Mgr Raymond de la Moureyre

décédé à Saint-Flour, le 14 février 1997,
à l’âge de 86 ans.


Raymond de la Moureyre est né le 8 mars 1911, à Saint-Flour. Il est ordonné prêtre le 29 juin 1934, à Saint-Flour, pour le diocèse. Il entre au noviciat et fait profession le 5 juillet 1936, à Orly. Affectations : Congo : Mindouli (1936-1937) ; Brazzaville (1937-1941) ; Kibouendé (1941-1942) ; Boundji (1942-1945) et Mbamou (1945-1946) ; Brazzaville (1946-1947) ; Kibouendé (1947-1948) ; Brazzaville, à Saint-François (1949-1953) et à la cathédrale (1953-1956) ; directeur de La Semaine africaine (1956-1959). Il devient évêque de Mouila (Gabon), en 1959. En 1976, il démissionne et revient au Congo :. Brazzaville, curé de Saint-François (1977-1979) ; Mbamou, (1979-1987) ; Brazzaville, aumônier des Petites Sœurs des Pauvres (1987-1992). En 1992 il rentre en France et se retire dans le Cantal.

Il n’acceptait pas le nom de Père. Il n’aimait pas le mot de Monseigneur. Il préférait qu’on l’appelle “Ya Raymond”, parce que “Ya”, au Congo, c’est le grand frère. Fidèle à son désir, j’utiliserai donc cette dénomination.

Ya Raymond est né dans une de ces familles nombreuses où s’épanouissent les vocations sacerdotales et religieuses. Il reçoit la solide instruction qui prépare l’homme de parole et de plume. Achevées au grand séminaire les études cléricales, il est ordonné prêtre, à vingt- trois ans, le même jour que son frère Paul. Deux mois plus tard, il entre au noviciat, qu’il doit prolonger pour raison de santé. Envoyé au Congo, il y trouve un terrain à la mesure de ses compétences et de son enthousiasme.

À Mindouli, un missionnaire auvergnat, Maboni, Joseph Bonnefont, l’initie à la langue et au ministère. Après cet apprentissage, il arrive comme vicaire à la cathédrale de Brazzaville où on lui confie les écoles et un secteur de brousse. Il s’y donne à fond, inaugurant des méthodes pédagogiques dont les anciens se souviennent encore aujourd’hui.

Survient la guerre. Il est mobilisé : d’abord à Bangui, puis à Brazzaville même. En juillet 1940, ses supérieurs le placent à la paroisse Saint-François. Il vit ainsi de près le rattachement du Congo à la France Libre.

Comme on est alors coupé de la métropole, il prend un congé en Angola en 1941. À son retour, on le nomme à Kibouendé : aux activités habituelles de la mission s’ajoute, dans l’école, une section pour la formation des instituteurs, section qu’il accompagne peu après, lors de son transfert à Boundji, dans le nord du pays. Il utilise alors une presse rustique pour rajeunir les cours de science, d’hygiène, d’agriculture, de français et d’histoire, qu’il met parfois même en chansons.

Après un très bref passage au petit séminaire de Mbamou, il est nommé directeur de l’enseignement pour le diocèse de Brazzaville, puis directeur à Kibouendé. Il peut enfin prendre un congé en France : on est en mai 1948, il était venu au Congo huit ans auparavant.

À son retour en mai 1949, on lui confie la cure de la paroisse Saint-François. Il sera vicaire délégué en janvier 1952. Responsable, en 1953, de la grosse communauté spiritaine de la cathédrale, quelques mois plus tard il est promu curé de ladite cathédrale. Ses supérieurs tiennent à exploiter ses compétences et son dynamisme : en 1956, lui sont confiées, tout à la fois, la direction diocésaine de l’enseignement, la direction du journal La Semaine africaine, et la charge de vicaire général.

C’est dans son étroit bureau du journal qu’il apprend sa nomination à l’évêché de Mouila au Gabon. Le 13 septembre 1959, Mgr Marty, évêque de Saint-Flour, lui confère à Libreville, la consécration épiscopale ; et offre au diocèse de Mouila l’abbé Paul de La Moureyre comme “fidei donum”, tandis que l’évêque de Dijon, Mgr Decourtray, envoie pareillement à Mouila un neveu de Ya Raymond, l’abbé François-Xavier Vallée.

Il faudrait beaucoup de développements pour retracer le fécond épiscopat de Ya Raymond. Tout est à faire ou presque dans ce nouveau diocèse. Pour cela, Ya Raymond y va de tout son possible, qui est grand. Publication d’un catéchisme populaire ; ouverture de missions ; construction d’églises, de presbytères et d’écoles ; création d’un petit séminaire ; accueil de nombreuses congrégations jusqu’au fond de la brousse ; fondation d’un collège ; développement d’œuvres sociales avec l’appui du Secours Catholique du Cantal et de celui de l’Ordre de Malte, etc…

Cependant, les années passent. Ya Raymond désire voir un évêque gabonais sur le siège de Mouila. Fin 1976, il est heureux de la nomination de Mgr Cyriaque Obamba. C’est encore le cardinal Marty qui vient l’ordonner en janvier 1977.

Ya Raymond, libéré, peut retourner au Congo. Dans ce pays qu’il affectionnait (et qui sut le reconnaître, en lui conférant le grade de Commandeur du Mérite congolais), il retrouve Saint-François de Brazzaville et le séminaire de Mbamou, et puis se retire chez les Petites Sœurs des pauvres à Brazzaville, toujours actif cependant de la plume et du cœur.

Un accident de santé le contraint à rentrer en France, non sans nostalgie ni amertume. Il reste quelques mois à Chevilly, puis s’en revient à Saint-Flour, près de sa famille et plus précisément de son frère Paul, en maison de retraite et à l’hôpital de Saint-Flour. Ordonnés ensemble, voilà les deux frères partis la même année.

Tracer le curriculum vitæ de Ya Raymond est plus facile et plus rapide que de cerner et d’évoquer sa personnalité si originale et si attachante. J’oserai cependant quelques traits simplificateurs. Ya Raymond a une carrure de prophète : le verbe haut et clair, quelque peu provocateur ; la plume aisée, alerte, inventive, parfois trempée dans l’acide. Il aimait et faisait aimer “Maman Marie”, et sa résidence en portait le nom : “Val Marie”. Son catéchisme s’intitule Dieu est bon, son exclamation favorite, qu’il inscrivait également sur sa voiture et au linteau des portes. Cet ouvrage, aux baroques têtes de chapitre, sort des cadres classiques dans le fond et la forme : il affiche les thèmes de Vatican II, parle en termes clairs et concrets de paix, de justice et de développement. Bref, en ce catéchisme peu banal, Ya Raymond, passionné de l’Afrique et de l’Évangile, met tout son cœur d’évêque et de spiritain. -
René Charrier - PM, n° 231.

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