Le Père Alphonse GEMBERLE
SOULTZMATT (Haut Rhin).


LE 5 janvier, le Père Aphones GEMBERLÉ, né à Soultzmatt (68), fêta ses 91 ans. Ce jour-là, à l'hôpital SaintFrançois à Kirungo, en Tanzanie, le doyen d'âge de tous les Spiritains jeta un regard sur sa longue vie, se mit à son bureau et rédigea d'une écriture fine et lisible sa dernière lettre à destination de l'Alsace.

De cette lettre nous extrayons ;e passage suivant: " Je considère comme une bénédiction d'avoir eu mon berceau dans un foyer chrétien; de cette grâce je ne pourrai jamais assez remercier le Seigneur."

Le vieux missionnaire sentait sa fin prochaine; le ciel l'en avait prévenu. A deux reprises, "l'Ancien de la montagne "avait fait deux chutes et s'y était fracturé le bras et le poignet.

Le vieillard était prêt. Ne continuait-il pas à savourer la joie d'avoir eu le rare privilège de commémorer le 70e anniversaire de sa profession religieuse ? Ce jour-là, en octobre dernier, n'avait-il pas noté avec humour : " Mon état de santé fait perdre leur latin à mes deux médecins et à moi mon grec ! " C'est dans la sérénité que le 12 janvier le nonagénaire ferma ses yeux.

LE CORPS-FRANC : ALSACE
Le Père Gemberlé fut l'un des derniers témoins d'une glorieuse époque missionnaire. Durant 61 ans il a eu la chance de travailler en Afrique Orientale, le fameux Est-Africain de jadis. De Bagamoyo il pénétra vers l'intérieur du pays sur les traces des pionniers, fut employé dans diverses missions des " Nguru et Uluguru Mounts " et après des séjours de plusieurs années, cinq à six, selon l'usage de l'époque, il s'était familiarisé avec le pays, et avait appris à connaître les hommes, leur naturel, leurs usages et leur langue.

Cependant ce qui pourtant nous semble être d'un intérêt plus direct, c'est qu'il vécut côte à côte avec la plupart de nos nombreux compatriotes, ses contemporains et parfois rencontra encore les ouvriers de la première heure.

Ainsi le Père Gemberlé revêt pour nous la valeur d'un témoin, d'un symbole et même d'un monument. Plus qu'un ancien, il est un ancêtre.

Car ne l'oublions pas : l'Est-Africain de son temps fut une immense région apostolique, confiée principalement aux Spiritains de notre pays, dirigée par trois évêques, sortis de nos villages. L'Afrique Orientale de 1912 évoque pour nous Mgr Émile ALLGEYER de Rixheim (68), Mgr François-Xavier VOGT de Morlenheim (67) et Mgr Aloys MUNSCH de Feliering (68), avec leur fameuse équipe de personnalités puissantes et variées. L'Alsace entre 1868 et 1923 entretint dans l'Est-Africain: au Kenya, au Kilimandjaro et en Tanzanie, un véritable corps expéditionnaire, des volontaires de choc et d'assaut, recrutés depuis la frontière suisse jusqu'à la Lauter. Toutes ses régions y étaient représentées avec honneur.

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