Cahier Afrique (15)



  de Mauritanie (RDC)
Un' was ne'les ?
alors quoi de neuf ? ,( en dialecte francique)
P. Marc Botzung

Le courrier qui s'amasse sur mon bureau et les nombreux mails de fin d'année m'obligent à reprendre le clavier pour vous donner quelques nouvelles. Et simultanément de faire un peu le point.

L'évolution du pays
Comme annoncé l'an dernier, la Mauritanie vit depuis août 2005 une période de transition politique dont le but affiché est de sortir d'une période de gouvernement assuré depuis 29 ans (!) par les militaires (même s'ils sont habillés en cravate et complet veston, vues les modes du politiquement correct actuel) pour remettre les reines du pouvoir entre les mains des civils dans le cadre d'un Etat de droit au fonctionnement démocratique. A l'image de ce que connaissent depuis quelque temps les pays voisins (Mali, Sénégal). Il s'agissait en fait de sortir d'une impasse réelle : pouvoir sans partage, élections truquées, mauvaise gestion des biens de l'Etat, corruption et détournements. Des avancées intéressantes ont été faites en peu de temps. Le budget de l'Etat a été rééquilibré, des concertations ont été organisées sur les grands chantiers à mettre en œuvre pour remettre le pays sur les rails, des élections (municipales, législatives) ont déjà été organisées sur des bases relativement transparentes. Il reste que les attentes du citoyen de base sont restées en grande partie sans réponse : salaires,prix des produits de première nécessité, valeur du système scolaire, chômage. La démocratie est intéressante dans la mesure où elle appelle à la mise en place de systèmes de régulations et de contrôles des personnes en situation de responsabilités,

mais il ne suffit pas d'avoir la liberté de se mobiliser pour un tel candidat ou tel autre pour voir la rudesse du quotidien disparaître au lendemain des élections. Des mauvaises habitudes ont été prises qu'il sera difficile de faire disparaître : corruption, népotisme', perte du sens de la citoyenneté au profit des réflexes ethniques ou tribaux. D'autre part la dernière ligne droite jusqu'aux élections présidentielles de mars 2007 semble parsemée de points d'interrogation.
Les militaires ont promis leur retrait volontaire des affaires politiques et publiques - ce qu'ils ont respecté jusqu'ici et qui fait en grande partie l'intérêt de la période actuelle -, mais à présent ils semblent très intéressés à assurer leurs arrières : soutien d'un candidat quasi officiel de leur ligne politique considérée comme la continuité du régime déchu (ligne qui a donc le soutien de toutes les personnalités d'avant : personnalités politiques, militaires, administratives, patronat, banques et commerçants), enrichissement personnel (probable), il ne restera plus qu'à s'assurer du maintien de leur impunité au sujet du 'passif humanitaire' concernant leurs responsabilités dans la mise à l'écart (morts, tortures, dépossession des biens, perte de travail, exil) d'une partie de la population (surtout haaipularen) s ur des bases ethniques. Cette impunité existe déjà, mais la libération de la parole après le putsch de 2005, ainsi que certaines des revendications rejailhes alors demandaient justice et mise en œuvre d'un retour organisé pour ceux qui sont encore en exil dans les pays voisins. Globalement on peut penser que la transition aura permis une réforme (salutaire) plus qu'une véritable rupture.


Il reste que le climat de paix civile et de solution de sortie (pacifique) de crise nous sont enviés par beaucoup. Et c'est effectivement un bien précieux.

Exemple : je connais plusieurs jeunes au chômage qui se plaignent de n'avoir pas dans leur famille quelqu'un capable de les placer à un poste. Qui est prêt à embaucher quelqu'un aujourd'hui sur la seule base de ses compétences ?
Mon travail
Sur Atar, mon enracinement se poursuit, les relations s'étendent ou s'approfondissent et je commence pour certains à faire partie du paysage. Les activités de la bibliothèque, dont le public s'étoffe peu à peu, y contribuent. Maixent, le stagiaire sénégalais de l'an dernier est maintenant au noviciat en Guinée (Conakry) et il a été remplacé par Raymond, Guinéen. Mes activités de formateur ont enfin trouvé preneur puisqu'on printemps (mars-avril), puis en automne (septembre-décembre), j'ai pu donner des cours d'initiation aux réalités du diocèse a deux religieuses ainsi qu'aux stagiaires spiritains. C'est peu, mais mieux que rien. Deux sœurs s'annoncent pour le mois prochain et on peut raisonnablement espérer un bon crû pour fin 2007. Certes d'autres formations s'y rajoutent de manière plus ponctuelles. L'intérêt de la formation à donner est déjà de devoir approfondir pour moi-même les réalités du pays (coutumes, société, histoire, religion) et à progresser en langue hassaniya. Mais l'enjeu fondamental est tout simplement la manière de vouloir vivre dans ce pays... et d'y vivre la Mission. Comment aimer durablement ce que l'on ne connaît pas ?

Comment aimer ce que l'on ne comprend pas ? Comment vouloir être missionnaire de l'amour de Dieu sans faire le pas vers l'autre qui est l'hôte qui m'accueille dans son pays ? Actuellement je suis de plus en plus convaincu que l'on ne peut "donner" (savoir, expérience, richesse, spiritualité, etc...) avec une certaine efficacité dans l'ordre des relations humaines que dans la mesure où l'on accepte simultanément de " recevoir " de ceux dont on partage la vie... ou au moins de ceux dont on veut être proches. C'est peut-être là tout simplement la réalité de ce que les théoriciens appellent le dialogue !

Demain
Les perspectives actuelles me laissent encore un an et demi à continuer ce travail, puis il est prévu par mes supérieurs un retour en France a priori pour faire... tout autre chose ! D'ici là je ne pense pas repasser par la France. Mais à chaque jour suffit son ouvrage et avec mon temps passé sous le ciel de Mauritanie j'ai aussi appris un peu à me dégager des prévisions bien claires...

Merci encore à vous tous qui pensez à moi et me soutenez d'une manière ou d'une autre (amitié, lettres, dons, etc...), ce qui m'est une aide précieuse.
Bonne année 2007 à tous, santé et bonheur,

Amicalement, Marc Botzung
Atar le 23 janvier 2007

Mes coordonnées n'ont pas changé : BP 45 Atar République Islamique de Mauritanie e-mail : marc.botzung@laposte.net (mais la correspondance par mail est assez inégale en fonction des périodes : qualité des connexions, existence ou non d'un lieu public d'accès à Internet à Atar, parfois cela dépend tout simplement de mes déplacements à Nouakchott...)
 

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