en profita
aussitôt pour renouveler son bail pour neuf ans, du ler octobre 1817 au ler octobre 1826,
et empêcher ainsi M. Bertout de rentrer dans sa maison. M. Bruyères, maître des
requêtes, que le ministre avait chargé de faire examiner par un architecte la maison de
la rue NotreDame-des-Champs, en faisait, le 20 juin 1817, cette description : « Au
reçu de la lettre que Votre Excellence m'a fait l'honneur de m'écrire, j'ai envoyé
quelqu'un visiter la maison située vers le milieu de la rue de Notre-Dame-des-Champs, que
désire louer M. le Supérieur du Saint-Esprit. Cette maison paraît être propre à
remplir les intentions de M. le Supérieur. On y trouve une chapelle [3] très bien
disposée. Elle se compose d'un rez-de-chaussée, de deux étages carrés et d'un étage
en mansarde. Chaque étage renferme de huit à neuf pièces principales (sans les
cabinets), presque toutes à cheminée. Le corps de logis, sur la rue, a dix croisées de
face. Il est accompagné d'un autre corps sur la cour, simple et en profondeur. En
général, la maison est en bon état, et sa location au prix de 3.300 francs, y compris
un jardin, paraît tout à fait modérée. La promptitude avec laquelle M. l'abbé Bertout
a désiré que je rendisse compte à Votre Excellence de la situation de cette maison,
m'empêche d'entrer dans de plus grands détails. » - Une Ordonnance du 18 juillet 1817
autorisa ce loyer et accorda les 3.300 francs à prendre sur les fonds du clergé. Le
loyer devait courir du ler juillet 1817. Désormais, M. Bertout, conservant toujours
l'espoir de recouvrer l'ancienne maison, était en mesure de remettre en activité le
Séminaire du Saint-Esprit.
Un autre sujet de joie et d'encouragement était venu le soutenir dans sa difficile
entreprise : cette même année 1817, M. Fourdinier, ancien professeur de théologie du
Séminaire d'Arras, son parent et filleul, était venu s'adjoindre à lui, le 23 juin. Le
17 juillet, ils prirent possession de la maison louée et, en novembre, avec le concours
des abbés Corrigan, Chapel et Roy, ils rouvrirent les cours de philosophie et de
théologie. M. Bertout était Supérieur de l'établissement, et M. Fourdinier, outre les
fonctions de professeur, remplissait encore celles de procureur. Le 18 août 1819, le
Séminaire comptait quinze élèves, et, en 1821, dix-huit, parmi lesquels MM. Warnet,
Lacombe, Hardy et Nicole. M. Lacombe y fut d'abord élève, puis professeur et fut ensuite
envoyé à la Guadeloupe, dont il devint plus tard Préfet apostolique.
Rachat de l'immeuble de la rue des Postes et de la maison de campagne de Gentilly.
-
Acquisition de la maison de l'Impasse des Vignes. - Allocations.
Cependant, M. Bertout ne renonçait nullement à l'espoir de recouvrer les bâtiments de
l'ancien Séminaire occupés par l'École Normale. Pour bien faire comprendre cette
situation, rappelons sommairement les phases par lesquelles l'immeuble a dû passer.
Confisqué le 18 août 1792, puis loué à M. Angar en 1793, et enfin vendu à la veuve
Angar en 1797, celle-ci le loua, l'année suivante, à M. et Mme Poichon, qui en firent
une fabrique de papiers peints; la location fut ensuite transférée à un M. Mac Dermott,
qui en devint locataire définitif par un nouveau bail du 18 vendémiaire an XIII (10
octobre 1804); en mai 1813, M. Mac Dermott le sous-loua, pour quatre ans, au prix de 4.000
francs, à l'Université, qui y installa l'École Normale. Enfin, par un dernier bail,
l'immeuble fut loué directement à l'Université, au prix de 6.000 francs, pour neuf ans,
du ler octobre 1817 au ler octobre 1826.
M. Bertout avait cherché à intéresser à sa cause, entre autres grands personnages, le
duc d'Angoulême et le cardinal de Talleyrand-Périgord, archevêque-duc de Reims
(17771790), grand Aumônier de France (1815-1821) et ensuite archevêque de Paris (10
octobre 1817-20 octobre 1821), et leurs recommandations auprès des ministres de la Marine
et des Cultes avaient eu l'effet désiré. - En 1818, M. Bertout écrivait à Son Ém. le
cardinal Fontana, qui venait de succéder au cardinal Litta : « ... En quittant Paris (4
avril 1805), Votre Éminence eut l'extrême bonté de me promettre ses bons offices : je
les acceptai avec bien de la reconnaissance. J'espère donc que Votre Éminence voudra
bien nous honorer de sa protection, comme le faisait Son Ém. le cardinal Litta... Voici
la situation où nous nous trouvons : le Roi nous a rétablis dans l'intention que nous
fournissions des prêtres à toutes les Colonies françaises. Pour une telle entreprise,
il faudrait des fonds considérables et un local spacieux afin d'être à même de
recevoir un grand nombre de jeunes gens. Jusqu'à présent, le Gouvernement ne nous a
donné qu'un secours modique (15.000 francs par an), et, malgré toutes mes
sollicitations, nous n'avons pu encore rentrer dans notre ancienne maison dans la rue des
Postes, près de celle des Dames de la Visitation, où Votre Eminence logeait. En
attendant avec confiance les moments de la divine Providence, nous avons loué une maison;
nous avons repris nos anciens exercices et nous avons un certain nombre d'élèves que
nous élevons dans l'esprit des Missions. »
Sur ces entrefaites, M. Angar fils, en son nom et au nom de ses deux soeurs, résolut de
vendre les bâtiments de l'ancien Séminaire et, selon l'intention bien connue de leurs
parents défunts, de préférence à la Congrégation du SaintEsprit, et à un prix
très modéré. Aux premiers jours d'avril 1819, conformément aux désirs de M. Bertout,
il fut décidé entre les deux ministres de la Marine et des Cultes, que chacun d'eux
donnerait 45.000 francs (soit 90.000 francs), pour réaliser cette acquisition, et que le
reste serait avancé par la Congrégation. Mais le 12 juillet suivant, obéissant à une
arrière-pensée que M. Bertout n'eut pas de peine à discerner [4], le ministre des
Cultes, M. Decazes, proposa de faire supporter par les deux ministères la somme totale du
prix d'achat, sous la condition expresse que l'acquisition se ferait dans la forme
administrative, au nom et pour le compte de l'État, sauf à affecter ensuite la maison à
l'usage du Séminaire du Saint-Esprit, ou de tout autre établissement. On comptait ainsi
faire, tôt ou tard, revenir l'immeuble à l'École Normale. Pour déjouer ce calcul et se
prémunir contre un tel danger, M. Bertout alla trouver les héritiers Angar et fit avec
eux, en date du 13 juillet 1819, un acte sous seing privé, aux termes duquel ceux-ci
promettaient de vendre à M. Bertout, au nom et au profit de la Congrégation du
Saint-Esprit, les bâtiments de l'ancien Séminaire sis à Paris, rue des Postes, n° 26,
au prix principal de 103.000 francs. La vente devait se réaliser devant notaire par un
contrat en règle, dans l'espace de deux mois. Pendant cet intervalle, M. Bertout prenait
sur lui d'obtenir du Gouvernement les autorisations et ordonnances requises. Il avait
promis d'ajouter au prix d'achat 3.000 francs pour « pot-de-vin », ce qui portait la
somme à 106.000 francs, dont la moitié à supporter par chacun des deux ministères
était de 53.000 francs. - Ce n'est pas sans une vive appréhension que M. Bertout avisa
les deux ministres de lacte sous seing privé et qu'il leur en communiqua copie. Le
ministre de la Marine, M. Portal, était assez accommodant; il fut même d'avis qu'on
pourrait faire résilier le bail de l'Université, lequel ne devait expirer que le ler
octobre 1826, et faire évacuer le Séminaire par l'École Normale. Les vues de M. Decazes
n'étaient pas aussi bienveillantes; il persistait dans la pensée qu'il fallait acheter
l'immeuble au nom et pour le compte de l'État. Pour ne pas laisser échapper une occasion
qui ne se représenterait plus, M. Bertout y consentit, mais il eut soin d'ajouter : « Je
désirerais seulement que, dans l'acte d'acquisition, on nous laissât la faculté de
rembourser le Gouvernement. » Il est donc évident que M. Bertout n'avait point renoncé
à l'idée de rendre la Congrégation non seulement usufruitière, mais encore
propriétaire de l'immeuble. Le 30 août 1819, parut une première Ordonnance, dont voici
les passages principaux :
« Vu lacte sous seing privé
contenant promesse de vente de la part du sieur Angar à la Congrégation des
Missionnaires du Saint-Esprit, de l'ancienne maison du Saint-Esprit, située rue des
Postes, n°26, et occupée en ce moment par l'École Normale... »
ARTICLE PREMIER : « L'ancienne maison du Saint-Esprit, rue des Postes, sera acquise aux
frais et pour le compte de lEtat. »
- ART. 2. « L'acquisition sera faite par les soins du conseiller d'État, préfet de la
Seine, conformément aux dispositions du compromis souscrit par M. Angar... »
ARTICLE 4. - « Le prix de l'acquisition et les frais seront acquittés dans les termes
prescrits par ledit acte, moitié sur les fonds du département de la Marine, et moitié,
sur les fonds du département de lIntérieur (chargé des Cultes). » - Il y avait
ainsi une contradiction manifeste dans le libellé de l'Ordonnance : tandis qu'aux
considérants et à l'article 2, il est dit que, conformément au sous-seing privé,
l'acquisition serait faite au nom et au profit de la Congrégation du Saint-Esprit, il est
stipulé à l'article premier que l'achat se ferait au nom et pour le compte de l'État :
cette Ordonnance était donc absolument inexécutable.
