Le Père Laurent MAZURIE,
1916-1944


Fils de Léon Mazurié et de Francine Razil, Laurent naquit àSaint-Servais le 25 novembre 1916. Ses études le fit passer de Saint-Servais à Langonnet et à Cellule, avant d'entrer au noviciat àOrly où il fit profession le 18 septembre 1937. C'est à Mortain qu'il fit ses deux ans de philosophie. Mobilisé pour la guerre, il participa aux opérations en France du 17 septembre 1939 au 26 août 1940.

A Chevilly pour la préparation directe au sacerdoce, il fait ses voeux perpétuels en 1942, et reçoit la prêtrise à la maison mère le 19 septembre 1943. Le 2 juillet 1944, lors de la cérémonie de consécration à l'apostolat, il est "réservé provisoirement pour la France". Sur son carnet de notes, le P. Mazurié avait écrit: "Parmi ceux qui ont fait leur consécration, n'y en a-t-il pas plusieurs que le Seigneur va rappeler à lui bientôt ? En 1940, plusieurs sont restés... et l'époque est aussi tragique, même davantage. Seigneur, que nous soyons tous fidèles au rendez-vous... au ciel." Il était donc prêt à devenir la victime de son dévouement.

C'était le 23 août 1944. La libération de Chevilly s'opérait par les troupes françaises débouchant de Rungis et se dirigeant sur Paris. Il est 17 heures, le Père se souvient qu'il doit accomplir un ministère chez les Soeurs de Saint-Joseph de Cluny à Thiais. Malgré sa prudence reconnue, il s'aventure en bicyclette sur la route qui mène au carrefour de Thiais. C'est là que se passa le drame. Le P. Mazurié, pris à partie par les allemands installés avec leurs batteries au carrefour de l'Avenue des Sorbiers et de la route de Fontainebleau, état abattu par eux d'une balle à la tête, le soir du 24 au 25 août. Le cadavre a été découvert couché sur le dos, étendu sur l'herbe près du trottoir à l'endroit précis de l'arrêt de l'autobus. Le crâne était fracassé, les balles tirées dans la figure étaient ressorties par le haut de crâne. Le bras et la main droite étaient couverts de sang, le bas de sa soutane déchiré. A côté de lui gisait un garçon de 16 ans, Jacques Hellouin. La bicyclette avait disparu.

Le 25 août, vers les 8 heures, le cadavre avait été signalé par "des chevillais indignés et horrifiés par ce crime" à des Frères secouristes du Séminaire qui, sur la demande de la Mairie ramassaient les morts et les blessés.

On ignore les circonstances précises du drame. Une enquête menée sur place n'a pas élucidé les points obscurs. Selon une première version, le Père serait intervenu auprès des allemands en faveur du jeune homme, Jacques Hellouin, que ceux-ci malmenaient et finirent par tuer. C'est ce qui détermina son assassinat par la soldatesque en état d'ivresse. D'après d'autres témoins, le Père a dû être retenu comme prisonnier pendant la nuit, peut-être obligé de travailler, puis mis à mort sur la route et laissé là jusqu'à la fin de la bataille, c'est-à-dire à la fuite des occupants devant les tanks américains venant de la Belle Epine.

Les obsèques du P. Mazurié, le 26 août, furent marquées d'un trait aussi émouvant qu'imprévu. Vers la fin de la messe, les troupes de la Résistance, accompagnées d'une foule sympathique, revenaient du cimetière communal où ils avaient enterré les morts tombés la veille. Les résistants et la foule sont entrés dans la chapelle du séminaire. Le cercueil passa entre leurs rangs et fut suivi jusqu'au cimetière de la communauté. Quand les dernières prières furent récitées, une salve d'honneur de mousquetons salua la dépouille du Père Mazurié

Le Père Mazurié, aux yeux de la population entrait aux côtés de milliers de soldats dans la grande histoire nationale de son pays, comme il l'eût fait en tombant dans un coin ignoré de la brousse africaine. L'homme propose... Dieu dispose Le 31 octobre 1944, la Municipalté de Chevilly donna le nom de "Rue du Père Mazurié" à l'ancienne Grand'Rue. Et le 11 novembre eut lieu l'inauguration officielle de la rue du Père Mazurié.

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