Le Père Isaïe BOULANGER,
1804-1854


Né le 3 février 1804, à Boësse, dans les Deux-Sèvres, Isaïe était le douzième enfant d'Adrien-Bemard et d'Elisabeth Maugeret. Après ses études primaires, le père de famille décida que cet enfant resterait avec lui pour les travaux de la ferme. Ce qu'ü fit jusqu'à 19 ans. En 1823, une mission spirituelle donnée à Argenton éveilla en lui une vocation sacerdotale. Il entra au petit séminaire de Bressuire, où son frère aîné, Henri, professeur dans l'établissement, l'aida à réduire son retard. En 1828, ü entrait au grand séminaire de Poitiers et était ordonné prêtre en 1831 par Mgr de Bouillé.

Curé de Cissé, à trois lieues de Poitiers, il employa tout son zèle à animer cette paroisse rurale, réparant son église, donnant des leçons particulières à des enfants, se mettant à la disposition des adultes pour des services sociaux, organisant des rencontres pour les prêtres du canton, sollicitant le concours des missionnaires diocésains pour sa paroisse, lui-même intervenant dans la rue et les champs. Quand son père fêta ses noces d'or de mariage, l'église était trop petite pour contenir la famille et les amis.

Il prit alors un repos en famille. Puis l'évêque lui demanda d'accepter la paroisse plus importante de Lussac-les-Châteaux. Il fut heureux de pouvoir y installer des religieuses enseignantes pour l'éducation des filles. Mais l'exemple d'amis prêtres partis en Chine éveilla en lui le désir des missions. Âgé de quarante ans, il se tourna vers le Père Libermann qui venait de fonder la congrégation du Saint-Coeur de Marie pour l'évangélisation des Noirs. Il-.fut inscrit dans le registre du personnel sous le numéro 30, en 1845.

Il resta encore cinq ans en France ; d'abord à Amiens, économe de la maison du P. Libermann. Le 6 janvier 1847, il y fit sa consécration à l'apostolat, en compagnie de l'abbé Truffet, qui fut bientôt après nommé Vicaire apostolique des Deux-Guinées ; arrivé à Dakar le 8 mai, ce jeune évêque devait, hélas, y décéder le 22 novembre suivant.

En 1848, le Saint-Cceur de Marie du R Libermann réalisa sa fusion avec la congrégation du Saint-Esprit. Le R Libermann en devint responsable. Il affecta le P. Boulanger à Bordeaux, comme aumônier de la grande maison d'oeuvres sociales et chrétiennes que dirigeait un étonnant laïc missionnaire, le dynamique et original M. Germainville. Ce n'est que le 22 février 1850 que le P. Boulanger partit enfin pour l'Afrique.

Il s'embarqua à Brest et arriva à Gorée le mois suivant avec cinq confrères. Mgr Kobès, successeur de Mgr Truffet, ne tarda pas à le choisir comme vicaire général et lui confia la construction de l'église de Ste-Marie de Gambie. Il vint ensuite prendre ses responsabilités à Dakar, pendant les six mois du séjour de l'évêque au Gabon. H eut à régler deux affaires difficiles, et le fit à la satisfaction de tous. Puis il inspecta durant trois mois la mission de Grand-Bassam (Côte d'Ivoire) et sut se faire agréer de tous, blancs et noirs, de toutes conditions. Il alla encore plus loin, jusqu'au Gabon pour visiter les confrères et les gens du pays, et encourager tout le monde dans le bien.

La Préfecture apostolique du Sénégal administrait un territoire plus exigu que la Sénégambie, mais assez important; les îles de Saint-Louis et de Gorée étant des villes constituées, sièges du gouvernement français en Afrique. Au départ de l'abbé Guyard qui avait donné sa démission, la congrégation du Saint-Esprit venait d'être officiellement chargée de la prendre en charge. C'est le P. Boulanger qui en fut investi Il écrivit au Père Libermann : " Comment, mon bien-aimé Père, avez-vous pu consentir à ma nomination, vous qui savez tout ce qui me manque pour cette charge, qui va du reste si peu à mes goûts, et qui contrarie tous les projets que j'avais conçus en entrant dans une congrégation de religieux missionnaires, de ne jamais occuper de dignités ? Pourquoi donc me séparer de mon Évêque, auprès duquel je me trouve si heureux, et que je me proposais d'aider de tout mon pouvoir jusqu'à ma mort ? " Il était religieux, il fallait obéir, et c'est ce qu'il fit. Il sut aussi s'adapter et se dépenser jusqu'au bout de ses forces.

Longtemps il cacha ses difficultés de santé, mais bientôt ses jambes n'en pouvaient plus et ses forces l'abandonnèrent. C'est sur une civière que les médecins l'embarquèrent pour rejoindre Toulon. L'hôpital militaire l'accueillit, mais ne put retarder l'issue fatale, le 22 avril 1854. Il avait 50 ans. De grands honneurs funèbres, dus à son titre de préfet apostolique, et plus encore dictés par le respect et l'admiration qu'avaient provoqués sa vie et sa mort, lui furent rendus par la cité à laquelle il était venu confier son dernier soupir.

N.B. - Cette notice est un résumé de l'article sur le Père Boulanger, dans le livre édité en 1856 : "Vies de trois missionnaires apostoliques du diocèse de Poitiers."

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