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CENTRAFRIQUE  
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« Que pouvions-nous faire de plus ? »

Une simple présence pour aider à réconcilier

À la paroisse Notre-Dame d’Afrique à Bangui, le P. Gabriel Myotte Duquet nous reçoit en ce mois de mai 2015. Alors qu’il s’apprête à retourner en France, à la demande de ses supérieurs,
pour occuper le poste de supérieur de la communauté de Chevilly, il revient sur le sens de sa démarche auprès des réfugiés de la capitale centrafricaine.
Fin mars 2013, les habitants de Bangui fuient les exactions de la coalition Séléka. Des milliers de réfugiés s’entassent dans des camps de fortune aux abords de l’aéroport sécurisé par l’armée française, dans les paroisses de la ville ou au grand séminaire de Bimbo. Les spiritains présents en Centrafrique lancent alors un appel à toute la congrégation pour obtenir du renfort en personnel afin d’aider les réfugiés. Le P. Gabriel Myotte Duquet, qui a travaillé de nombreuses années au nord de ce pays, répond à cet appel et retourne à Bangui, pour une durée d’un an. Le P. Paul Flamm, un spiritain américain, travaille depuis longtemps dans les camps de réfugiés de Tanzanie. Il accepte également de partager son expérience pour une durée de six mois, mais il s’avère que le programme d’action qu’il a élaboré en Tanzanie est difficilement applicable dans le cas présent. Son programme a été adapté aux réfugiés de Tanzanie installés dans des camps depuis de longues années, mais ici il faut faire face à l’urgence et à l’extrême précarité imposée par les événements. De plus, les camps étant installés sur les terrains des paroisses ou du grand séminaire de Bimbo, les curés de la ville sont présents et veillent à l’accompagnement spirituel des réfugiés ; avec l’aide des chrétiens engagés, ils planifient la distribution des aliments octroyés par le PAM (Programme alimentaire mondial) et aident à l’organisation de la vie quotidienne. « Que pouvions-nous faire de plus ? » se demande le P. Gabriel.
En novembre 2014, l’archevêque de Bangui, Mgr Nzapalainga, et sa délégation rendent visite au camp Béal, proche de la paroisse Notre-Dame d’Afrique où réside le P. Gabriel. Cet ancien camp a servi de base aux forces françaises durant les années quatre-vingt-dix. Il abrite un grand nombre d’anciens combattants de la Séléka et personne ne s’y aventure. Responsables du coup d’État de mars 2013, ces derniers se sont réfugiés dans ce camp lorsque leur chef, Michel Djotodia, a été contraint de quitter le pouvoir en janvier 2014. Le P. Gabriel profite de la visite de l’archevêque pour pénétrer à l’intérieur du camp, établir des contacts avec quelques réfugiés et inviter les autorités du camp à répertorier les enfants non scolarisés. Le projet d’installer une école à l’intérieur du camp s’avérant impossible, le directeur d’une école publique proche, accepte alors d’inscrire les enfants des anciens combattants Sélékas. Les plus grands seront inscrits au lycée Boganda. C’est ainsi que le P. Gabriel a été témoin de gestes de solidarité. Sa présence et sa prédication ont permis que des ennemis d’hier se réconcilient.
L’été dernier, les réfugiés du camp Béal ont fini par accepter de déposer les armes, suite à l’accord du Forum national pour la réconciliation convoqué par le gouvernement de transition. Les forces armées de l’ONU ont pu pénétrer le camp et vider le sous-sol rempli des armes et des munitions, une véritable poudrière qui mettait en danger la sécurité des habitants du camp et des quartiers environnants.
La paix reviendra en RCA. Il faudra beaucoup de temps pour guérir des blessures si profondes. Les ennemis de la paix feront tout pour freiner le processus de réconciliation, mais chaque fois des femmes et des hommes se dresseront pour briser inlassablement le cercle de la violence, au nom même de leur espérance et de leur foi en Celui qui a donné sa vie pour sauver l’humanité.

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