Le terme du compromis étant expiré, d'un commun accord il fut fixé par prolongation au
13 septembre 1819. Ce jour-là, enfin, fut signé par-devant Me Boulard et Viénol,
notaires à Paris, le contrat par lequel les héritiers Angar vendent au prix principal de
103.000 francs, à M. Bertout, pour le compte et au nom de sa Congrégation, les
bâtiments du Séminaire du Saint-Esprit. En voici un extrait :
« ... Lesquels (M. Angar et ses deux
soeurs) ont, par les présentes, vendu... à la Congrégation du Saint-Esprit, ce accepté
pour elle par M. Jacques Magdeleine Bertout, Supérieur du Séminaire du Saint-Esprit,
demeurant, à Paris, rue Notre-Dame-desChamps, n° 15, à ce présent, au nom et comme
se portant fort de ladite Congrégation, pour laquelle il soblige dobtenir
l'autorisation d'acquérir et de faire ratifier les présentes, par acte en bonne forme et
en suite des présentes, dans un an, à compter de ce jour, étant bien entendu que
l'effet de la garantie, ci-dessus contractée, serait dans le cas où l'autorisation
n'aurait pu être fournie dans l'année, de ce jour, et la ratification faite par acte
ensuite des présentes, dans le même délai, de laisser l'immeuble au compte personnel de
M. Bertout, qui en serait, pour ce cas, seul propriétaire, une maison et dépendances,
connue sous le nom de Séminaire du Saint-Esprit, sise à Paris, rue des Postes, no 26. )
(Suit la description de l'immeuble)...[5] (1)
« M. Bertout ou le Séminaire du Saint-Esprit dans le cas ci-dessus prévu, sont
propriétaires, à compter de ce jour, de l'immeuble présentement vendu, mais ils n'en
commencent la jouissance qu'au ler octobre prochain par la perception à leur profit des
loyers payés par l'Université...
Cette vente est faite moyennant le prix principal de cent trois mille francs...
Enregistré à Paris le vingt-trois septembre mil huit cent dix neuf. »
Comment M. Bertout s'y prendrait-il pour donner connaissance aux ministres du contrat
signé le 13 septembre 1819 ? Malade, par suite des angoisses que lui causait cette
affaire, il confia à M. Fourdinier le soin de faire cette délicate et scabreuse
communication. Du côté du ministre de la Marine, la cause était à peu près gagnée;
M. Portal se montra très conciliant; et, par une lettre du 3 décembre, chercha même à
faire partager ses sentiments par M. Decazes. Ce dernier finit lui-même par reconnaître
la Congrégation propriétaire de l'immeuble, mais avec cette clause résolutoire que si
le Séminaire cessait d'exister, c'est-à-dire si, faute de personnel, la Congrégation
venait à s'éteindre, ou si elle renonçait à l'oeuvre coloniale, l'État lui serait
substitué dans ses droits de propriété. Enfin, le 21 du même mois, fut signée par le
roi Louis XVIII l'Ordonnance qui ratifiait et approuvait le contrat du 13 septembre , en y
ajoutant toutefois la clause ci-dessus mentionnée.
ARTICLE PREMIER. - « L'acquisition faite des héritiers Angar par l'abbé Bertout,
Supérieur, et au nom de la Congrégation des Prêtres du Saint-Esprit, du bâtiment et
dépendances de l'ancien Séminaire de ce nom, sis rue des Postes, no 26, pour être
employé au logement de sa Congrégation,, est et demeure approuvée. »
- ART. 2. - « Ladite Congrégation étant spécialement chargée de fournir les prêtres
nécessaires au service paroissial dans les Colonies, il lui est accordé à cette
considération pour l'aider à subvenir à la dépense de l'acquisition ainsi qu'aux frais
accessoires de toute nature, y compris ceux de l'établissement de son Séminaire dans la
maison dont il s'agit, un secours de cent six mille francs, dont moitié sera supportée
par le département de la Marine, et moitié par celui de l'Intérieur, sur le disponible
actuel des fonds généraux du Clergé, le tout sous la condition expresse que, dans le
cas où le Séminaire de Saint-Esprit viendrait à cesser d'exister pour quelque cause que
ce soit, ou d'occuper personnellement pour l'usage auquel il est appelé par les
présentes, les bâtiments dont il s'agit, l'État entrera immédiatement et en toute
propriété en possession de l'immeuble... »
Cette clause résolutoire est équivoque, insidieuse et dénote comme toujours présente
l'arrière-pensée dont il a été question plus haut : l'Université voulait, per fas et
nefas, garder le Séminaire pour l'École Normale. M. Bertout se vit forcé, par les
circonstances, de consentir aux dispositions astucieuses du ministre, contenues dans
l'Ordonnance, mais non dans le sens que la Congrégation pourrait être dissoute
arbitrairement, pour quelque cause que ce fût, dans le but de rendre l'État
propriétaire. Le sage et prudent Supérieur prit luimême le soin de faire connaître
dans quel sens il donnait son assentiment : « Par cette clause, dit-il, j'entendais que
si, par défaut de directeurs ou d'élèves, nous cessions d'exister, la maison passerait
entre les mainss du Gouvernement; je la trouvais juste, puisque le Gouvernenient nous
donnait des fonds. Mais, je fus surpris, quand je reçus l'Ordonnance, de voir qu'on y
avait inséré les mots « par quelque cause que ce soit ». J'en fis mes observations :
on me répondit que ces mots n'avaient d'autre sens que celui que j'y attachais moi-même.
Je passai outre. Mais il est certain que si j'eusse compris qu'on pouvait nous détruire
arbitrairement ayant des directeurs et des élèves, jamais je n'aurais consenti à une
pareille condition. »
La Congrégation était donc rentrée dans ses droits de propriété sur le Séminaire. Il
s'agissait maintenant d'en faire évacuer les bâtiments; mais lUniversité avait de
la peine à en retirer l'École Normale. Le 6 juin 1820, M. Bertout proposa de la
transférer au Collège du Plessis, qu'elle avait occupé antérieurement, ou bien dans
l'un des nouveaux bâtiments du collège d'Harcourt, ou dans celui de Louis-leGrand.
Cette proposition était appuyée par le baron Portal, ministre de la Marine, et par le
comte Siméon, ministre de l'Intérieur et des Cultes. Le 21 février 1821, une
Ordonnance royale décida que l'École Normale serait transférée à la Sorbonne; mais
l'Université ne se pressait nullement dobtempérer à cette décision.
Cependant, les choses changèrent bientôt de face : le 14 décembre de cette année 1821
fut formé le ministère du duc de Richelieu, dans lequel M. Joseph de Villèle occupait
le département des Finances, et le Marquis de Clermont Tonnerre celui de la Marine.
Quelque temps après le décès du Duc de Richelieu, M. de Villèle le remplaça comme
président du Conseil (7 septembre 1822). L'année précédente, le 1er juin, une
Ordonnance royale nommait Mgr Frayssinous grand maître de l'Université, Comme l'École
Normale manifestait des dispositions hostiles au Gouvernement, Louis XVIII la supprima par
son Ordonnance du 6 septembre. Cette suppression devait avoir pour nécessaire
conséquence l'évacuation des immeubles immeubles. Toutefois ce n'est que trois mois
après, (5 décembre) que la Congrégation put en reprendre possession. La
réinstallation du Séminaire fut inaugurée le 8 décembre, fête de
l'Immaculée-Conception. Il y eut, ce jour-là, grande réunion au Séminaire; tous les
anciens amis étaient là, ainsi que Mgr de Quélen, archevêque de Paris, et sans doute
aussi M. Boudot, son premier vicaire général. Nous tenons ce détail de M. l'abbé
Nicole, qui était alors du nombre des Séminaristes.
En 1820, se trouvait à vendre la maison de l'Impasse des Vignes, n° 2, qui faisait, pour
ainsi dire, corps avec le Séminaire, à la suite du grand édifice dû à M. Bouïe,
d'heureuse mémoire. Ayant trouvé quelque argent, M. Bertout crut devoir lacheter.
Cette maison, d'ailleurs, avait appartenu autrefois à Mme Veuve Saulnier (née Duflos),
soeur du Supérieur. Le dernier propriétaire, M. Anfoine Dupuis, officier et chevalier de
Saint-Louis, la vendit le 27 juillet 1820 à la Congrégation du Saint-Esprit,
représentée par M. Bertout, et cette acquisition fut autorisée par Ordonnance royale du
22 août 1821. Voici un extrait du contrat : « M. Antoine Dupuis a vendu à la
Congrégation du Saint-Esprit... une maison située à Paris, cul-de-sac des Vignes, no
2.... moyennant le prix principal de vingt-deux mille francs(22.000 francs) que M. Bertout
s'est obligé tant pour lui que pour le Séminaire, au cas prévu, de payer au vendeur
dans quatre mois à partir du 27 juillet 1820, à Paris, en sa demeure, ou pour lui au
porteur de ses pouvoirs et de la grosse de l'acte présentement extrait... Il a été
exprimé que M. Bertout, ou le Séminaire du Saint-Esprit, dans le cas prévu, étaient
propriétaires, à compter du 27 juillet 1820, dudit immeuble, mais qu'ils en
commenceraient la jouissance à partir du premier dudit mois de juillet par la perception
à leur profit des loyers payés par l'Université...» Signé : BOULARD.
