Le Père Eugène MIGNON,
1827-1855


En 1850, M. Cozonet, directeur du séminaire de Quimper, écrivait au Père Libermann: "Ce n'est pas M. Barbier seulement que je vous adresse. Comme M. Barbier, M. Mignon est diacre, il jouit comme lui d'une bonne santé, il a pour le moins sa piété, son caractère, est je crois plus joyeux, et s'il n'a pas sa capacité intellectuelle je garantis en conscience qu'il a plus qu'il ne faut pour vous rendre des services réels." En post-scriptum, il ajoutait : "J'oubliais de vous dire que M. Mignon est muni du consentement de sa famille et du consentement de son évêque. Nous avons cette année 152 élèves et nous entrons ce soir en retraite. Priez s.v.p. pour nous le bon Dieu et la bonne Vierge; vous y êtes du reste interessé, car de là dépendra peut-être le nombre de bons missionnaires que je mettrai pour vous à la porte du séminaire..."

Ces deux diacres devinrent en 1852 deux excellents missionnaires, l'un au Sénégal, l'autre en Guyane ; tous deux moururent de fièvre jaune, le P. Barbier en 1859, le P. Mignon le 15 août 1855.

Le P. Mignon, né à Châteaulin, était aumônier de l'hôpital de Cayenne depuis un an et demi, quand la fièvre jaune se déclara dans la colonie au milieu de juin. L'arrivée des malades remplit bientôt l'hôpital. Le Père Mignon était le seul prêtre à assurer le service de jour et à être appelé jusqu'à trois ou quatre fois par nuit. Lui-même atteint, ne put être sauvé malgré tous les soins du médecin. Il mourut comme un saint: "il tenait son crucifix collé sur ses lèvres, un rayon de bonheur céleste semblait être descendu sur son visage, il paraissait tout enflammé d'amour."

Depuis la fin de juillet, il n'y avait plus d'enterrement public, tous se faisaient à dix heures du soir ou à trois heures du matin, car c'est à ces heures que passait un tombereau pour transporter les cadavres. On fit exception pour le Père Mignon : plus de 400 personnes accompagnèrent son cercueil, plus d'un versaient des larmes et sanglotaient. Les jeunes se disputaient l'honneur de le porter, ils changèrent plus de douze fois afin d'avoir cet honneur. Ce départ prématuré fut une grande perte pour la Guyane. Le P. Mignon prêchait très bien soit en français soit en créole. Il était surtout un bon religieux, tout plein de charité et d'humilité.

Page précédente