Le Père Jean-Marie COUILLARD,
décédé à Bessou, le 24 mars 1898,
à l'âge de 30 ans.


Jean-Marie Couillard était né à La Meurdraquière (Manche), le 2 septembre 1868. Il venait d'être ordonné sous-diacre (29 juin 1892) et commençait sa dernière année de séminaire, quand Mgr Le Roy [nouvel évêque du Gabon] vint à Coutances pour y recevoir la consécration épiscopale (9 octobre 1892). Depuis longtemps un irrésistible attrait le poussait à aller travailler au salut des infidèles. Il alla confier ses préoccupations et ses désirs au nouvel évêque des Noirs, qui l'encouragea dans ses desseins de se faire missionnaire.

Sur ces entrefaites, son père vint à mourir, et, quoiqu'il eut un frère aîné prêtre dans le diocèse, comment quitter aussitôt sa mère désolée ! Il ne savait comment lui annoncer son dessein, quand, un peu plus tard, au retour d'un pèlerinage à Lourdes avec lui, elle lui dit d'elle-même, qu'elle avait offert à la sainte Vierge un de ses fils pour être missionnaire. Mais l’évêque de Coutances, tenait beaucoup à ses prêtres et ne les laissait pas facilement partir. Il se résigna donc à accepter, en attendant, un poste de vicaire et y resta pendant deux ans.

Libre enfin de suivre ses attraits, il arriva au noviciat spiritain d'Orly le 13 août 1895, fit sa profession le 15 août l'année suivante et le 10 novembre de la même année, il s'embarquait avec Mgr Augouard pour l'Oubangui.

Plein de santé, de force et de courage, il s'offrit à aller travailler aux avant-postes de la mission, dans la station de la Sainte-Famille des Banziris, dirigée par le P. Moreau. On se trouvait encore au milieu de la période la plus pénible, celle des premières installations. Le zélé missionnaire se prêta joyeusement aux exigences de la situation en se dévouant avec courage à tous les travaux qu'il y avait à faire. Mais, en même temps, il se mit avec zèle à l'étude de la langue indigène.

On le chargea plus spécialement de l'œuvre des enfants, pour la plupart rachetés de l'esclavage. Tout en les formant au travail, il s'attachait surtout à en faire de bons chrétiens. Un peu plus tard, on l'envoya faire une excursion du côté du Gribingui, un des sous-affluents du Tchad ; il en rapporta de précieux renseignements sur les populations de ces contrées, qu'il espérait plus tard aller évangéliser. Mais hélas ! le bon Dieu avait d'autres desseins.

Voici comment le P. Moreau annonçait sa mort à Mgr Augouard, dans une lettre du 25 mars 1898 : « C'est brisé par un coup soudain que je vous écris ces mots. Le cher P. Couillard vient de mourir hier matin, à 3 heures ! Depuis trois jours il souffrait beaucoup d'une enflure à la cuisse gauche et dans tout le bras droit. Le 23 au soir, il ressentit des douleurs au haut du bras gauche, mais rien ne paraissait encore dangereux. Dans la nuit suivante, vers deux heures du matin, je suis réveillé par des cris plaintifs ; je cours dans la chambre du Père et je le trouve sans connaissance. Après lui avoir donné l'absolution, je réveille le frère. Pendant qu'il essaye de ranimer le cher malade, je lui administre l'extrême-onction et lui donne l'indulgence plénière de la bonne mort ; tous les enfants s'étaient levés et priaient à la chapelle. Après un semblant de mieux, le pauvre père commence à râler et il rend le dernier soupir avant que nous eussions terminé les prières des agonisants. »

On ne sait pas au juste la cause de cette mort si rapide. peut-être le cher père aura-t-il été victime d'un empoisonnement ou de quelque piqûre venimeuse ? C'est ce que fait présumer l'enflure dont il souffrait et qui se sera sans doute portée rapidement au cœur. -
BG, t. 19, p. 246.

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