257 ARTICLE PREMIER. - Quoique, pour être admis à la signature du contrat spirituel et civil, il suffise de l'acte de consécration mentionné dans le chapitre précédent, cependant, pour favoriser les pieuses dispositions des âmes ferventes qui auraient le désir de se lier envers Dieu dans la Congrégation par des engagements plus saints et plus parfaits, tous sont autorisés à faire à perpétuité, outre la consécration susdite, les trois voeux de religion entre les mains du Supérieur général ou d'un autre membre par lui délégué.
258 ART. II. - Ces voeux ne pourront être faits que sous la condition que plein pouvoir sera conservé au Supérieur général d'en relever en tous temps et circonstances, par lui-même ou par délégation.
259 ART. III. - Ces voeux ne doivent être prononcés qu'en la seule présence du Supérieur général ou de celui qu'il a délégué pour les recevoir, et ils seront secrets pour toujours. Ils se feront selon la formule suivante:
F o r m u l e d e s V o e u x.
Très-sainte et très-adorable Trinité,
Plein du désir de vous consacrer à jamais toute ma vie et tout mon être, je viens me prosterner devant le trône de votre divine Majesté et vous supplier humblement de recevoir avec bonté l'offrande que je vous fait de tout moi-même.
En la présence de Jésus-Christ, mon souverain Seigneur, de la très-sainte Vierge Marie, ma bonne et très-aimée Mère, de tous les Anges et de tous les Saints, moi, N. N., je vous donne mon corps, mon âme, tout ce que je suis, tout ce que j'ai et tout ce que je peux, pour maintenant et pour tout le temps qu'il vous plaira de me laisser vivre sur la terre.
Je vous promets, ô mon Dieu, et je fais voeu de pratiquer fidèlement toute ma vie la sainte vertu de chasteté.
Je vous promets d'observer toute ma vie la parfaite pauvreté, telle qu'elle est prescrite dans les règles adoptées par les Missionnaires de la Congrégation du Saint-Esprit et de l'Immaculé Coeur de Marie; j'en fais le voeu selon les intentions de ces mêmes règles, avec connaissance de cause, librement et volontairement.
Je vous promets obéissance exacte et fidèle dans la personne des Supérieurs que votre divine Providence me donnera dans la susdite Société, au sein de laquelle j'ai le bonheur de me consacrer à votre service. J'observerai toute ma vie cette sainte obéissance telle qu'elle est exigée par nos règles; j'en fais le voeu perpétuel selon les intentions de ces mêmes règles, avec connaissance de cause, librement et volontairement.
O Jésus, mon Seigneur et mon Dieu, c'est pour votre gloire et par amour pour vous, en l'honneur et sous la protection de votre très-sainte et très-aimable Mère, que je fais ces promesses et ces voeux. Daignez, ô mon bon Maître, unir mon sacrifice à celui que vous avez offert sur le Calvaire, et que vous offrez tous les jours aux saints autels; donnez-moi la force et l'amour dont vous étiez rempli au grand jour de votre admirable sacrifice, afin qu'uni à vous et animé de votre esprit et de votre sainteté, mon sacrifice soit agréable à votre Père céleste, et afin que toute ma vie je sois fidèle à accomplir parfaitement ce que votre divine bonté m'inspire de promettre en ce moment.
O Marie ! ma très-bonne et très-aimée Mère ! unissez-moi dans votre amour à votre fils Jésus, et, debout au pied de sa Croix, offrez-moi avec lui au Père céleste; attirez dans mon coeur les sentiments d'amour et de sainteté qui l'ont animé; intercédez pour moi, afin que cet amour et cette sainteté remplissent sans cesse mon âme comme ils remplissent la vôtre, et que l'esprit de Jésus soit toujours ma vie, mon soutien, ma force, et qu'il me rende fidèle dans la parfaite exécution des promesses que je viens de faire à mon Dieu. Ainsi soit-il.
260 ART. IV. - En faisant la promesse de pratiquer la pauvreté, on sacrifie à Dieu, par les voeux ainsi que par la consécration, l'usage des biens qu'on a ou qu'on pourra avoir en sa possession, et, de plus, tout pouvoir d'acquérir, de la manière suivante:
1 Par vente, achat et échange. Si cependant il était opportun de réaliser ces sortes de transmutations dans un bien qu'on aura licitement en sa possession, on peut le faire avec la permission du Supérieur général.
2 Par dons manuels. On ne peut accepter ces dons, sinon pour la Communauté; et, dans ce cas, il est conforme au bon ordre qu'on ne les accepte qu'avec la permission du Supérieur, au moins supposée.
3 Par acception d'honoraires, soit pour les fonctions sacrées, soit pour tout autre objet. Tout honoraire doit entrer dans le bien commun.
261 ART. V. - Le sacrifice qu'on fait à Dieu de l'usage de ses biens, par le consécration et par les voeux, consiste:
1 A n'employer ni bien ni ressource aucune pour sa propre personne: tous doivent être égaux dans la Congrégation et recevoir d'elle tout ce qui leur est nécessaire ou utile.
2 A n'avoir par devers soi, sans l'autorisation du Supérieur, aucune somme d'argent, et à ne pas réunir ses fonds et ses revenus pour en disposer par soi-même en faveur d'autrui.
3 Dans le cas où le Supérieur leur remettra de l'argent pour leurs dépenses, le temps ou la circonstance de cette autorisation étant expiré, ils remettront le reste de la somme en rendant compte de leurs dépenses.
262 ART. VI - Ceux qui ont fait le voeu de pauvreté aussi bien que ceux qui n'ont fait que leur consécration, peuvent conserver la nue propriété des biens qu'ils avaient auparavant, ils peuvent aussi acquérir, par héritage, donation entre vifs et par testament.
263 ART. VII. - Ceux qui voudraient pratiquer la sainte pauvreté avec plus de perfection et ne conserver aucune propriété sur la terre, peuvent disposer de leurs biens en faveur de qui ils voudront. On peut de même disposer de l'usufruit des biens que l'on a selon qu'on le jugera convenable.
264 ART. VIII. - Si l'on désire favoriser la Communauté d'un don ou d'un fonds ou d'un revenu, les Supérieurs l'accepteront avec la reconnaissance due à un bienfait; mais le donateur n'acquiert aucun droit à une préférence quelconque sur ses confrères; tous doivent être égaux dans la Congrégation; Dieu seul doit être la récompence du bienfait accompli pour son amour.
265 ARTICLE UNIQUE. - Avant leur départ pour les Missions, ils feront à N.-S. Jésus-Christ la consécration de leur futur ministère, et dans cette consécration, ils prendront la résolution solennelle de faire ce qui dépendra d'eux pour que la Congrégation reste fidèle au but qu'elle se propose, le salut des âmes les plus pauvres et les plus abandonnées. Cette consécration se fera d'après la formule suivante:
Consécration de notre apostolat à Notre Seigneur Jésus Christ.
Le moment est enfin arrivé, ô Jésus, mon Maître et mon souverain Seigneur, où je dois obéir à votre voix puissante qui m'appelle; où je dois abandonner tout et vous suivre. Je viens répondre à votre appel avec bonheur, et je vous suis avec allégresse et amour. Me voici, ô mon Dieu ! Je me livre entre vos mains corps et âme; je me donne à vous sans réserve et sans mesure, pour être employé, immolé toute ma vie par la divine volonté de votre Père, à votre gloire et pour le salut des âmes. Je me consacre particulièrement à celles qui sont les plus délaissées et les plus méprisées parmi les hommes.
Je prends ici, en votre sainte présence, et de toute la ferveur de mon âme, la ferme et inébranlable résolution de me dévouer toute ma vie au salut de ces pauvres âmes, et d'en faire l'objet de toutes mes occupations, conformément à la volonté de mes Supérieurs et aux règles établies dans notre Congrégation.
Je veux, pour l'amour de votre saint Nom et pour le salut de ces mêmes âmes, faire tous les sacrifices et supporter avec amour toutes les privations et toutes les afflictions que la divine volonté de votre Père m'imposera.
Je désire ardemment, et je prends la ferme résolution de ne plus chercher désormais ma joie et ma consolation que dans les travaux que j'entreprendrai et dans les peines que je souffrirai pour ces pauvres âmes si chères à votre coeur et à celui de votre sainte Mère.
Désormais, ô mon Dieu, je vous appartiens tout entier: servez-vous de moi comme d'un instrument qui doit être uniquement employé pour votre gloire au salut des pécheurs et des infidèles; usez, consumez toutes les forces de mon être dans ce grand oeuvre de votre divin amour.
Bénissez, mon bon et adorable Maître, bénissez les saintes résolutions que vous m'inspirez en ce moment; bénissez ma sortie de cette sainte maison, bénissez les frères bien-aimés que j'y laisse, bénissez mon voyage et mon arrivée au lieu où votre divine volonté me conduit, bénissez mes travaux, encouragez mon âme, fortifiez ma faiblesse, soyez sans cesse avec moi, remplissez-moi de l'abondance de vos grâces et de vos vertus apostoliques, afin que je puisse répondre, selon toute l'étendue de votre miséricorde, aux saints désirs que vous daignez m'inspirer; dites à Marie, votre sainte Mère et la mienne, qu'elle joigne sa bénédiction aux vôtres, afin que ma vie étant sous sa miséricordieuse protection, je sois fidèle à toutes les résolutions que je viens de prendre, et qu'ainsi votre saint Nom soit béni, loué et glorifié dans l'Assemblée des Anges et des Saints. Ainsi soit-il !
DEUXIEME PARTIE
Esprit de la Congrégation ou Réglement à observer par ses Membres, pour le parfait accomplissement de leurs devoirs.
PREMIERE SECTION : VIE APOSTOLIQUE.
CHAPITRE Ier.
- De la vie apostolique en général et des vertus
fondamentales sur lesquelles elle repose.
266 ARTICLE
PREMIER. - La vie apostolique est cette vie d'amour et de
sainteté que le Fils de Dieu à menée sur la
terre pour sauver et sanctifier les âmes, et par laquelle
il s'est continuellement sacrifié à la gloire de
son Père pour le salut du monde.
267 ART. II. -
Les Membres de la Congrégation se considéreront
comme appelés par Jesus-Christ pour partager avec lui le
grand oeuvre du salut du monde; ils auront sans cesse les yeux
fixés sur lui comme sur leur chef et leur modèle,
et se rempliront de ses sentiments pour les âmes qu'ils
sont chargés de sauver; ils calqueront leur vie sur la
sienne et reproduiront, dans toutes leurs paroles et leur
conduite, ses saintes maximes.
268 ART. III. - Devant
établir l'amour et le règne de Jésus-Christ
dans les âmes, ils doivent, à bien plus forte
raison, l'établir d'abord dans leurs propres coeurs de la
manière la plus parfaite, afin qu'à l'exemple de
Jésus ils puissent ensuite leur servir de modèles,
annoncer, comme de vrais apôtres, les
vérités du salut, et produire des fruits
solides.
269 ART. IV. - Ils se
pénétreront de la pensée que le Fils de
Dieu les envoie, comme son Père l'a envoyé, pour
se consacrer, se dévouer et s'immoler à sa gloire
pour le salut des âmes.
270 ART. V. - Leur vie ne
doit donc pas être, comme celle du commun des hommes, une
vie employée à la recherche de leurs propres
intérêts et de leurs propres satisfactions; mais
elle doit être toute de foi et de charité. Vivant
à Dieu pour les âmes, ils doivent consacrer tout
leur être et employer tous leurs instants à leur
sanctification, objet pour lequel leur divin Maître les
envoie.
271 ART. VI. - Ils feront profession de ne
jamais mettre leur estime ni leur satisfaction dans les choses
de la terre. Dans toute leur conduite, ils seront
indifférents pour les grandeurs, les richesses et les
plaisirs, n'estimant les choses de ce monde que comme
Jésus-Christ les a estimées, et mettant toute leur
jouissance dans la gloire de Dieu et le salut des âmes.
Ils éviteront cependant en cela l'affectation et
l'amour-propre.
272 ART. VII. - Ayant une fois mis la
main à la charrue, ils ne doivent pas regarder en
arrière; mais ils se rendront de plus en plus aptes au
travail que Dieu leur a confié, par l'oubli du monde, le
détachement de tout ce qu'ils y ont de plus cher, pour
s'attacher de plus en plus parfaitement à
Jésus-Christ leur maître et aux âmes
auxquelles il les a donnés.
273 ART. VIII. -
Quoique ce détachement du coeur n'exclue point
l'affection pour les parents ou autres personnes avec lesquelles
ils auraient contracté des liaisons bonnes et conformes
à la volonté divine, cependant ces liaisons ne
doivent en rien gêner ni la liberté de leur esprit,
ni la perfection de leur amour pour Jésus; elles ne
doivent leur occasionner ni tristesse, ni faiblesse, et
n'arrêter jamais l'essor de leur zèle et de leur
dévouement pour le salut des âmes.
274
ART. IX. - Dans les lettres qu'ils leur écriront, ils se
garderont bien d'entretenir une affection trop tendre qui
affaiblit l'âme, mais ils leur parleront un langage digne
d'un coeur apostolique, plein d'esprit de foi, et tendant
toujours à édifier et à produire des effets
salutaires pour leur sanctification.
275 ART. X. - Ils
seront aussi détachés d'eux-mêmes que de
toutes les choses de la terre, pour être tout à
Jésus et aux âmes, pour entreprendre, avec un
dévouement parfait, tout ce qui tend à la gloire
de Dieu et au salut de hommes, et pour avoir cette force et
cette énergie dans les peines et les difficultés,
qui fait les véritables apôtres de
Jésus-Christ.
276 ART. XI. - Ayant ainsi
renoncé à eux-mêmes, pour consacrer toute
leur vie à Jésus-Christ, et aux âmes qu'il a
rachetées, ils agiront en toutes choses comme des hommes
qui ne s'appartiennent plus à eux-mêmes, mais
à Jésus-Christ leur unique Maître, et
n'auront que des vues pures pour sa gloire. Ils
éviteront de se complaire en ce qu'ils pourraient voir en
eux de bon et dans le bien qu'il leur serait accordé de
faire. Mais tout en employant avec simplicité, pour la
gloire de Dieu, les dons qu'ils en ont reçus, ils se
maintiendront dans des sentiments humbles en vue de leur
bassesse. Ils ne s'attristeront pas non plus de ne pouvoir
faire autant de bien qu'ils voudraient, mais ils feront de leur
mieux, pour glorifier Dieu et procurer le salut des âmes,
évitant le découragement, la préoccupation
inquiétante, la déconsidération de
soi-même, qui produit l'embarras, la timidité et
tous les autres défauts qui ont fausse apparence
d'humilité et ne sont que le résultat de l'orgueil
froissé et humilié. Ils laisseront à leur
divin Maître le soin de bénir leurs travaux et
d'exaucer leurs désirs, quand et comme il lui plaira, de
peur qu'en s'inquiétant ils ne s'occupent plus
d'eux-mêmes que de la gloire de celui à qui ils
appartiennent.
277 ART. XII. - Par suite de ce
sacrifice d'eux-mêmes, ils éviteront les soins
empressés et inquiets de leur santé; ils ne
feront, par rapport à cela, que ce que la gloire de Dieu
et l'obéissance exigeront d'eux.
278 ART. XIII.
- Pénétrés de cette vérité
que Jésus-Christ leur a enseigné par son exemple,
et que l'Esprit-Saint a si profondément gravée
dans le coeur éminemment apostolique de Marie, que la vie
et l'âme de l'apostolat sont dans le
générosité et l'esprit de sacrifice, ils
voueront leurs âmes à l'Esprit-Saint, pour qu'il
imprime en elles un véritable esprit apostolique, par le
généreux amour des sacrifices.
279 ART.
XIV. - Ils considéreront comme une faiblesse, dont ils
auront à rougir devant Jésus-Christ, toute crainte
de s'exposer à des privations. Ils s'estimeront heureux
de sacrifier à Dieu les douceurs de la vie, et en
regarderont la jouissance comme un poison dangereux qui
énerve l'âme, la privant de la
générosité, de la force et de
l'énergie apostolique que le grâce de
l'Esprit-Saint veut y entretenir.
280 ART. XV. - Ils
regarderont les peines, les afflictions, les contradictions et
les humiliations, comme des faveurs accordées par la
bonté de Dieu, pour les rendre semblables à
Jésus-Christ leur divin Maître. Ils en profiteront
pour s'établir plus solidement dans l'abnégation
d'eux-mêmes et de toutes choses et dans la parfaite
soumission à sa sainte volonté. Ils les
supporteront avec toutes les dispositions avec lesquelles leur
divin Maître les a supportées lui-même pour
leur donner l'exemple. Ils auront, au milieu de ces peines,
l'esprit serein, libre, ouvert, calme, et conserveront la
douceur et la gaîté dans leurs rapports avec les
hommes.
281 ART. XVI. - La vanité sera à
leurs yeux une bassesse indigne d'un homme apostolique qui,
venant au nom de Jésus-Christ, doit être au-dessus
de ces petitesses de l'esprit du monde. Ils se mettront en
garde contre les vains sentiments de complaisance dans l'estime
des hommes, et contre la pente des esprits vaniteux de se faire
remarquer et distinguer au-dessus de leurs confrères.
Mais tout en traitant le monde avec cette charité
apostolique pleine de douceur, d'affection et de
prévenance, et tout en remplissant leurs saintes
fonctions avec l'affection qu'ils pourront, ils ne chercheront
à plaire qu'à Dieu seul.
282 ART. XVII. -
Ils ne se laisseront pas dominer non plus par la crainte du
blâme et des jugements des hommes. Tout en
ménageant leurs faiblesses et leurs
préjugés, ils se consoleront de ces jugements, par
la pensée que Jésus-Christ seul est leur
Maître et leur juge, et qu'ils sont trop heureux d'avoir
à souffrir, pour être ses fidèles
disciples.
CHAPITRE II : - Du
zèle apostolique.
283 ARTICLE PREMIER. - Mettant toute leur
confiance dans la bonté de Jésus, ils demanderont
sans cesse la grâce du zèle pour le salut des
âmes, qui est la vertu fondamentale de la vie apostolique.
