Missionnaires spiritains : Logo Le reportage  
GABON  
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Les spiritains du Gabon ont une présence pastorale dans les diocèses de Libreville, de Franceville, de Mouila, de Port-Gentil et dans la préfecture apostolique de Makokou.
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Évangélisation et insertion paroissiale


Une région fertile
Fin novembre, c’est le dĂ©but de l’étĂ© et la fin de l’annĂ©e scolaire dans les pays de l’hĂ©misphère sud. Ă€ 230 km d’AsunciĂłn, nous voici Ă  Villa del Rosario, une commune de 12 000 habitants, avec le P. Pierre Juvèneton, au pays depuis 35 ans, et le P. Christian Egemonye. Les abondantes pluies ont fait descendre le thermomètre autour de 30 °C. Nous partons Ă  la dĂ©couverte d’une riche rĂ©gion agricole. De l’eau en abondance, de grandes surfaces cultivables, la rĂ©gion ne manque pas d’atouts pour attirer de riches investisseurs, mais offre cependant peu d’emplois aux jeunes. Il y a pourtant des signes prometteurs d’avenir. Un nouveau port fluvial avec ses premières installations de stockage et d’écoulement de grains par bateau a Ă©tĂ© ouvert. Une culture expĂ©rimentale de 150 variĂ©tĂ©s de jatropha – une plante dont l’huile extraite de la graine est utilisĂ©e comme carburant – est menĂ©e par deux ingĂ©nieurs allemands et financĂ©e par l’Allemagne.
 
Dans l’archidiocèse de Libreville, huit paroisses sont gérées par les spiritains. Il s’agit d’Akébé, de Nkembo, d’Okala, d’Owendo, de Lalala, de Lambaréné, de Likuala et de Sotega. Elles mettent l’accent notamment sur l’évangélisation et la solidarité. La visite de malades, l’animation pastorale et sacramentelle renforcent la proximité avec les fidèles. « Les paroisses veillent aussi à la mise en œuvre des orientations pastorales autour des thèmes de la justice, de la réconciliation et de la paix », précise le P. Patrick Edou, vicaire général de Libreville, premier assistant du supérieur de la fondation et curé de Saint-Christophe (Okala).
Le 5 janvier 2014 a été, pour la paroisse des Rois-Mages (Akébé), le jour du lancement des festivités de l’année jubilaire célébrant ses 50 ans d’existence. « Dans ce cadre, la paroisse veut porter, en particulier, les familles séparées ou instables pour leur ouvrir la porte de la réconciliation », souligne le P. Mathieu Bialabalu, curé de la paroisse.
C’est avec Ă©motion que les fidèles se souviennent de leurs anciens prĂŞtres et en particulier du P. GĂ©rard Warenghem, fondateur de communautĂ©s ecclĂ©siales vivantes de base (CEVB). Ce sont des lieux de retrouvailles pour le partage de l’Évangile et l’animation pastorale dans les quartiers. Pour la coordinatrice des CEVB, Mme Jeanne Akoma Esseng : « Elles cimentent les familles et leur apportent un rĂ©confort dans les moments difficiles, notamment lors de deuils. » Seul bĂ©mol, les hommes et les jeunes y sont moins visibles que les femmes.
La plupart des paroisses sont cosmopolites : Nigérians, Camerounais, Togolais, Béninois, Congolais et Gabonais se côtoient. C’est un défi majeur que de construire des communautés solides à cause des différences de mentalité et de niveau de vie, qu’ils soient ouvriers, commerçants, fonctionnaires ou sans emploi.
L’éducation, le ministère de délivrance et de guérison font également partie des activités paroissiales. C’est l’activité principale du P. Festus Chianakwana, curé exorciste de Sainte-Monique (Sotega).
Par ailleurs, comme la ville de Libreville s’agrandit, les spiritains veillent à être présents dans les nouveaux quartiers afin d’accueillir et de servir les ceux qui viennent d’y emménager. Cela permet de freiner les sectes et les « Églises du réveil » qui poussent comme des champignons. C’est ainsi que nos confrères ont construit en 1985 l’église du quartier d’Owendo (Notre-Dame-du-Rosaire), à la sortie de Libreville.
L’autre mission bien connue du Gabon est celle de Lambaréné (Saint-François-Xavier). Fondée en 1880, elle a servi de base pour apporter l’Évangile sur le cours de l’Ogooué, à l’intérieur du pays. Elle possède des ateliers, dont une menuiserie pour usage interne et un centre de recherche académique pour les jeunes. Ce dernier est une salle informatique avec Internet et une bibliothèque, qui ouvre une fenêtre sur le monde pour les jeunes de Lambaréné.
 
