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Des raisons d'espérer  
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Rappelons que le commerce équitable est conçu pour assurer une juste rémunération à des producteurs des pays pauvres afin qu’ils puissent développer leur activité à long terme et améliorer leur niveau de vie. Il contribue au développement durable. Il prend la forme d’un partenariat entre des distributeurs des pays riches et des producteurs des pays pauvres pour garantir à ces derniers un revenu minimum indépendamment des fluctuations du marché. Bien qu’existant depuis plusieurs décennies, le commerce équitable connaît un fort développement depuis le début des années 2000. Il concerne essentiellement les produits alimentaires et artisanaux.

La filière équitable,
espoir pour les producteurs des pays du Sud
 



Une coopérative des producteurs de cacao au Ghana
Le terrain qu’exploite Kawa Konadu est situé à une quinzaine de minutes de marche du centre d’Amankwatia, petit village de la province d’Ashanti, dans le centre du Ghana. C’est une parcelle d’environ un hectare, sur laquelle poussent des cacaoyers, entourés de plusieurs autres essences.
Ă€ l’évidence, on est ici bien loin du concept d’exploitation agricole tel qu’on l’entend sous nos latitudes : Â«â€‰J’utilise très peu de fertilisants et de pesticides ; aucune machine hormis la machette, et je n’ai pas de quoi renouveler mes plants », dit Kawa Konadu, 68 ans et mère de 5 enfants, qui exploite ce lopin de terre depuis une trentaine d’annĂ©es.
 
Dures conditions de vie
Côté habitation, la situation n’est guère plus brillante ; sa maison en torchis n’est composée que d’une seule pièce. « Pendant la saison, le travail est assez lourd. Il faut aller ramasser les cabosses et les ramener ici, puis les ouvrir une à une pour en extraire les fèves que j’empaquette ensuite dans des feuilles de bananiers pour qu’elles fermentent », explique-t-elle en désignant, posées à même le sol, un amas de feuilles méticuleusement pliées. Elle ira peser sa production et la faire sécher sur l’une des tables construites dans le centre du village.
Les revenus tirés de cette activité sont difficiles à cerner, sans doute de l’ordre de 600 à 1 000 € par an. En tout cas, ces petits paysans, qui produisent une matière première agricole consommée dans le monde entier, vivent dans des conditions plus que sommaires. Amankwatia, isolé à une heure de piste d’Offinso, la ville la plus proche reliée au réseau routier, ne dispose ni d’eau courante ni d’électricité. Le paradoxe est tel que le chef du village s’étonne qu’on puisse lui demander s’il aime le chocolat. « Bien sûr que oui, répond-il, mais je n’en achète jamais, c’est bien trop cher ! »
 
Une coopérative de 65 000 producteurs
Kawa estime toutefois que sa situation s’est un peu amĂ©liorĂ©e depuis qu’elle a quittĂ© PBC, la sociĂ©tĂ© d’État qui collecte la majeure partie des fèves au Ghana. Elle explique : Â«â€‰Dès que j’en ai eu l’occasion, j’ai rejoint Kuapa Kokoo, la coopĂ©rative du commerce Ă©quitable. Avec elle, les relations sont plus transparentes ; il n’y a plus de triche au moment de la pesĂ©e des fèves. »
Créée en novembre 1993, juste après la libéralisation partielle du marché du cacao au Ghana, Kuapa Kokoo compte aujourd’hui 65 000 producteurs, répartis dans 1 350 villages, ce qui en fait une des plus importantes coopératives au monde investies dans le commerce équitable. En 2012, elle a collecté plus de 42 000 t. de cacao…, mais faute d’un marché suffisant, elle n’en a vendu qu’un tiers à des clients labellisés Max Havelaar, le reste étant écoulé dans les filières traditionnelles.
Bien que tous les planteurs d’Amankwatia ne travaillent pas avec Kuapa Kokoo (qui signifie « producteur de bon cacao Â» en langue twi), le logo de Max Havelaar est bien visible dans le centre du village. « Au dĂ©part, nous Ă©tions une vingtaine dans la coopĂ©rative, explique Samuel Antwi, l’homme qui s’occupe de peser les fèves apportĂ©es par chaque producteur. Nous sommes 136 aujourd’hui Â», sur une population Ă©valuĂ©e Ă  500 familles.
 