Ils apporteront aussi de leur côté une grande
fidélité aux desseins de Dieu pour la pratique de
cette éminente vertu. Ils la considéreront
souvent dans leur divin Maître et dans le coeur de Marie,
qui en a été rempli par les dons les plus parfaits
de l'Esprit saint. Ils tâcheront de la pratiquer selon
toutes les règles de perfection qu'elle exige,
évitant surtout les défauts qui s'y glissent
facilement.
284 ART. II. - L'âme, la source et
l'aliment du vrai zèle, est un amour de Dieu, pur, saint,
ardent, intimement gravé dans le coeur; ils prendront les
moyens les plus efficaces pour établir parfaitement en
eux cet amour. Ce doit être la vertu propre et
caractéristique du Missionnaire fervent au service des
âmes pauvres et nécessiteuses, dévoué
au Saint-Esprit et à l'immaculé et tout
apostolique Coeur de Marie.
285 ART. III. - Par un
effet de ce saint amour, ils tâcheront de se remplir d'un
zèle grand et généreux, ils n'auront jamais
ni crainte, ni appréhension, et marcheront avec courage,
sous la conduite de l'Esprit saint vers le but que Dieu leur
propose: Faire vivre et régner leur divin Maître
dans les âmes. Ils travailleront avec confiance et amour
aux dépens de leur repos, de leur santé, de leur
honneur, de tous leurs intérêts, et de leur vie
même, s'il le fallait.
286 ART. IV. - Leur
zèle sera constant et persévérant au milieu
des peines, des fatigues et des privations, malgré les
résistances des hommes ou tout autres obstacles.
287 ART. V. - Le vif désir de glorifier Dieu, qui leur
inspirera ce parfait amour pour lui, leur donnera un zèle
énergique et ardent qui leur fera embrasser
vigoureusement les moyens que la divine Providence leur mettra
entre les mains pour gagner et pour sanctifier les
âmes.
288 ART. VI. - Cependant il faut
éviter ce zèle qui n'est qu'un effet de
l'imagination ou d'une ardeur naturelle: le zèle
véritable n'est pas excité par un effort de la
nature, mais il vient tout entier de la grâce du divin
Esprit, et doit être puisé dans l'union intime avec
Jésus qui en est la source.
289 ART. VII. -
C'est pourquoi, quelqu'ardent que soit leur zèle, il ne
doit point produire le trouble dans leurs âmes. Il faut
éviter avec le plus grand soin l'activité
immodérée, la précipitation,
l'empressement, la préoccupation et autres défauts
de ce genre, qui sont les marques d'un zèle imparfait qui
vient plus de leur mauvaise nature que de celui qui seul peut le
donner pur et saint. Il faut aussi éviter avec le
même soin la lenteur et les autres défauts
opposés aux précédents. L'action
extérieure doit être vive, selon l'exigence des
circonstances, mais dans l'intérieur, l'âme doit
toujours conserver sa sainte union avec son adorable
Maître et agir avec une paix parfaite.
290 ART.
VIII. - Pour se conserver dans cette paix du divin Maître,
il faut qu'on évite les incertitudes de l'esprit; on doit
agir avec une grande liberté intérieure, faire ce
qu'on croit bon et utile, pour procurer la plus grande gloire de
Jésus-Christ, et lui laisser le soin de bénir et
faire fructifier, selon son bon plaisir, ce que l'on aura
fait.
291 ART. IX. - Ils éviteront le
zèle âpre qui est plutôt pharisaïque
qu'apostolique; l'ardeur avec laquelle ils embrasseront ce qui
peut porcurer la gloire de Dieu, sera toujours
tempérée par une douce charité qui, se
répandant dans toute leur conduite, la rendra pleine de
cette bénignité de leur divin Modèle.
292 ART. X. - Ils se souviendront de cette parole qu'il
adressa à ses Apôtres: Je vous envoie comme des
agneaux au milieu des loups; c'est pourquoi ils devront exercer
la plus grande douceur envers ceux qui les persécuteront,
qui les haïront et chercheront à leur
résister ou à leur nuire. Ils seront comme des
agneaux sans défense contre leurs ennemis, tant que
ceux-ci ne s'attaqueront qu'à leurs personnes et que la
gloire de Dieu ne sera pas compromise.
293 ART. XI. -
Ils exerceront particulièrement la plus grande douceur
envers les pécheurs même les plus endurcis, envers
les âmes faibles et malades par les vices et les penchants
qui les tiennent courbées vers la terre, envers les
âmes grossières, et envers celles qui leur
résistent. Ils se regarderont comme les pères de
tous les pécheurs, les représentants de
Jésus-Christ, le divin Agneau, auprès de tous.
294 ART. XII. - Ils réduiront en pratique, dans
toute leur conduite, cete belle maxime apostolique, qui nous est
enseignée par le grand Apôtre: Se faire tout
à tous, pour les gagner tous à
Jésus-Christ. Ils se mettront à la disposition de
tous, se conformant aux caractères, aux goûts, aux
désirs et aux vues de tous, afin que, par ce moyen, ils
puissent faire pénétrer dans tous les coeurs
l'amour des vérités du saint Evangile et le
désir fervent et efficace de les pratiquer. Cependant
ils prendront bien garde de ne pas agir ainsi au
détriment de leurs règles, de l'esprit dont elles
doivent les animer, de l'union avec notre Seigneur et de la vie
modeste, humble, sainte et religieuse dont ils doivent faire
profession, à l'exemple de leur divin Maître.
295 ART. XIII. - Ils doivent allier, dans leur zèle,
la force à la douceur; ils feront une guerre continuelle
aux péchés et aux vices, les poursuivant partout
jusqu'à entière extinction, s'armant pour cela de
la vertu et de la puissance divine de leur Maître qu'il
leur communiquera, s'ils en sont fidèles. Cependant,
tout en poursuivant leurs vues saintes avec vigueur, ils
disposeront toutes choses avec douceur et suavité, comme
le fait Dieu lui-même.
296 ART. XIV. - La force
avec laquelle ils agiront doit être l'effet de l'amour de
Dieu qui les remplit, produite par l'Esprit-Saint et non pas
fondée sur leur caractère et leur naturel. En
déployant cette force apostolique, ils tâcheront de
se maintenir dans l'esprit d'humilité et la basse opinion
d'eux-mêmes, et de conserver la paix, la douceur et
l'union de leurs âmes à Dieu. Ils éviteront
avec grand soin la raideur, l'opiniâtreté et tous
les autres défauts qui accompagnent ordinairement
l'énergie et la générosité
naturelles.
297 ART. XV. - Ils ne doivent pas se livrer
en aveugles à cette ardeur et à cette
énergie qui les anime, ni employer sans discernement tous
les moyens qui semblent de prime-abord propres à faire
réussir leus saintes entreprises; mais ils
considèreront les choses en la présence de
Jésus-Christ, leur Maître, et à la
lumière de son divin esprit, afin d'agir en tout selon la
véritable et sainte prudence avec laquelle il a agi
lui-même.
298 ART. XVI. - En voulant suivre cette
règle, ils prendront garde de se conduire selon la
prudence du monde; ils n'auront jamais en vue leur
intérêt propre, ni même celui de la
Congrégation, ni aucune autre vue humaine, mais Dieu seul
et sa gloire. Ils éviteront la timidité, qui veut
toujours prendre le parti le plus sûr pour l'amour-propre,
l'incertitude dans les décisions, et tous les autres
défauts qui dénotent un homme qui examine par la
raison naturelle, et ne se livre pas assez à la
lumière divine.
299 ART. XVII. - Ils
tâcheront, dans toutes leurs entreprises, d'examiner avec
soin, selon toutes les règles de la sagesse, le fond de
leurs projets, les difficultés qu'ils pourront y
rencontrer et les moyens les plus convenables pour surmonter ces
difficultés et obtenir le succès
désiré, faisant attention aux circonstances dont
ces difficultés sont environnées; mais ils ne
mettront aucune confiance dans les moyens qu'ils croiront devoir
employer pour réussir. Toute leur confiance sera
uniquement en Jésus-Christ qu'ils auront toujours devant
les yeux.
300 ART. XVIII.- Ils se garderont bien
soigneusement encore d'un autre défaut de la prudence
humaine, où conduit quelquefois un faux zèle: de
la ruse, de la finesse et du détour. Leur zèle
sera dirigé par une prudence simple, ouverte, franche,
évitant avec soin toutes les recherches de l'industrie
humaine et toute voie qui s'écarte de la droiture qui
convient à un homme de Dieu et dont notre divin
Maître a donné l'exemple.
301 ART. XIX. -
Leur simplicité ne doit pas aller jusqu'à
découvrir indistinctement leur pensée devant tout
le monde et dans toutes les circonstances; ils doivent apprendre
à discerner ce qui est à dire de ce qu'ils doivent
taire, savoir être réservés, lorsqu'il le
faut, et garder un secret, lorsqu'il est opportun qu'il soit
gardé.
302 ART. XX. - Ils observeront encore
cette règle de prudence importante, pratiquée par
les saints Apôtres, et dont Jésus-Christ
lui-même a donné l'exemple: c'est de ne pas vouloir
surmonter toute espèce de difficulté, mais de
savoir plier pour un temps devant un obstacle qu'on
prévoit ne pouvoir pas être écarté,
ou dans des circonstances qui exigent, pour agir selon Dieu,
qu'on attende et qu'on diffère, sauf à reprendre
plus tard ce que l'on semble abandonner pour le moment.
303 ART. XXI. - Lorsqu'ils seront humiliés,
calomniés, persécutés par les hommes, ils
se tiendront en paix devant Dieu et mettront leur confiance en
lui. Il leur suffit de servir Dieu avec fidélité,
se rendant témoignage de la pureté de leurs vues,
sans vouloir être honorés et estimés des
hommes; ils éviteront surtout l'empressement et
l'activité que la nature met à se justifier; si
cependant ces faux rapports devaient nuire à leur
ministère ou être des obstacles à la gloire
de Dieu, ils aviseraient aux moyens propres à en
détruire les mauvais effets, mais toujours sans
âpreté, sans rancune, se conservant au contraire
dans les bornes de l'humilité, de la douceur et de la
modestie, épargnant, si cela se peut, les
persécuteurs et les traitant même avec
charité et convenance.
304 ART. XXII. - Ils
auront aussi un très-grand soin de vaincre les
défauts de leur caractère et de leur humeur,
faisant tous leurs efforts, pour ne pas faire souffrir et pour
n'offenser en rien ceux avec lesquels ils sont en rapport, afin
que leur ministère soit sans reproche et que les hommes,
voyant en leurs personnes de vrais serviteurs de Dieu, exempts
des défauts et des faiblesses si communs dans le monde,
profitent de leurs bons exemples, écoutent leurs paroles
avec confiance et glorifient leur Père
céleste.
305 ART. XXIII.- Ils éviteront
soigneusement tout ce qui est défectueux dans leurs
manières; ils auront un abord facile, ouvert,
prévenant, afin de mettre à leur aise les
personnes avec lesquelles ils converseront et de leur inspirer
la confiance. Ils seront polis envers tous, prenant cependant
bien garde de ne jamais imiter en rien la politesse des gens du
monde: la leur doit être une politesse de charité,
pleine de la simplicité évangélique.
306 ART. XXIV. - Ils se mettront en garde aussi contre la
légèreté et les amusements frivoles; ils
éviteront même les jeux et les amusements
innocents, soit dans l'intérieur de la maison, soit
dehors.
307 ART. XXV. - Ils éviteront aussi de
se faire des tics ou habitudes généralement
inusitées, en adoptant certaines expressions favorites,
certaines manières dans le parler, les gestes, la
démarche ou la tenue; ces sortes d'imperfections
proviennent d'un défaut ou d'une prétention
ridicule; il est rare qu'elles ne finissent par nuire plus ou
moins au ministère. Tout dans le Missionnaire doit
être grave, modeste, sage, et tellement selon les
convenances, que rien en lui ne soit de nature à
répugner aux personnes qui les fréquentent.
CHAPITRE III.
- Règles de conduite
envers les âmes que nous avons à
évangéliser.
308 ARTICLE PREMIER. - Le
principe de toute notre conduite à l'égard des
âmes auxquelles nous sommes envoyés, sera un amour
tendre, fort et compatissant, un désir ardent de procurer
leur salut et de les sanctifier. Songeant que le Fils de Dieu
nous a donnés à ces âmes, pour les former
dans la vie chrétienne et leur procurer le salut
éternel, nous nous regarderons comme leurs serviteurs,
nous leur dévouerons toute notre vie, selon
l'étendue des desseins du divin Maître.
309 ART. II. - Tous nos travaux doivent tendre à la
destruction des péchés, des vices et à
l'établissement du règne de Jésus-Christ
dans les âmes; cependant, lorsque nos travaux auront
obtenu ces résultats dans une population, nous ne
l'abandonnerons pas pour cela, mais nous mettrons nos soins
à consolider et à perfectionner l'oeuvre, en
fortifiant les âmes dans les vertus et dans la pratique
des maximes évangéliques, tant que notre secours
leur sera nécessaire.
310 ART. III. - Quoiqu'il
soit utile et important que, par l'instruction dans les
connaissances humaines et tous autres moyens, ils introduisent
dans les pays sauvages les connaissances naturelles et les
vertus sociales, pour s'en aider à consolider et à
étendre les chrétientés qu'ils formeront;
cependant les vérités de la foi étant
l'unique objet de leur zèle, ils en feront toujours,
dès l'origine, le fondement de tous leurs travaux, bien
persuadés d'ailleurs que, sans la foi, ils n'obtiendront
jamais de ces peuples de vertus civiles et sociales, ni la
correction du vice. Autant que possible, ils aviseront aux
moyens de faire l'un et l'autre à la fois, afin de
s'aider de la culture des esprits, et même de
l'intérêt naturel de leur famille, pour leur
inculquer avec plus de succès les saintes
vérités de l'Evangile.
311 ART. IV. -
S'ils se présentait des hommes qui soient rebelles
à la parole de foi qu'ils viennent leur annoncer, ils ne
laisseraient pas généralement de leur enseigner
avec la même charité et les mêmes soins les
connaissances humaines, comme à ceux qui sont
fidèles.
312 ART. V. - En général
leur amour, tendre pour les hommes, les portera à ne
laisser échapper aucune occasion de leur faire du bien,
non-seulement ce bien qui va directement au salut, mais encore
celui qui est, en quelque manière que ce soit, pour le
soulagement du corps et de l'âme, et cela, toujours par
cette compassion tendre de la véritable charité et
avec le désir de les sauver.
313 ART. VI. -
Dévoués, par leur divin Maître, aux
âmes les plus pauvres et les plus malheureuses, leurs
soins et leur tendresse toute particulière seront pour
ceux dont la misère et le délaissement seront plus
grands. Ils les traiteront avec une bonté et une
prédilection spéciales, ils leur procureront tous
les secours et les soulagements qu'ils pourront, sans trop
examiner s'ils le méritent ou non. Ils s'entretiendront
souvent avec eux, les visiteront fréquemment dans leurs
pauvres réduits et ne laisseront échapper aucune
occasion de les instruire dans les vérités saintes
et de les rendre meilleurs. Ils les combleront et enrichiront,
autant qu'ils pourront, de toutes sortes de biens
spirituels.
314 ART. VII. - La visite des malades sera
encore une de leurs plus grandes et plus tendres sollicitudes
apostoliques; ils les consoleront, fortifieront et
encourageront; ils rendront aux plus pauvres tous les services
même les plus pénibles et les plus
dégoûtants, et feront tout cela avec
cordialité et gaîté de coeur. Dans les
maladies mortelles, ils devront employer tous les moyens, pour
leur procurer l'avantage de recevoir le baptême, s'ils ne
l'ont pas encore reçu, et les autres sacrements, s'ils
sont chrétiens; ils prendront bien garde de trop attendre
pour les y préparer.
315 ART. VIII. - En
général, ils auront une tendresse et une
compassion très-grandes envers les affligés; ils
apporteront à leurs peines tous les soulagements et
toutes les consolations qu'ils pourront. Ils se reprocheront
comme une faute, la moindre négligence qu'ils auraient
mise à donner du secours et de la consolation à
une âme affligée, soit par la pauvreté, soit
par la maladie ou de toute autre manière.
316
ART. IX. - Ils seront les avocats, les soutiens et les
défenseurs des faibles et des petits contre tous ceux qui
les oppriment; c'est dans ces circonstances que doivent se
manifester la charité et la vertu de Jésus-Christ
qui sont en eux. Leur conduite cependant doit toujours
être dirigée par la douceur et une sainte prudence,
évitant d'agir avec trop de vivacité contre les
oppresseurs, dans la crainte de les irriter d'avantage.
317 ART. X. - Leur manière d'agir avec ces pauvres
âmes, dans tous leurs rapports avec elles, sera simple,
douce et cordiale; ils seront pour elles d'une charité et
d'une bonté toute paternelle; ils leur manifesteront le
plus grand intérêt, dans toutes les circonstances,
et seront toujours prêts à les écouter avec
bienveillance, n'en repoussant, n'en négligeant aucune,
mais le tout sans affectation et par l'effet de leur amour pour
notre Seigneur Jésus-Christ qu'elles
représentent.
318 ART. XI. - Ils
éviteront, comme des défauts indignes d'un homme
apostolique, toutes manières hautaines,
dédaigneuses, moqueueuses, indifférentes, et
toutes les façons de ce genre que les hommes du monde ont
coutume de prendre envers les gens pauvres et
méprisés; mais, au contraire, plus ces gens seront
abjects, plus leurs coeurs seront émus de tendresse et de
compassion pour eux, et plus ils les traiteront avec
bonté et affection.
319 ART. XII. - Ils
supporteront avec patience, douceur et bonté, les
grossièretés, les défauts et les vices
mêmes de ces pauvres gens, étant pleins d'une
sainte et tendre compassion pour eux, à la vue de leur
misère et de leur abaissement, tâchant de les
guérir, par le moyen de cette douceur et de cette
charité, des maux qui les accablent. On ne laissera
cependant pas faire le mal sans le désapprouver et le
reprendre.
