Le Fr. AQUILIN Stroesser,

décédé à Langonnet, le 5 février 1954, à l'âge de 91 ans et, après 70 années de profession.

Alfred Stroesser naquit à Strasbourg, le 5 décembre 1862. Il fit profession, à Chevilly, le 6 avril 1883, puis fut pla­cé successivement à Mesnières, de 1884 à 1911; à Chevilly, de 1911 à 1927; à la Maison-Mère, de 1927 à 1937. Le 5 avril 1945, il arrivait à Langonnet.

C'est une bien noble figure de reli­gieux qui disparaît de la Province avec le cher Frère Aquilin. Les confrères qui l'ont connu de près, à Mesnières, à Che­villy, à la Maison-Mère, au temps de son activité comme maître forgeron­ serrurier, sont unanimes à faire son éloge de parfait religieux, proclamant à l'envi sa douceur jamais démontée, ain­si que sa régularité exemplaire.

De cette régularité, de cette douceur, il continua ici, à l'Abbaye, du­rant les huit années de sa retraite, à donner des preuves éclatantes à tout son entourage. Réduit par l'âge à l'inactivité, et depuis de longs mois à ne plus quitter le lit, il accepta stoïquement cette rude épreuve, se tenant nuit et jour dans une position parfaitement immobile, comme cloué à la croix, mais unissant généreuseme ' nt son sacrifice à celui de Jésus pour le salut des âmes confiées à la Congrégation.

Devant ses visiteurs, il aimait à évoquer le souvenir de sa longue vie laborieuse, à Strasbourg d'abord, où il gagnait déjà sa vie à l'âge de 14 ans, puis au service de la Congrégation, soit à la Maison-Mère où il fut chargé du chauffage central, soit dans les différentes maisons de la Province de France, toujours comme maître forgero.n-serrurier.

Peu expansif, du moins sur la fin de ses jours, son bonheur il le trouvait moins dans la conversation que dans la lecture des revues et des albums traitant de sa province d'origine, ou bien dans la méditation qu'il prolongeait pour ainsi dire indéfiniment.

Quand vous l'abordiez, invariablement il vous plaçait sans retard sur le terrain de la foi, vous répétant avec conviction ce qui était devenu son refrain: «Il faut accepter comme c'est! La vie, il faut l'accepter comme elle est, et les hommes comme ils sont! » A quoi il ajoutait non moins invariablement : « Le Bon Dieu est bon. Il faut se résigner, faire tou­jours la volonté du Bon Dieu. »

La pensée de l'éternité, de l'au-delà, le préoccupait sans cesse. « J'ai hâte de savoir comment cela se passe là-haut, disait-il encore. Au pa­radis, je désire tout visiter. Je demanderai au Bon Dieu la permission d'aller visiter les étoiles, l'une après l'autre »

Au début de janvier de cette année, vu son état de faiblesse, à la suite d'une légère bronchite, son confesseur lui proposa les derniers sa­crements qu'il reçut avec beaucoup de piété.

Par la suite, il alla en déclinant de jour en jour; lui-même s'en rendait compte et disait qu'il ne verrait pas la fin de l'hiver. Le 4 février, alors qu'apparamment rien d'extraordinaire ne se fût passé ce jour, il confia tout simplement à son entourage : « Je me suis trompé, je pensais que ce serait aujourd'hui que je partirais avec les autres. »

Le délai, de fait, devait être de courte durée; dès le lendemain, premier vendredi du mois, le visage du cher, Frère Aquilin avait pris l’aspect émacié des mourants; à la fin des prières des agonisants récitées à son chevet, il dit encore assez distinctement - « C'est la fin »Et c'était vrai; quelques minutes plus tard, à 19 h. 30, le bon Frère cessait de respirer et allait à la grande rencontre de celui qu'il avait, si fidèlement aimé et servi, pour recevoir de lui la récompense promise au bon et fidèle serviteur.

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