Dans le diocèse de Port-Gentil, toute une population venue d’ailleurs dans les années soixante a fourni la main-d’œuvre autour de l’économie du pétrole et du bois. Ces personnes sont aujourd’hui vieillissantes ou malades. « Nous leur rendons visite à domicile afin de leur apporter sacrements et réconfort. La plupart sont pauvres car ils n’ont rien mis de côté et n’ont pas de pension. En raison du manque de routes, l’accès aux foyers est compliqué. Il faut parfois passer à pied par des champs marécageux où l’eau monte jusqu’aux genoux », explique le P. Guy Boulbin, curé de Sainte-Barbe et vicaire général du diocèse.
Et il ajoute : « Comme il y a un problème de chômage, la présence des étrangers n’est pas bien perçue. Elle crée des rivalités. Et comme l’État ne peut pas faire face à tous les problèmes, nous voulons former des jeunes pour leur donner le goût du travail et surtout du travail bien fait. » Le P. Boulbin travaille avec le P. Évina Serge Bienvenu, qui donne des cours de religion dans les écoles, accompagne des mouvements et tisse des relations de dialogue avec les musulmans.
Responsable du renouveau charismatique et aumônier de la communauté anglophone du diocèse, le P. Emmanuel Iro, curé de la paroisse Saint-Paul-des-Bois, organise, quant à lui, des activités de solidarité, en collaboration avec la Caritas paroissiale. Il collecte de la nourriture et d’autres produits afin de soutenir les plus pauvres. Une partie des denrées alimentaires est apportée aux prisonniers et aux anciens qui logent dans une maison achetée par le diocèse de Port-Gentil pour les accueillir. D’autres produits, tels que le savon, sont également distribués à tous ceux qui en ont besoin.
 
Le diocèse de Franceville, de son cĂ´tĂ©, a confiĂ© trois paroisses aux spiritains : une Ă  Moanda et deux Ă  Lastourville. Quatre spiritains y travaillent. Pour le P. Christian Ngouedi, curĂ© de la paroisse du Père-Brottier Ă  Moanda, « une Ă©vangĂ©lisation efficace rime avec la volontĂ© du missionnaire de durer sur un lieu et de prendre le temps de bien connaĂ®tre les gens, le terrain et la culture. Sinon, c’est une pastorale de tourisme ».
On trouve à proximité l’église Saint-Dominique qui a été construite dans les années soixante à l’aide de la compagnie minière Comilog – une société de droit gabonais dont l’activité principale est l’exploitation de la mine et de l’usine de manganèse à Moanda –, fondée en 1962. La population de la ville augmente rapidement à cause d’une grande présence des étrangers attirés par l’activité économique autour de la mine de manganèse.
Du côté de Lastourville, « la mission est toujours au niveau de la première évangélisation car les habitants ne sont pas encore bien ancrés dans la foi au Christ et se rendent encore chez les charlatans pour chercher des réponses aux maux de la société », souligne le P. Serge Simple Akra, curé des paroisses du Sacré-Cœur et de Saint-Pierre-Claver. Et il ajoute : « Malgré l’omniprésence de mouvements, beaucoup de jeunes ne fréquentent pas l’Église. Pour les intéresser à l’Évangile, nous avons pensé organiser des activités sportives qui se feront en parallèle à une catéchèse adaptée. »
Construite par les spiritains, l’église Saint-Pierre-Claver est la plus ancienne paroisse du diocèse de Franceville. M. Jérôme Sinzi (74 ans), sage de la paroisse, a été témoin, en 1956, du début de sa construction. Mais son meilleur souvenir reste celui de la mise en place d’une école où il a, lui-même, été instruit.
 