320 ART. XIII. - Quoiqu'en
général les Missionnaires doivent s'efforcer de
gagner l'affection et la confiance de ces âmes, par leur
conduite saintement charitable, cependant ils prendront garde
que leur charité et leur douceur ne
dégénèrent en faiblesse. Ils
tâcheront de proportionner leur manière d'agir aux
besoins des personnes, et ils emploieront à propos la
fermeté, et même la rigueur, s'il le faut, mais la
passion ne doit jamais y paraître. Il faut que ceux que
l'on reprend voient, malgré cette
sévérité, qu'on les aime et que c'est pour
cela qu'on les reprend.
321 ART. XIV. - On doit prendre
garde aussi de ne pas se familiariser avec eux, par cette
douceur et cette simplicité; il faut toujours que notre
douceur soit accompagnée de gravité et de
réserve. Il est nécessaire que le Missionnaire
conserve un grand pouvoir et une grande autorité sur
l'esprit de ces peuples: cela est indispensable, si l'on ne veut
pas ruiner son ministère auprès de ces âmes
grossières et sans culture; seulement il faut que cette
gravité soit paternelle, ne dégénère
pas en hauteur et en domination, et ne soit pas non plus
affectée.
322 ART. XV. - On étudiera avec
soin leurs caractères; on examinera aussi les penchants
de leurs coeurs, leurs inclinations, leur affections; par
là, on parviendra à connaître leurs vices et
les principes d'où ils proviennent; par là aussi,
on se mettra à même de prendre les vrais moyens
d'acquérir de l'autorité sur leurs esprits, de
trouver entrée dans leurs coeurs et de gagner leur
affection et leur confiance.
323 ART. XVI. - Ils
s'efforceront de retirer ces pauvres âmes, par les
pensées de la foi, des vues basses et abjectes où
elles se tiennent elles-mêmes et qui sont souvent cause
qu'elles se livrent sans retenue à beaucoup de vices. On
tâchera de relever leur sentiment abattu, de leur inspirer
de la force et de l'énergie; mais on s'y prendra avec
prudence, pour ne pas les jeter dans l'excès
opposé: dans l'orgueil, l'esprit d'indépendance et
d'insubordination.
324 ART. XVII. - On fera tout ce que
l'on pourra, pour établir entre les riches et les
pauvres, les blancs et les noirs, cette charité
chrétienne qui fait que tous les hommes se
considèrent comme frères en Jésus-Christ,
et pour anéantir, autant que possible, les mépris
et l'indifférence d'une part, les jalousies et les haines
de l'autre; mais il faut une grande prudence en cela, pour ne
pas perdre tout.
CHAPITRE IV. - Du
zèle des Missionnaire pour la formation du clergé
et pour son avancement dans les vertus sacerdotales.
325 ARTICLE PREMIER. - En missions
lointaines, ils s'emploieront, avec toute la
persévérance que le vrai zèle leur
inspirera, à la formation d'un clergé
indigène; aucune peine, aucun sacrifice ne doit
être épargné pour l'organisation et le
perfectionnement de cette oeuvre si conforme aux vues du divin
Fondateur de l'Eglise, si instamment ecommandée par le
Saint-Siège, et qui d'ailleurs fournit seule le moyen de
répandre au loin la lumière du saint Evangile et
de l'établir solidement dans les contrées que nous
sommes chargés de défricher.
326 ART. II.
- Les Missionnaires se garderont bien d'aller à la
légère et avec trop de promptitude dans une oeuvre
aussi importante; ils ne se contenteront pas de faire des
prêtres, mais ils s'appliqueront avec le plus grand soin
à les bien former, pour les rendre dignes de ce saint
état et capables d'en exercer avec plus de fruit les
fonctions sacrées. Ils éprouveront les sujets
pendant un temps convenable, les formeront dans la science et la
piété, et ne les avanceront au sacerdoce que
lorsqu'ils se seront moralement assurés de leur vertu, de
leur capacité et de leur persévérance.
327 ART. III. - Ils ne se contenteront pas de les instruire
dans les sciences ecclésiastiques, mais ils leur
apprendront tout ce qui sera capable de leur donner de
l'influence et de leur attire le respect. Ils ne se
contenteront pas non plus de les former dans la pratique des
vertus chrétiennes et sacerdotales, mais ils mettront un
soin tout particulier à réformer les
défauts de leurs caractères; ils tâcheront
de leur inspirer le courage, la force, l'énergie et
l'activité; les élèveront dans des
sentiments nobles et généreux, prenant garde
cependant de donner de l'aliment à leur orgueil, de leur
inspirer la confiance en eux-mêmes et de les porter
à l'indépendance.
328 ART. IV. - Pour
réussir plus facilement à les former à la
perfection sacerdotale, ils choisiront ordinairement les sujets
dès leur plus bas âge; ils les éloigneront,
autant que possible, de tout rapport avec les personnes du
dehors, au moins dans les premiers temps, leur donnant ainsi
l'instruction préalable et les formant peu à peu.
Une fois promus aux ordres inférieurs, et avant
d'être avancés aux ordres sacrés, ces jeunes
gens pourront, lorsqu'on n'y trouvera pas
d'inconvénients, être employés, dans la
compagnie des Missionnaires, au travail du salut des
âmes.
329 ART. V. - Sachant que, de sa nature,
cette sainte oeuvre éprouve des difficultés
très-grandes et très-multipliées, surtout
dans les pays non civilisés, ils se prémuniront
contre les tentations que le démon ou leur propre
faiblesse pourraient leur suggérer; ils apporteront aux
obstacles multipliés une constance et une fermeté
proportionnées à la grandeur, l'importance et
l'urgence de l'oeuvre. Ils s'encourageront mutuellement
à la persévérance, dans les plus grandes
difficultés. Si, au milieu de ces difficultés et
de ces peines, il arrive à quelqu'un d'entre eux
d'être tenté par une pensée de
découragement, il regardera comme une grande faute de
communiquer cette pensée à ses confrères,
mais il se contentera d'en faire part à son
Supérieur.
330 ART. VI. - Lorsque, par la
miséricorde de Dieu, on sera parvenu à former des
prêtres indigènes, on les traitera avec tous les
égards avec lesquels on doit agir envers des
confrères dans le sacerdoce: on les affectionnera et
encouragera en toutes manières; on évitera les
airs de supériorité à leur égard, et
tout ce qui, de près ou de loin, se ressentirait du
mépris et de l'indifférence.
331 ART.
VII. - Dans les pays où il se trouve des prêtres
établis régulièrement dans les paroisses,
les membres de la Congrégation leur porteront un respect
et une affection sincères; ils les traiteront avec
distinction; leur cèderont volontiers la première
place, et agiront à leur égard avec toute la
déférence due à leur position dans la
sainte hiérarchie.
332 ART. VIII. - Dans les
services que ces ecclésiastiques leur demanderont, ils
seront toujours disposés à les recevoir, ne leur
manifesteront jamais aucun mouvement d'humeur ou de
mécontentement pour cause d'importunité ou de
manières peu convenables, ni d'indifférence envers
ceux qui manqueraient de science, de talents, ou qui ne se
conduiraient pas selon la sainteté ou la dignité
de leur état. Ils éviteront en
général toute manière d'agir qui pourrait
leur faire de la peine, quels que puissent être leurs
défauts. La modestie, l'humilité, la
charité, l'affabilité animeront leurs rapports
avec eux, le tout cependant avec simplicité et sans
affectation.
333 ART. IX. - Ils pratiqueront cette
charité prévenante envers les prêtres qui
leur seront opposés, et même envers ceux qui leur
feraient du tort. Ils n'en parleront jamais en mal, même
entre eux; ils ne s'en plaindront jamais à personne, mais
feront tous leurs efforts pour les aimer d'un amour
sincère et cordial et leur rendront toutes sortes de bons
offices, prenant bien garde de ne mettre aucune affectation dans
cette conduite charitable, de peur d'en perdre tout le fruit et
de mécontenter davantage ceux qui en seraient
l'objet.
334 ART. X. - Ils tâcheront d'inspirer
aux fidèles, par leurs paroles et par leur exemple, le
plus grand respect pour les prêtres, et surtout pour leurs
curés respectifs. Ils en parleront toujours
favorablement, et ne manifesteront jamais aux fidèles de
mécontentement touchant la conduite de qui que ce soit
d'entre eux. Ils feront ressortir les qualités de ceux
qui sont bons et excuseront, autant que possibles, la conduite
de ceux qui auraient donné prise à la critique des
gens du monde, à moins qu'il ne puisse en résulter
du scandale.
335 ART. XI. - Ils auront avec les
prêtres des rapports fréquents, mais ce sera pour
la gloire de Dieu et non pas pour former de ces liaisons qui ne
tendent qu'à la satisfaction de la nature. Quoique ces
rapports soient nécessaires pour leur manifester le
respect et la déférence qu'ils ont pour eux, ils
éviteront cependant les visites trop fréquentes et
sans but; ils les engageront plutôt à venir les
voir dans leur maison, afin de leur rendre service, sans
s'exposer à se répandre trop au dehors et à
perdre, par là, le goût de la vie de
communauté.
336 ART. XII. - Nos Maisons doivent
être à la disposition des Ecclésiastiques,
pour leurs retraites annuelles ou autres. On les recevra avec
beaucoup de prévenance, quand ils viendront; on les
logera et nourrira convenablement, et cela, sans exiger de
rétribution, lorsque les ressources de la Maison le
permettront; si cependant ils veulent faire une aumône, on
ne la refusera pas, de peur de leur causer de la peine.
337 ART. XIII. - On saisira toutes les circonstances, pour leur
être utile; on les soutiendra et encouragera dans leurs
peines et leurs difficultés, et on leur rendra tous les
services qu'une charité pleine de respect doit nous
inspirer, surtout pour ce qui touche au saint
ministère.
CHAPITRE V. - Du
ministère de la parole de Dieu.
338 ARTICLE
PREMIER. - Les Missionnaires, envoyés par notre Seigneur
Jesus-Christ et prêchant en son saint Nom la doctrine du
salut qu'il est venu apporter sur la terre, doivent avoir ces
divines vérités dans le coeur et les annoncer
comme il les annonçait lui-même.
339 ART.
II. - C'est pourquoi ils liront et méditeront souvent le
saint Evangile et les écrits des Apôtres, pour
acquérir la parfaite connaissance de notre Seigneur
Jésus-Christ et de ses saints mystères, pour se
remplir des grandes et admirables vérités qu'il
est venu nous enseigner par lui-même et par son Esprit
saint. Ils y puiseront, par le recueillement et la
prière, une connaissance exacte des qualités et
des dispositions avec lesquelles ont prêché leur
divin Maître et ses saints Apôtres.
340
ART. III. - La fin qu'ils se proposeront, dans leur
prédication, doit être de faire connaître aux
hommes leurs prévarications; de leur en inspirer de
l'horreur; de les instruire dans la voie du salut; de les
exciter, par tous les moyens qu'un zèle et une
éloquence sainte leur fourniront, pour leur faire
embrasser ces vérités avec ferveur et d'une
manière pratique.
341 ART. IV. - Pour obtenir ce
résultat, ils ne prêcheront point une morale
sèche et trop raisonnée; mais ils baseront
l'enseignement de la morale chrétienne sur les
vérités éternelles, les autres dogmes de la
foi et les mystères du Verbe incarné et
crucifié pour le salut du monde. Ils graveront
profondément dans les esprits ces dogmes fondamentaux, et
s'en serviront, comme de puissants léviers, pour soulever
les âmes et les arracher au vice, et, comme d'un baume
précieux, pour infiltrer dans les coeurs la confiance et
l'amour. C'est ainsi qu'ils jetteront la crainte et la terreur
dans l'âme du pécheur, pour l'arracher à ses
penchants funestes; qu'ils le ramèneront à Dieu,
par la confiance, et lui rendront doux le joug du Seigneur, par
l'impression du divin amour.
342 ART. V. - Leur
prédication doit être zélée et
fervente; leurs paroles ne doivent pas être un jeu de
l'esprit, mais elles doivent partir d'un coeur
profondément et intimement pénétré
du divin amour et d'un zèle puissant pour le salut et la
sanctification des âmes.
343 ART. VI. - C'est
pourquoi, dans la préparation qu'ils apporteront à
leurs prédications, ils ne mettront pas leur confiance
dans l'étude et la science; mais ils disposeront les
matériaux de leurs discours, en s'unissant, dans un
recueillement doux et suave, à l'amour et au zèle
ardent de leur divin Modèle, et,
pénétrés de ces sentiments, ils se
livreront à la ferveur de leur coeur; ils en animeront
les vérités qu'ils auront à annoncer et les
inculqueront dans les coeurs de ceux qui les
écoutent.
344 ART. VII. - Ils n'apporteront pas
cependant cette ardeur à toutes leurs paroles; ils
proportionneront à chaque verité le sentiment qui
lui est propre et qu'ils voudraient voir dans leurs auditeurs;
et ce sentiment, ils le puiseront dans la même source de
l'amour, du recueillement et de l'union à
Jésus-Christ, leur Maître.
345 ART. VIII.
- Leur prédication doit être sainte; ils doivent
toujours annoncer la parole de Dieu et non pas leur propre
parole; ils ne s'étudieront point à employer les
industries de l'éloquence humaine, pour obtenir de bons
effets; mais ils parleront en hommes inspirés par la
grâce divine, et tâcheront d'imprimer les sentiments
qu'ils éprouvent eux-mêmes dans les âmes de
ceux qui les écoutent, en agissant toujours sous
l'impression de cette sainte grâce.
346 ART. IX.
- A l'animation de leurs paroles ils joindront celle de
l'action, tâchant de rendre l'impression qu'ils
éprouvent dans le fond de leur âme, par leurs
gestes, l'expression de leur figure et par la contenance de leur
corps: ce sont là autant de paroles puissantes que Dieu
donne aux prédicateurs apostoliques, pour opérer
le salut des peuples.
347 ART. X. - Cette action ne
doit pas être l'effet d'un calcul de l'esprit; mais elle
doit partir du plus profond sentiment qu'ils éprouvent
dans leur âme, et être toujours en rapport parfait
avec leurs paroles et avec les sentiments qu'ils veulent
produire dans les autres.
348 ART. XI. - Ils
éviteront la méthode de ceux qui cherchent
à frapper les esprits par des vérités
générales et spéculatives, ou à
exalter les imaginations par des idées et des paroles
emphatiques: la prédication apostolique est solide et
pratique; elle éclaire vivement les esprits, tout en
allant directement aux coeurs, pour les remuer et les porter
à goûter et à aimer les
vérités qu'ils annoncent.
349 ART. XII. -
Leur prédication doit être simple dans leurs
pensées, dans les mouvements affectueux, dans l'ordre et
l'enchaînement des matières et dans le style. Le
secret de leur éloquence tout apostolique consistera
à sentir vivement les vérités qu'ils
veulent prêcher, à les rendre telles que leur divin
Maître les leur aura imprimées dans le coeur, sans
trop s'attacher à la manière de les exprimer, et
sans mettre de recherche dans la tournure des phrases et des
pensées.
350 ART. XIII. - Cependant ils ne
doivent, en aucune manière, mettre de la
négligence dans ces différents points; ils doivent
éviter tous les défauts dont ils
s'aperçoivent, et même donner un certain soin
à leur style et à leurs gestes, afin de ne pas
nuire, en les négligeant, à l'impression que
doivent faire leurs paroles.
351 ART. XIV. - Il faut
que leurs pensées soient solides, claires, sans embarras
et mises à la portée de ceux qui les
écoutent, pour que tous les comprennent sans
difficulté et sans contention d'esprit.
352 ART.
XV. - Cette simplicité ne doit pas non plus nuire
à la dignité qu'exigent les vérités
qu'ils annoncent; ils éviteront avec soin le trivial;
sentant avec dignité les vérités du salut,
ils les rendront de même, tout en se proportionnant
à la simplicité et même à la
grossièreté des intelligences qu'ils veulent
éclairer.
353 ART. XVI. - Etant les
prédicateurs de la vérité, et par là
antagonistes du monde, du démon et de ses oeuvres, ils
doivent déployer la force et la
générosité apostolique dans leurs
prédications, et, abjurant toute crainte et toute
faiblesse, ils s'animeront de l'esprit de leur divin
Maître et parleront avec la puissance qu'ils en auront
reçue, pour la destruction du péché et du
vice et pour la corrention des peuples dans lesquels ils les
apercevront; et, tout en mêlant l'onction de la
grâce dans l'énergie de leurs paroles, ils
éviteront ces ménagements qui ressentent la
faiblesse et la pusillanimité, prenant garde cependant
que leurs discours ne dégénèrent point en
déclamations ou invectives passionnées, et plus
encore que leurs descriptions ne soient point des
personnalités.
354 ART. XVII. - Dans le
ministère de la parole, ils doivent représenter
avec dignité et grandeur d'âme le Maître qui
les envoie, et parler tanquam potestatem habentes. Ils feront
tout ce qui est en leur pouvoir, pour vaincre les vaines et
ridicules timidités et les troubles qui en sont la suite;
parlant au nom de leur Maître et le représentant
auprès de leurs auditeurs, ils doivent prendre sur eux
l'ascendant attaché au caractère de l'apostolat et
ne pas rabaisser la parole de Jésus-Christ, par la
faiblesse de leur naturel. Ils songeront cependant que leurs
prédications doivent être toujours
accompagnées d'une parfaite modestie; ils
éviteront avec un grand soin la hauteur ou cette
hardiesse inspirée par l'orgueil, et ne prendront jamais
un ton de suffisance réprouvée de Dieu.
355 ART. XVIII.- Ils doivent préparer leurs
prédications et même leus catéchismes avec
grand soin, toutes les fois que cela est possible, et jamais,
hors les cas de nécessité absolue, ils ne doivent
monter en chaire sans s'y être préparés, de
peur qu'ils ne tombent dans l'orgueil et la présomption.
Chacun fera sa préparation de la manière qui lui
convient le mieux, soit en écrivant tout ce qu'il doit
prêcher et l'apprenant par coeur mot à mot, soit en
écrivant seulement les principaux points de
développement, soit en faisant tout cela simplement dans
son esprit, sans rien écrire.
