Le Père Prosper LITZLER,
décédé à Wolxheim-Canal, le 29 juin 1964,
à l'âge de 77 ans et, après 53 années de profession.
BPF n° 133 p.509-511
Le P. Litzler naquit à Oberdorf, dans le Haut-Rhin, le 25 mai 1887. Il fit profession à Neufgrange, le 21 septembre 1910, fut ordonné prêtre à Knechtsteden, le 10 octobre 1914, et c'est à Fribourg qu'il fit sa Consécration à l'apostolat, le 1er août 1915.
Il fut d'abord, durant quelques années, professeur à Saverne (19181925), puis à Neufgrange (1925-1926). Son premier poste hors de France fut à SaintPierre-et-Miquelon, comme vicaire, de 1927 à 1929. Et c'est ensuite qu'il arriva à la Guadeloupe.
La Providence a ménagé à ce bon Alsacien la satisfaction de venir mourir dans son pays natal et d'y reposer. Mais c'est la Guadeloupe qui a bénéficié de toute son ardeur apostolique. Certes, quelques-uns, de son vivant, avaient, en parlant de lui, un sourire amusé; mais mieux on le connaissait, plus on l'estimait.
Sa tenue était toujours très soignée, avec, parfois, une pointe de recherche; mais très pénétré de la dignité du sacerdoce, il ne concevait pas qu'un prêtre puisse s'exhiber en tenue négligée, et il aurait considéré. comme une faute de n'avoir pas une tenue digne, respectable même.
Ce même souci du beau, du bien, se retrouvait dans sa prédication. Certes, tous les confrères n'appréciaient pas ses sermons « trop longs » et. d'un style solennel, gente éloquence sacrée. Mais là encore, cette façon de faire venait de ce qu'il voulait transmettre avec autorité et majesté la Parole, de Dieu. Un style plus direct et un sujet traité en partant davantage de la vie même du peuple eut sans doute été préférable, mais cette faiblesse ne vient-elle pas de la formation qu'il a reçue et de sa méthode de travail ? Car c'est bien d'un travail qu'il s'agissait, et d'un rude travail! C'était. admirable de le voir, dès le lundi matin, commencer la composition de son sermon pour le dimanche suivant: il cherchait de tous les côtés dans sa bibliothèque, et au besoin empruntait quelque livre, fouillait l'Ami du Clergé, prenait un morceau par ci, une idée par là, agençait, pesait, taillait, recoupait, raturait, recommençait; bref, c'était un vrai travail qui durait parfois jusqu'au samedi. Logiquement parlant , on dira qu'avec d'aussi grands efforts une autre méthode lui aurait donné de bien meilleurs résultats; peut-être. Mais ce ne sont pas les plus beaux morceaux de littérature qui donnent les meilleurs résultats apostoliques. Que chacun fasse tout son possible, à l'exemple du P. Litzler, et le Seigneur donnera la fécondité qu'il jugera à propos.
Pour les cérémonies religieuses et le chant, le même trait essentiel de son caractère tranchait avec autant de vigueur. Ceux qui le jugeaient de l'extérieur souriaient de la pompe qu'il aimait à donner aux cérémonies et de la solennité traînante de son chant, excessivement traînante sur la fin de sa vie. Ne disait-on pas, en blaguant, qu'il mettait cinq minutes, montre en main, pour. chanter une préface ! Mais ce qu'il convient de retenir, c'est cette volonté de célébrer avec toute la dignité qu'impose la Majesté de Dieu.
Autre aspect caractéristique du P. Litzler, c'était son attachement au service des jeunes. Il fut l'un des promoteurs de l'évangélisation des jeunes Guadeloupéens par les mouvements de jeunesse, selon la méthode de son temps. Il fut &ailleurs décoré par le Préfet Ravail, en 1954, pour services rendus, de la Médaille de Sport P. S. F. La raison profonde de cette ardeur, c'est que, toute sa vie, il s'est efforcé d'être le Bon Pasteur, selon ce qu'il avait longuement médité dans l'Évangile. Il s'appliquait à connaître chacune de ses ouailles, et ses efforts sur ce point étaient favorisés par une excellente mémoire. Repassant, vingt ans après, dans une paroisse où il n'avait séjourné qu'un an, il connaissait encore par son nom plus d'un paroissien ... !
Et c'est cette même ardeur apostolique qui l'a maintenu au travail jusqu'au bout. Usé par l'âge, de santé précaire, ne pouvant plus assurer un ministère paroissial, il avait demandé un emploi moins chargé, et il fut tout heureux d'être placé comme aumônier. Mais là encore, ce n'était pas un poste de tout repos. Il assurait le service d'une clinique et de deux hôpitaux répartis sur quelque deux kilomètres d'une rude montée. Sans calculer, sans y prêter attention, il s'est donné de tout son coeur à ce nouveau ministère, lui consacrant toutes ses forces de plus en plus chancelantes. C'est seulement lorsqu'un épuisement total l'eut terrassé qu'il laissa la place à un autre.
En 1954, il avait été nommé Doyen d'honneur et placé comme socius de l'archiprêtre à l'église-cathédrale de la« paroisse de Saint-Pierre et Saint-Paul à Pointe-à-Pitre. C'est en la fête des saints Apôtres Pierre et Paul qu'il s'éteignit à Wolheim-Canal, le 29 juin 1964. Et c'est maintenant un grand sourire de charité et de bonheur qui répond dans l'assemblée des Saints à l'évocation du Père Prosper Litzler.