Dans le diocèse de Mouila, deux paroisses ont Ă©tĂ© confiĂ©es aux spiritains. « Depuis quatre ans, j’essaie de faire fleurir l’Évangile Ă  Mouila » affirme le P. Thomas Diouf, curĂ© de Saint-Kisito. La communautĂ© la plus Ă©loignĂ©e de la paroisse se trouve Ă  99 km dans la brousse. La route y est peu praticable. « Quand j’y vais, je passe la nuit, accueilli par les catĂ©chistes qui prĂ©parent une centaine de chrĂ©tiens pour les cĂ©lĂ©brations. Ils font eux-mĂŞmes l’animation en l’absence du prĂŞtre », explique le P. Diouf.
Il y a un défi majeur ici : c’est la présence des temples du Bwiti (religion ancestrale). Les gens y vont surtout quand ils sont éprouvés par les difficultés de la vie mais n’y trouvent pas de réponses à leurs questions.
Du côté de Ndendé, le charlatanisme (religion traditionnelle) et la multiplication de sectes comme la « Nzambi bougie » – lumière de Dieu – sont omniprésents. Ils mettent en péril le travail d’évangélisation. Il arrive que les charlatans accusent certaines personnes de sorcellerie. Cela sème la division dans les familles. Les gens vivent une sorte de double appartenance. La foi est encore chancelante. Elle n’a toujours pas pris suffisamment de racines pour résister à ces types de tentations.
En raison de la pauvreté de la population, « nous avons fondé une pharmacie des pauvres, pour soutenir ceux qui n’ont pas les moyens de se procurer de médicaments ailleurs. Nous les achetons à la pharmacie gabonaise et vendons à un prix défiant toute concurrence », assure le P. Kayambi, curé de la paroisse (Immaculée-Conception) de Ndendé.
 
La préfecture apostolique de Makokou, située dans le nord-est du Gabon, a pour priorités : le développement, la santé, l’éducation, la création de proximité géographique et de nouvelles paroisses. D’après Mgr Koerber, préfet apostolique de Makokou, « la préfecture est appelée à devenir diocèse. J’ai été nommé ici pour être plus proche des chrétiens et des prêtres. Et je souhaite éveiller la conscience des gens car ils disposent d’une terre mais ils la fuient alors qu’elle est source de tout ce dont ils ont besoin pour vivre ».
La prĂ©fecture s’étend sur un vaste territoire avec 1 000 km de pistes plus ou moins praticables et une population peu dense. Certains villages ne peuvent ĂŞtre atteints que par voie fluviale. Cela constitue un sĂ©rieux problème de contact avec les fidèles. Une Ă©quipe de deux prĂŞtres est installĂ©e Ă  la paroisse Notre-Dame-des-Victoires. « Au-delĂ  des activitĂ©s paroissiales du quotidien, nous nous rendons compte qu’il y a beaucoup de fidèles qui se disent chrĂ©tiens mais ne le sont pas en acte. C’est notre devoir de les aider Ă  retrouver la dimension de cohĂ©rence entre foi et acte », Ă©voque le P. Anatole Balou, curĂ© de la paroisse. Le P. Jean-Baptiste Mouyamba constate, pour sa part, que « l’accompagnement de jeunes Ă  Makokou est un dĂ©fi majeur : ils changent de lieu de vie frĂ©quemment, soit parce qu’ils doivent partir Ă  l’universitĂ©, soit parce qu’ils ont Ă©tĂ© chassĂ©s de la maison suite Ă  un comportement inappropriĂ©, ou alors parce que leurs parents ont Ă©tĂ© mutĂ©s dans une autre rĂ©gion ».
Cette équipe travaille en collaboration avec une communauté de Sœurs de la congrégation des Filles du Divin Amour – fondée en 1969 par Mgr Godfrey Mary Paul Okoye, spiritain nigérian. En mission à Makokou et à Libreville, les Sœurs travaillent principalement au sein d’établissements scolaires, au service de la santé et de la catéchèse paroissiale. La congrégation compte actuellement plus de 900 religieuses présentes dans 15 pays. Elle est appelée à être signe de l’amour incarné au cœur du monde pour le service de l’humanité. Dans leur école primaire à Makokou, il y a 335 enfants. Et les Sœurs sont en train de construire un collège afin que les élèves puissent continuer à recevoir une éducation de qualité sous leur responsabilité.



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