356 ART. XIX. - En
préparant leurs discours, ils ne se contenteront pas de
considérer les vérités abstractivement et
en elles-mêmes; mais ils les appliqueront pratiquement aux
besoins, aux vices et aux caractères des peuples auxquels
ils parlent, se représenteront bien les dispositions de
ces peuples, leurs moeurs, leurs usages, la trempe de leur
esprit, afin de leur proportionner la parole de Dieu qu'ils leur
annoncent.
357 ART. XX. - Leurs prédications
doivent être préparées, autant que possible,
en esprit d'oraison, avec piété et recueillement
devant Dieu. Ils se tiendront en cet état, soit pendant
les lectures qu'ils feront et qu'ils méditeront, soit
dans l'arrangement de leur sujet et ses développements,
soit en l'apprenant. Il serait bon alors de se
représenter au milieu des peuples et de s'animer des
sentiments que doivent respirer nos paroles au moment de la
prédication.
358 ART. XXI. - On doit surtout se
maintenir dans ces sentiments, dans la préparation
immédiate; il faut, en ce moment, éviter
l'application sèche de la mémoire qui ne tendrait
qu'à enlever le recueillement intérieur et
à éloigner l'affection du coeur.
359 ART.
XXII. - S'ils doivent prendre leurs mesures, pour que leurs
prédications aient les qualités nécessaires
pour le bien des autres, ils doivent veiller aussi pour qu'ile
n'en souffrent pas de détriment eux-mêmes. Ils se
mettront en garde contre la vanité et la complaisance ou
satisfaction humaine qui l'accompagne: ces sentiments et
d'autres semblables seraient capables de détruire en eux
tout l'esprit de sainteté qui doit les animer. Ils
s'examineront donc spécialement sur ces différents
points, après leurs prédications, et viseront de
plus en plus à l'oubli d'eux-mêmes. Ils
éviteront de parler de leurs prédications,
après les avoir faites, afin de ne pas se laisser tromper
par les illusions de l'orgueil et du démon qui en est
l'auteur et qui cherche à leur inspirer cette
complaisance en eux-mêmes, sous de vains
prétextes.
360 ART. XXIII.- Si, dans la
prédication, on doit s'adresser au coeur, dans le
catéchisme, il faut parler directement à l'esprit.
On aura grand soin d'être clair, concis et substantiel;
cependant, en prenant tous les moyens de faire comprendre les
vérités qu'on enseigne et de les graver dans les
esprits, on aura une parole onctueuse, pour les faire
goûter et aimer par ceux qui les écoutent.
361 ART. XXIV. - Leur langage, dans les catéchismes, doit
être un langage familier et approchant de la conversation
ordinaire. Ils doivent se faire enfants avec les enfants, afin
d'exprimer les vérités saintes dans un langage
d'enfant, pour se mettre à leur portée et les leur
rendre compréhensibles; ils useront pour cela de
similitudes, de paraboles et d'autres moyens de ce genre, afin
de parler à leur imagination, et, par ce moyen, faire
entrer les vérités dans leur esprit.
362
ART. XXV. - On prendra toutes les mesures, pour rendre les
catéchismes intéressants et pour fixer les
intelligences légères et volages des enfants, en
leur faisant prendre goût à ces instructions. On
excitera leur imagination, sans cependant leur inspirer des
sentiments d'orgueil et de vanité.
363 ART.
XXVI. - On maintiendra le bon ordre et le silence dans les
réunions, et, pour cela, tout en traitant en particulier
chacun de ses enfants avec douceur et affection, on exercera sur
eux, quand ils seront assemblés, une surveillance active,
grave et ferme, se conservant toutefois dans les bornes de la
modération.
CHAPITRE VI. - De
l'administration des sacrements et des autres fonctions
saintes.
364 ARTICLE PREMIER. -
Dans l'administration des sacrements et en général
dans l'exercice de toutes les saintes fonctions du sacerdoce, on
doit se comporter avec le plus grand respect et avec un profond
sentiment de foi. On évitera la dissipation, la
précipitation, une activité
immodérée; on veillera à ce que, dans
l'extérieur, il ne paraisse rien qui puisse être
pris pour négligence, insouciance, indifférence:
tout en nous doit montrer l'importance de l'acte que nous
accomplissons et le soin, la modestie et les convenances avec
lesquelles nous nous en acquittons. La vivacité, la
mauvaise humeur, les imperfections de notre caractère,
ainsi que toutes les autres faiblesses de notre pauvre
humanité doivent disparaître. On doit se comporter
avec le même respect et la même religion, toutes les
fois qu'on traite des choses saintes ou lorsqu'on se trouve
à l'Eglise. On inspirera les mêmes sentiments aux
fidèles.
365 ART. II. - Notre dévotion et
nos sentiments de religion, de foi et d'amour doivent surtout
redoubler, quand nous offrons le saint sacrifice de la Messe; il
faut paraître à l'autel comme un ange du Ciel, s'y
tenir et s'y comporter, comme si l'on voyait des yeux du corps
ce qui s'y passe et celui qui s'y trouve.
366 ART. III.
- On doit se tenir dans les limites fixées par les
Saints, pour la célébration du saint sacrifice de
la Messe, éviter d'être long, sans pourtant jamais
se presser; tâchant ainsi d'acquérir peu à
peu cette modeste et paisible aisance qui inspire de la
dévotion à tour les assistants, et qui fait que,
sans causer de l'ennui aux faibles, par nos longueurs, nous ne
sommes précipités ni dans nos paroles, ni dans nos
mouvements.
367 ART. IV. - A moins d'un cas pressant,
on ne montera jamais à l'autel sans avoir fait une
préparation convenable, et l'on prendra au moins un
quart-d'heure, après avoir célébré,
pour faire son action de grâces. On tâchera de ne
pas se laisser déranger pendant ces moments
précieux, sans cependant brusquer ceux qui voudraient
nous parler alors; on les renverra doucement à un autre
temps.
368 ART. V. - L'administration du sacrement de
la pénitence étant d'une haute importance, on
mettra une grande fidélité à s'en
acquitter, recevant tout le monde dans le saint tribunal avec
une égale charité, et ne faisant jamais acception
de personne.
369 ART. VI. - Les Missionnaires se
rendront au saint tribunal aussitôt qu'on les y demandera,
s'ils le peuvent, et ne feront pas attendre les pénitents
sans une raison véritable. Lorsqu'ils seront
obligés de remettre à un autre moment, ils s'y
prendront toujours avec douceur et charité. Cependant
ils tâcheront de régler si bien leurs heures
ordinaires de confession, qu'ils pourvoient aux besoins et
à la commodité de leurs pénitents, tout en
conservant un temps suffisant pour leurs propres occupations,
sans être trop dérangés.
370 ART.
VII. - Ils auront le plus grand soin de ne manifester de
l'ennui, de la peine ou du mécontentement, à
l'occasion de leurs pénitents, ni en leur
présence, ni en leur absence, quelque pénible
d'ailleurs que puisse être pour eux le soin de leurs
âmes. Ils recevront, au contraire, avec une grande
douceur ceux qui leur causent le plus d'importunité ou de
chagrin.
371 ART. VIII. - Ils chercheront toujours
à encourager les pénitents, plutôt
qu'à les reprendre avec une sévérité
sèche; ils feront sentir aux pécheurs toute la
grandeur du mal qu'ils ont commis, mais non de manière
à leur causer une mauvaise honte, à les resserrer,
à intimider leurs esprits; il faut, au contraire, que la
parole du confesseur les touche, les aide et les encourage
à ouvrir leurs coeurs avec confiance.
372 ART.
IX. - Ils éviteront aussi, pendant ce temps, et plus
particulièrement pendant l'accusation, les impatiences et
autres manifestations de mécontentement, ainsi que toute
démonstration capable de fermer leurs coeurs.
373 ART. X. - Après la déclaration des
péchés, ils donneront aux pénitents
quelques instructions courtes, précises, onctueuses,
adaptées à leurs besoins, pour leur servir de
règle de conduite.
374 ART. XI. - Ils ne
parleront pas dans le confessional de choses
étrangères à la confession et à la
direction des âmes.
375 ART. XII. - Ils ne
retiendront pas trop longtemps leurs pénitents, surtout
les personnes du sexe, à moins que leurs besoins ne
l'exigent absolument. On sera encore plus attentif à
cette règle, lorsqu'on apercevra un certain attachement
trop humain, soit dans le pénitent, soit dans son propre
coeur. Si les longueurs du pénitent proviennent d'un
certain embarras à s'exprimer avec plus de
brièveté, on se gardera de le trop presser et de
le troubler; on tâchera alors de l'instruire, avec
douceur, sur la manière de s'accuser avec clarté
et concision.
376 ART. XIII. - Il faut bien se mettre
en garde contre un certain mouvement d'amour-propre, qui fait
que l'on éprouve du mécontentement quand on se
voit abandonné par des pénitents; on doit leur
laisser toute liberté de s'adresser à qui ils
veulent, et ne jamais leur témoigner la moindre peine, ni
la moindre résistance, quand ils usent de cette
liberté, à moins qu'on ne voie évidemment,
qu'en changeant de Confesseur, ils nuiraient gravement au bien
de leurs âmes; et, dans ce cas, il faut examiner devant
Dieu jusqu'à quel point on doit s'opposer à leurs
désirs, et l'on agira avec prudence et
réserve.
377 ART. XIV. - On exercera sur
soi-même la vigilance la plus grande et la plus assidue,
afin de se prémunir contre la violation du sceau de la
confession, en quoi que ce soit et en quelque manière que
ce puisse être; on évitera de parler, même
d'une manière vague et générale, de ce qui
peut avoir quelque rapport avec les confessions que l'on a
entendues, lors même que les personnes présentes ne
pourraient avoir aucune connaissance de nos
pénitents.
378 ART. XV. - On ne doit jamais
plaisanter sur ce qui touche au saint tribunal, ni en parler
avec légèreté, quand bien même les
personnes présentes seraient toutes
ecclésiastiques. On doit être encore plus
réservé à parler avec amusement et
plaisanterie des personnes que l'on entend en confession, soit
en leur présence soit en leur absence.
DEUXIEME SECTION : VIE DE
COMMUNAUTÉ
PREMIERE DIVISION : Des Communautés, et de ce
qui s'y doit observer.
CHAPITRE PREMIER.
Noviciat et des dispositions que doivent avoir ceux qui se
préparent à entrer dans la
Société.
379 ARTICLE PREMIER. - Le noviciat est une sainte
solitude où ceux qui sont appelés à
être membres de la Congrégation éprouveront
leur vocation, apprendront à en connaître les
devoirs et s'appliqueront à en acquérir les vertus
et les perfections.
380 ART. II. -
Pénétrés de l'importance du noviciat, de
son influence sur toute leur vie et de sa
brièveté, ils prendront, dès les premiers
jours, des résolutions ferventes et pratiques, afin de
profiter du temps précieux qu'ils ont à y passer
et de se former à la vie sainte qu'ils veulent
embrasser.
381 ART. III. - Ils feront tout ce qu'ils
pourront, pour éloigner d'eux les rapports avec les
personnes du dehors et pour effacer de leur esprit et de leur
coeur tous les objets extérieurs, afin que, vivant seuls
avec Dieu, ils obtiennent grâces, lumières et force
de l'Esprit-Saint, pour se former dans l'esprit apostolique et
religieux, selon toute l'étendue des desseins de la
miséricorde divine sur eux.
382 ART. IV. - Tous,
même ceux qui auront encore à compléter
quelque partie de la science ecclésiastique,
considèreront le temps du noviciat comme un temps
donné à la sanctification de leurs âmes, et
pour cela ils mettront à profit les instructions qu'on
leur donnera en public et en particulier; ils étudieront
les règles de la Congrégation, s'efforceront de se
remplir de leur esprit et tâcheront de vivre dans le
recueillement et l'esprit d'oraison.
383 ART. V. - Ils
ouvriront leurs âmes à leur directeur avec
fidélité, simplicité et confiance, lui
découvriront tous les replis de leur coeur; ils lui
parleront surtout de leurs défauts, de leurs vices, de
leurs peines et tentations. Ils l'entretiendront de leurs
saints désirs, de leurs joies et satisfactions, de leurs
progrès dans l'oraison et dans la pratique des vertus.
Ils le consulteront sur toutes leurs difficultés, et en
général sur tout ce qui touche à leur
avancement spirituel.
384 ART. VI. - Leur vie, dans le
noviciat, sera simple, humble, modeste et docile, pleine de
piété, de paix, de gaîté et
d'ouverture de coeur.
385 ART. VII. - Pour pratiquer,
dès les premiers temps de leur noviciat, la parfaite
abnégation, ils se livreront avec joie et
fidélité à la pratique de la
pauvreté, de l'obéissance et de la
régularité, vertus qu'ils devront pratiquer toute
leur vie dans la Congrégation. Ils y attacheront une
grande importance et y apporteront un soin et une application
toute particulière, pendant le noviciat.
386
ART. VIII. - Pour passer leur noviciat avec ferveur et faire du
progrès dans l'abnégation d'eux-mêmes, ils
s'exerceront dans la mortification intérieure, dans la
privation de leurs goûts et affections naturelles et de
toutes les satisfactions des sens, ne mettant leur bonheur que
dans la jouissance du divin amour et dans l'acquisition des
vertus et de la perfection de leur état.
387
ART. IX. - Parmi les mortifications à pratiquer, ils
s'attacheront de préférence à celles qui
tendront à la réforme de leur caractère et
de leurs défauts naturels. Ils emploieront les moyens
les plus efficaces pour obtenir cet heureux résultat; ils
dirigeront vers cet objet leurs oraisons, leurs examens et leurs
autres exercices de piété.
388 ART. X. -
Ils ne feront aucune étude, ni lecture, ni autre exercice
non prescrit par leurs règles générales,
sans en avoir consulté leur directeur; ils se feront
prescrire par lui un réglement particulier pour les
occupations du temps libre que leur laissent les règles
générales de la Communauté, et
l'observeront avec exactitude et fidélité.
389 ART. XI. - Comme l'oraison et le recueillement habituel
sont les moyens les plus efficaces pour parvenir à la
sainteté de leur état, ils s'y appliqueront avec
zèle et ferveur; ils en feront l'objet de leur attention
continuelle. Ils prendront garde cependant de tomber dans la
contention, l'affectation, et éviteront les embarras
d'esprit et les inquiétudes, tous défauts
très-dangereux qui éloignent de la perfection
plutôt que d'en rapprocher.
390 ART. XII. - La
règle du silence sera l'objet de leur pieuse attention;
ils mettront une fidélité toute
particulière à son observation. Cette
règle est plus importante dans le noviciat que dans nos
autres communautés; elle offre un moyen puissant pour se
conserver dans le recueillement et l'esprit d'oraison. Pendant
le temps du silence, non seulement on ne doit pas parler; on ne
doit pas même se communiquer par gestes ou par signes,
mais chacun s'occupera avec paix et application à ce que
sa règle prescrit, sans faire attention aux autres et
sans les déranger.
391 ART. XIII. - Un des
exercices qui demande le plus de vigilance de leur part est
celui des récréations; leur conversation doit
être simple, gaie, aisée, modeste, paisible,
prévenante, franche et polie. Ils ne se laisseront pas
aller aux contestations, aux conversations mondaines; ils
éviteront la vanité qui cherche à se faire
valoir, à donner bonne opinion de soi; la trop grande
profusion de paroles, laissant à chacun sa part à
la conversation, comme aussi une réserve excessive qui,
le plus souvent, provient de l'amour-propre ou d'autres
défauts; l'esprit farceur qui est toujours nuisible
à l'âme; la dissipation et les fréquents
éclats de rire; l'esprit caustique, qui fait autant de
mal à celui dui s'y laisse aller que de peine au
prochain; la médisance et le murmure, qui renferment un
double mal, en ajoutant le scandale à la faute contre la
charité. Ils apprendront, pendant les
récréations, à supporter avec douceur et
charité les défauts de leurs confrères et
à se faire tout à tous, pour les satisfaire
tous.
392 ART. XIV. - Ils se mettront en garde contre
les amitiés particulières, par lesquelles leurs
coeurs pourraient se lier trop aux uns, et contre les
répugnances et les froideurs auxquelles ils se
sentiraient portés envers les autres. Ceux qui se
laissent aller sans résistance à l'un de ces vices
sont généralement des âmes livrées
aux désirs de leurs aises, des jouissances et
satisfactions humaines; des âmes faibles qui ne savent pas
dominer leurs sens, ni se rendre maîtres de leurs
passions; des âmes peu fidèles à la
grâce divine qui porte toujours à une
charité sainte et universelle.
393 ART. XV. -
Dans les combats qu'ils livreront à la nature, pour la
destruction de leurs défauts et pour l'acquisition des
vertus, ils doivent s'attendre à ce que l'ennemi leur
suscite toutes sortes de peines, d'ennuis et d'épreuves.
Ils s'engageront dans cette lutte avec courage et la
soutiendront avec ferveur et constance, persuadés que le
démon ne leur suscite ces peines que pour les
empêcher d'être dans la suite des instruments de
miséricorde entre les mains de Dieu, pour le salut des
âmes, et convaincus que, s'ils persévèrent
dans leur fidélité au milieu des tentations, plus
ces peines et tentations seront grandes, plus elles serviront
à les former à la sainteté
nécessaire au grand ministère qu'ils doivent
exercer un jour pour la gloire de Dieu. Pendant la tentation,
ils mettront toute leur confiance en Jésus et Marie, et
jamais en leurs propres forces.
394 ART. XVI. - Pendant
leur noviciat, ils ne doivent demander à aller visiter
leurs parents ou amis éloignés que pour
nécessité réelle. Après leur
admission, et avant leur départ, ils peuvent solliciter
cette permission, lorsqu'il y a des raisons graves pour cela.
Dans toutes ces circonstances, ils s'abandonneront au jugement
de leur Supérieur.
395 ART. XVII. - Après
leur admission dans la Congrégation, pendant le temps qui
leur restera avant d'être envoyés en mission, leur
conduite doit, en toutes circonstances, être la même
qu'auparavant; ils observeront avec la plus grande exactitude et
la plus grande fidélité les règles
prescrites aux Novices.