L'Université occupait cet autre immeuble en vertu d'un bail de 2.000 francs; elle y avait
établi son économat, sa lingerie et son infirmerie. Avant de louer, en 1817, la maison
de la rue Notre-Dame-des-Champs, M. Bertout avait fait des démarches auprès du ministre
de l'Intérieur pour obtenir un transfèrement de loyer en faveur du Séminaire qu'il se
proposait d'établir dans cette maison; mais l'Université et M. Laîné s'y étaient
refusés absolument. - Une opposition au paiement donna lieu à la pièce suivante, dont
la reproduction a son importance en ce qu'elle précise les conditions de vente et d'achat
:
« Extrait des minutes du greffe du Tribunal civil de première instance du département
de la Seine, séant au Palais de Justice, à Paris, du mardy huitième jour du mois
d'août de l'année 1820. - Est comparu au greffe dudit tribunal civil de première
instance du département de la Seine, séant au Palais de Justice, à Paris, Maître
Quenescourt, avoué près le même tribunal, et de la Congrégation du Saint-Esprit, au
dit nom, a déposé entre les mains de nous, greffier en chef dudit tribunal, soussigné,
l'expédition d'un contrat de vente passé devant Maître Boulard, notaire à Paris, le 27
juillet 1820, par Antoine Dupuis, propriétaire, chef d'escadron, officier de la Légion
d'Honneur et chevalier de l'Ordre royal et militaire de Saint-Louis, demeurant à Paris,
rue Richelieu, no 107, près le Boulevard; - à la Congrégation du Saint-Esprit, ce
accepté pour elle par le Sieur J. M. Bertout, Supérieur du Séminaire du Saint-Esprit,
demeurant à Paris, rue Notre-Dame-des-Champs, n° 15, au nom et comme se portant fort de
la dite Congrégation, pour laquelle il s'oblige d'obtenir l'autorisation : - d'une
maison[6] située à Paris, cul-de-sac des Vignes, no 2, près la rue des Postes, ayant
cour et jardin, entourés de murs avec, entrée par une porte cochère conduisant à la
cour, autour de laquelle, en deux sens, règnent les bâtiments; - le tout, moyennant la
somme de 22.000 francs de principal, outre les charges »... Il (M. Bertout) s'est obligé
dobtenir l'autorisation d'acquérir et de faire ratifier ledit contrat par acte en bonne
forme à la suite d'icelui, dans une année à compter de sa date; ledit contrat contenant
stipulation que, dans le cas où l'acquéreur n'aurait pas fourni à l'époque convenue
les autorisation et ratification dont s'agit, l'immeuble faisant l'objet de la vente
resterait au compte personnel dudit requérant qui en serait, pour ce cas, seul
propriétaire dune maison et dépendances située à Paris, cul-de-sac des Vignes,
no 2, près la rue des Postes... »
Il faut noter ici que M. Bertout, sans aucune subvention de la part du Gouvernement, avait
payé cette maison avec l'argent qu'il avait su se procurer. Un prêtre du clergé de la
Martinique, l'abbé Hérard, lui avait, à cet effet, prêté 7.000 francs.
Afin d'obtenir l'Ordonnance royale donnant l'autorisation requise pour faire l'acquisition
au nom de la Congrégation, M. Bertout adressa la lettre suivante au comte Siméon,
ministre de l'Intérieur : « J'ai acheté l'année dernière une maison située
cul-de-sac des Vignes, rue des Postes. Comme cette maison peut être par la suite très
utile, nécessaire même, à notre Congrégation, mon intention a été de la lui donner
avec l'autorisation de Sa Majesté. Je prie, en conséquence, Votre Excellence, d'obtenir
une Ordonnance royale à cet effet. Les oppositions formées à la délivrance des deniers
et qui ne viennent que d'être levées, m'ont empêché de recourir plus tôt à Votre
Excellence pour solliciter cette faveur. J'ai l'honneur de la prévenir que l'Ordonnance
doit être rendue avant le 28 juillet prochain, autrement la maison serait ma propriété
personnelle : ce qui serait tout à fait contre mon voeu. » (Lettre du 28 juin 1821.)
Cette lettre étant restée sans réponse, M. Bertout, empêché par la maladie, fit
écrire de nouveau au ministre, le 7 juillet : « Le Supérieur du Séminaire du
Saint-Esprit a eu l'honneur d'écrire à Votre Excellence, le 28 juin 1821, pour la prier
d'obtenir de Sa Majesté l'autorisation d'acheter une maison, cul-de-sac des Vignes, dont
le contrat d'achat a été passé devant Me Boulard, notaire à Paris, le 27 juillet 1820,
sous la condition d'obtenir l'autorisation de Sa Majesté dans le courant d'une année. -
Nous avons acheté cette maison : 1° parce qu'elle est enclavée dans notre propriété
et qu'il aurait été bien désagréable pour nous, si elle avait été occupée par
toutes sortes de personnes; 2° prévoyant que nous ne pourrons jamais servir le
Gouvernement aussi bien que nous le désirons, si nous n'avons une école ecclésiastique
qui dépende de notre Séminaire et destinée à l'alimenter, nous nous proposons
d'établir ce petit Séminaire dans la susdite maison. Nous n'avons pas demandé
l'autorisation dans le temps de l'achat, parce qu'il s'est fait précipitamment; et nous
avons différé si longtemps, parce que, ayant eu des oppositions au payement, nous
n'avons pas voulu demander une autorisation qui aurait pu être inutile; mais maintenant,
que la maison est payée, nous supplions Votre Excellence de vouloir bien nous obtenir
l'assentiment du Roi. »
Enfin, le comte Siméon ayant fait, le 18 juillet, un rapport favorable, Louis XVIII signa
l'Ordonnance ci-après :
ARTICLE PREMIER. - « L'acquisition, faite suivant acte publie du 27 juillet 1820, par le
sieur abbé Bertout, Supérieur du Séminaire du Saint-Esprit, au nom et profit dudit
Séminaire d'une maison située à Paris, Impasse des Vignes, n° 2, moyennant le prix de
vingt-deux mille francs, est approuvée ... »
Un mot maintenant sur les allocations. Le Gouvernement de la Restauration n'avait pas
fermé l'oreille aux sollicitations de M. Bertout. Le 2 avril 1816, une Ordonnance royale
accordait au Séminaire, à compter du 1er janvier 1816, une allocation de 5.000 francs
sur les fonds du ministre des Cultes; le 3 septembre de l'année suivante, l'ancienne
allocation de 10.000 francs était rétablie par le ministère de la Marine à courir du
1er janvier 1817. Sous le ministère de M. de Villèle, le Gouvernement fit bien davantage
encore : à dater du 1er janvier 1824, par décision ministérielle, le Marquis de
Clermont-Tonnerre fit au Séminaire une dotation, à raison de 1.200 francs par directeur
et 500 francs par élève, jusquà concurrence de 50.000 francs. - Ajoutons que M.
Bertout reçut encore d'autres gratifications, en particulier celle de 2.000 francs pour
la restauration de la chapelle. A cette occasion, Charles X, qui venait de succéder à
son frère Louis XVIII, lui fit envoyer un tableau représentant la Descente du
Saint-Esprit sur les Apôtres
La réorganisation religieuse des Colonies françaises[7]
Nous ne pouvons indiquer que sommairement les efforts que fit M. Bertout pour maintenir ou
envoyer des ouvriers apostoliques aux Colonies françaises, en même temps qu'il essayait
de rouvrir le Séminaire destiné, à leur former des successeurs.
Par suite de la Révolution et des guerres continuelles qui se succédèrent, de 1789 à
1815, ces colonies passèrent alors par des crises politiques, sociales et religieuses
dont on peut difficilement se faire une idée. Les anciens Ordres religieux qui en avaient
autrefois assuré l'évangélisation, Jésuites, Capucins, Carmes, Dominicains, avaient
disparu ou n'étaient plus représentés, ici ou là, que par quelques-uns de leurs
membres sécularisés.
Les relations avec Rome étaient à peu prés impossibles; les Supérieurs
ecclésiastiques n'étaient pas sûrs de la réalité de leurs pouvoirs; souvent, des
compétitions s'élevèrent; et, du reste, ces îles lointaines, tantôt au pouvoir des
Français, tantôt en celui des Anglais, avaient un avenir fort incertain.
Au milieu de cette situation lamentable, le zèle admirablé et l'héroïque constance de
M. Bertout ne se démentirent pas un instant.
Dès que le décret impérial du 2 germinal an XIII 1805 lui permit de reprendre l'oeuvre
de la Congrégation et du Séminaire, en leur donnant un but précis - l'évangélisation
des colonies françaises, - il se mit en rapport avec ses anciens confrères de Cayenne,
en particulier avec M. Legrand, qui en avait été le préfet et qui se trouvait alors à
la Martinique; les autres s'étaient dispersés en différentes parties de l'Amérique du
Nord. Par son entremise, M. Legrand reprit son poste à Cayenne. En même temps (4
novembre 1807), le Gouvernement impérial lui demandait un préfet apostolique et douze
missionnaires pour la Martinique. Mais bientôt après, le décret de Schoenbrunn, du 26
septembre 1809, venait ruiner de nouveau ses espérances, en supprimant la Communauté du
Saint-Esprit. Dès lors, M. Bertout attendit dés temps meilleurs, au Collège qu'il avait
établi, rue Notre-Dame-des-Champs, avec MM. Besnard et Auyer; il les quitta même en 1814
et se retira aux Missions Êtrangères.
Avec le retour de Louis XVIII, les démarches recommencèrent près du Gouvernement, de
la Nonciature et du SaintSiège : elles devaient aboutir, cette fois, - comme on l'a vu,
- à la reconnaissance légale de la Congrégation, à l'approbation canonique des
Règles, et à la dotation du Séminaire, dans son immeuble reconquis.
