Missionnaires spiritains : Logo Où va Haïti en 2011 ?  
- 1 -




Au peuple d’Haïti, compassion et espérance


Le 12
janvier 2011, tout Haïti s’est souvenu du séisme du 12 janvier 2010. L’Église tout entière a manifesté à ce peuple meurtri sa compassion et sa solidarité.



Envoyé spécial du pape Benoît XVI, le cardinal Robert Sarah, président du Conseil pontifical Cor Unum, a concélébré la messe, accompagné d’évêques venus d’Europe et d’Amérique, du nonce apostolique et de l’ensemble des évêques d’Haïti.
Sous la tente officielle, au 1er rang, la première dame, Mme Préval, le Premier ministre, Jean-Max Bellerive, des membres du gouvernement, un délégué du FMI, etc.
Autour de l’autel, des centaines de prêtres, de religieux, de religieuses. Tout autour, une foule compacte. Un service d’ordre discret et efficace.
À côté de la télévision nationale, des grappes d’autres journalistes et photographes.


La célébration s’est ouverte par la lecture du message de Benoît XVI. « À l’occasion du 1er anniversaire du terrible tremblement de terre qui a endeuillé votre pays, je suis uni à vous, chers Haïtiens, pour vous assurer de ma prière, particulièrement pour ceux qui sont morts. Je désire également vous donner une parole d’espérance dans les circonstances présentes particulièrement difficiles. En effet, il est temps de reconstruire maintenant, non seulement les structures matérielles mais surtout la cohabitation civile, sociale et religieuse. Je souhaite que le peuple haïtien soit le 1er protagoniste de son histoire actuelle et de son avenir, comptant aussi sur l’aide internationale qui a déjà donné des signes de grande générosité à travers une aide économique et par des volontaires venus de tous les pays. Je suis présent à travers Son Éminence le cardinal Robert Sarah, président du Conseil pontifical Cor Unum. Il vous porte, par sa présence et sa voix, mon encouragement et mon affection. Je vous confie à l’intercession de Notre-Dame du Perpétuel Secours, patronne d’Haïti qui, je suis sûr, du haut du ciel, ne demeure pas indifférente à vos prières. Que Dieu bénisse tous les Haïtiens ! »

L’abbé Marie Éric Toussaint Glandas, curé de la cathédrale, rappelle ensuite le séisme du 12 janvier 2010. Il évoque le nombre impressionnant de victimes, parmi lesquelles l’archevêque Mgr Serge Miot, les prêtres, les séminaristes, les religieux et religieuses, mais aussi les pompiers, les gendarmes, les bénévoles, les responsables politiques et les milliers d’anonymes qui ont été inhumés dans des fosses communes. Il explique que cette célébration de foi et de prière veut rattraper le manque de respect que les circonstances ont imposé à toutes ces victimes et à leurs familles. Il demande


à tous de s’unir dans la prière pour que Dieu accorde son pardon à tous. Mais aussi pour que le pays se reconstruise dans plus de justice pour tous, surtout pour les plus pauvres.
Un second message du pape annonce la nomination de Mgr Guire Poulard, jusqu’à présent évêque des Cayes comme nouvel archevêque de Port-au-Prince. Et celle de Mgr Marie