396 ART. XVIII.- Lorsqu'ils
seront pour partir en mission, ils ne se mêleront en rien
des préparatifs pour leur départ; ils en
laisseront tout le soin et toute la sollicitude au procureur de
la Maison, s'occupant seulement des préparatifs
spirituels pour la conservation des grâces et des vertus
qu'ils auront acquises pendant le précieux temps de leur
noviciat. Si cependant leurs parents, amis ou d'autre personnes
leur faisaient des présents, il pourraient les accepter.
Ils les remettront à leur directeur, aussitôt
qu'ils les auront reçus, sans y conserver aucun droit et
sans s'en occuper davantage.
397 ART. XIX. - Pendant
leur voyage, ils obéiront à celui que le
Supérieur aura chargé de le représenter
auprès d'eux. Ils observeront un réglement,
autant que les circonstances et les incommodités du
voyage le pourront supporter. Tout en veillant à la
conservation de leur santé, ils prendront garde de se
relâcher pendant la traversée.
CHAPITRE II. - Devoirs généraux des
Membres envers la Congrégation.
398 ARTICLE PREMIER. - Etant
appelés par une vocation spéciale de Dieu dans la
Congrégation, il est de leur devoir de lui être
sincèrement et affectueusement attachés, de faire
tout ce qui est en leur pouvoir, pour la rendre digne et capable
de l'accomplissement des desseins de Dieu sur elle. Ils doivent
avoir la plus grande estime pour ses règles et l'esprit
qu'elles contiennent, les considérant comme la voie que
la divine Miséricorde leur a tracée, pour parvenir
à la gloire qui leur est destinée.
399
ART. II. - Ils feront, chacun pour sa part, tout ce qui
dépendra d'eux pour la conservation de ses règles,
du bon esprit qui doit animer la Congrégation, et pour le
maintien de ses oeuvres dans le but pour lequel elle a
été fondée.
400 ART. III. - Ils
éviteront l'orgueil, l'égoïsme et la jalousie
de corps; ils considéreront leur Société
comme une pauvre servante de l'Eglise de Dieu, employée
aux oeuvres les plus infimes aux yeux des hommes et travaillant
avec fidélité et constance à leur
accomplissement, pour l'exaltation de cette sainte Eglise et
pour la gloire de son divin Epoux. Ils ne se feront pas un
souci de rendre leur Société glorieuse aux yeux
des hommes, par l'éclat de ses oeuvres; ils se
contenteront de la rendre solidement utile.
401 ART.
IV. - Quoiqu'il soit de leur devoir de fortifier la
Congrégation dans son intérieur et
d'étendre ses oeuvres au dehors, ils se mettront en garde
cependant contre l'envie de s'agrandir, contre les désirs
trop naturels d'augmenter en nombre et d'obtenir une plus grande
importance. Ils se contenteront de se mettre avec paix et
confiance à la disposition de leur divin Maître, et
de profiter des circonstances que la providence de Dieu leur
fournira, pour se rendre de plus en plus utiles dans la sainte
Eglise.
402 ART. V. - Ils professeront un respect
sincère pour les autres Congrégations et leurs
membres, et entretiendront avec elles des rapports d'une
charité cordiale; ils seront contents de les voir
honorées et aimées de tout le monde, lors
même qu'on les préfèrerait à leur
propre Société, évitant et étouffant
dans leurs coeurs les bas sentiments qu'inspirent la jalousie et
l'amour-propre de corps, qui sont ordinairement le partage des
âmes faibles et peu généreuses dans le
service de Dieu. Remplis d'un zèle pur et fervent, ils
se réjouiront de voir Dieu glorifié et les
âmes sauvées, n'importe quel instrument a servi
pour opérer cet heureux effet, et même lorqu'il en
résulte un désavantage pour la
Congrégation.
CHAPITRE III. - Devoirs
des membres de la Congrégation les uns envers les
autres.
403
ARTICLE PREMIER. - Leurs rapports entre eux seront ceux des
enfants d'une même famille qui est celle de Jésus
et de Marie. Ils doivent se traiter comme des frères
animés d'un même esprit qui est l'esprit de Dieu,
et d'un même sentiment qui est celui qui anime le saint et
immaculé Coeur de Marie. Ils regarderont comme fait
à Jésus-Christ lui-même tout ce qu'ils
feront à leurs frères, et ils agiront en tout avec
eux comme ils auraient agi envers le divin Sauveur et sa
très-sainte Mère.
404 ART. II. - Ils
veilleront sur leur esprit, pour ne jamais se laisser aller
à la vivacité; supporteront avec douceur, patience
et charité toutes les peines qu'ils pourraient
éprouver de la part de leurs confrères,
évitant dans ces circonstances les manifestations de
mécontentement ou de froideur, se condamnant plutôt
eux-mêmes que leurs confrères, et faisant tous
leurs efforts, pour gagner l'affection de ceux qui leur airaient
fait de la peine.
405 ART. III. - Ils se mettront en
garde avec le plus grand soin contre tout sentement d'envie ou
de jalousie; dès qu'ils s'apercevront du premier
mouvement de ce vice humiliant, ils s'efforceront de
l'étouffer aussitôt et demanderont à Dieu la
grâce d'être délivrés d'un sentiment
si bas et si indigne d'un serviteur de Jésus-Christ. Ils
entoureront d'une plus grande charité et traîteront
avec une plus grande douceur celui qui en sera l'objet. Ils
prendront garde que cette mauvaise tentation ne se manifeste en
aucune manière, ni dans leurs paroles, ni dans leurs
actions.
406 ART. IV. - Ils se réjouiront du
bien que Dieu fera par leurs frères, et ne s'attristeront
pas, s'ils n'en font pas autant. Il faut que les désirs
de leur coeur soient toujours très-purs, et leur fasse
souhaiter ardemment que Dieu soit glorifié, et seront
aussi contents et aussi heureux, lorsque cette gloire de Dieu
sera procurée par leurs confrères que si
c'était par eux-mêmes. Ils se tiendront donc en
paix et dans une parfaite soumission à la divine
volonté, lorsqu'ils se verront inférieurs en dons
et en grâces de Dieu et lorsque leur ministère sera
moins fructueux que celui de leurs confrères.
407 ART. V. - On fera rarement, sans en être
chargé, des observations à un confrère sur
les fautes qu'on lui voit commettre, et lorsqu'on croit utile
d'en faire une, elle doit être assaisonnée par la
douceur, la charité et la modestie.
408 ART. VI.
- On ne se mêlera pas de ce qui regarde l'office d'un
autre, sans en avoir été chargé par son
Supérieur, ou sans en avoir été prié
par celui qui est chargé de cet office.
409 ART.
VII. - On doit éviter de s'entretenir de la
manière dont les confrères s'acquittent des
fonctions qu'ils remplissent, à moins que ce ne soit pour
l'édification; on ne doit jamais les examiner et les
juger dans l'accomplissement de ces fonctions; mais chacun, sans
s'occuper des autres, fera son possible pour remplir saintement
et parfaitement celles qui lui seront confiées. En
général, on ne doit jamais juger ses frères
d'une manière défavorable en quoi que ce soit, et
moins encore manifester ses jugements, si l'on avait la
tentation d'en former dans son esprit.
410 ART. VIII. -
Cependant, si l'on voyait dans un confrère un
défaut grave, ou qu'on lui eût vu faire des fautes
considérables, et qu'il y eût à craindre un
dommage sérieux pour lui ou pour la Communauté, on
en préviendrait le Supérieur; mais cela se fera
dans un véritable esprit de charité, sans aucune
rancune, et avec une intention pure et sainte.
411 ART.
IX. - On ne nourira jamais dans son esprit ni dans son coeur de
l'opposition, de la rancune, du mépris ou de
l'indifférence envers ses confrères, quel que
puisse en être le motif. On évitera de même
les préférences pour les avantages naturels, les
talents ou autres qualités; mais on les aimera tous
également et on les traitera tous avec la même
estime et la même bienveillance.
412 ART. X. - On
se gardera encore bien davantage de s'élever
soi-même au-dessus de ses frères, pour quelque
raison que ce soit; on se considèrera, au contraire,
comme le dernier de tous; on donnera toujours à tous la
préférence sur soi, et, loin de chercher à
briller parmi eux et à briguer leur estime, par
vanité et recherche de soi-même, on se conduira de
manière à ne pas fixer sur soi l'attention des
autres.
413 ART. XI. - L'âme de toute cette
conduite doit être une charité vraie et
sincère; ils doivent préférer leurs
confrères à tous les autres hommes, les aimant
comme d'autres eux-mêmes de cet amour véritable du
saint coeur de leur Mère, dans la surabondante
plénitude de l'esprit de Dieu que le remplit.
414 ART. XII. - Cette charité doit être cordiale:
il se suffit pas seulement qu'on l'ait dans la bouche ou
même dans les actions, elle doit partir d'un coeur
vraiment affectionné, luttant avec fidélité
et constance contre les tentations qui pourraient
s'élever contre cette vertu.
415 ART. XIII. -
Elle sera effective: on se se contentera pas de l'avoir dans le
coeur; il faut qu'elle se manifeste par les rapports intimes
qu'on aura avec tous ses frères, par les services qu'on
leur rendra en toute occasion, par la complaisance et la bonne
volonté qu'on y mettra, par la douceur avec laquelle on
les traitera, soit dans ses paroles, soit dans sa conduite
à leur égard.
416 ART. XIV. - Elle sera
simple: il faut éviter, dans ses paroles et sa conduite,
toute manifestation affectée de charité; pas de
pensées recherchées pour faire plaisir; pas de
tournures de phrases flatteuses; jamais surtout de paroles
capables d'exciter la vanité; mais on parlera et on agira
avec cette affection sincère et simple des enfants de
Dieu, sans recherche et non avec la fausse charité des
gens du monde.
417 ART. XV. - Elle sera franche et
droite: on doit agir avec ses frères avec franchise et
droiture de coeur, avec épanchement et
gaîté; la véritable charité a
toujours le sourire sur les lèvres, pour porter la joie
et la consolation dans le coeur des autres.
418 ART.
XVI. - Elle sera modeste et grave: on évitera de se
laisser aller à des mouvements
déréglés; on ne se poussera et on ne se
touchera pas, mais on conversera ensemble avec une modestie
douce, grave, quoique pleine de franchise et d'une
gaîté sainte.
419 ART. XVII. - Elle sera
respectueuse: on se parlera et on se traitera avec respect, sans
affectation, évitant les familiarités, les
grossièretés et toutes les autres manières
peu convenables entre des serviteurs de Dieu.
420 ART.
XVIII.- Enfin le charité des membres de la
Congrégation entre eux sera pieuse et sainte: on n'aimera
pas son confrère dans la vue d'en être aimé,
ni par goût et penchant trop naturels, ou pour le plaisir
qu'on trouve dans cette affection.
421 ART. XIX. -
Aimant ainsi ses confrères, tout en Dieu et pour Dieu, on
tâchera de faire régner Dieu en eux: c'est pourquoi
le premier devoir que la charité impose à chaque
membre de la Congrégation, c'est le désir de la
sanctification de ses frères. Ils prieront souvent pour
cela; ils donneront bon exemple, pour les porter par là
à la perfection.
422 ART. XX. - Leur
charité ne se portera pas seulement sur leurs
frères individuellement; mais ils auront la plus grande
tendresse et le plus grand attachement pour la
Congrégation, dans laquelle ils sont saintement unis
ensemble par la vertu du divin Esprit et dans le coeur tout
d'amour et de sainteté de leur très-bonne
Mère. Ils feront tout ce qui sera en leur pouvoir pour
augmenter ses avantages spirituels, pour la rendre propre
à procurer la plus grande gloire de Dieu, dans les
âmes, et pour qu'elle soit une servante fidèle de
leur adorable Maître, dans l'Eglise.
423 ART.
XXI. - Leur charité ne s'exercera pas seulement envers
les confrères vivants, mais aussi envers ceux de leurs
confrères morts. Dans chaque Communauté, on dira
neuf messes pour chacun des confrères qui viendront
à mourir, et si la Communauté comptait plus de
neuf membres, chacun en dirait une dans la même intention;
on s'acquittera de ce devoir le plus tôt qu'on pourra, et
l'on en fera mémoire toute l'année. Tous les ans
au 1er jour libre après les fêtes de la
Pentecôte et du saint et immaculé Coeur de Marie,
tous les membres de la Congrégation diront la sainte
Messe pour tous les membres défunts.
CHAPITRE IV. - Devoirs particuliers de la
Communauté-Mère.
424
ARTICLE PREMIER. - La Communauté-Mère et tous ceux
qui y sont employés à la formation des membres de
la Congrégation et à la direction des autres
Communautés, contractent par là même un
devoir spécial de donner l'exemple à tous leurs
confrères, par l'observation exacte de nos règles
et par la conservation de l'esprit de la
Congrégation.
425 ART. II. - Tous doivent
assister aux exercices qui, dans les autres communautés,
doivent être faits en commun. Ils sont libres de faire en
particulier ceux qui se font en particulier, quoique dans le
séminaire ou le noviciat ils se fassent en commun,
excepté cependant les offices aux jours de fête,
auxquels, autant que possible, ils doivent assister, afin de les
célébrer avec la pompe et la solennité
convenables.
426 ART. III. - Ils doivent assister aux
récréations, et, autant que possible, aux
promenades du séminaire et du noviciat.
427 ART.
IV. - Quoiqu'il leur soit permis d'entrer dans les chambres de
leurs confrères, ils doivent cependant éviter les
conversations inutiles et les pertes de temps.
428 ART.
V. - Ils ont encore à veiller sur les sorties trop
fréquentes; ils ne sortiront que par
nécessité ou pour une utilité
réelle, et en demanderont toujours la permission,
à moins que ce ne soit avec obédience, pour une
fonction régulière à exercer. On doit
être plus réservé que dans tout autre
communauté, pour l'acceptation d'invitation à un
repas.
429 ART. VI. - Le Supérieur
général doit apporter une grande vigilance
à ce que dans la Maison-Mère la sainte
pauvreté soit observée dnas sa pratique
extérieure, autant que la position de cette
Communauté vis-à-vis les personnes du dehors qui
la fréquentent peut le permettre. Cette position
pourrait exiger une plus grande propreté dans le logement
et l'ameublement; mais le luxe et le superflu doivent en
être bannis, comme des autres communautés.
430 ART. VII. - Les membres de la Congrégation
employés dans la Maison-Mère n'oublieront pas leur
vocation à la vie apostolique; ils s'emploieront donc,
autant qu'ils le pourront, à procurer la gloire de Dieu
et le salut des âmes, le tout cependant selon la sainte
obéissance, dans l'esprit de la Congrégation, et
sans rien négliger des devoirs que leur imposent les
occupations ordinaires pour le bien général de
l'oeuvre.
DEUXIEME DIVISION.
Des fonctionnaires de la Congrégation, et
de leur administration.
CHAPITRE Ier.
Règles pour l'administration de la
Congrégation.
431 ARTICLE PREMIER. - Le gouvernement de la Congrégation
ayant une influence considérable sur tous ses membres,
ainsi que sur leurs oeuvres et sur le bien qu'ils sont
appelés à produire dans l'Eglise de Dieu, il est
très-important qu'il soit soumis à des
règles sages et tout évangéliques.
432 ART. II. - Le gouvernement de la Congrégation doit
toujours être en rapport avec la fin vers laquelle elle
tend: la plus grande gloire de Dieu, et avec l'objet qu'elle se
propose: le salut des âmes les plus
délaissées. Aussi ce doit être là
l'idée générale et l'unique
préoccupation des Supérieurs, dans la direction
qu'ils donneront à toutes les affaires de la
Congrégation, et dans toutes leurs démarches, et
l'exercice de leurs fonctions.
433 ART. III. - Dans la
direction générale des oeuvres, dans leurs
rapports avec leurs frères, et dans leur conduite
particulière, les Supérieurs agiront avec autant
de force que d'application à entretenir et à
augmenter l'esprit apostolique dans tous les membres de la
Congrégation. Ils éviteront avec le plus grand
soin tout ce qui pourra diminuer ou affaiblir cet esprit.
434 ART. IV. - Un de leurs soins principaux, dans la
direction des affaires, sera la parfaite observation de la
règle; ils éloigneront toutes les vues qui ne sont
pas conformes à l'esprit de la Congrégation ou qui
tendent à l'affaiblir.
435 ART. V. - Dans la
conduite de leurs communautés, les Supérieurs
feront tout ce qui sera en leur pouvoir pour procurer le bien et
l'avancement spirituel de leurs frères, évitant de
diriger les choses d'une façon qui puisse nuire à
la sainteté de ceux qui sont sous leur conduite.
436 ART. VI. - Ils apporteront une attention toute
particulière à entretenir la paix, l'union et la
bonne intelligence parmi tous les membres de la
Congrégation qui sont sous leur conduite.
437
ART. VII. - Comme ils ont à gouverner des choses saintes
et à les diriger vers une fin sainte, les moyens doivent
être saints ainsi que la manière de les employer.
Ils éviteront donc, dans la direction des oeuvres de
Dieu, les manières d'agir profanes et passionnées
qu'on met en usage dans l'administration des choses
humaines.
438 ART. VIII. - Dieu doit être, autant
que possible, le principe, comme il est la fin, de toute la
conduite des Supérieurs dans la direction des affaires de
la Congrégation. Ils n'emploieront de moyens pour
l'exécution de leurs desseins, ni de manières
d'agir autres que ceux que notre Seigneur Jésus-Christ
prendrait lui-même, s'il était à leur
place.
439 ART. IX. - Ils auront de
l'éloignement pour cette conduite si opposée
à celle de leur divin Maître et si contraire
à l'esprit de Dieu, de gouverner les choses divines par
des principes, des industries et des combinaisons pleines de
duplicité et de détours qu'ont accoutumé de
porter dans les affaires du monde ceux qui les administrent; ils
auront toujours une conduite droite, simple et franche. Cette
droiture, cette simplicité et cette franchise doivent
être pratiquées surtout dans les rapports avec les
Supérieurs ecclésiastiques, et dans
l'intérieur de la Communauté vis-à-vis les
confrères.
440 ART. X. - Quoiqu'il faille agir
dans toute notre administration et dans nos rapports avec un
grand esprit de simplicite, cela n'empêche pas que notre
gouvernement ne doive être sage, réfléchi et
plein de discrétion, et cette discrétion doit
être selon Dieu.