Voilà donc, par Ordonnance royale du 3 février 1816, qui nous régit encore, la
Congrégation du Saint-Esprit reconnue et approuvée comme Institution chargée de la
desserte des paroisses et missions coloniales, soit, dit le Baron Portal, ministre de la
Marine et des Colonies, « par des sujets sortis de son sein », soit « par des prêtres
venant des divers diocèses» et « formés en son Séminaire ». (Circulaire aux
Gouverneurs des Colonies, 30 avril 1820).
Sans perdre un instant, M. Bertout se mit en devoir de poursuvre le but qui lui était
donné. D'après une note du Vicomte de Bouchaye à M. Lainé, ministre de l'Intérieur
(12 octobre 1816), il y avait dans les possessions d'outremer françaises en 1790, cent
trente-sept prêtres, y compris les Supérieurs ecclésiastiques; et il ajoute qu'il n'y
aurait tout au plus que soixante-quatre, lorsque tous ceux qu'il avait, demandés y
seraient arrivés. Le déficit serait donc de soixantre treize, qu'il faudrait pouvoir
fournir en trois années. Par le traité du 30 mai 1814, Saint-Louis du Sénégal et
Gorée ayant été restitués par l'Angleterre à la France, l'abbé Giudicelli y fut
nommé préfet apostolique (1816). Mais peu après, par suite de ses démêlés avec le
colonel Schmalz, Gouverneur, il rentrait en France et donnait sa démission. M. Bertout
lui fit donner comme successeur M. Terrasse, (qui, avec l'abbé Tabaudo, curé de Gorée,
la Mère Rosalie et six Soeurs de Saint-Joseph de Cluny, arrivèrent le 19 mars 1819.
En 1793, l'abbé Legrand, élève du Séminaire, qui, dès l'année 1784 avait été
envoyé à la Guyane, en fut expulsé en 1792 avec cinq de ses confrères, et passa à la
Martinique, où il resta, curé du Gros-Morne, jusqu'en 1807. Ce fut à cette époque
qu'à la demande de M. Bertout, il retourna à Cayenne comme Supérieur ecclésiastique;
mais le 18 janvier 1809, Cayenne était pris par une flotte anglo-portuguaise, Et ce ne
fut qu'en 1817 que le Supérieur du Saint-Esprit put y envoyer des renforts dans la
personne de MM. Guillier, Viollat et Girardon. L'année suivante, (1818), M. Legrand
mourut et fut remplacé par M. Guillier, qui se retira en 1846, à un âge fort avancé,
à Digoon.
Pendant la terreur, des chargements de prêtres avaient été expédiés, comme on le
sait, à la Guyane. Plusieurs moururent. Quelques-uns restèrent dans la colonie,
d'autres purent passer aux États-Unis ou rentrer en Europe; vingt quatre se rendirent
à la Martinique et à la Guadeloupe, en octobre 1801, et y prirent du ministère. L'un de
ces prêtres, l'abbé J.-P. Pierrori, du diocèse de Langres, y reçut, en 1815, des
pouvoirs de préfet « sub délégué » de M. Foulquier, curé de la Pointe-à-Pitre, qui
s'était lui-même attribué des pouvoirs sur les deux îles, après la disparition des
Dominicains et des Capucins (ceux-ci avaient chacun leur Supérieur ecclésiastique). En
1818, M. Bertout, informé de cette situation, fit ériger la Martinique et la Guadeloupe
en préfectures apostoliques; mais les nominations des titulaires traînèrent en longueur
: ce ne fut qu'en 1821 que M. Carraud, du diocèse de Lyon, fut titularisé pour la
première de ces colonies, et, en 1823, M. Graff pour la seconde.
Dès 1719, les Mascareignes, comprenant l'île Bourbon et l'Ile de France, avaient été
érigées en préfecture apostolique et confiées aux Lazaristes. En 1792, cette
Congrégation est supprimée, et un M. Hoffmann, Capucin sécularisé, devient, on ne
sait, comment, Préfet des Mascareignes et de Madagascar, pendant que les anciens
Lazaristes ne reconnaissent que leur Supérieur. En 1810, Bourbon est pris par les
Anglais, mais rendu en 1814. Enfin, en 1817, arrivent d'autres prêtres, les Frères des
Écoles chrrétiemies et les Soeurs de SaintJoseph; puis M. Bertout fait nommer M.
Pastre comme préfet, en 1821.
Avec le même zèle, il s'occupe de Sainte-Marie de Madagascar et de l'Inde française,
procurant, des prêtres à Pondichéry, à Chandernagor, à Karikal, à Mahë, à Yanaon.
Dans tout le domaine colonial français, en un mot, on retrouve son action : le zèle de
ce prêtre admirable, malgré les mille difficultés auxquelles il se heurta
perpétuellement, ne connaît ni la fatigue ni le découragement. Avec les Supérieurs et
les prêtres des Colonies, avec les Évêques de France, avec le grand Aumônier, avec les
Nonces, avec la Propagande, avec les Ministres, les Gouverneurs et les Représentants des
divers gouvernements de la France, il négociera jusqu'à la fin de sa vie, toujours
soutenu et poussé par la même idée : la vie et le développement de sa Congrégation
et, de son Séminaire, pour les Missions coloniales.
VI. Petit Séminaire.
Approbation des Règles. - Nouvelles épreuves. - Décès de M. Bertout.
Nous avons vu plus haut que l'intention de M. Bertout était d'établir un petit
Séminaire dans la maison nouvelle maison acquise sur l'Impasse. Le 16 mai 1823, il
écrivit à Mgr de Ouélen au sujet de ce projet; sa lettre se terminait ainsi : « Je le
soumets à Votre Grandeur et je la prie de vouloir solliciter en notre faveur une
Ordonnance qui nous cite de la juridiction de l'Université. » Il écrivit pour le même
sujet à M. de Corbières, ministre de l'Intérieur. En vertu de l'Ordonnance du 5 octobre
1814, et conformément à la demande du ministre de l'Intérieur, le grand-maître de
l'Université, Mgr Frayssinous, consulta le Conseil royal de l'Insruction publique qui
donna un avis favorable; et, sur le rapport de M. de Corbières, Louis XVIII signa
l'Ordonnance le 20 août 1823, dont l'article preinier stipule que « le Supérieur
général de la Congrégation du Saint-Esprit est autorisé à former un petit séminaire
dans la maison chef-lieu de ladite Congrégation, située à Paris, pour y recevoir et
élever des jeunes gens dans la vocation de cet Institut, à la charge de se conformer aux
Lois et Ordonnances concernant les petits séminaires ».
« Nous fîmes préparer et disposer ad hoc, dit M. Nicole dans ses notes, la maison de
l'Impasse des Vignes, no 2. Arrivèrent des Irlandais, des Picards, des Normands, des
Bourguignons, des Bretons, des Vosgiens, etc., tous jeunes gens de quinze à seize ans. -
Séparation complète d'avec les théologiens et les philosophes. Les classes furent
organisées; j'eus ma part d'élèves. Une cinquantaine d'élèves étaient là. J'en ai
conduit une quinzaine de troisième en seconde et en rhétorique. Tout marchait très
bien. Plusieurs d'entre eux sont allés dans les Missions. En 1830, tous furent forcés,
de se retirer. »
Le petit séminaire s'était ouvert le ler octobre 1824. Le 15 janvier 1823, M. Bertout
avait écrit au cardinal Consalvi, pro-Préfet de la S. Congrégation de la Propagande :
« J'ai la satisfaction de pouvoir annoncer à Votre Éminence que nous sommes rentrés
dans notre ancienne maison et que, l'année prochaine, je me propose d'établir un petit
séminaire pour être la pépinière de celui où l'on enseigne la philosophie et la
théologie. Par ce moyen, nous pourrons avoir un plus grand nombre d'ecclésiastiques pour
nos Missions. »
Voici la réponse du cardinal:
« Avec plaisir, j'ai appris que l'ancienne maison de votre Séminaire vient de vous être
rendue, et que votre Seigneurie a l'intention d'y recevoir sans tarder un certainnombre
d'élèves. C'était, en effet, une chose fort désirable car les missions des Colonies
françaises sont dans une très grande pénurie, d'ouvriers. Aussi, je les recommande de
plus en plus à votre sollicitude bien connue . »
Son Ém. le cardinal Fontana ayant manifesté le désir de voir les Règles de la
Congrégation du Saint-Esprit, M. Bertout s'empressa de les lui envoyer, en lui exprimant
le désir de les voir approuvées par le Saint-Siège.
« Je viens de recevoir, répondait-il le 28 juin 1819, la lettre que Votre Éminence m'a
fait l'honneur de m'écrire dans le courant du mois : je m'empresse d'y répondre et
d'envoyer à Votre Éminence les statuts de notre Congrégation... Ils ont été
approuvés (en 1734) par Mgr de Vintimille, archevêque de Paris. Si Votre Éminence
voulait bien nous obtenir l'approbation de nos Règles par le Saint-Siège, cette
approbation leur donnerait une nouvelle autorité et elles nous deviendraient encore plus
chères. - Nous nous jetons tous aux pieds de Sa Sainteté pour lui témoigner le respect
le plus profond, et la conjurer de donner sa bénédiction apostolique à notre
Congrégation et à nos Missions. »
« Nous avons encore d'autres statuts qui concernent nos Séminaristes; si Votre Éminence
désire en avoir communication, j'aurai l'honneurde les lui faire parvenir. »
Le 4 septembre, Son Éminence accusa réception de l'exemplaire des Règles, et accepta
l'offre de la communication des Règlements des Séminaristes. M. Bertout les envoya le 13
octobre.
