Le P. Joseph WILT,
de la Province de France, décédé à Langonnet, le 2 juillet 1947,
a l'âge de 84 ans, après 57 ans (le profession.


Le P. Joseph Vilt est né le 15 novembre 1862, à Otterswiller, diocèse de Strasbourg. Ordonné prêtre le 28 octobre 1889, à Grignon, il filt, sa profession et sa consécration, le 15 aotit de l'année suivante. Le 26 septembre 1890, iI s'embarquait à Bordeaux pour la Guadeloupe, oùil devait rester professeur au collège de Basse-Terre jusqu'en 1905. Obligé alors par son état de santé à un long repos, il rentra en France et, en 1907, il fut définitivement rattaché à la Province qui le plaça successi­vement à Langonnet et à Saverne pour revenir enfin à Langonnet, en 1931.

C'est au soir du 2 juillet 1947, en la fête de la Visitation, que la mort a finalement triomphé, de l'opiniâIre résistance du cher P. Wilt, à laveille de ses 85 ans.

Jusqu'au début de la guerre, le Père s'adonnait encore à quelques occupations; son bonheur, c'était de pouvoir s'occuper du jardin de Saint Joseph, au bas du cimetière; sa joie, de toucher à l'harmonium. Entre temps, il passait à la bibliothèque, ruminait quelques cas de morale on de liturgie, tout en allant d'un couloir à l'autre, passait chez les malades se rendait au jardin, s’en revenait par la chapelle et, d'une chapel a l’autre, se retrouvait finalement, à celle de l’infirmerie, s'enfermait ensuite pendant quelques instants dans la cage du monte-charge pour des exercices d'assouplissement. Le soir, il montait dans sa chambre et attendait là les confrères qui, nombreux, s’adressaient à lui pour leur confession hebdo­inadaire.

Modèle de régularité, il remarquait et faisaît remarquer les moindres infractions au règlement; soucieux de la bonne marche de la communauté , il entendait ne rien laisser passer à la négligence. Son zèle à l’inté­rieur de la Communauté n'avait d'égal que son ardeur à entretenir la ferveur de ses dirigés avec lesquels il correspondait volontiers dans la mesure du possible.

D'année en année cependant, les forces diminuaient; bientôt commen­cèrent les misères du grand âge, supportées vaillamment, avec esprit de foi et le secret espoir aussi de retarder toujours longtemps encore L'épreuve finale, sans doute dans le dessein d'augmenter ses mérites et d'être le plus longtemps possible le bon ouvrier du Bon Dieu et de l'Eglise.

Baisse de la vue, engourdissement des doigts tout bleuis par le froid de l'hiver brumeux et par la mauvaise circulation du sang, vertiges, tout se èonjugua un jour pour enlever au cher Père la joie de monter au saint autel. En avril 1945, le voici pris de congestion; son état devint alarmant, mais simple alerte... Sur ces entrefaites, décès du bon P. Onfroy : le passage de la mort au premier étage inquiéta vivement le malade, qui se hâta de remonter au second et s'arima de pied en cap pour éloigner la redoutable visiteuse et en retarder la rencontre. Bientôt, il fut à même de reprendre ses allées el. venues, mais désormais ait ralenti et en s’aidant d'une canne. Les questions sur sa santé l'importunaient visiblement et à tous ceux qui l’interrogeaient, il répondait invariablement : « Je vais bien-bien. Merci. » Il reprit alors de plus belle ses exercices d'assoit­plissement pour écarter la paralysie; de temps en temps, il s'essayait à marcher sans canne; pour surmonter sa bronchite chronique et enrayer les quintes de toux, il s'astreignit, sur la fin, à mastiquer, du matin au soir, dcs croùtons de pain. A heure régulière, il allait pour la lecture spirituelle tantôt chez l'un, tantôt chez l'autre, mais bien vite le sommeil avait raison de l'attention du bon vieillard, et le lecteur, certains jours, devait souffler fort pour surmonter le ronflement de son voisin. De plus en plus, la somnolence arrivait à vaincre la bonne volonté du cher Père, qui s'excu­sait d’arriver en retard aux exercices ou de les avoir manqués pour n'avoir pas entendu la cloche. A bout de force, ne pouvant plus ni monter ni descendre les escaliers, il dut se résoudre à garder la chambre... au deuxième étage, bien entendu; reconnaissant sa grande faiblesse et, par ailleurs, disposé à faire en tout la sainte volonté dit Bon Dieu, il accepta dans des vues de foi la proposition des derniers sacrements. Par suite, il déclina de plus en plus et, au soir de la Visitation, il s'éteignit tout doucement, sans secousse, après avoir reçu unie dernière absolution.

« C'est un saint », avait dit de lui le Frère Portier de Saverne, en septembre 1931, annoncant à une de ses dirigées le prochain départ du bon Père pour Langonne!. Et cette même dirigée d'écrire, à la nouvelle de son décès : « Je suis remplie de reconnaissance à la pensée de la douce mort qui a été accordée à mon bon Père, image de la transition paisible de la mort à la vie. Dans la pleine abjection qu’est la vie d’un être sur la terre, son enseignement visait toujours à faire connaître les réalités de la vie qui sont en nous. Comment n’aurait-il pas été prêt à entrer dans cette vie dont la Foi lui avait découvert tous les mystères ? »

Bienheureux ceux qui meurent dans le Seigneur, et que leur sort est digne d’envie : !

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