Éric Toussaint Glandas, jusqu’ici curé de la cathédrale et directeur de la Caritas, comme évêque auxiliaire.
L’homélie du cardinal Sarah est écoutée avec attention, sur place et dans le pays tout entier. Ses paroles, de respect pour les victimes et de compassion pour les souffrants du corps et du cœur, touchent les gens. Autant que son courage pour tracer des chemins de reconstruction des infrastructures et des hommes pour sortir Haïti de la pauvreté. Extraits.
« Cher peuple d’Haïti : je t’apporte la paix et la joie du Seigneur. Un an exactement après le tremblement de terre dévastateur qui a frappé ce cher pays d’Haïti, je viens auprès de vous au nom du Saint-Père. Nous portons encore le deuil de milliers de personnes qui nous étaient chères : des enfants, des parents, des frères et des sœurs ainsi que des prêtres, des religieux et des séminaristes. Parmi ceux-ci, Mgr Joseph Serge Miot, archevêque de Port-au-Prince. En un instant, plusieurs milliers d’entre vous ont perdu tous leurs biens et, encore aujourd’hui, ne savent comment envisager l’avenir. De nombreux et remarquables bâtiments et monuments, dont certains à caractère religieux, sont devenus des ruines. Je pense en particulier à la cathédrale Notre-Dame-de-l’Assomption qui, autrefois, se trouvait à l’endroit même où nous sommes réunis. La maladie et la mort continuent à vous frapper. La joie de vivre semble avoir été brisée par cette tragédie provoquée par un cataclysme et non par une malédiction divine. Le pape m’a envoyé de Rome pour vous dire son amour et sa compassion ainsi que la compassion et la prière de toute l’Église. »
Suit une exhortation sur le véritable bonheur et la paix définitive. Et une dénonciation des injustices, corruptions, inégalités, pauvreté, non-respect de la dignité de la personne humaine, violations des lois que beaucoup d’Haïtiens ont subis depuis ce tremblement de terre.
« Si nous ne recherchons pas ensemble le bien commun, continue le cardinal, la société civile risque de se réduire à une somme d’égoïsmes où prévaudra la loi du plus fort sur les plus faibles, l’intérêt personnel au détriment du développement communautaire, la violence et la corruption sur la paix et la réconciliation. Je lance un appel aux autorités locales – gouvernements, partis politiques, leaders, médias – ainsi qu’à la communauté internationale pour que le bien du peuple d’Haïti, sa reconstruction matérielle et morale deviennent des objectifs prioritaires. De ce lieu, je ne peux pas ne pas éprouver radicalement combien l’égoïsme personnel et national constituent des obstacles fondamentaux pour un développement équitable de tous les peuples et de toute la personne humaine.
Bien chers Frères et Sœurs d’Haïti, le monde entier parle de votre courage légendaire, mais aussi de votre pauvreté et de vos souffrances immenses qui ne connaissent pas de fin. Souvenez-vous de ce que le pape Jean-Paul II, de vénérée mémoire, vous disait, en 1983, lors de sa visite historique dans ce pays : “Quelque chose doit changer ici !” Pour sortir Haïti de sa pauvreté et de ses souffrances, vous devez chasser le démon et la fièvre du gain facile.
Combattez ensemble les désordres politiques, la corruption, l’égoïsme, l’indiscipline morale, la gabegie dans la gestion du bien commun qui freinent l’essor économique et social de votre beau pays.
Et vous, les jeunes, qui êtes la force du présent et le futur d’Haïti, ne vous laissez pas entraîner par des hommes politiques avides et agités par la fièvre du pouvoir. Votre champ de bataille, c’est l’école et les champs de formation universitaires et professionnels et non pas la rue et les combats de rue entre factions politiques.
Chers Frères et Sœurs, Dieu est si puissant qu’il peut faire surgir le bien même d’une des plus grandes tragédies. Il se sert de nous, êtres humains, pour manifester sa présence aimante et vigilante, sa sollicitude et sa compassion. Nous avons découvert des personnes qui se sont engagées, comme jamais auparavant, pour manifester, entre autres, de la sollicitude envers ceux qui avaient perdu un être cher. Nous avons été témoins d’aides et d’assistances sans précédent provenant de pays qui, autrefois, vous étaient hostiles. Nous avons assisté à des comportements héroïques de gens très ordinaires qui ont risqué leur vie, dévoilant ainsi ce qu’il peut y avoir de meilleur dans une personne humaine. Aujourd’hui, nous rendons grâces à Dieu pour tous ceux-ci : le Catholic Relief Services, les Caritas ainsi que toutes les autres agences caritatives catholiques et non catholiques, pour nos évêques, prêtres, religieux, religieuses, pour les mouvements, les autorités et services d’urgence nationaux ainsi que pour les aides dépêchées par les gouvernements du monde entier. À vous tous, organismes nationaux, internationaux et États, nous demandons humblement de poursuivre votre aide jusqu’au bout. Haïti a encore énormément besoin de l’aide et de la solidarité internationales. Jésus ne nous dit pas qu’il n’y aura plus de catastrophes, plus de tremblements de terre. Mais il nous rappelle avec force que nous ne devons pas les affronter seuls, mais solidairement et dans l’amour de Dieu qui a été répandu dans nos cœurs par l’Esprit Saint. La seule espérance pour toute l’humanité est de suivre le commandement de nous aimer les uns les autres comme le Créateur aime chacun de nous. Acceptons qu’Il nous donne un cœur nouveau pour aimer. »
Envoyé au nom de l’Église universelle, le cardinal Sarah apporte aussi une aide de US $ 1,2 million provenant des dons reçus : $ 800 000 pour la reconstruction des écoles, et $ 400 000 pour la reconstruction d’églises. Occasion de remercier tous ceux qui ont collaboré au travail immense de la 1re phase d’urgence et de stimuler la seconde phase d’engagement caritatif. Accompagné de Mgr Segundo Tejado, il a rencontré le président de la République, René Préval, les évêques, les séminaristes, les responsables de la Caritas et des ONG. Il a ensuite visité des communautés religieuses et des centres de santé qui avaient été détruits par le séisme. Et célébré la messe au camp de sinistrés de Parc Acra.

Hommage aux victimes, aux survivants, aux héros, à nous tous


Les journaux ont tous évoqué le séisme de 2010. En publiant sous différentes rubriques de nombreux témoignages d’écrivains, haïtiens et étrangers, ayant vécu le 12 janvier.
Quelques titres forts : « Je me souviens… », « Ne rien oublier », « Histoire d’une miraculée », « Temps morts », « Entre deuil et espérance », « Une douleur étrange comme un bruit de tonnerre », « Des yeux secs pour pleurer nos morts ! », « Recueillement, prières, larmes, angoisse ! ».
Suivent des pages entières de condoléances de grands groupes ayant perdu certains de leurs employés. Avec, soutenues par des images symboliques, des paroles comme : « Nous honorons le courage du peuple haïtien », « Pour eux et pour nous ».
Certaines pages invitent aussi à la réflexion critique : « Un mémorial pour ne pas oublier les disparus », « Un an après, tout à faire ! », « Un an après le séisme, Haïti pleure ses morts et la reconstruction manquée ! » Sous le titre : « Le seul hommage digne de ce nom : devenir citoyen », Lyonel Trouillot écrit dans Le Nouvelliste (12/01/2011) : « Un an après, comment parler des morts sans les offenser, sans nommer ceux qui ont piétiné leurs cadavres : les maquereaux d’Haïti, les politiques muets, les institutionnels corrompus. […] Il n’y a pas de mots pour dire la rage. […] C’est une société que les hommes et les femmes qui y vivent doivent changer, bâtir autrement, au propre comme au figuré. Au nom des morts, la République des ONG. Au nom des morts, la communauté internationale qui commande, décide et menace. Au nom des morts, les cadres haïtiens qui s’en vont, les ”aideurs“ qui s’installent. Au nom des morts, le laxisme des zombies au pouvoir qui ont géré, aussi mal d’ailleurs que le reste, leur avenir personnel. »





Sommaire           Page précédente           Page suivante            Couverture