M. Jean-Baptiste BOUDOT
né le 4/01/1765, associé à la Congrégation le 25 août 1789, décédé le 14/12/1838


M. Jean-Baptiste Boudot naquit le 4 janvier 1765, à Châtillon-sur-Seine, au diocèse de Langres (aujourd'hui diocèse de Dijon). Nous n'avons pas de renseignements sur ses premières années; mais nous savons qu'entré au Séminaire du Saint-Esprit à l'âge de seize ans, il fut admis à l'épreuve en juillet 1785 et associé à la Congrégation le 25 août 1789. Immédiatement après, M. Duflos l'envoya au Grand Séminaire de Meaux pour y enseigner la théologie. Lors de la suppression des Séminaires (18 août 1792), il revint à Paris; et, bien qu'il ne quitta jamais la capitale pendant la Révolution, il ne prêta aucun des serments dont on exigeait la prestation de la part des prêtres. Autant qu'il le put, il se rendit utile aux âmes fidèles, exerçant en secret le saint ministère pendant ces années de désolation. Ses vertus et ses mérites le firent remarquer : en 1819, le cardinal de Talleyrand Périgord, archevêque de Paris, oncle du prince de Talleyrand, le nomma chanoine honoraire et théologal, et, l'année suivante, l'associa au Chapitre de la Cathédrale; en 1821, Mgr de Quélen lui donna des lettres de vicaire général et le choisit pour son confesseur. Ces marques de distinction ne changèrent rien à ses habitudes de modestie et de simpli­cité; il continua de mener une vie exemplaire et dé se livrer à ses travaux apostoliques et mourut, presque subitement, le 14 décembre 1838.

Après avoir ébauché rapidement les premiers traits de la vie et du caractère de ce digne prêtre, nous allons reproduire les articles qui ont été publiés dans l'Ami de la Religion, à l'occasion de sa mort et de ses funérailles.

« PARIS. - M. Boudot, premier grand-vicaire de M. l'Archevêque de Paris, est mort subitement ce soir à cinq heures. Il était assis près du feu, dans son fauteuil, lorsqu'il a été suffoqué tout à coup par une attaque de goutte remontée, qui ne lui a laissé que trois ou quatre minutes de vie, sans aucune connaissance. (N° du 15 décembre 1838.)

La mort de M. Boudot - continue l'Ami de la Religion - a vivement affligé M. l'Archevêque, et tout son clergé, auxquels il était également cher. Son savoir théologique, la modération et l'aménité de son caractère, sa vie constamment employée pour le bien de la Religion et de l'Église, tout le recomman­dait à l'estime et à l'affection de ses confrères. Associé aux directeurs du Séminaire du Saint-Esprit, il professait la théologie dans cette maison dont les élèves n'allaient point aux leçons de Sorbonne ou de Navarre. Son nom se trouve avec celui de tous ses confrères dans la liste des prêtres de Paris qui refusèrent le serment en 1791. Malgré cela, il resta constam­ment à Paris, et, ce qui est plus extraordinaire, il logeait au Séminaire même, prenant seulement la précaution de changer de nom et de costume. Après la Terreur, M. Boudot exerça le saint ministère à Paris. Il confessait beaucoup de personnes et prêchait dans les églises. Il remplit longtemps des stations dans presque toutes les paroisses. Lorsque M. le Cardinal de Périgord prit possession de l'Archevêché en octobre 1819, il nomma M. l'abbé Boudot chanoine honoraire et théologal; l'année suivante, il lui donna un canonicat et l'admit ensuite dans son Conseil. M. l'Archevêque actuel le choisit pour son confesseur et le fit grand-vicaire titulaire en 1827, à la mort de M. Borderies. Devenu premier Grand-Vicaire et archidiacre de Notre-Dame par la mort de M. l'abbé Jalabert, il secondait M. l'Archevêque dans les détails de l'administration, dirigeait plusieurs communautés, répondait aux consultations et trou­vait, dans une sage distribution de son temps, le moyen de suffire à tout. Une infirmité, suite, sans doute, d'un long exer­cice du ministère du confessionnal, le tourmentait depuis plu­sieurs années. Il s'y était joint un anévrisme. Il parait que c'est cette dernière maladie qui l'a enlevé. Vendredi dernier, sorti vers les quatre heures pour aller confesser à l'Hôtel-Dieu, il se trouva indisposé en chemin, regagna son logement, n'eut que le temps de s'asseoir et expira en quelques minutes. - Ses obsèques ont eu lieu le lundi 17, à Notre-Dame. Nous ne pouvons mieux terminer cette petite notice que par la lettre, pastorale que M. l'Archevêque a adressée au clergé et aux fidèles à l'occasion de cette perte :

