Le Père Paul LE MOAL,
1883-1965


Né le 11 juin 1882 à Kergaër en Saint-Ségal, de Jean-Paul Le Moal et de madame, née Anne Leborgne, le jeune Paul avait commencé son petit séminaire à Pont-Croix. Bientôt cependant sa vocation missionnaire se précisa et il entra chez Ies Pères du Saint Esprit qui le menèrent au sacerdoce le 28 octobre 1908, à Chevilly. Neuf mois plus tard, le jour de la consécration à l'apostolat, il reçut mission pour le Sénégal. Vicaire à Fadiouth de novembre 1909 à décembre 1910, il fut rapatrié sanitaire pour une fièvre bilieuse qui risqua de l'emporter.

Après un an de repos dans sa Bretagne natale, Mgr Le Roy le nomma pour St-Pierre-et-Miquelon. Le Père était sur le départ, quand arriva un S.O.S. du P. Lequien, curé de Pétionville en Haîti. Ne recevant sur place que l'aide de professeurs fatigués, envoyés par le collège de Port-au-Prince, celui-ci suppliait que lui soit donné un vicaire jeune, actif pour son immense paroisse ; le Père Le Moal vint à son aide de 1911 à 1914, quelque peu jalousé par ceux du collège, car Pétionville est à une altitude fort agréable.

1914, ce fut la guerre ; il fallut rentrer. Resté mobilisable au Sénégal, il chercha à y retourner à son arrivée à Bordeaux, mais il fut dirigé sur le front, d'où il reviendra avec la Croix de Guerre.

De retour à Pétionville dès 1919, il y travailla sans se ménager jusqu'en 1928. Il partagea son activité sacerdotale entre la ville et les immenses campagnes qu'il parcourait sans relâche à cheval, de chapelle en chapelle ; il en édifia de nouvelles. Aussi, une fois de plus, sa santé n'y tint pas, et fin 1928 il dut rentrer en France pour toute une année de repos. Une bonne partie de ce temps, il le donna àla nouvelle maison de Piré, dont il a été un des cofondateurs. Il n'y avait pas là, hélas, le beau soleil des Antilles ! Ses Supérieurs lui permettront de le retrouver à la Guadeloupe.

Le Père Le Moal débarqua à Pointe-à-Pitre le 23 septembre 1929, avec en poche la nomination d'aumônier du Pensionnat de Versailles. Hélas, pris d'une furonculose, il lui fallut s'aliter à Pointe-à-Pitre. Le 18 décembre, Mgr Cenoud le nomme curé au Gosier. Il s'occupera de cette paroisse avec un entrain et un zèle inlassable jusqu'au 12 novembre 1937. Dès cette époque, sa joie communicative et son bon conseil attirèrent vers lui de nombreux confrères ; il restera sa vie durant le conseiller recherché de bien des prêtres, et personne ne fut surpris quand, à la fin de juillet 1937, il fut honoré par Mgr Genoud du camail de chanoine, puis chargé d'une paroisse plus grande, celle de Ste Anne. Il y sera, six ans durant, le pasteur zélé et aimé.

D'avril à Noël 1939, le Père revit la France et les siens pour la dernière fois. En janvier 1944, ne se sentant plus assez en forme, le Père obtint d'être déchargé de paroisse et passa à Port-Louis. Il y aida le curé tout en s'occupant de l'aumônerie des religieuses de Beauport. Pourtant il lui faudra reprendre le collier. A Baie-Mahault, le P. Liagre décéda subitement et il n'y avait personne pour le remplacer. De bon cœur le Père s'occupa de cette paroisse, du 15 janvier 1946 à la mi-janvier de 1948. Sa santé ayant de nouveau fléchi, il retourna à Port-Louis, mais pour peu de temps.

Le 15 octobre de la même année, le Père prit en charge l'aumônerie de l'Hôpital général de Pointe-à-Pitre, et pendant onze ans il a été là au service des souffrants, de jour et de nuit. Dieu sait pour combien il a été l'instrument de la grâce de Dieu, aidant les uns à revivre ici-bas, d'autres à entrer dans la vie éternelle.

L'établissement cependant s'agrandissait régulièrement et le Père, presque octogénaire, ne put plus y suffire. Fin novembre 1959, on lui permit de prendre sa retraite ; il choisit de la prendre au presbytère des Abymes. Retraite, oui ; mai pas inactivité. La grande joie du Père fut de participer le plus possible à la vie de la paroisse et de rendre à ses confrères le plus de services possibles ; prières, lectures, études, occupaient son temps libre et , presque chaque jour, moins sur la fin, car la montée est raide, son pèlerinage à Notre-Dame de Guadeloupe sur le morne du Calvaire. Quand survint dans l'Eglise la réforme liturgique, il y applaudit ; il ne se sentait pas trop vieux pour un nouvel effort, mais s'imposait chaque soir une demi-heure de préparation afin de pouvoir, le lendemain matin, bien dire les textes sacrés.

Quand enfin sonna l'heure de Dieu, elle le trouva prêt. Dix jours de maladie seulement à l'Hôpital général, et peu avant midi du 12 août, entièrement abandonné entre les mains de Dieu, ayant gardé toute sa lucidité jusqu'au dernier instant, le cher Père rendit sa belle âme à Dieu.

Une cinquantaine de prêtres entourèrent Monseigneur l'Evêque le lendemain matin. Mgr Gay lui-même mena le cher Père pour l'ultime fois à l'église et offrit le Saint-Sacrifice en même temps que huit prêtres concélébrants. Retraçant la vie du cher défunt, Monseigneur souligna combien à travers toute sa vie de prêtre il avait été attaché et attentif à l'Eglise, zélé, ouvert aux autres, débordant de joie et de charité. Il rappela aussi ce 3 novembre 1958, un grand jour dans la vie du Père. Il venait, à l'église de Massabielle, de célébrer, entouré des Pères Schweitzer et Le Gallo, leur jubilé sacerdotal, lui de 50 années, eux 25. Une cinquantaine de prêtres les entouraient ce jour-là aussi. A la fin du repas fraternel, dans des mots simples et touchants, il retraça sa vie de prêtre : espoirs, illusions, réalités, et dit ces mots qui révélèrent toute son âme sacerdotale : "Si j'avais le bonheur de regrandir dans la foi et si j'avais mon expérience actuelle, eh bien je voudrais encore être prêtre

Page précédente