441 ART. XI. - Une règle
générale et importante que la prudence impose aux
Supérieurs, c'est la réserve, la discrétion
et la modération dans leurs paroles et dans leurs
actions; parler peu, et toujours avec attention et
réflexion, lorsqu'ils ont à traiter des questions
administratives avec le prochain. Ils éviteront de
même de mêler, sans motif, des paroles inutiles dans
les entretiens qu'ils auront pour traiter ces questions. Cette
modération, cette attention et ce calme de la
réflexion leur sont recommandés, non-seulement
lorsqu'ils traitent d'affaires, mais dans tout l'ensemble de
leur conduite. Ces qualités leur seront d'un grand
secours, pour l'acquisition du tact qui apprend ce qu'il faut
dire et ce qu'il faut taire en tous temps, et surtout dans les
circonstances importantes.
442 ART. XII. - Pour
appliquer convenablement dans la pratique cette triple
règle de prudence, ils ont besoin de proportionner leurs
paroles et leurs manières d'agir aux sentiments,
dispositions et intérêts des personnes avec
lesquelles ils ont à traiter. Ces sentiments,
dispositions et intérêts ne se connaîtront
pas toujours par des conclusions calculées du
raisonnement, mais plutôt par un certain tact. Ce tact
s'acquiert ordinairement par la connaissance
générale et pratique des plis et replis du coeur
humain, des différentes nuances des caractères,
des intérêts divers qui les affectent et par
l'esprit d'observation qu'on apporte en général
dans ses rapports avec le prochain, enfin par l'attention que
l'on a aux sentiments et dispositions qu'on voit en lui, pour
proportionner en toutes choses, et par un esprit de
charité, nos paroles et nos actions à ces
sentiments et dispositions.
443 ART. XIII. - Dans
l'accomplissement de ces règles de prudence, on
évitera toute affectation et manifestation
extérieures qui tendraient à faire voir qu'on est
un homme prudent, grave, et qu'on agit par principes; ce serait
s'exposer à perdre les fruits que doit apporter
l'observation de ces règles, et, ce qui est pire encore,
à livrer son âme à une vanité
puérile qui la rendrait désagréable devant
Dieu.
444 ART. XIV. - Pour acquérir cette
prudence; pour observer facilement ces règles, et pour ne
pas tomber, en les observant, dans les détours et la
duplicité des prudents du monde, on a besoin d'une
parfaite abnégation de soi-même, de dominer toutes
ses passions et sa sensibilité, d'une humilité
profonde, sincère, et enfin du calme et de la paix
fondés sur le recueillement et l'abandon à Dieu et
à son bon plaisir en toutes choses.
445 ART. XV.
- Cette réserve et cette modération doivent les
suivre aussi dans leurs entreprises; il faut cependant
éviter avec grand soin la timidité, les
précautions excessives, la lenteur et les autres
défauts qui tiennent d'une fausse prudence; il faut peser
saintement les choses par la prudence de l'esprit de Dieu,
prendre hardiment une résolution, selon les
lumières qu'on aura; mettre toute sa confiance dans la
bonté du divin Maître et en sa très-sainte
Mère, et agir avec force, selon la résolution
qu'on aura prise.
446 ART. XVI. - Un esprit
défiant, soupçonneux et porté à la
prévention est non-seulement contraire à la
sainteté qui doit animer tout homme de Dieu, mais encore
très-opposé à une bonne administration des
choses saintes, surtout quand on a affaire à des
personnes dont les dispositions sont inconnues. Si, au
contraire, on a affaire à des personnes dont les
défauts de droiture ou les mauvaises dispositions sont
bien connues, on doit se mettre sur ses gardes et apporter plus
de réserve et d'attention dans ses rapports avec elles,
sans cependant se laisser aller trop à des sentiments de
défiance et de soupçon, surtout à une
certaine agitation ou irritation que ces sentiments produisent
dans l'âme.
447 ART. XVII. - Quelle que soit la
pénétration d'un Supérieur, il doit prendre
garde de se prononcer trop vite sur les personnes et les choses;
cette manière d'agir le ferait juger très-souvent
à faux et par prévention, et ce serait souvent une
marque de présomption. Faire ses observations,
établir peu à peu une probabilité, et, hors
des cas pressés, ne fixer son jugement qu'après
mûr examen, telle est la conduite des hommes sages qui
agissent selon l'esprit de Dieu.
448 ART. XVIII.-
Quoique notre prudence doive être acquise dans l'oraison
et le recueillement, et que sa source doive être dans le
divin Esprit et dans la sagesse éternelle de notre
Père céleste, cela n'empêche pas cependant
qu'il faille toujours procéder d'une manière
très-régulière dans nos entreprises, et ne
rien négliger, dans la considération d'un objet,
de ce qui pourrait nous le faire approfondir; seulement c'est
l'esprit de Jésus qui doit seul êtr la source de
nos lumières, et toute notre confiance doit être en
lui seul.
449 ART. XIX. - Il est encore bon, et
même important pour les Supérieurs, de mettre
beaucoup de suite et d'uniformité dans leurs entreprises,
surtout dans celles qui concourent à l'exécution
d'un même projet, dans tout ce qui y a rapport, ainsi que
dans la marche qu'on y suit, et dans les moyens qu'on emploiera
pour y réussir.
450 ART. XX. - Ils mettront une
grande douceur et un grand calme dans leurs rapports avec les
personnes avec lesquelles ils auront à traiter,
évitant surtout les vivacités et les brusqueries,
la roideur, les susceptibilités,
l'opiniâtreté, surtout sur les points de peu
d'importance, et en général toute manifestation
qui pourrait exciter dans celui avec lequel on a affaire des
sentiments de peine, de mécontentement et
d'opposition.
451 ART. XXI. - Une vertu des plus
importantes aux Supérieurs, c'est une grande constance
accompagnée d'une douce et imperturbable patience au
milieu des peines, des difficultés et des oppositions
qu'ils rencontrent. Ils ne doivent pas s'effrayer à la
vue des obstacles qu'on mettra à ce qu'ils
entreprendront; quand la prudence ou la nécessité
exigeront qu'ils cèdent à ces difficultés,
ils ne perdront pas de vue leurs projets, s'ils sont importants
pour la gloire de Dieu et le salut des âmes; ils mettront
toute leur confiance en leur adorable Maître, attendront
une circonstance plus favorable, et profiteront de toutes les
occasions, pour se préparer les voies et poursuivre leurs
desseins, dans le temps et les circonstances
déterminés par la Providence.
452 ART.
XXII. - Ceux qui gouvernent doivent se prémunir contre
l'empressement à entreprendre ou à exécuter
les oeuvres avant que le temps en soit venu. Ils doivent savoir
qu'ils ne peuvent rien par eux-mêmes; que Dieu seul peut
faire réussir leurs bons desseins pour sa gloire, et
attendre en paix que sa divine bonté leur fournisse les
circonstances, les moyens favorables pour en venir à
l'exécution de leurs saints projets.
453 ART.
XXIII.- Enfin, ils prendront garde à un autre
excès, qui est de laisser traîner les affaires en
longueur. Ils s'y prendront toujours d'avance, pour accomplir
chaque chose en son temps. Pour mieux réussir en cela,
ils auront beaucoup d'ordre et d'exactitude en tout.
CHAPITRE II.
- Comment on doit se conduire dans la
Supériorité
454 ARTICLE
PREMIER. - La supériorité doit être
considérée comme une charge imposée par
notre Seigneur Jésus-Christ, pour faire observer les
règles, procurer la sanctification des membres de la
Congrégation, entretenir le bon ordre et la paix entre
eux, entreprendre et conduire à bonne fin, pour la
très-grande gloire de Dieu et le salut des âmes,
toutes les oeuvres dont la Congrégation a coutume de
s'occuper, enfin pour diriger tous les travaux des Missionnaires
vers cette unique fin.
455 ART. II. - Ceux à qui
cette charge difficile sera imposée ne devront l'accepter
qu'avec une sincère appréhension, une humble
défiance d'eux-mêmes et de leurs talents. N'ayant
pas cette crainte et cette défiance, ils s'exposeraient
à commettre de grandes fautes dans leur administration.
Ceux qui éprouveraient de la satisfaction de se voir
revêtus de l'honneur de la supériorité, ou
qui s'en croiraient dignes, devraient regarder cette disposition
comme une de leurs plus dangereuses tentations et se mettre en
garde contre l'amour-propre, de crainte d'éloigner les
bénédictions de Dieu de leurs travaux, et
même de se perdre.
456 ART. III. - Quoique la
crainte et la répugnance de se voir au-dessus de ses
frères soient des dispositions excellentes qui attirent
les grâces de Dieu sur un Supérieur et le rendent
apte à exercer saintement ses fonctions, elles ne doivent
cependant pas aller jusqu'à la pusillanimité et la
résistance. Aussitôt que la lettre
d'obédience leur arrive, ils doivent accepter et entrer
en charge. Ils peuvent ensuite faire leurs observations au
Supérieur général ou au Provincial; mais
ils se soumettront, si le Supérieur insiste malgré
leurs observations.
457 ART. IV. - Les
Supérieurs ne chercheront jamais leurs
intérêts, leur honneur ou leur propre
bien-être, ni dans l'intérieur de la
Communauté, ni au dehors; mais en tout et partout ils ne
seront occupés que de la gloire de Dieu, du bien de leurs
communautés et des membres qu'ils ont à
gouverner.
458 ART. V. - Ils n'auront ni frère,
ni domestique attachés à leur personne; mais ils
se contenteront d'être servis comme leurs
confrères. Ils doivent encore moins se faire rendre des
services purement personnels par leurs confrères, sans
nécessité; cependant quand les circonstances
l'exigent, ou lorsque, par ce moyen, ils auront plus de
facilité dans l'accomplissement de leurs devoirs et
l'exercice de leurs fonctions, ils peuvent se faire rendre des
services, même personnels, par un frère ou un
domestique, pour les services ordinaires, et par un
confrère, pour ceux qu'il convient de demander à
un ecclésiastique. Cette règle doit être
observée par le Supérieur général
aussi bien que par les autres Supérieurs.
459
ART. VI. - Ils ne doivent pas s'épargner, dans les
travaux du saint ministère, aux dépens de leurs
confrères, en choisissant ce qu'il y a de plus facile et
de plus agréable; mais, au contraire, ils prendront
plutôt pour eux ce qui sera plus difficile et plus
pénible, et soulageront leurs frères à leur
dépens.
460 ART. VII. - Ils prendront garde de
faire souffrir leus confrères, par une certaine
austérité de vie; ils ne doivent pas les charger
au delà de ce que la règle demande, sous
prétexte de procurer leur sanctification. S'ils
éprouveraient de l'attrait pour les mortifications, leurs
propres goûts ne devraient pas influer sur leur conduite
dans la direction de leurs communautés; loin de charger
leurs confrères de pratiques pénibles et de les
conduire par une voie de mortification, ils seront au contraire
généralement portés à adoucir le
joug du divin Maître, pourvu cependant que ces
adoucissements ne soient pas opposés à l'esprit de
la règle et ne mettent pas en danger de produire le
relâchement.
461 ART. VIII. - Ils se conduiront
comme des serviteurs que le divin Maître a placés
auprès de leurs frères pour s'occuper d'eux sans
cesse; ils en prendront un soin continuel, tant au corporel
qu'au spirituel, et feront en sorte qu'il ne leur manque rien de
ce dont ils auront besoin sous ces deux rapports.
462
ART. IX. - En qualité de serviteurs, ils doivent
sacrifier sans cesse, pour leurs frères, leur
bien-être, leur satisfaction, leur santé et leur
vie même, s'il en est besoin, pour leur bien
spirituel.
463 ART. X. - Ils n'auront aucune
distinction ni à table, ni dans leurs habits, ni dans
tout ce qui est de leur usage; mais, au contraire, s'ils veulent
vivre selon la perfection de l'humilité de notre Seigneur
Jésus-Christ, ils prendront toujours ce qu'il y a de plus
vil.
464 ART. XI. - Ils prendront garde cependant
d'avilir leur dignité et de faire mépriser leur
autorité; ils ne pratiqueront cette conduite humble que
dans l'usage ordinaire de la vie, et dans les choses
étrangères à leurs fonctions; mais, dans
l'exercice de leur charge, ils doivent agir en
supérieurs.
465 ART. XII. - Ils se garderont
bien de se conduire, dans les fonctions de leur
supériorité, avec un esprit de domination et
d'amour-propre; mais, à l'exemple de Jésus-Christ
leur Maître, ils gouverneront leurs frères avec
humilité, douceur, modestie et affection.
466
ART. XIII. - Tout en observant cette conduite douce et modeste,
dans les ordres qu'ils donneront à leurs
confrères, ils doivent parler cependant positivement et
non avec hésitation, déterminer les choses le plus
qu'ils peuvent, et les laisser rarement dans l'incertitude ou
à l'arbitraire, éviter la faiblesse et les
précautions excessives.
ART. XIV. - Dans les
conversations ordinaires et dans tous leurs rapports
indifférents avec leurs confrères, ils doivent
être simples et ouverts. Ils éviteront, dans cette
circonstance, de faire sentir leur supériorité,
dans leurs paroles et dans leurs manières; ils auront
soin aussi d'être graves et modérés; ils
n'adresseront pas à leurs confrères des
plaisanteries auxquelles ils ne pourraient répondre
convenablement, et se garderont plus que tout autre de dire ou
de faire ce qui leur pourrait causer de la peine.
468
ART. XV. - Ils ne parleront pas en termes irritants, caustiques
ou offensants, des confrères absents dont ils auraient
à se plaindre; ils éviteront toute parole de
mépris, et en général tout ce qui est
choquant et qui n'aurait pu être dit en leur
présence.
469 ART. XVI. - Dans toute leur conduite
à l'égard de leurs confrères, ils doivent
manifester la plus grande confiance; ils leur communiqueront,
touchant la Congrégation, ce qu'ils savent devoir les
édifier et consoler. Ils leur parleront surtout du bien
qui s'y fait, de la conduite sainte de leurs confrères
des autres maisons, et de leurs travaux pour la gloire de Dieu,
le tout avec la prudence convenable.
470 ART. XVII. -
Dans tous leurs rapports avec leurs inférieurs, ils
agiront également envers tous avec la même
simplicité, franchise et ouverture de coeur; par ces
moyens ils gagneront leur confiance et leur estime. Ils
éviteront avec soin à leur égard les
soupçons, les détours, les finesses et tous les
autres moyens de gouverner de ce genre qu'emploient les hommes
vides de l'esprit de Jésus-Christ: ces moyens ne
sauraient produire que du mal.
471 ART. XVIII.-
Cependant cette simplicité, cette franchise et cette
confiance, quoique sincères et parfaites, ne doivent pas
nuire à la prudence si nécessaire aux
Supérieurs dans la direction de leurs confrères et
pour le discernement des esprits, ni les empêcher de
traiter chacun selon les besoins.
472 ART. XIX. - Enfin
l'âme, le grand principe de la conduite des
Supérieurs envers leurs confrères, sera une
charité toute sainte; ils doivent être comme leurs
pères spirituels, les traiter avec une tendresse
paternelle, et avoir tous les soins possibles pour procurer le
bien de leurs âmes et de leurs corps, et en même
temps pour les rendre contents et heureux.
473 ART. XX.
- Leur charité doit être universelle et
égele envers tous; ils doivent bien se mettre en garde
contre les prédilections particulières et les
préférences; leur coeur doit être tout
entier à tous ensemble, et tout entier à chacun en
particulier. Les seules préférences qu'ils
peuvent et doivent faire seront pour les âmes faibles et
tentées, pour les affligés et les malades; ils
chercheront à les fortifier et encourager, par tous les
moyens qui seront en leur pouvoir, sans cependant manquer
à nos règles.
474 ART. XXI. - Cette
charité et cette douceur doivent paraître
même dans les répréhensions qu'ils seront
obligés de faire quelquefois; jamais ils ne doivent rien
dire par humeur ou mécontentement, ni d'une
manière piquante ou méprisante; mais lorsqu'ils
seront obligés de reprendre, ils le feront de
manière à procurer le bien des âmes, et par
un mouvement de charité véritable,
tempérant ainsi ce qu'il y a de plus pénible dans
leurs observations, par la douceur et la prévenance dans
les formes.
475 ART. XXII. - Cependant leur
gouvernement doit être plein de vigueur et
d'énergie; ils doivent tenir ferme à l'observation
de la règle et de l'esprit qui y est contenu, y tendre
sans cesse de tout leur pouvoir, avec prudence toutefois, et se
faire obéir exactement.
476 ART. XXIII.- La
règle qui leur tiendra lieu de toutes les autres et qui
les renferme toutes, ce sera de considérer leur divin
Maître au milieu des Apôtres et sa manière
d'agir à leur égard, et ils agiront de même
à l'égard de leurs frères. Ils auront
recours à lui dans les moments critiques, et
tâcheront d'attirer en eux les saintes dispositions avec
lesquelles il aurait agi lui-même dans ces
circonstances.
477 ART. XXIV. - Enfin, une règle
à laquelle les Supérieurs doivent porter une
attention toute spéciale, c'est qu'étant
chargés de faire observer les règles, par les
membres de la Communauté, ils contractent une obligation
plus stricte que les autres d'y être fidèles. En
toutes circonstances, ils doivent montrer un amour
sincère pour ces règles, et agir selon l'esprit de
la Congrégation. Ils ne doivent jamais s'exempter de
l'observation d'un réglement, si ce n'est pour des
raisons qui leur auraient paru suffisantes pour accorder cette
exemption à leurs confrères.
CHAPITRE III.
- Du Supérieur
général.
478 ARTICLE PREMIER. - Le
Supérieur général doit être tout
entier voué et consacré à l'esprit de notre
Seigneur Jésus-Christ, et au très-saint Coeur de
Marie, pour le service de la Congrégation; c'est dans la
vue de cette sainte servitude qu'il doit se sacrifier sans cesse
pour elle.
479 ART. II. - En vertu de cette servitude
qui doit faire l'âme de sa conduite dans la
Congrégation, toutes ses pensées, tous ses
désirs, toute son occupation et toute sa vie doivent
aboutir à rendre cette même Congrégation
digne et capable d'opérer les oeuvres de salut et de
sanctification auxquelles son divin Maître la destine,
pour la gloire de son Père céleste.