« Venez et voyez quelle nouvelle et subite affliction le Seigneur nous réservait. Considérez le sacrifice qu'il exigeait encore de nous, l'épreuve, d'autant plus sensible qu'elle était inattendue, à laquelle il a voulu nous soumettre ! Notre esprit se déconcerte, notre cœur se gonfle, nos yeux nous refusent les larmes qui pourraient tempérer notre douleur. Vous le dire est, du moins, un allègement, et savoir que vous partagez nos profonds regrets nous est une consolation. L'un des plus anciens dépositaires de notre confiance, comme de notre autorité, le grave et fidèle ami du pasteur et du troupeau, le conseiller si sage du clergé de notre diocèse, le guide sûr de tant de personnes diverses, le directeur habile de tant de communautés religieuses, M. l'abbé Boudot, Vicaire général, archidiacre de notre diocèse, président de notre Chapitre métropolitain, digne successeur de ceux qui partagèrent la sollicitude du vénérable Cardinal de Périgord et la nôtre, vient de nous être enlevé subitement, sans que nous ayons eu le temps de l'embrasser et de bénir son passage de cette vie à l'éternité. Hier encore, nous épanchions les secrets les plus intimes de notre âme dans la sienne; nous lui disions nos peines et nos inquiétudes; et voilà que, dès aujourd'hui, nous ne devons plus espérer de l'entendre nous consoler et nous tranquilliser ! Mon Dieu, que votre saint nom soit béni ! Que votre volonté soit faite ! Vous les répéterez, avec nous, ces actes d'adoration, de soumission, de résignation, proférés au sein de la plus véhémente tristesse qui fut jamais, et ensuite nous nous relèverons calmes, comme l'était le généreux athlète que nous venons de voir tomber inopinément, disposés à fournir, comme lui, la carrière de zèle et de dévouement ouverte devant chacun de nous. Nous serrerons nos rangs, nous marcherons avec confiance sous l'étendard de la croix à la conquête des âmes rachetées par le sang de Jésus-Christ; et, par la grâce du souverain Pasteur, nous nous efforcerons de mériter qu'il soit dit de nous comme du vénérable prêtre dont nous pleurons en ce moment la mort : « Heureux le serviteur fidèle qui, lorsque son maître viendra, sera trouvé saintement occupé à l'oeuvre qui lui avait été confiée : Bealus ille servus, quem, quum venerit dominus ejus, invenerit sic facientem! »
(Ami de la ReligiOn, n° du 18 décembre 1838.)

PARIS. - Les obsèques de M. l'abbé Boudot ont eu lieu lundi à la Métropole. Il s'y était rendu un grand nombre. d'ecclésiastiques; ils remplissaient le chœur et le sanctuaire M. Boudot avait eu des rapports avec presque tous les prêtres de la capitale et il en confessait beaucoup. Des curés de la ville et de la banlieue, des chanoines de Saint-Denis, des Supérieurs de Communautés étaient venus rendre les derniers devoirs à un homme aimé et vénéré de tous, qu'on était accou­tumé à consulter, et des conseils duquel on se trouvait bien. Le Séminaire du Saint-Esprit, entre autres, dont M. Boudot avait été un des directeurs et pour lequel il avait conservé un vif attachement, était là tout entier. M. Boudot avait pris part à la restauration de cette maison, aimait à la visiter, et il était pour tous ses membres un protecteur sage et éclairé. M. l'abbé Salandre, grand-vicaire et archidiacre, a officié malgré son grand âge, sa douleur et ses infirmités, assisté, de deux chanoines, MM. Molinier et Eglée, faisant diacre et sous diacre. M. l'Archevêque occupait son trône et a fait l'absoute. M. Gillis évêque titulaire de Limyra, et coadjuteur d'Édimbourg, assistait au service. Le corps a été porté au cimetière du Père Lachaise, où M. l'abbé Jammes, grand-vicaire et archidiacre, et bon nombre d'ecclésiastiques, l'ont accompagné. Le clergé, les fidèles font une grande perte. M. Boudot était, par son âge, par son expérience, par sa sagesse reconnue, le conseil et l'appui des jeunes ecclésiastiques. Il dirigeait huit ou dix Communautés religieuses; il était le lien entre l'ancien et le nouveau clergé. Il avait les vieilles traditions de l'Église de France et, en même temps, il savait se conformer aux besoins actuels. Sa vie sérieuse et occupée représentait très bien celle d'un homme de communauté. Il se levait à cinq heures du matin, faisait son oraison, disait sa messe et confessait à des heures réglées, soit chez lui, soit à Notre-Dame. Il avait éga­lement des heures marquées pour recevoir tous ceux qui venaient le consulter et ceux qui avaient affaire à lui pour des choses d'administration. Il dirigeait des personnes du plus­haut rang et n'en parlait jamais. Modeste, réservé, toujours calme au milieu des plus importantes affaires,, toutes ses habitudes étaient graves, dignes, celles d'un bon prêtre. Espérons, qu'il aura reçu la récompense de cinquante ans de vertus, de travaux et de services.
(Ami de la Re1igion n° du 20 décembre 1838.)

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