Un prix d’achat presque identique à celui de la compagnie d’État
Les membres de Kuapa Kokoo tirent le mĂŞme revenu par sac que les autres planteurs avec, toutefois, un coup de pouce symbolique d’environ 0, 75 €/sac de 62,5 kg, avec lequel Grace Addai, autre productrice de 62 ans, affirme avoir « acquis quelques plants de tomates ». C’est plutĂ´t la gestion dĂ©mocratique de la coopĂ©rative qui intĂ©resse les planteurs. Les intĂ©resse aussi la « prime de dĂ©veloppement Â», 2e pilier du commerce Ă©quitable, qui reprĂ©sente 10 % du chiffre d’affaires soit, pour Kuapa Kokoo, 2,5 millions US $ en 2012, une somme colossale !
 
Financement d’infrastructures
« Nous gérons ce montant de manière transparente et démocratique », assure le directeur général de la coopérative, Kuame Owusu, dans son bureau climatisé de Kumasi, la grande ville du centre du Ghana. Environ 40 % vont directement aux producteurs, sous la forme de don de machettes, ou servent à financer des projets sociaux, comme des puits, des écoles ou une clinique mobile. Kuapa Kokoo encourage aussi les femmes à gagner en indépendance et à augmenter leurs revenus entre deux récoltes, grâce notamment à la mise en place d’ateliers de production de savons, par exemple.
Une autre partie de la prime (8 %) est utilisée pour lutter contre le travail des enfants, un véritable fléau dans les plantations d’Afrique de l’Ouest. Quant au fonctionnement de la coopérative – qui emploie 55 salariés –, il capte 16 % du budget.
 
Une nouvelle Ă©cole dans le village
Amankwatia est l’un des 8 villages Ă  avoir bĂ©nĂ©ficiĂ© de la construction d’une Ă©cole, en 2010, financĂ©e par Kuapa Kokoo : deux longs bâtiments de plusieurs salles qui entourent une belle pelouse oĂą des enfants courent après un ballon. « Nous accueillons 17 classes de primaire et du collège, soit environ 400 Ă©lèves », souligne le directeur. Abbass Ibrahim, 19 ans, est l’un d’eux ; il dĂ©clare : Â«â€‰Avant j’allais Ă  l’école Ă  Offinso, mais depuis que celle-ci a Ă©tĂ© construite je gagne une vingtaine de minutes de marche. » FĂ©ru de guitare, le jeune homme rĂŞve maintenant de poursuivre ses Ă©tudes dans une Ă©cole de musique. Ă  cĂ´tĂ© de lui, Zinabou Harouna, 15 ans, affirme frĂ©quenter l’école « depuis l’âge de 8 ans » et « rĂŞve de devenir infirmière ». Tous, ou presque, sont fils et filles de producteurs de cacao… mais, visiblement, très peu ont envie de reprendre l’exploitation familiale ni mĂŞme de rester dans la rĂ©gion, sauf Amina Omarou, 14 ans, qui se prĂ©sente comme « la meilleure de la classe » : « Moi, j’aimerais rester ici pour enseigner, aider la communautĂ© et devenir un modèle pour les autres enfants. »
 
Amélioration des résultats scolaires
Les résultats scolaires semblent s’être nettement améliorés depuis la construction de l’école. L’absentéisme est en chute libre, même si, reconnaît le directeur, « il s’élève dès qu’il pleut, parce que beaucoup d’enfants viennent de loin et que, ces jours-là, les chemins deviennent impraticables. » Du côté des instituteurs aussi il a fallu trouver les moyens de lutter contre les absences. En plus de l’école elle-même, Kuapa Kokoo a donc financé la construction de quelques maisons pour les accueillir.
Un professeur de maths, 33 ans, y habite depuis 2009 : « Le gouvernement a décidé de m’envoyer ici. Ce n’est pas toujours facile parce que mon épouse et mes deux enfants habitent à Kumasi ; je ne les vois que le week-end. Mais cette école me plaît. Je trouve que le niveau n’est pas mauvais. C’est enthousiasmant. »
Selon le directeur, avant la construction de l’école, aucun élève ne réussissait les examens pour poursuivre ses études au lycée. Ils seraient 52 % aujourd’hui.
Page préparée par Charles Distel,
sur la base d’un article lu sur Internet

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