480
ART. III. - Pour ne pas laisser éteindre peu à peu
le zèle ardent qui doit l'animer comme Missionnaire, et
pour donner le bon exemple aux novices, il travaillera au salut
des âmes dans le pays où il est, sans jamais
négliger, en quoi que se soit, les affaires de la
Congrégation, qui sont l'objet direct de son devoir.
481 ART. IV. - Son attachement à la
Congrégation, dont il est le chef, ne sera pas un
attachement humain et d'amour-propre; mais il l'aimera du
même amour dont Jésus-Christ aime son Eglise.
482 ART. V. - Dans la direction qu'il donne à la
Congrégation, son but ne doit pas être la
prospérité temporelle; mais l'unique vue qui doit
absorber toute son attention et attirer tous ses désirs
et toute la force de son action sera la plus grande gloire de
son adorable Maître, le salut et la sanctification des
âmes, par les oeuvres que nos règles
déterminent et selon l'esprit dans lequel elles doivent
s'exécuter.
483 ART. VI. - Il veillera sur
lui-même et sur ses confrères, pour qu'on n'attache
pas trop d'importance aux biens de la terre; il évitera
l'empressement pour les augmenter; il se gardera surtout
d'employer pour cela des moyens inconvenants qui pourraient
produire un mauvais effet sur le prochain ou être
indirectement nuisibles à la gloire de Dieu et au bien
des âmes. Il se gardera bien d'absorber son esprit dans
dans l'administration du matériel; sa pensée doit
bien plutôt être occupée du bien spirituel de
la Congrégation, faisant avec simplicité tout ce
qui dépend de lui, pour procurer à la
Société l'aisance dont elle a besoin, et,
évitant toute recherche, il mettra sa confiance dans la
divine Providence plutôt que dans les industries des
combinaisons humaines, indignes des Apôtres de
Jésus-Christ.
484 ART. VII. - Il ne cherchera
pas non plus avec trop d'empressement à augmenter le
nombre des sujets de la Congrégation; il évitera
avec soin de recevoir trop facilement les postulants, au
détriment de la ferveur et de l'esprit de nos
règles. Il les examinera ou les fera examiner avec soin,
sur les règles déterminées dans ce
Règlement.
485 ART. VIII. - Il doit mener la vie
que les règles prescrivent aux autres membres de la
Communauté, autant que lui permettront ses occupations
qui, parfois, peuvent être une raison suffisante
d'exemption.
486 ART. IX. - Pour que le Supérieur
général soit plus capable de choisir les
Supérieurs particuliers, il consultera les notes qu'il
aura reçues sur les principaux membres des
Communautés; il écoutera les avis du
Supérieur provincial, et pèsera bien tous ces
renseignements, en la présence de Dieu. Il prendra garde
de laisser influencer son choix par ses affections
particulières et personnelles: les qualités du
sujet doivent seules en être les motifs
déterminants. Il serait bon aussi qu'il fît
attention, dans son choix, aux sentiments des confrères
auxquels le sujet doit être préposé, afin de
choisir celui qui pourrait acquérir leur estime et leur
affection.
487 ART. XI. - Il doit veiller
particulièrement sur lui-même, pour ne pas
céder, sans motif suffisant, aux instances que pourraient
lui faire ses confrères, pour lui faire accepter des
distinctions, dans les habits, la nourriture et autres objets
à son service. C'est pour lui un devoir spécial
de de montrer en toutes choses plus fidèle observateur
des règles que tout autre, et principalement de celles
qui lui sont propres à lui-même. Il se fera aussi
spécialement remarquer par son humilité, sa
simplicité, sa modestie, sa pauvreté; par la
ferveur et le zèle pour la gloire de Dieu et le salut des
âmes et surtout pour l'avancement spirituel de la
Congrégation dont il est le chef.
488 ART. XI. -
Le Supérieur général doit surveiller
spécialement et avec le plus grand soin
l'éducation des postulants, et, ne pouvant par
lui-même leur donner l'instruction et la direction dont
ils ont besoin, il apportera la plus grande attention aux choix
du Maître des novices. Il les interrogera en particulier,
le plus souvent qu'il pourra, sur leur intérieur, et leur
donnera, lorsque ses occupations le lui permettront, des
instructions sur l'esprit de la Congrégation.
489 ART. XII. - Il doit rarement demander conseil sur les
affaires de la Congrégation aux personnes
étrangères. Cette recommandation est faite encore
plus instamment aux autres Supérieurs.
TROISIEME SECTION : VIE RELIGIEUSE.
CHAPITRE Ier.
- De la
Consécration à Dieu de tous les Membres de la
Congrégation.
490 ARTICLE PREMIER. - Le novice entrant dans la
Congrégation contracte avec elle; des deux
côtés on prend des engagements à
l'observation desquels on s'oblige, tout le temps de leur
durée.
491 ART. II. - L'acte de
consécration doit se faire avec une solennité
religieuse convenable, et en présence de la
Communauté, autant que possible. On suivra un
cérémonial régulier à toutes les
consécrations.
492 ART. III. - Quoique cette
consécration ne renferme pas les obligations d'une
promesse positive faite à Dieu, cependant tous les
membres de la Congrégation considèreront comme un
devoir d'y rester fidèles, comme à une
résolution sainte et solennelle à laquelle il ne
leur est jamais permis de manquer, sans un motif
très-grave, et ils s'estimeront heureux, toute leur vie,
d'avoir contracté une obligation qui communique à
toutes leurs oeuvres le mérite du sentiment religieux qui
la leur a fait contracter. Par cette même
consécration, les Membres contractent envers la
Société un engagement positif qui les oblige
à l'observation de ce qu'ils promettent.
493
ART. IV. - Autant que faire se pourra, on se préparera
à cet acte par une retraite spirituelle, pour attirer sur
soi les grâces de l'Esprit-Saint et les
bénédictions de l'Immaculé Coeur de Marie,
et pour entrer dans les dispositions saintes qu'exige un tel
acte.
494 ART. V. - Tous les ans, le jour de la
fête de l'Immaculé Coeur de Marie, chaque
Missionnaire renouvellera sa consécration, afin de se
renouveler dans les saintes dispositions dont il était
animé lorsqu'il la prononça pour la
première fois, et de prendre les résolutions dont
il aura besoin, pour l'accomplissement des devoirs qu'elle lui
impose.
CHAPITRE II.
- Des Voeux.
495 ARTICLE PREMIER. - Celui qui a le
bonheur de se donner à Dieu, par les voeux, lui consacre
tout son être sans réserve et sans retour, en lui
immolant toute satisfaction: dans les biens extérieurs,
par le voeu de pauvreté; dans la jouissance des sens, par
le voeu de chasteté, et dans le libre exercice de sa
volonté, par l'obéissance. Ils se
pénètreront de cette pensée que, par cet
acte religieux, dont l'effet sera en eux permanent pour la vie,
ils seront désormais et pour toujours tout à Dieu;
dans leurs âmes avec leurs facultés, dans leurs
corps avec leurs jouissances et dans l'usage de tout objet
extérieur; et que, par conséquent, ils ne doivent
plus en disposer que pour sa gloire et selon son bon plaisir.
Remplis de cette pensée, ils y conformeront leur vie, qui
sera alors une vie toute de sainteté et de religion,
pleine des grâces et des bénédictions de
celui à qui ils appartiennent.
496 ART. II. Si,
par ces voeux, ils ont le bonheur de sanctifier toute leur vie,
par la vertu de religion, ils doivent songer aussi que, par
là, ils s'imposent des obligations envers Dieu: de
pratiquer la pauvreté telle quelle est
spécifiée dans les Règlements constitutifs
(sect.3, chap.II, art.4); d'observer la chasteté telle
que l'Eglise la demande de ses Prêtres, et d'obéir
à tous les ordres positivement et clairement
exprimés par leurs supérieurs.
497 ART.
III. - Quoiqu'ils ne soient strictement obligés
d'observer les promesses faites à Dieu que dans le sens
exprimé dans l'article précédent, c'est
cependant un devoir pour eux de tendre à la perfection
dans la pratique des trois vertus qu'ils promettent,
conformément aux explications qu'en donnent ces
Règlements.
498 ART. IV. - Comme la
Congrégation est plus essentiellement apostolique que
religieuse, son esprit et ses tendances générales
ne la portent pas à vouer un culte spécial et
extérieur aux troix vertus exprimées dans les
voeux. Elle désire une perfection entière dans
leur pratique intérieure, selon qu'il est marqué
dans les chapitres suivants.
499 ART. V. - Ils se
disposeront aux voeux, par une retraite. Tous les ans, ils les
renouvelleront, en leur particulier, au saint jour de la
Pentecôte.
CHAPITRE III.
- De la
Pauvreté
500 ARTICLE PREMIER. - La pauvreté
évangélique sera considéré, par les
membres de la Congrégation, comme une des vertus les plus
importantes et les plus fondamentales de la vie apostolique et
religieuse. Ils s'y attacheront de toute la
sincérité de leur coeur, prenant garde que le
relâchement ne s'introduise pas dans la
Congrégation sur cet article qui produit la
sanctification de ses Membres et les rend aptes au service des
âmes que la divine Providence leur a confiées.
501 ART. II. - Ils s'appliqueront spécialement, dans
la pratique de la sainte pauvreté, au détachement
parfait des biens de la terre et à une entière
indifférence pour l'honneur, l'élévation et
le bien-être attachés aux richesses.
S'étant donnés à Jesus-Christ, pour
continuer, sous ses ordres, son divin apostolat, et cela
auprès des âmes les plus pauvres et les plus
abandonnées, ils manqueraient essentiellement à
l'esprit de leur vocation, en conservant de l'estime ou de
l'affection pour les grandeurs et les richesses de la terre et
le désir d'en porter les marques.
502 ART. III.
- Etant sincèrement détachés de l'estime et
de l'affection des richesses et de leur faux brillant, ils ne se
laisseront influencer en rien par les riches et les grands du
monde. Ils n'auront pas pour eux ces complaisances, ces
assiduités et ces flatteries indignes de leur
état; ils se conduiront cependant avec prudence, et
rendront à chacun les honneurs qui sont dus à son
rang et à sa position dans le monde.
503 ART.
IV. - Ils ne rougiront pas de leur pauvreté devant les
hommes; ils n'auront pas la faiblesse, indigne d'un homme
apostolique, de se regarder comme abaissés, par leur
pauvreté, au-dessous des riches et des grands; mais en
traitant tout le monde avec la modestie, la réserve et la
civilité dues à chacun, ils se conduiront avec la
liberté, la dignité et les convenances qui
caractérisent l'homme apostolique, représentant
Jésus-Christ sur la terre.
504 ART. V. - En
hommes dévoués à l'apostolat de
Jésus-Christ, ils travailleront à sa gloire,
l'esprit libre de tout souci pour leur subsistance et le coeur
dégagé de toutes les choses humaines. Ils
mettront toute leur espérance dans le Maître qu'ils
servent, et le Père céleste, qui nourrit les
oiseaux du ciel, récompensera leur confiance et leur
amour. Cependant les Supérieurs chercheront avec
prudence et sollicitude à procurer aux Missionnaires tout
ce qui leur est nécessaire ou utile.
505 ART.
VI. - Ils souffriront avec amour les privations qui
proviendraient de la pauvreté, même celles qui
seraient l'effet d'un oubli de la part des Supérieurs;
cependant, dans ce dernier cas, s'il en pouvait résulter
du mal pour la santé ou quelqu'autre grave
inconvénient, ils devraient en prévenir qui de
droit.
506 ART. VII. - Tout ce qui est à l'usage
des Missionnaires leur sera fourni par la Communauté dont
ils font partie; ils éviteront de s'attacher à ces
objets, et seront toujours disposés à les rendre,
s'il en était besoin.
507 ART. VIII. - On
retranchera les superfluités dans la nourriture, le
logement, l'ameublement et les habits; on se contentera du
modeste nécessaire. Dans la qualité de tout ce
qui est à l'usage des Communautés, on
évitera tout ce qui approche du luxe et l'on observera
les règles de la sainte pauvreté, se contentant
d'un honnête médiocrité.
508 ART.
IX. - Cependant, comme la pratique des vertus religieuses doit
avoir pour eux un but et une direction spécialement
apostolique, ils éviteront, dans leur pauvreté
extérieure, tout ce qui paraîtrait excessif aux
personnes du dehors; ils proportionneront cette
médiocrité, dans les objets qui sont à leur
usage, aux habitudes des pays où ils se trouveront et des
personnes qui les environneront, y conservant toujours une
grande propreté.
509 ART. X. - La nourriture,
quoique réglée par l'esprit et la vertu de
pauvreté, doit cependant être saine, substantielle
et capable de conserver la santé des Missionnaires.
510 ART. XI. - On n'aura pas de jardins d'agrément;
mais tout y doit être utilisé pour le bien de la
Communauté. Dans les plantations qu'on y fera, pour la
commodité des Missionnaires, on évitera la
recherche, et en cela, comme en tout le reste, on ne doit pas se
laisser aller à l'amour des objets de rareté ou de
curiosité, afin qu'en tout se fasse sentir
l'éloignement du luxe et du brillant de la richesse. On
évitera aussi ce luxe et cette recherche, dans
l'acquisition des livres; il y aura cependant dans chaque Maison
une bibliothèque en rapport avec ses besoins.
511 ART. XII. - Les Missionnaires prendront dans cette
bibliothèque les livres qui leur seront
nécessaires; mais ils ne doivent pas les conserver
constamment dans leurs chambres, sinon pour le temps qu'ils s'en
servent.
CHAPITRE IV.
- De la
Chasteté
512 ARTICLE PREMIER. - Quoique par l'engagement religieux que
les membres de la Congrégation ont pris envers Dieu, pour
la pratique de la chasteté, ils ne soient strictement
obligés à renoncer, toute leur vie, qu'à la
satisfaction des sens, dans les impressions directes de la
concupiscence de la chair, ils doivent cependant veiller et
résister avec ferveur à tous les penchants et les
inclinations qui se lient à cette mauvaise concupiscence.
Ils prendront toutes leurs mesures, pour conserver à Dieu
purs et saints leurs corps qu'ils lui ont consacrés, par
la promesse d'observer cette vertu.
513 ART. II. - Pour
conserver ce précieux trésor, ils doivent
tâcher de se convaincre de leur extrême
fragilité et de la multitude des dangers qui les
environnent. Ils se défieront sans cesse
d'eux-mêmes et seront en garde contre leur propre
faiblesse, ne se croyant jamais en sûreté,
même lorsque ces dangers sont éloignés. Ils
songeront que le feu de la concupiscence une fois allumé
s'éteint difficilement; ils auront donc soin d'en
éloigner tout danger et d'en éteindre la moindre
étincelle, dès qu'ils en ressentiront les
premières atteintes.
514 ART. III. - Ils se
rendront attentifs à toutes les impressions et sensations
intérieures qui flattent les sens; ils se refuseront les
satisfactions qui peuvent amollir l'âme; ils
éloigneront de leur esprit toute curiosité qui
peut directement ou indirectement exposer la sainte vertu de
pureté, particulièrement dans le saint tribunal et
dans leurs rapports avec les personnes du sexe. Ils banniront
de leur esprit, de leur coeur et de toutes leurs habitudes ce
qui pourrait les rendre mous et faibles; ils s'établiront
surtout saintement et solidement dans la sobriété
du coeur qui ne leur permet pas de se laisser jamais aller
à ces tendresses, à ces affections, goûts et
satisfactions incompatibles avec la pureté parfaite,
même lorsque ces mouvements et impressions de l'âme
ne leur paraissent pas directement envenimés par la
mauvaise concupiscence.
515 ART. IV. - Ils doivent
surtout resoubler de vigilance sur leur coeur et sur ses
affections, dans leurs rapports ordinaires et habituels avec les
personnes du sexe, particulièrement avec celles qui
professent une haute piété. Lorsqu'on sentira une
pieuse affection pour ces personnes, à cause de leurs
vertus et de leurs bonnes qualités, on regardera
généralement cette pente comme une subtile
tentation, et quelque pieux et pur que paraisse être ce
sentiment, on ne s'y livrera pas, se défiant toujours de
la faiblesse de son coeur, et étant persuadé que
ce sentiment cache une ruse de l'ennemi, et qu'il finira mal,
quoiqu'il ait innocemment commencé. Ils ont besoin, dans
ces circonstances, d'une vigilance particulière sur leur
esprit qui ne doit jamais se préoccuper de ces personnes.
On doit éviter de leur manifester le sentiment qu'on
ressent en quelque manière que ce soit; on observera les
règles de de la mortification des sens et on sera
réservé dans ses paroles et dans tout son
maintien.
516 ART. V. - On évitera aussi de
s'attacher ses pénitents, surtout les personnes du sexe;
on tâchera de se tenir toujours libre et
dégagé de tout lien, s'efforçant de n'aimer
et de ne faire aimer que Jésus et Marie.
517 ART. VI.
- Ils veilleront avec le plus grand soin sur leurs sens, afin de
ne pas laisser blesser leurs coeurs par les traits impurs de la
concupiscence, et leur imagination se salir par ses
fantômes.
518 ART. VII. - Ils auront à
exercer spécialement cette vigilance, dans leurs rapports
avec les personnes du sexe; ils auront une tenue modeste, des
manières graves, un ton de conversation
modéré, l'action et les paroles paisibles et
réservées. Ils auront avec elles le moins de
conversations inutiles qu'ils pourront, et ne les feront durer
que le temps qu'exigent leur bien spirituel ou la
bienséance. Jamais ils ne doivent se permettre avec
elles les plaisanteries, les éclats de rire et toute
manière d'agir qui se ressent tant soit peu de la
familiarité; mais tout en eux sera grave, sage et
paisible. Il ne faut pas cependant prendre un air
austère, des manières dures ou brusques, un ton
sec ou indifférent; il faut qu'une douce charité
soit l'âme de cette sainte gravité.
519
ART. VIII. - Ils priveront leurs corps de toutes les
délicatesses dont usent les hommes du monde pour la
satisfaction de leurs sens; ils seront sobres dans l'usage
permis et nécessaire des créatures, et se
conserveront toujours maîtres de leurs sens, non-seulement
quand ils seront en Communauté où ils ne peuvent
se procurer les vaines satisfactions des hommes sensuels, mais
surtout quand ils seront hors de la communauté et que les
commodités et les douceurs que recherche la nature leur
seront offertes.
