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Mgr Oscar Ngoy, évêque de Kongolo "Le diocèse continue à vivre du témoignage de ses martyrs"


Les conditions de vie sont difficiles pour les habitants de la région de Kongolo, mais elles n’entravent pas la vitalité des chrétiens héritée du témoignage des missionnaires. Entretien avec MgrOscar Ngoy, spiritain.


Le nom de Kongolo résonne comme celui d’un haut lieu dans l’histoire de la Congrégation. Comment, en tant qu’évêque de Kongolo, assumez-vous cette histoire tragique ?

Moi-même et tous les chrétiens du diocèse essayons d’être les témoins de cette histoire pour les générations qui viennent. La célébration du centenaire de l’évangélisation du diocèse de Kongolo en 2010 a été marquée par l’évocation du massacre. Avec le cinquantenaire de l’événement tragique nous continuons à nous approprier cette histoire, car elle n’appartient pas seulement à la Congrégation mais aussi à l’histoire du diocèse tout entier. Il nous revient de faire en sorte que le diocèse continue à vivre du témoignage de ses martyrs.


Est-ce que le souvenir des martyrs est très présent dans la population ?

Oui, les gens se remémorent les événements de Kongolo par un chant, composé il y a quelques années, qui permet, même à ceux qui ne sont jamais allés à l’école, de se souvenir et de s’approprier ces événements. Des personnes sont venues en parler avec moi. Le diocèse a organisé un grand pèlerinage le jour anniversaire des 50 ans, sur les différents lieux construits par les missionnaires. L’actuel camp militaire où ils furent tués a ouvert ses portes pour l’occasion. Un des témoins, jeune séminariste au moment des faits, y retournait pour la 1re fois après 50 ans. Il a pris la parole, c’était très émouvant.


La région de Kongolo vit-elle en paix maintenant ?

Oui, la paix s’installe après les conflits qui ont divisé le pays entre 1998 et 2003. Un signe important : les gens reviennent, commencent à reconstruire leur maison en matériaux durables et à travailler aux champs. Ils ont davantage confiance en eux-mêmes.


Nous avons l’impression que Kongolo est très isolé…

Toute la région nord du Katanga est très enclavée. Les routes, insuffisantes, sont mal entretenues. Les avions sont rares. Les trains et le rail ont vieilli, leur entretien, mal assuré par les compagnies pour le transport du minerai, coûte cher.

Les gens rencontrent de grandes difficultés pour se déplacer. Moi-même, lorsque je vais à Lubumbashi, j’y reste plusieurs jours pour éviter des allers-retours fatigants et l’usure du véhicule.

Le tissu économique du pays demeure fragile. Les choses ne peuvent avancer que doucement. Ce qui serait très utile, c’est la réfection des routes afin que les paysans
puissent évacuer les produits agricoles vers les centres de consommation.


Que fait l’Église pour venir en aide aux populations ?

L’hôpital général de Kongolo est aux mains du diocèse ainsi que plusieurs centres de santé. Nous avons créé un bureau de développement pour lancer des microprojets agricoles. C’est ainsi qu’avec l’aide financière de la Conférence épiscopale italienne nous avons relancé la culture du café, dans une région très reculée.

Nous aimerions aussi aider à l’amélioration de l’habitat mais il nous faut rencontrer des partenaires pour financer cette action. Comme il y a carence de personnel médical dans la région, deux prêtres du diocèse sont en formation de médecine à l’Institut catholique de Bukavu et un autre apprend les techniques de construction.


Pour promouvoir la paix et la réconciliation, quelles actions engagez-vous ?

Avec la commission diocésaine Justice et Paix, nous essayons de constituer des équipes au niveau de chaque communauté de base pour que les gens apprennent à résoudre les conflits sans utiliser la violence. Nous les encourageons à entreprendre une vraie démarche de réconciliation. C’est un travail de longue haleine. Mais j’ai bon espoir et les chrétiens sont motivés.

Il existe une volonté sincère de construire la paix. Il y a, bien sûr, les séquelles des deux conflits armés mais il faut aussi aider à résoudre beaucoup de petits conflits, un peu pour tout et pour rien, un palmier ou une parcelle de terre…


Comment les spiritains participent-ils à ces efforts ?

Il n’y a que 4 spiritains dans le diocèse. Ils vivent à Kongolo. Deux spiritains travaillent à la paroisse du Mémorial des martyrs, la plus vivante des trois paroisses que compte la ville. Un autre est chargé de la communauté du postulat spiritain. Un frère est chargé du bureau diocésain des œuvres médicales. Tous s’impliquent et participent à l’effort du diocèse en s’investissant dans les différentes commissions diocésaines.


Quels sont vos souhaits pour les années à venir ?

Après la mort des missionnaires, d’autres spiritains sont arrivés de France, Belgique, Canada, Angleterre, Tanzanie et Cameroun. Des Congolais, dont moi-même, sont entrés dans la Congrégation. Pour les spiritains qui travaillent au Congo, le berceau c’est Kongolo. Nous devons, à nos confrères martyrs, de pouvoir continuer à travailler ici. Ce sont les gardiens de notre église. Pour être davantage présents au Mémorial et assurer le témoignage dont nous parlions au début de l’entretien, il faudrait plus de spiritains à Kongolo.

Propos recueillis par Gilles Pagès


Le diocèse de Kongolo en chiffres

  • 45 000 km2

  • pour 930 000 hab.

  • 17 paroisses

  • 71 prêtres

  • 200 religieuses

  • 54 séminaristes

  • 4 spiritains

  • 631 communautés de base animées par des laïcs

  • 12 mouvements d’apostolat des laïcs de piété, de promotion familiale ou d’entraide et d’éducation de la jeunesse (scouts, groupe Kisito Anuarite, Kiro, Jeunes de lumière, etc.)

  • Des associations de soutien aux microprojets ruraux (maendeleo signifie en kiswahili “développement”).

Ville de Kongolo

  • 3 paroisses pour 150 000 hab.



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