Le Père Albert Boyer,
1906-1969


Albert Boyer naquit à Sainte-Rosei le 16 septembre 1906. Profès à Orly en 1927, prêtre à Chevilly en 1933, il reçut son obédience pour Madagascar et le vicariat apostolique de Majunga.

Il fut affecté à Ambato-Boeni en 1934 à Marovoay en 1943 ; à Andriamena en 1946 ; à Mitsinjo en 1949 à Mahabibo (Majunga) en 1955.

De la Réunion, perle de l'océan indien, le Père Boyer a gardé le calme imperturbable de ses habitants, que ne troublent ni les fréquents cyclones, ni les volcans mal éteints, la douceur de vivre dans un climat jamais excessif et toujours parfumé, la confiance en la Providence de Dieu qui ne laisse pas mourir de faim ses enfants trop nombreux sur une petite terre. Pour eux, et le R Boyer, ce n'est pas l'inchala des arabes, mais plutôt: " Bon Dieu? il est en l'air et veille sur nous"...

Avec les ans, le P. Boyer était devenu massif et plutôt lent, mais en fait, jamais il n'a agi avec précipitation ... Rien ne sert de courir ....il faut être là où on a besoin de vous. Il était là, pour la visite des malades qui l'appelaient, pour faire le catéchisme à un isolé préparant son mariage, et cela à n'importe quelle heure, même à l'heure sacrée de la sieste tropicale. Il était la providence des pénitents matutinaux ou tardifs. H était tout à tous, sans murmure, sans abandonner sa douceur, son pas lent et l'éternel sourire qui égayait sa barbe noire qui flottait, simplement ou un peu plus fort, selon la fréquence des dérangements...

" N'y a-t-il pas un peu de vertu là-dedans ? " comme disait le cardinal Verdier au chanoine qui le félicitait de son bon tempérament d'auvergnat. Il y avait, chez le P BOYER, du tempéramment et beaucoup de vertu. Nul n'a surpris jamais sur ses lèvres une nuance de méchanceté, une critique amère, ni la plus petite médisance. Tout cela nous le sentons mieux maintenant qu'il nous a quittés 0n était à l'aise avec lui, son silence même était apaisant et tous ses confrères usaient et abusaient de sa douce tranquillité pour déverser en son âme leur conscience, sans jamais trouver en lui un signe d'énervement, de fatigue ou de contrariété. Il était aussi très aimé de ses malgaches il les connaissait bien, il avait jaugé leurs âmes, connaissanant leurs grandeurs et leurs faiblesses.

A son arrivée à Madagascar il fit ses premières armes auprès du Père Mariedasse, pondychérien de vieille souche chrétienne indienne, qui possédait parfaitement le malgache ; aussi le P. Boyer devint vite son émule et put alors passer des heures à écouter les confidences pour réconforter et guérir par des paroles sacerdotales qui pesaient le poids de sa sagesse et de sa foi.

Il était sans souci de ses aises, se trouvant bien partout. Un plat de riz pimenté, une natte pour dormir lui suffisaient. Aussi n'avait-il pas d'impedimenta dans ses voyages apostoliques et pas de viatique. Il avait une cuillère et son gobelet, et avec ces deux instruments il pouvait aller loin, et durer longtemps dans ce pays de l'hospitalité.

Le P. Boyer n'a été ni missionnaire constructeur, ni missionnaire géographe ou chasseur... il a été le missionnaire qui instruit, conseille, console, pardonne, et cela sans s'attachere plus à l'un qu'à l'autre : tous et chacun n'étant qu'une âme à qui il se devait.

Quelquefois on le croyait parti à Maroala en amont de la Betsiboka, alors qu'il se trouvait à Miadana en aval. Il avait rencontré au Tafia, au port de la Marovoay des chrétiens de Miadana qui l'avaient sollicité et il était parti avec eux. Cela a bien quelques inconvénients, car les plus rusés se l'appropriaient, mais cela manifeste aussi sa nature de serviteur évangélique.

Il ne fut que peu de temps chef de station, il réclama bien vite à rentrer dans le rang. Les bilans, les statistiques, la surveillance des travaux manuels n'était pas son fort. Il n'aimait que le ministère des âmes, dut-il faire des kilomètres à pied pour les trouver. " La voiture, disait-il, ça se détraque, je ne connais rien à la mécanique, et puis ça fait perdre du temps ; on ne peut aller que sur les routes qui fuient les villages de montagne ou ceux des rizières. A pied, je vois tout mon monde, on me sait jamais en panne, jamais pressé pour l'heure des repas... toute famille qui mange m'invite. C'est bon la chauve-souris-roussette, les vers blancs du tamarinier, ou les sauterelles et scarabées au goût de noisette, Voky dia basy : je suis rassasié, ça suffit."

Cela a duré 36 ans, de son pas de sénateur, avec le sourire, Malemy fanahy, disaient de lui les malgaches ; c'est-à-dire : bon, doux, avec qui il fait bon vivre.

Il est revenu dans son pays natal, pour accomplir sa dernière marche et atteindre le ciel, le 22 juin 1969, à 62 ans.

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