Voici la réponse de Son Éminence, en date du 25 décembre :
« Révérendissime Seigneur, Nous avons reçu la lettre de Votre Seigneurie et, avec
elle, les Règles de votre Séminaire, destinées à bien former l'esprit de vos élèves
pour en faire les vaillants messagers de l'Évangile auprès des nations barbares. Ainsi,
vous avez satisfait aux désirs de la Sacrée Congrégation, elle vous exprime la
reconnaissance qui vous est due. Elle examinera attentivement ces règles afin d'en
retirer ce qui paraîtra le plus conforme aux esprits des Orientaux et le plus apte à
procurer l'extension de notre sainte Religion catholique»
Comme cette approbation ne se faisait pas aussi vite que l'aurait désiré le bon M.
Bertout, Son Éminence le rassura à plusieurs reprises en lui donnant chaque fois
l'espoir qu'après qu'on aurait bien examiné ces Règles, elles seraient approuvées. Le
9 février 1822, Son Éminence lui écrivait encore dans le même sens :
« Pour ce qui regarde l'approbation par le Saint-Siège des statuts de votre Seminaire,
j'espère pouvoir vous donner bientôt, une réponse définitive. »
Ce fut la dernière lettre de Son Ém. le cardinal Fontana, qui mourut le mois suivant.
Quelque temps après, il avait pour successeur, avec le titre de Pro-Prèfet, Son Ém. le
Cardinal Consalvi. M. Bertout ne tarda pas à entrer en rapport avec lui, et, le 20 avril
1822, Son Ém. lui fit savoir à quelle condition cette approbation pouvait être donnée
: la dépendance du Saint-Siège :
« Révérendissime Seigneur, Les Règles et Constitutions de votre illustre Séminaire
dédié au Saint-Esprit ont été mûrement examinées. Les EE. Pères ont trouvé ces
Règles pleines de prudence, de sagesse, d'indelligence et très propres à former
d'excellents ministres du Sanctuaire. Cependant, ils ont remarqué, qu'il y manquait une
chose très importante et nécessaire entre toutes : la dépendance due au Siège
apostolique, sans laquelle la Congrégation a pensé que ces Règles ne pourraient que
difficilement être approuvées par une décision suprême du Saint-Siège. Il est assez
évident qu'au Souverain Pontife appartient le droit suprême d'envoyer de saints
missionnaires de l'Évangile à toutes les nations lointaines et infidèles, pour y
propager la foi catholique. Sur ce sujet, le Siège apostolique est tellement soucieux et
vigilant qu'il ne pourrait déléguer ce pouvoir à personne, sans d'abord en connaître
le mérite et la science, et sans lui donner l'approbation et la bénédiction
apostolique. En vérité, je ne doute pas que, pour le moment, la Sacrée Congrégation ne
puisse se reposer avec sécurité sur la droiture et le zèle bien connu de Votre
Seigneurie. Mais, dans la confection des lois, il importe de regarder l'avenir dont les
vicissitudes et les résultats ne peuvent être prévus. C'est pourquoi le procédé d'une
coiffiance sans bornes et la concession d'une faculté illimitée qui vous serait
accordée présentement pourraient être interprétée par vos successeurs comme le titre
d'un droit acquis, ou du moins comme le prétexte d'une mesure odieuse, si ce qu'on vous
concède venait dans la suite à être restreint. Puisqu'il en est ainsi, la Sacrée
Congrégation est persuadée que Votre Seigneurie trouvera juste et convenable, qu'avant
toute nouvelle proposition, on ajoute aux Règles et Constitutions déjà existantes,
cette autre indispensable et de la plus grande importance, à savoir : toutes les affaires
qui concernent, les Missions doivent être traitées et expédiées avec la pleine entente
et l'approbation du Siège apostolique par l'organe de la Sacrée Congrégation de la
Propagande. J'attends votre réponse à ce sujet, etc...[8] (1).
M. Bertout,, dans sa réponse, se déclare prêt à accepter, cette dépendance, qui,
dailleurs, est de droit. « Votre Éminence me demande, dit-il, comme condition de
l'approbation à accorder a nos Statuts par le Saint-Père, la soumission de notre
Congrégation au Saint-Siège pour toutes les affaires relatives aux Missions des
Colonies. Je consens bien volontiers que cette clause soit ajoutée à nos Règles et
Constitutions. Cette soumission a toujours été et sera toujours dans nos coeurs. » -
Cette réponse causa beaucoup de satisfaction au Cardinal qui, en-retour, fit espérer,
par sa lettre du 31 août 1822, que l'approbation carionique des Règles par Sa
Sainteté ne se ferait plus attendre longtemps.
Cependant, pour que la S. Congrégation pût enfin proposer les Règles à l'approbation
de Léon XII, le droit exigeait, outre le consentement du Supérieur, celui des autres
membres de la Congrégation. Cette formalité à remplir est l'objet de la lettre
suivante, du 26 avril 1823 :
« Révérendissime Seigneur, L'assentiment que Votre Seigneurie a donné, comme je m'en
doutais, à notre conseil, qui était que pour obtenir l'approbation des Règles de votre
très illustre Séminaire du Saint-Esprit, il fallait y ajouter cette autre Règle
statuant que toutes les affaires relatives aux Missions des Colonies doivent être
traitées et expédiées avec la pleine entente et l'approbation du Siège apostolique par
l'organe de la Sacrée Congrégation de la Propagande, cet assentiment a donné grande
satisfaction aux EE. Pères. Mais, comme il s'agit d'une société où non seulement le
Supérieur, mais aussi les conseillers et leurs électeurs ont chacun leur rang, le droit
strict demande que et le Supérieur et aussi les autres consentent à l'acceptation de
cette Règle. C'est pourquoi il est nécessaire que tous les membres de la société
manifestent leur volonté et leur consentement à l'insertion de cette Règle et qu'ils
vous confèrent le pouvoir de l'ajouter aux anciennes. Après avoir reçu cette faculté,
vous nous en enverrez l'acte juridique avec la signature des membres qui ont donné leur
suffrage, après quoi on pourra procéder régulièrement à l'approbation des Règles.
Mais cette approbation portera seulement sur les dix chapitres qui constituent les Règles
et Constitutions principales et substantielles du Séminaire, les seules qui furent
approuvées en 1734 par l'archevêque de Paris; elle ne concernera pas les articles
relatifs au gouvernement intérieur et, aux charges des fonctionnaires, car ceux-ci
peuvent changer suivant les circonstances de choses ou de temps, ainsi qu'il est indiqué
au chapitre V, art. 4. En attendant, votre réponse, je prie Dieu de répandre sur vous
l'abondance de ses biens.
H Card.Consalvi Pro-Pref. Petrus caprano Arch. Iconis , Secr.
Peu au courant de ces sortes de formalités, M. Bertout envoya un simple écrit attestant
par les signatures que ses confrères avaient donné leur consentement (30 juin). Hélas
Son Ém. le Cardinal Consalvi, qui avait conduit cette affaire avec tant d'habileté et de
succès, n'eut pas la satisfaction de la terminer : vers le milieu de cette année 1823,
il suivit Pie VII dans la tombe. Le Cardinal della Somaglia fut alors nommé Préfet de la
S. Congrégation de la Propagande. Son Eminence envoya à M. Bertout la formule de
lacte à signer par les confrères, ajoutant que, pour être authentique, cet acte
devait être visé par le Nonce de Paris ou par un notaire public.
« Révérendissime Seigneur, Il n'y a aucun doute pour la Sacrée Congrégation que les
directeurs du Séminaire du Saint-Esprit ne soient d'accord avec vous pour ajouter aux
anciennes Constitutions du Séminaire la Règle qui établit la dépendance due au
Saint-Siège. Cependant, comme il faut le reconnaitre juridiquement, afin que l'acte de ce
consentement puisse être consigné dans les Registres de la Sacrée Congrégation, et
puisque l'écrit que Votre Seigneurie nous a transmis par lettre du 30 juin n'est pas
authentique, la Sacrée Congrégation désire que la formule de consentement, dont je vous
envoie un exemplaire ci-joint, fût signée par vous et les autres prêtres de la
Société. Cette formule authentique, selon ce qui se pratique en des cas similaires,
devra être visée par le Nonce apostolique ou par un notaire public; puis vous nous la
ferez parvenir. Je ne doute pas que vous ne vous acquittiez de cette formalité, avec
plaisir et avec soin, et je prie le Dieu Tout-Puissant de répandre sur vous l'abondance
de ses biens.
De Votre Seigneurie, le tout dévoué. »
Le Supérieur du Saint-Esprit se conforma de tout coeur aux désirs et indications du
Cardinal Préfet et fit accompagner l'envoi de la pièce demandée [9]des lignes
suivantes, en date du 5 décembre 1823 : « J'ai l'honneur d'envoyer à Votre Éminence
l'acte de notre soumission au Saint-Siège pour tout ce qui regarde les Missions des
Colonies, suivant le modèle qui nous a été donné, et légalisé par Son Excellence Mgr
le Nonce. Après la réception de cette pièce, j'ose espérer que nos Statuts recevront
l'approbation de Sa Saintété (Léon XII). J'ai eu l'honneur de la connaïtre à Paris :
si j'osais prier Votre Excellence de lui prèsenler nos respectueux hommages, nous nous
jetterions à ses pieds pour lui demander sa bénédiction. »
Cette fois, les voeux de M. Bertout, et de ses confrères vont être accomplis. En effet,
à la réunion du 12 janvier 1824, les Règles furent de nouveau soumises à l'examen de
la S. Congrégation, et, sur le rapport de son secrétaire, Mgr Pierre Caprano,
archevêque d'Icone, elles furent enfin approuvées par un décret, du 7 février suivant.
Le texte de ce décret se trouve en tête des Règles. Le 17 mars, M. Bertout accusa
réception de ce précieux document et offrit aux Cardinaux de la S. Congrégation de la
Propagande l'expression de ses plus respectueux hommages et de sa vive reconnaissance.