520 ART. IX. - Ils éviteront
les manières lâches et molles, ils auront au
contraire de l'énergie, et observeront les règles
de la modestie dans leur tenue, dans leur démarche, dans
leurs gestes et dans toute leur manière d'être,
même quand ils sont seuls. Ils fuiront la paresse et
l'oisiveté, de peur que l'ennemi ne les attaque, en les
trouvant désoeuvrés.
521 ART. X. - Les
personnes du sexe ne doivent jamais entrer dans
l'intérieur de la Maison; lorsqu'elles ont besoin de
parler à un Missionnaire, elles doivent être
reçues au parloir. Autant que possible, les conseils de
direction doivent se donner au confessional; si cependant il
arrivait que la nécessité ou les convenances
exigeassent de les recevoir hors du confessional, on devrait les
acceuillir avec bonté et charité.
522
ART. XI. - On ne confessera les personnes du sexe que dans
l'église ou dans un endroit public destiné
à cela, et, autant que possible, dans un moment où
cet endroit est féquenté et de manière
à pouvoir être vu de tout le monde.
523
ART. XII. - Ceux qui confessent dans les couvents et ceux qui y
exercent d'autres fonctions, ne doivent fréquenter le
parloir que le moins qu'il se pourra. Les conversations de
longue durée, les entretiens inutiles et en
général toutes les paroles qui ne sont pas pour le
bien des âmes, ne peuvent que nuire à
eux-mêmes et aux religieuses avec lesquelles ils
conversent. Pour celles-ci, aussi bien que pour les personnes
du monde, les directions se feront dans le confessional.
524 ART. XII. - Dans leur rapports avec les enfants, les
Missionnaires éviteront ces complaisances et ces
affections trop naturelles qu'on se permet à leur
égard, à cause de leur innocence et des autres
qualités de l'enfance, ainsi que les caresses trop
affectueuses, comme de les baiser, les embrasser, etc. Nous ne
devons pas plus chercher notre satisfaction dans l'amitié
que nous inspirent les enfants que dans toute autre affection,
quoique cette satisfaction soit de sa nature plus pure que les
autres. Il faut cependant leur témoigner beaucoup de
douceur et de bonté, à l'exemple et dans les
sentiments de notre Seigneur Jésus-Christ.
525
ART. XIV. - Non seulement ils prendront toutes les
précautions possibles pour conserver intacte et sans
tâche dans leur âme, la sainte vertu de
pureté, mais encore ils éviteront avec le
même soin tout ce qui pourrait donner aux hommes le
moindre soupçon sur ce point délicat.
CHAPITRE V. - De l'Obéissance.
526 ARTICLE PREMIER. - La
parfaite obéissance consiste dans le renoncement à
son propre jugement et à sa propre volonté, pour
se soumettre avec amour à la sainte volonté de
Dieu, manifestée par les règles de la
Congrégation et par les Supérieurs.
527
ART. II. - Ils doivent obéir non-seulement aux principaux
Supérieurs, mais encore à tous ceux qui leur sont
préposés, dans les charges et les fonctions de la
Communauté, ainsi qu'à tous ceux qui ont quelque
emploi dans la maison, en ce qui concerne cet emploi, même
lorsque le fonctionnaire leur est inférieur dans tout ce
qui est en dehors de sa charge.
528 ART. III. - On
obéira au Supérieur, dès la première
manifestation de sa volonté, de quelque manière
qu'elle soit manifestée, et cela, sans réplique,
ni réflexion.
529 ART. IV. - On obéira,
lors même qu'on prévoirait que de cette
obéissance il résultera des inconvénients
et des difficultés graves. Dans ce cas, on doit proposer
ces difficultés avec humilité et modestie, et en
même temps avec simplicité et franchise, sans
chercher à faire prévaloir son sentiment, et on
sera disposé à se soumettre parfaitement à
ce qui sera décidé.
530 ART. V. - On
obéira aux principaux Supérieurs, lors même
qu'ils ordonneraient des choses qui seraient contre la
règle ou contre son esprit; seulement, toutes les fois
que cela arrivera, on devra leur faire des
représentations, et s'ils persévèrent, on
agira selon leurs ordres. Mais, si la contravention à la
règle avait quelque gravité, on devrait instruire
le Supérieur général de la
Congrégation de l'ordre donné, des
représentations faites et de la réponse à
ces représentations.
531 ART. VI. - On
obéira selon l'esprit et les intentions bien connues dans
lesquelles le Supérieur aura prescrit la chose
commandée, et l'on exécutera ses volontés
dans toute leur étendue, même lorsqu'il n'aurait
pas dit expressément toutes ses intentions, pourvu que
ces intentions non exprimées n'offrent pas
d'inconvénients graves.
532 ART. VII. - La vraie
obéissance est non-seulement une obéissance de
volonté et d'action, mais encore une docilité et
une soumission parfaites de l'esprit au jugement porté,
évitant avec soin non-seulement l'opposition et la
dispute, mais encore tout esprit de critique, ainsi que les
murmures et les mécontentements. On regardera surtout
comme une tentation diabolique l'opposition systématique
au Supérieur, quel que soit le motif qui l'inspire.
533 ART. VIII. - On se gardera bien aussi de juger son
supérieur dans sa conduite, soit dans les choses qui
concernent sa charge, soit dans celles qui regardent sa vie
privée. On se gardera encore davantage de communiquer
aux autres les jugements et les murmures que le démon
aura suggérés; jamais on ne doit parler de ses
supérieurs qu'en bien et de façon à porter
les autres au respect et à l'obéissance à
leur égard.
534 ART. IX. - Tous doivent
être disposés à se rendre là
où leur Supérieur voudre les envoyer et à
accepter les charges qui leur seront données. Cependant
on peut représenter au Supérieur les raisons qu'on
aurait de ne pas se voir chargé d'une fonction, ses
craintes, ses goûts et dégoûts; mais ces
observations doivent être faites avec docilité et
de manière à ne causer aucun embarras au
Supérieur, pour sa décision, ni à mettre le
moindre retard à l'exécution de l'ordre
donné.
535 ART. X. - Personne ne doit jamais, en
dehors de son obédience, entreprendre aucun
ministère, sans un ordre de son Supérieur; toutes
les demandes qui seront faites doivent lui être
adressées.
536 ART. XI. - Personne ne fera
jamais aucune démarche, ni ne prendra aucun moyen
indirect, pour être employé à un
ministère ou à une mission quelconque, ni pour
rester dans une position, dans l'exercice d'une fonction, ou
pour en être rappelé. On se défiera surtout
de toute pensée de quitter un emploi, pour en avoir un
plus relevé, sous le prétexte de faire un plus
grand bien. On se contentera en général de faire
connaître au Supérieur ses goûts,
dégoûts et aptitudes, évitant de gêner
sa conduite et s'abandonnant avec simplicité à la
divine volonté.
537 ART. XII. - Ils
obéiront à leurs supérieurs, non comme
à des hommes, mais comme à Jésus-Christ
qu'ils leur représentent; aussi leur obéissance
sera sainte, prompte, humble, douce, simple, pleine d'amour et
de contentement.
538 ART. XIII. - La pratique de la
parfaite obéissance à leurs supérieurs se
manifestera non-seulement dans l'exécution des ordres
qu'ils en recevront, mais encore dans toute leur conduite
à leur égard.
539 ART. XIV. - Dans leurs
paroles, leurs actions et dans toute leur conduite, ils doivent
montrer du respect à leurs supérieurs; cependant
ce respect ne doit pas empêcher qu'ils agissent à
leur égard avec simplicité, franchise et ouverture
de coeur; ce qui doit être l'effet d'une affection sainte
et cordiale qu'ils auront pour eux, comme pour la personne
même de Jésus-Christ, leur divin Maître.
540 ART. XV. - On recevra avec un esprit de foi, avec
douceur et humilité, les observations et les corrections
qui seront faites par les supérieurs, comme on les
recevrait de Jésus-Christ lui-même, et au lieu de
sa laisser aller au chagrin et au mécontentement contre
celui qui les a faites, on aura toujours pour lui la même
affection et la même ouverture de coeur.
541 ART.
XVI. - On n'écoutera pas les inspirations de
l'amour-propre, qui cherche toujours à s'excuser et
à se justifier, même quand on est
répréhensible. Si on ne l'est pas, on doit, sans
scrupule, le dire avec simplicité et modestie, lorsque
cela paraît utile à la gloire de Dieu; mais s'il
n'y avait aucune raison de se disculper, on ferait une chose
agréable à Dieu, en gardant le silence. Dans
touts les cas, on évitera les instances, lorsque l'excuse
ne convainc pas en notre faveur.
542 ART. XVII. - On
résistera aux impressions de l'orgueil, lorsqu'à
cause de la présence des personnes du dehors, il
cherchera à inspirer une certaine honte de la pratique de
la parfaite obéissance. On tâchera d'obéir
avec autant de fidélité et de perfection au
dehors, qu'on le doit faire dans l'intérieur de la
Communauté.
543 ART. XVIII.- Les anciens, ceux
qui ont passé par les principales charges, ceux qui ont
exécuté de grands travaux pour la gloire de Dieu
et le salut des âmes, et en général tous
ceux qui ont acquis le plus d'autorité dans la
Congrégation, loin d'être exempts de
l'obéissance, doivent la pratiquer au degré le
plus parfait, pour en donner l'exemple aux autres.
CHAPITRE VI.
- Des dévotions de la
Congrégation.
544 ARTICLE PREMIER. - Les membres
de la Congrégation seront animés, soit dans leur
vie privée, soit dans leur vie commune, soit dans leur
vie apostolique, par un esprit profondément religieux
dont l'âme doit être une dévotion solide et
fondamentale.
545 ART. II. - Pour que les
dévotions des membres de la Congrégation soient
solides et fondamentales, elles ne doivent pas être
seulement un pur effet de l'imagination et du sentiment, mais
étant en harmonie avec leurs devoirs et leur vocation,
elles consisteront dans un dévouement pratique, un
recours à Dieu plein d'amour et de confiance et un
désir d'imitation sincère et parfait.
546
ART. III. - Pour faire entrer ses membres dans cette
dévotion fondamentale et pleine de sainteté, et
pour leur procurer une source et un moyen puissant de
sanctification dans l'accomplissement des devoirs de la vie
privée, commune et apostolique, la Congrégation
les consacre spécialement à l'Esprit-Saint, auteur
et consommateur de de toute sainteté et inspirateur de
l'esprit apostolique, et à l'Immaculé Coeur de
Marie, rempli surabondamment, par le divin Esprit, de la
plénitude de la sainteté et de l'apostolat et
participant le plus parfaitement à la vie et au sacrifice
de Jésus-Christ, son Fils, pour la rédemption du
monde. Cette double dévotion est la dévotion
spéciale et distinctive de la Congrégation.
547 ART. IV. - Ils trouveront dans l'Esprit-Saint, qui vit
dans leurs âmes, une source de la vie intérieure et
religieuse et un principe tout-puissant de cette charité
parfaite qui est l'âme du zèle et de toutes les
autres vertus apostoliques. Ils considèreront
l'Immaculé Coeur de Marie comme un modèle parfait
de fidélité à toutes ces saintes
inspirations du divin Esprit et de la pratique intérieure
des vertus de la vie religieuse et apostolique. Ils y
trouveront un refuge auquel ils auront recours dans leurs
travaux et leurs peines, et y épancheront leur coeur avec
une confiance d'enfant, dans leurs faiblesses et leurs
tentations.
548 ART. V. Nous honorerons, comme nos
protecteurs et nos patrons, saint Pierre, saint Paul et saint
Jean. Les deux premiers sont nos modèles dans nos
travaux de l'apostolat; nous honorons d'une manière
spéciale le dernier, qui a puisé une si grande
abondance des grâces de l'Esprit-Saint dans le coeur de
Jésus et qui a été donné comme un
enfant privilégié au Saint et Immaculé
Coeur de Marie. Il nous apprendra à y puiser, nous
aussi, cette abondance d'amour et d'esprit apostolique, et
à être des enfants tendres et découés
du Saint et Immaculé Coeur de Marie.
549 ART.
VI. - Le saint jour de la Pentecôte et celui du Saint et
Immaculé Coeur de Marie seront les Fêtes
principales de la Congrégation. Les fêtes de saint
Pierre, de saint Paul et de saint Jean seront solennelles, sans
être cependant célébrées comme
fêtes patronales du premier ordre.
550 ART. VII.
- Nous honorerons d'un culte spécial, mais secondaire,
les autre Apôtres, et nous aurons une dévotion
particulière pour les saints qui se sont rendus
remarquables dans la vie apostolique par leur zèle et
leurs travaux, pour la gloire de Dieu et le salut des
âmes.
551 ART. VIII. - Enfin nous vouerons une
dévotion particulière à saint Joseph,
à cause de ses rapports intimes avec Jésus et
Marie et des faveurs qu'il en a reçues. Nous puiserons,
dans cette dévotion, la vie intérieure, les vertus
et l'esprit de communauté.
RÉGLEMENTS DE LA CONGRÉGATION DU SAINT-ESPRIT SOUS L'INVOCATION DE L'IMMACULÉ COEUR DE MARIE.
PREMIERE PARTIE.
Réglements constitutifs et organiques.
SECTION PREMIERE.
VIE APOSTOLIQUE.
CHAPITRE Ier. - Du but de la Congrégation. 1
CHAPITRE II. - Des moyens à employer pour atteindre le but que se propose la Congrégation. 3
SECTION DEUXIEME
VIE DE COMMUNAUTÉ
PREMIERE DIVISON
Des Communautés, et de ce qui s'y doit observer. 5
CHAPITRE Ier. Idée générale de l'état constitutif de la Congrégation. 5
CHAPITRE II. - De la préparation qui doit précéder l'admission des sujets dans la Congrégation. 7
CHAPITRE III. - Règles à observer dans le Noviciat. 8
1.- Règles pour tous les jours. 8
2.- Règles qui s'observent à certains jours seulement. 9
3.- Quelques règles générales à observer dans le Noviciat. 9
CHAPITRE IV. - De l'admission des Novices dans la Congrégation, et des devoirs auxquels ils s'engagent. 11
CHAPITRE V. - A quoi la Congrégation s'engage envers les Membres qu'elle admet dans son sein. 12
CHAPITRE VI. - Des cas où un Membre peut et doit être renvoyé de la Congrégation. 13
CHAPITRE VII. - Des règles qui doivent s'observer dans les Communautés. 14
CHAPITRE VIII. - Des rapports des Membres de la Congrégation avec le Supérieur général et entre eux. 17
CHAPITRE IX. - Des rapports des Communautés entre elles. 18
CHAITRE X. - Des rapports avec les Supérieurs ecclésiastiques. 19
CHAPITRE XI. - Des Frères coadjuteurs. 21
CHAPITRE XII. - Du Temporel. 22
DEUXIEME DIVISION
Des Fonctionnaires employés dans les Communautés, et de l'Administration qui leur est confiée.
CHAPITRE Ier. - Des Supérieurs. Qualités requises pour la Supériorité. 23
CHAPITRE II. - Du Supérieur général. 24
CHAPITRE III. - Du Supérieur Provincial. 27
CHAPITRE IV. - Des Supérieurs des Communautés. 29
CHAPITRE V. - Des Assistants. 31
CHAPITRE VI. - Des Conseillers et de leurs assemblées. 32
CHAPITRE VII. - Des Procureurs et des Economes. 34
CHAPITRE VIII. - Du Préfet. 36
CHAPITRE IX. - Du Maître des Cérémonies. 37
CHAPITRE X. - Des Professeurs. 38
CHAPITRE XI. - Du Maître des Novices et de son Assistant. 39
SECTION III
VIE RELIGIEUSE
CHAPITRE Ier. - De la Consécration à Dieu par la vie religieuse. 40
A c t e d e C o n s é c r a t i o n. (40)
CHAPITRE II. - Des Voeux. 42
F o r m u l e d e s V o e u x. (42)
CHAPITRE III. - De la Consécration avant le départ. 44
DEUXIEME PARTIE.
Esprit de la Congrégation ou Réglement à observer par ses Membres, pour le parfait accomplissement de leurs devoirs.
SECTION PREMIERE
VIE APOSTOLIQUE.
CHAPITRE Ier. - De la vie apostolique en général et des vertus fondamentales sur lesquelles elle repose. 45
CHAPITRE II. - Du zèle apostolique. 48
CHAPITRE III. - Règles de conduite envers les âmes que nous avons à évangéliser. 52
CHAPITRE IV. - Du zèle des Missionnaire pour la formation du clergé et pour son avancement dans les vertus sacerdotales. 55
CHAPITRE V. - Du ministère de la parole de Dieu. 57
CHAPITRE VI. - De l'administration des sacrements et des autres fonctions saintes. 61
SECTION DEUXIEME
VIE DE COMMUNAUTÉ
PREMIERE DIVISION.
Des Communautés, et de ce qui s'y doit observer
CHAPITRE PREMIER. - Du Noviciat et des dispositions que doivent avoir ceux qui se préparent à entrer dans la Société. 63
CHAPITRE II. - Devoirs généraux des Membres envers la Congrégation. 66
CHAPITRE III. - Devoirs des membres de la Congrégation les uns envers les autres. 67
CHAPITRE IV. - Devoirs particuliers de la Communauté-Mère. 70
DEUXIEME DIVISION.
Des fonctionnaires de la Congrégation, et de leur administration 71
CHAPITRE Ier. - Règles pour l'administration de la Congrégation. 71
CHAPITRE II. - Comment on doit se conduire dans la Supériorité. 74
CHAPITRE III. - Du Supérieur général. 77
SECTION TROISIEME.
VIE RELIGIEUSE.
CHAPITRE Ier. - De la Consécration à Dieu de tous les Membres de la Congrégation. 79
CHAPITRE II. - Des Voeux. 80
CHAPITRE III. - De la Pauvreté. 81
CHAPITRE IV. - De la Chasteté. 83
CHAPITRE V. - De l'Obéissance. 85