LE FRÈRE TÉLESPHORE GASCHY
de la Mission de Bagamoyo
(1885-1913)
(Not. Biog. V p. 382-383)


Courte existence que celle de ce jeune Frère, mort à 27 ans, en pleine vigueur d'âge et d'activité. Il était né le 4 mai 1885 à Elsenheim, au diocèse de Strasbourg.

Ce fut son oncle, le P. Théophyle Gaschy qui lui fit connaître la Congrégation. Sur sa demande, il fut admis au Postulat des Frères de Chevilly, le 3 septembre 1902. Profès, le 8 septembre 1904, il fut d'abord placé dans la communauté de Prior-Park, et, quelque temps après, lors de la fermeture de cette maison, envoyé à Kneschtsteden. Il fut là employé à la culture.

Son attrait l'avait toujours tourné vers les missions, celles du Zanguehar particulièrement. Le 10 avril 1906, nous le trouvons à Bagamoyo. L'année d'après, demandant son admission au voeux de cinq ans, il écrit au T. R. Père : « J'ai toujours été désireux d'aller en mission; aussi je me plais bien ici. Depuis mon arrivée je suis employé au jardin. J'ai aussi pour occupation la classe et la surveillance de nuit des enfants; maintenant je fais la sacristie au lieu de la surveillance. » (Lett. du 23 avril 1907.)

Quand il écrit cinq ans plus tard pour le renouvellement de ses voeux, il est à Tounoungouo. « Je suis ici, dit-il, depuis que la Station a été reprise. Tout va bien, malgré les petits sacrifices qu'il y a à faire. Je suis heureux et content ». (Lettre du 5 mai 1912.)

A cette même époque Mgr Vogt donnait de lui ce témoignage : « Le Frère Télesphore est un bon religieux et rend de bons services. Son Supérieur, le P. Jaekel, est très content de lui. Je n'ai jamais eu de reproches à lui faire. Il me semble qu'il va sensiblement mieux sous tous les rapports. »

Combien ces paroles de son Évêque pleines de si heureuses constatations, l'étaient aussi de souhaits de longues années dans la Mission ! Ses jours hélas ! étaient comptés. Résumons ici la lettre où le P. Jaekel rapporte le fatal incident de chasse qui amena sa mort.

La provision de viande était à court. Le Frère prend deux chrétiens et va sur les bords du Kingani pour tâcher de tuer quelque antilope. Les voilà sur la trace et bientôt en présence d'un buffle. Le Frère le tire et le blesse. On le poursuit; quand se voyant traqué, il fait volte-face et charge. Le Frère s'abrite derrière un arbuste qu'il abandonne quand l'animal fonce sur lui. Dans son élan, il brise tronc et branches de ce trop fragile rempart, le suit, l'atteint et le roule sur le sol. Le Frère est contusionné et reçoit trois blessures, la plus grave à l'estomac qui est mis à nu, et sort. Ramené à la Mission il est pansé par le P. Jaekel qui l'arrange de son mieux et le fait, dans la nuit même, porter à l'hôpital de Morogoro. Le médecin averti va au devant de lui, nous apprend le P. Brassel, et lui fait des piqûres de morphine.

A l'hôpital le P. Vogel lui donne une absolution. Le P. Brassel arrive à son tour et s'entretient avec lui dans l'état de somnolence où l'a mis la morphine. Il l'excite à la contrition et lui donne une nouvelle absolution. «Merci. Je pense à tout, lui dit le Frère ». Le Père reste, pendant qu'on l'opère, dans une pièce contigüe. L'opération terminée, il rentre; mais le Frère respirait à peine. Le Père peut lui donner une dernière absolution ; un instant après c'était fini.

« Nous avons ramené le corps à la Mission de Morogoro écrit le P. Brassel. Ce matin, 3 février nous l'avons inhumé. Il y a eu grand-messe et le concours de presque toute la population chrétienne a été bien consolant dans cette si triste circonstance. » (Lettre 5 février 1913.)

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