Désormais, l'Institut était canoniquement reconstitué et l'on put procéder à
l'élection du Supérieur; mais, pour cela, il fallut des dispenses quant à certaines
conditions exigées de la part des électeurs. Mgr de Quélen les accorda sans
difficulté, en date du 20 juin 1826. L'élection eut lieu le 16 juillet suivant. M.
Bertout fut élu à l'unanimité, et, le 1er août, son élection confirmée par un acte
authentique de Mgr de Quélen, archevêque de Paris. Les électeurs furent, outre MM.
Bertout et Fourdinier, MM. Henry Power, du diocèse de Cork, en Irlande, agrégé au
diocèse de Paris, entré en qualité de Séminariste étudiant, le ler janvier 1820,
associé à la conduite et au gouvernement de ladite Communauté le 1er Octobre 1822; -
Éléonore-Germain Baradère, du diocèse de Tarbes, entré au Séminaire en qualité, de
séminariste le 10 février 1821, associé à la conduite et gouvernement de ladite
Communauté le 4 octobre 1823; - Antoine-Jacques-François Deligny-Soulé, du diocèse de
Tarbes, entré en qualité de Séminariste le 5 janvier 1821, associé le ler juillet
1824; - Adolphe-Emmanuel Nicole, du diocèse de Coutances, agrégé à celui de Paris,
entré en qualité de Séminariste le 3 octobre 1821, associé le 13 juin 1823; - Jean
Hardy, du diocèse de Tours, agrégé à celui de Paris, entré en qualité, de
Séminariste le 22 octobre 1822, associé le 30 mars 1826 [10]
Mais les épreuves sont le sceau des oeuvres de Dieu. Vers 1825, la Commission nommée
dans le but de réorganiser l'enseignement ecclésiastique supérieur, voulant installer
une École des Hautes-Études dans les bâtiments du Séminaire du Saint-Esprit, offrait
en échange une autre maison. « Le projet de la Commission des Hautes-Études, disait M.
Bertout, est de s'emparer de la maison du Séminaire du Saint-Esprit et d'ôter à ce
Séminaire le soin de former des jeunes gens pour les Missions (coloniales). On se propose
d'offrir aux directeurs une autre maison, pour recevoir les prêtres que les évêques
enverraient pour ces Missions; car on doit donner à chaque évêque quatre bourses à
condition qu'il fournisse deux Missionnaires. Ce projet est contraire à notre droit de
propriété et à nos Constitutions, etc. » Évidemment, M. Bertout ne pouvait consentir
à de telles propositions : il protesta vivement contre ces étranges prétentions. On
finit toutefois par comprendre l'inconvenance de telles exigences, et, l'affaire en resta
là [11]. Cependant, ce projet d'une école de Hautes-Études fut repris par Mgr Affre;
mais il fit l'acquisition de l'ancien monastère des Carmes, occupé par les Carmélites
depuis 1797 et acheté, par la Rev. Mère Camille de Soyecout.
Une autre crise se produisit en 1829. Enhardis, sans doute, par les fâcheuses Ordonnances
relatives aux petits Séminaires et aux Jésuites, que Charles X eut la faiblesse de
signer l'année précédente, deux avocats du barreau de Paris, MM. Pierre Grand et
Isambert, députés très hostiles aux Religieux et aux Missionnaires, présentèrent à
la Chambre, séance du 7 mars 1829, des pétitions ayant pour objet, entre autres choses,
la suppression des Congrégations de Saint-Lazare, des Missions Étrangères et du
Saint-Esprit. La droite protesta énergiquement, surtout Mgr Feutrier, évêque de
Beauvais, qui avait succédé à Mgr Frayssinous au ministère des Affaires
ecclésiastiques, et qui déjà, en 1807, avait remplacé M. Jauffret comme vicaire
général de la grande Aumônerie; il rappela fort à propos que les trois Congrégations
avaient l'existence légale et prouva que la loi du 2 janvier 1817, loin d'avoir, par
rapport à elles, force rétroactive, les revêtait, au contraire, de la sanction
législative, au moins indirectement. La cause fut gagnée et le vote rejeta les
pétitions.
L'année suivante, le Séminaire du Saint-Esprit fut soumis à une épreuve bien plus
terrible et bien plus désastreuse. Le dimanche 25 juillet 1830, le ministère Polignac
avait fait signer par le roi, à Saint-Cloud, les quatre Ordonnances qui devinrent
l'occasion d'une nouvelle révolution et de la chute de Charles X. Le jeudi 29,
l'Archevêché est envahi, pillé et dévasté. Chez les Missionnaires de France, dans la
rue d'Enfer, on fait beaucoup de dégâts et plusieurs prêtres sont maltraités. A
Montrouge, on saccage la maison et le jardin des Jésuites; on abat les croix.; on insulte
et on maltraite les ecclésiastiques dans les rues.
Au milieu de ce déchaînement des passions révolutionnaires, le Séminaire du
Saint-Esprit ne pouvait pas être épargné. Le vendredi 30, des gardes nationaux s'y
présentent ainsi qu'à celui des Irlandais, réquisitionnent de l'argent et, d'après
l'Ami de la Religion, emportent plus de mille écus; mais il se trouve parmi eux des gens
honnêtes qui les font restituer à leurs propriétaires. Dans une lettre du 8 mai 1831,
à M. Lacombe, Préfet apostolique de la Guadeloupe, M. Bertout disait : « Mon
secrétaire, celui de M. Fourdinier et la porte de sa chambre ont été brisés; ensuite,
le pillage a eu lieu. Depuis ce temps-là, nous avons été menacés, mais on en est
resté là. Je ne sais si l'on ne reviendra pas à la charge. Priez pour nous, etc. »
La maison de campagne (de Gentilly) eut le même sort que le Séminaire. « La semaine
dernière, lit-on dans l'Ami de la Religion (2 septembre 1830), un nombreux rassemblement
s'est porté vers les maisons de campagne de Gentilly; l'une de ces maisons appartient au
Séminaire du Saint-Esprit, et l'autre à Messieurs de Saint-Lazare. On y est entré
par-dessus les murs; on a dévasté le jardin et causé des dégâts dans la maison. Le
rassemblement était formé principalement, à ce qu'il paraît, d'ouvriers des carrières
voisines : on leur avait dit que ces maisons étaient occupées par des Jésuites et
qu'elles, renfermaient des armes, etc. »
Bien d'autres déboires et bien d'autres pertes devaient résulter pour le Saint-Esprit du
nouvel ordre de choses : non seulement les allocations des deux ministères de la Marine
et des Cultes furent supprimées à partir du ler septembre 1830; mais on voulut même
anéantir l'oeuvre du Saint-Esprit et, lui enlever sa maison. Dans une lettre à la
Propagande, M. Bertout disait : « Au mois de juillet 1830, notre maison de ville et celle
de la campagne ont été dévastées et pillées. Nous avons été un an sans pouvoir
recevoir d'élèves. Au mois d'octobre dernier (I831), nous en avons admis un petit
nombre; nos moyens ne nous permettent pas d'en avoir davantage pour le moment. »
Malgré cela, les prêtres du Saint-Esprit continuèrent à occuper le Séminaire; bien
plus, le ministre de la Marine ne cessait de s'adresser à eux pour avoir les prêtres
nécessaires aux Colonies. - Dès le 20 novembre 1830, M. Fourdinier, au nom de M. Bertout
très malade, avait informé le Cardinal Cappellari de ce qui venait de se passer. Son
Éminence répondit :
« Je viens de recevoir votre lettre du 20 novembre par laquelle j'ai appris avec douleur
l'état précaire où se trouvent et la santé de M. Bertout et les affaires du Séminaire
»
Ce cardinal ayant succédé, en 1831 à Pie VIII, sous le nom de Grégoire XVI, le nouveau
Préfet de la Propagande fut le cardinal Pedicini. En réponse à une communication de M.
Bertout, en date du 15 mai 1832, il écrivait le 9 juin :
« Pour ce qui regarde létat actuel du Séminaire du SaintEsprit qui était la
seconde question de votre lettre, ce serait le désir de la Sacrée Congrégation de
subvenir par d'abondantes aumônes aux besoins de cet Institut si bien méritant de la
Religion et des Missions. Mais, pour le moment, la Sacrée Congrégation se trouve dans
une pénurie d'argent, que Votre Seigneurie n'ignore pas, ou du moins qu'elle peut
facilement conjecturer de la difficulté des temps. Toutefois, pour contribuer autant que
possible au soutien de cette oeuvre excellente et salutaire, la Sacrëe Congrégation a
décidé de vous accorder pour celle fois un subside de 3.000 francs. Nous confions la
remise de cette somme à Son Exc. Mgr Antonio Garibaldi (Nonce apostolique), de qui vous
la recevrez (1).
Enfin, nous arrivons à une dernière calamité. En mars 1832, le choléra avait éclaté
à Paris et y faisait de terribles ravages, surtout parmi les troupes. Le 5 avril, le
ministre de la Guerre fit connaître son intention d'occuper « temporairement » les
bâtiments du Séminaire et d'en faire une succursale de l'hôpital du Val-de-Grâce : M.
Bertout y consentit bien volontiers; mais à la condition que M. Fourdinier et lui y
garderaient leurs chambres. Les séminaristes furent installés dans le bâtiment contigu
à la chapelle et occupé plus tard par le patronage de Sainte-Mélanie. Le 7,
l'administration militaire prit possession de la maison, et cinquante ouvriers du génie
se mirent aussitôt à démolir les cloisons des cellules. MM. Bertout et Fourdinier,
ayant fait quelques observations à ce sujet, le ministre écrivit, le lendemain, à M.
Bertout pour le rassurer. « La destination donnée à votre maison, disait-il, n'est que
momentanée, et, dès l'instant où la maladie cruelle qui afflige Paris et les troupes
aura diminué ses ravages, elle vous sera rendue; tout, sera rétabli dans l'état actuel,
aux frais de mon département. »
Hélas ! le fléau passé, on ne tint pas ces promesses et on voulut garder l'immeuble. On
offrit en échange une autre maison appartenant au ministère de la Guerre : refus et
protestations de MM. Bertout et Fourdinier; et, sans attendre, ce dernier fit des
démarches auprès des ministres de la Marine et des Cultes pour obtenir l'évacuation du
Séminaire. Dans le même but, le 10 décembre, il s'adressa à M. Barthe, qui venait de
cumuler les deux ministères de la Justice et des Cultes; celui-ci écrivit au ministre de
la Guerre pour lui rappeler ses promesses du 8 avril; mais en vain, et, bien que le
choléra eût entièrement disparu, les militaires continuèrent à occuper le Séminaire
jusqu'au 4 août 1835.
C'est le jour même où M. Barthe écrivit sa lettre, c'està-dire le 10 décembre 1832,
que le bon M. Bertout rendit son âme à Dieu. Dès le lendemain, l'Ami de la Religion,
publia un premier article nécrologique, puis un second le 19 janvier suivant. De
celui-ci, nous détachons les lignes suivantes : « Ce fléau passé, on continua
d'envoyer dans la maison des militaires qui auraient pu aisément trouver place au
Val-de-Grâce et on manifesta l'intention de garder le local. M. Bertout en conçut un vif
chagrin : c'était détruire en un instant, ce qu'il n'avait pu rétablir qu'avec tant de
peine. Sa santé s'altéra; sa goutte, dont les accès étaient devenus, depuis quelques
années, plus longs et plus douloureux, se fixa sur les organes intérieurs, et rien n'en
put amortir la violence. Le pieux vieillard montra, dans cette crise pénible, un calme
inaltérable : toujours occupé des pensées de la foi, il parlait à peine de ses
douleurs; jamais de plaintes, jamais de mouvements d'impatience, jamais même de nuages
sur cette figure si ouverte et si franche. Il conserva jusqu'à la fin sa présence
d'esprit et ces manières simples et affecteuses qui le rendaient si cher à ses amis. Il
reçut plusieurs fois, les sacrements avec de vifs sentiments de piété. Enfin, une
dernière crise l'enleva dans la nuit du 9 au 10 décembre peu après minuit... Ses
obsèques ont eu lieu dans la chapelle même de son Séminaire; M. l'abbé Boudot, grand
vicaire, ancien confrère et ami du défunt, officiait; M. le curé de Saint-Étienne, qui
est la paroisse du Séminaire, assistait en étole à la cérémonie; plusieurs
ecclésiastiques et laïques étaient venus rendre les derniers devoirs à un homme qui
leur était cher à tant de titres. Son corps a été porté au cimetière de
Mont-Parnasse. Espérons que la mort de ce digne Supérieur ne nuira point à
l'établissement; il le protégera sans doute d'en haut. »
Ni le Gouvernement ni la Propagande n'apprirent ce décès avec indifférence. Dès le 18
décembre, le comte de Rigny, ministre de la Marine, adressa à M. Fourdinier cette lettre
de condoléances : « Monsieur, j'ai reçu la lettre par laquelle vous m'informez de la
mort du respectable M. Bertout, Supérieur général du Séminaire du Saint-Esprit. Je
partage les justes regrets que vous fait éprouver cet événement : ils seront vivement
ressentis aux Colonies par toutes les personnes qui ont connu M. Bertout, même
indirectement, et qui ont pu apprécier le dévouement que, pendant une longue et
honorable carrière, il n'a cessé de montrer pour les intérèts de cet établissement,
etc. »
De son côté, Son Ém. le cardinal Pedicini, informé de ce décès par M. Fourdinier,
répondit en termes affectueux le 19 janvier 1833 :
« C'est avec tristesse et avec douleur que nous avons appris par lettre de Votre
Seigneurie du 26 décembre de lannée dernière la mort de M. Bertout, Supérieur
général du Séminaire du Saint-Esprit. Il a travaillé activement et sans cesse au
gouvernement et à l'agrandissement de votre Institut si utile, il a toujours déployé un
soin et un zèle remarquable a promouvoir le bien spirituel des Missions dans les Colonies
françaises. La mémoire de ce saint homme qui a si bien mérité de la Religion restera
toujours chère à la Sacrée Congrégation .
M. Bertout est l'un des hommes qui ont le plus mérité de la Congrégation. Il a été
l'instrument providentiel choisi par Dieu et réservé comme par miracle pendant la
terrible période révolutionnaire pour reprendre l'uvre interrompue et la faire
revivre sur ses propres ruines...
Avec une inébranlable confiance en la Providence, une énergie invincible, une constance
jamais lassée, une habileté et une prudence qui savaient mettre à profit toutes les
bonnes occasions, M. Bertout a reconstitué, l'oeuvre de M. Poullart des Places, en lui
donnant même un caractère plus nettement déterminé, un but plus apostolique, et une
situation légale et canonique plus complètes. Il est le second Fondateur de la
Congrégation, et le berceau qui nous porte - notre chère Maison Mère, - c'est lui qui
nous l'a rendu, en même temps qu'il nous a sauvés dans notre existence. La mémoire de
M. Bertout est une de celles qui ne doit jamais périr parmi nous.
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[1] Cette Notice est, sauf la conclusion, l'oeuvre du P. Jérôme Schwindenhannner.
NOTICES n° 21, mars 1911.
[2] Ce voyage eut lieu à l'époque où labbé Robillard, préfet apostolique de
Cayenne, était revenu en France par suite de ses démêlés avec les administrateurs, qui
avaient l'appui du ministre de la Marine : ce digne prêtre n'avait pas cru pouvoir, en
conscience, se soumettre à une réglementation fortement entachée de gallicanisme.
[3] 1) La chapelle de la rue Notre-Dame-des-Champs a 75 pieds sur 25, en forme elliptique,
hauteur de 20 à 25 pieds. La maison avait été occupée par un petit pensionnat de
filles; elle devint disponible en 1817 par suite de la mort de la Directrice.
[4] (1) Les craintes de voir lui échapper à jamais l'ancien Séminaire n'étaient point
chimériques : influencé par l'Université, M. Decazes avait l'intention d'y laisser
l'École Normale et de donner ensuite une autre maison à la Congrégation du
Saint-Esprit. « Je suis pour certain, disait M. Bertout, que notre maison eût été
donnée à l'Université, par suite des vives sollicitations de M. Royer-Collard,
président de la Commission de l'Instruction publique. Voyant que la maison allait nous
écbapper, quelles que pussent être par la suite les vues du Gouvernement sur nous, je
pris le parti de traiter avec les propriétaires. , - Le 13 octobre 1819, M. Bertout fit
part au cardinal Fontana de cette acquisition :
« Votre Éminence apprendra avec plaisir, écrivait-il, que, je viens de racheter notre
ancienne maison, située près des Dames de la Visitation, rue des Postes. Il y avait
longtemps que j'avais à coeur cette importante affaire. Nous pourrons loger dans cette
maison plus de cent élèves.Le Gouvernement m'avait fait de belles promesses : au moment
d'en venir à l'exécution, il voulut acheter la maison pour son compte, et probablement
pour la laisser entre les mains de l'Université. J'ai prévu le coup; elle me revient,
tout compris, à 115.000 francs environ; mais elle vaut le double. Je suis obligé
d'emprunter de l'argent : j'espère que la divine Providence me fournira les moyens de
satisfaire aux obligations que j'ai contractées. Si Votre Éminence voulait prendre la
peine de me rappeler au souvenir de Leurs Éminences les Cardinaux di Pietro, Gregorio,
Gabrielli, Litta, Oppozoni, je lui en serais infiniment obligé. »
En novembre 1822, M. Bertout informa Mgr Pedicini, secrétaire de la S. Congrégation de
la Propagande, qu'il était sur le point de reprendre possession de l'ancien Séminaire.
« J'ai été très sensible, disait-il, à la mort du cardinal Litla et encore plus à
celle du cardinal Fontana. J'avais en l'honneur de connaître particulièrement ce dernier
et j'avais été assez heureux de pouvoir lui rendre quelques services, dans des temps
malheureux, ainsi qu'a Leurs Éminences Gabrielli, Gregorio, Oppozoni et di Pietro... Avec
quelle satisfaction il (le cardinal Fontana) apprendrait que nous allons rentrer dans
notre ancienne maison, située près de celle qu'il habitait! Cette maison, qui faisait le
sujet de son admiration, est une des plus grandes et des plus belles de Paris; elle peut,
contenir plus de cent séminaristes. J'espère pouvoir y rentrer le mois prochain.
Alors, nous pourrons recevoir un plus grand nombre d'élèves et, nous osons
lespérer, les Missions des Colonies seront désormais mieux desservies.
Réponse, 7 décembre 1822. - Je me réjouis bien sincèrement de votre, rentrée en
possession des magnifiques batiments où était déjà installé votre Séminaire.
J'espère que vous y réunirez un grand nombre délèves. (Vehementer autem
gratulor de (amplore aeium) instauratione, ubi institutum jam lucrat Serninarium istud, ac
spero, te brevi illas non modico âlumnorum numero cumulaturum ,.
En septembre 1825, M. Bertout écrivait, à Leurs Éminences les Cardinaux Gregorio, Buzzi
et Oppozoni : « M. Carraud (Préfet apostoliquede la Martinique) pourra dire à Vos
Éminences que nous sommes rentrés dans notre maison de ville et de campagne, que notre
Séminaire sera composé cette année de près de cent élèves, tous destinés aux
Missions des Colonies. »
[5] 1) État des bâtiments lors du rachat, 13 septembre 1819 : Les bâtiments se
divisent en ancien et nouveau. Une grande porte cochère prise dans le nouveau offre
l'entée des deux.
« L'ancien bâtiment construit en pierres de taille, est composé d'un rez-de-chaussée,
d'un entresol et de quatre étages. Le rez-de-chaussée, où l'on arrive, par un corridor
a gauche, de la porte cochère, forme un grand réfectoire, à l'extrémité duquel se
trouve la cuisine de la maison, L'entresol régne sur toute l'étendue du réfectoire, il
est éclaire par les mêmes fenêtres. Au bout, du corridor qui conduit à ce réfectoire,
commence un très grand escalier qui, depuis le premier étage, communique avec le
deuxième du bâtiment neuf et les étages supérieurs. Les quatre étages de l'ancien
bâtiment peuvent contenir soixante-dix chambres.
- Le nouveau bâtiment est joint a l'ancien et communique avec lui depuis le deuxième
étage, par le grand escalier. Il.est composé d'un rez-de-chaussée et de quatre étages.
Le rez-de-chaussée forme, à gauche de la porte cochère, quelques pièces de décharge
ou propres à des logemerits de domestiques. Avant ces pièces, on rencontre l'escalier
qui ne conduit que jusqu'au second étage. A droite de la porte cochère est le logement
du portier; on trouve ensuite une grande salle de réception qui communique avec la
chapelle. Les quatre étages de ce bâtiment contiennent vingt-quatre chambres, outre cinq
grands appartements.
A la suite de ce bâtiment, à droite de la porte cochère, se trouve une grande et, belle
chapelle, qu'on pourrait appeller église, dont la porte principale est sur la rue des
Postes. Au-dessus de la nef qui est éclairée par une lanterne, est un très grand
emplacement occupé par la bibliothèque, où l'on parvient du troisième étage. La
chapelle est continuée par une grande salle d'exercices ayant pour séparation l'autel. A
côté de la salle d'exercices est une grande sacristie au-dessus de laquelle est
linfirmerie composée de trois pièces, dont une plus grande que les autres, et
d'une tribune ayant vue sur la salle d'exercices et dans l'église. Au-dessous de la
sacristie, de la salle d'exercices et de l'église, sont des (souterrains) destinées aux
classes de théologie et de philosophie et à l'instruction des pauvres enfants du
quartier et des Savoyards. Après, l'église a été construit un bâtiment sur la rue,
destiné à recevoir les Missionnaires anciens ou infirmes qui reviennent des Missions. Ce
Ce bâtiment communique avec les autres par lEglise et par un couloir, ou petite
cour longue et étroite, aboutissant au jardin de la maison dont le terrain, joint à
celui des bâtiments, peut contenir environ deux arpents- Cette maison (le Séminaire) est
en très bon état. M. Mac Dermott, qui l'a occupée pendant huit ou neuf ans, y a fait
de très grandes dépenses, de même que l'École Normale, qui y est aujourdhui
installée. La chapelle a cinq fenêtres de chaque côté, depuis le plancher jusqu'à
l'arête supérieure d'une corniche qui règne tout le long de la chapelle. La hauteur
peut être de 25 pieds; sa partie supérieure est une surface cylindrique, qui donne au
choeur, dans la partie la plus élevée, une hauteur de 34 à 35 pieds. Les quatre
colonnes qui soutiennent la galerie ont environ 22 pieds, leurs bases comprises; la
seconde partie entre les colonnes et la porte, reçoit le jour d'en haut, et a beaucoup
plus d'élévation que le choeur. »
[6] (1) Description de la maison Impasse des Vignes, n° 2 (1818). Désignation de ladite
maison, située cul-de-sac des Vignes, n° 2, près la rue des Postes... Cette maison
ayantcour et jardin entourés de murs, a une entrée par une porte cochère conduisant à
la cour, autour de laquelle, en deux sens, règnent les bâtiments : la partie à droite
est élevée d'un rez-de-chaussée dont la face est en pierres de taille, de quatre
étages et dessus simples, en profondeur, distribués en plusieurs pièces à feu et
deservie par deux escaliers. Au dessus, un comble en mansarde et pointe de grenier,
couvert en tuiles et deux égouts avec chéneau en plomb. A gauche de la porte cochère
est un pavillon élevé au-dessus des caves dun rez de chaussée, deux étages et
d'un comble à deux . égouts couvert en tuiles. Ledit pavillon double en profondeur,
formant plusieurs pièces à chaque étage, fraichement décorées avec des chambranles de
marbre et desservi par un escalier avec rampe de fer. A la suite est un bâtiment en
appentis servant de cuisine; ledit couvert en tuiles Au rez-de-chaussée, dans les
bâtiments, à droite, est un puits. Le jardin, planté d'arbres fruitiers en plein
rapport, et partie en agrément, séparé de la cour par un mur recouvert de dalles de
pierre dure;un perron avec une auge en pierre recevant les eaux par des conduites Au bout
du jardin, à gauche, est un petit bâtiment en appentis forinant deux étages avec
cheminée et escalier, etc.
[7] (1) Ce chapitre a été, ajouté à la biographie due au P. J. Schwindenhammer; mais
les éléments en sont empruntés à ses « cahiers".
[9] (1) La pièce contenant le consentement des membres de la Congrégation portait les
noms de MM. Bertout, Fourdinier, Henry Power, et. Germain Baradère.
[10] 1) Notes de M. Nicole, : En 1826, les noms suivants se placèrent sur le registre que
nous présenta, à nous, membres du Conseil de la Maison, le vénérable Supérieur : MM.
Bertout, Fourdinier, Henry (Power), Soulé, Baradére, Hardy, Nicole. » M. Warnet fut
agrégé plus tard; il était alors à Bourbon. M. Henry (Power), Irlandais, ordonné, au
Séminaire, professeur de théologie, retourna en Irlande en 1830 et y est resté, modèle
de douceur; MM. Soulé et Baradère, du diocèse de Tarbes, entrés an Séminaire un an
avant moi, reçurent des diruissoires de Mgr de Neyrac, évêque de Tarbes, jusqu'au
diaconat inclusivement, et au moment de l'Ordination pour la prêtrise, ou nous les
enleva. Ce fut une grande perte pour nous et un beau gain pour Tarbes,- où, du reste, on
a su apprécier leur éminent mérite. (Ils ont été nommés chanoines titulaires). MM.
Hardy et Nicole, entrés rue Notre-Dame-desChamps, à quelques mois de distance, furent
ordonnés à Paris, le 10 mars 1827, le dernier avec une dispense d'âge, né à Agon,
près de Coutances (Manche), le 17 juillet 1803; M. Hardy, né à Tours vers 1800, riche,
a fait du bien au Séminaire, auquel il s'est donné comme un fils dévoué. Il faut
ajouter cependant que c'était un homme d'un jugement faible, d'un caractère capricieux
et bizarre.
[11] Le 20 juillet 1825, M. Frayssinous avait fait décréter par Charles X
l'établissement, à Paris, d'une maison centrale des Hautes-Études ecclésiastiques. Une
Commission, présidée par l'Archevêque de Paris, Mgr de Quélen, fut chargée d'en
préparer les statuts. Dans la circulaire aux membres de cette Commission et dans ses
discours à la Chambre des Députés, les 25 et 26 mai 1826, M. Frayssinous, ministre des
Affaires ecclésiastiques, annonça que cette école serait la Gardienne des maximes
françaises. Il n'est pas étonnant que, contrairement an droit, on essayât de la fonder
sans le concours du Pape, nécessaire cependant pour lui conférer l'institution
canonique. Ce projet avorta, grâce à la résistance de Mgr de Quélen qui, pourtant,
n'était pas entièrement opposé aux principes gallicans : l'Archevêque réclamait pour
lui seul le droit de nommer les candidats aux chaires de cette école, taudis que les
autres commissaires, avec Frayssinous, voulaient que ce droit de présentation fût commun
à tous les membres de la Commission et que le roi les nommât définitivement. Il faut,
rappeler ici, qu'à la demande de M. Frayssinous, quatorze archevêques ou évêques
présents a Paris signèrent, le 3 avril 1826, une déclaration touchant les quatre
articles de 1682, et la présentèrent au roi, le 10 du même mois. Mgr de Quélen, dès
le 6 avril, publié son refus d'adhérer à la déclaration du 3; mais uniquement par des
considérations qu'il avait soumises au roi. Il paraît que la « Déclaration des
évêques de France" (ils n'étaient que quatorze) du 3 avril 1826 ne portait que sur
le premier des quatre articles. En effet, elle est ainsi intitulée : (Déclaration, etc.)
, sur les droits des souverains et sur leur indépendance pleine et absolue, dans l'ordre
temporel, de l'autorité directe, soit indirecte (de toute puissance ecclésiastique.) Il
y a là certainement une erreur contraire à l'enseignement commun des théologiens
catholiques. Si l'on considère les actes politiques formaliter, ils appartiennent comme
actes humains à l'ordre moral et sont par conséquent directement soumis au jugement
infaillible du Souverain Pontife, parlant ex cathedra. Considérés materialiter ils n'y
sont soumis qu'indirectement. Toutes les fois que les actes politiques n'ont rien de
contraire à la loi soit naturelle, soit canonique, soit divine, l'Église laisse aux
catholiques liberté d'action complète et entière dans le gouvernement de leurs États.
- Ces quatorze Prélats avaient donc oublié que les quatre articles de 1682 étaient
condamnés par un Bref d'Innocent XI, du 11 avril 1682, par la Constitution Inter
mulliplices d'Alexandre VIII du 4 août 1690, et, en 1788, par la Bulle Auclorem fidei de
Pie VI.
(Note P. Jérorne Schwindenhammer)
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