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Les Philippines hors clichés
épartis sur 7 107 îles et 300 439 km²,
99 millions
de Philippins aspirent à des conditions de vie meilleure. Par plus de respect
mutuel, d’éducation des plus pauvres et de justice sociale.
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En 1521, les Espagnols arrivent
dans l’archipel qu’ils baptisent du nom de leur roi, Philippe II. Ils y restent
quatre siècles, évangélisant le pays et tentant de l’unifier. En 1898, une
bataille navale dans la baie de Manille donne la victoire aux Américains.
Le pays connaît une période de
croissance jusqu’au 4 juillet
1946, date de l’indépendance. De 1941 à 1945, les Japonais dominant le
Pacifique instaurent un régime de terreur. Dans les années cinquante,
ressources naturelles et niveau d’éducation font espérer au pays un avenir
radieux. Mais la dictature du clan Marcos dilapide les richesses sans réussir
les réformes indispensables au développement du pays.
La situation politique, entre les
mains du président Benigno Aquino III, élu le 10 mai
2010, demeure fragile. La corruption à tous les niveaux freine le développement : 40 % du budget de l’État passerait en
dessous-de-table. Plus de 30 %
de la population, rurale à 60 %,
vit sous le seuil de pauvreté. Détenues par de riches propriétaires, les
plantations (rizières, cocotiers, bananiers, canne à sucre et vergers) sont
travaillées par les paysans qui gagnent à peine 1,50 €/jour. Le taux exceptionnel de natalité (26 %) impose au pays
d’importer du riz vietnamien et thaïlandais. Les terres les plus utiles sont « vendues » à des étrangers par le
gouvernement. Face à cette injustice dont sont surtout victimes les lumad
(natifs ethnolinguistiques implantés dans les îles bien avant l’arrivée des

1ers colonisateurs et aujourd’hui minoritaires), la New People Army (NPA) se
défend dans les montagnes contre l’armée philippine.
Face à ces difficultés, les gens
quittent les campagnes, cherchent à être maçon, chauffeur ou domestique et font
exploser les bidonvilles. Trop nombreux, ils repartent bien souvent dans leurs
provinces en n’ayant gagné que le billet retour. Les plus chanceux, 15 % de la population active,
partent pour l’étranger. Ils constituent la 1re source de revenus des
Philippines.
Malgré ce quotidien difficile,
les visages sourient et les portes accueillent l’étranger de passage. Les
Philippins parlent toujours au présent. L’avenir, ils s’en occuperont demain ! L’argent gagné dans la
journée est dépensé le soir même. Un autre trait marquant des Philippins est
leur fausse image d’un Occident parfait où l’argent coulerait à flots. La
religion catholique est profondément ancrée chez les Philippins. Et cette foi
s’affiche : panneaux
publicitaires clignotant sur les routes au rythme de «
Jesus
loves you »,
sainte cène peinte sur les Jeepney, tricycle baptisé «
Gift of
God »…
Sur le bateau nous amenant de
Cebu à Ozamiz, les postes de télé passent en boucle, sous forme de prière
récitée et écrite, une demande à l’Esprit de Dieu :
«
Qu’Il protège notre voyage et guide spécialement ceux qui sont chargés
de conduire la destinée des voyageurs pendant cette traversée. » Prière suivie d’une pub
sur la compagnie qui exploite la ligne de bateaux. Réaction d’un passager : «
C’est
plus facile de confier le bateau à Dieu par une belle prière que de
l’entretenir correctement pour que les traversées se passent dans une plus
grande sécurité ! »
Aux Philippines, l’école suit le
système américain de la maternelle à l’université.
Le niveau des études est
relativement faible :
écoles et supports pédagogiques insuffisants, profs mal formés, mal rémunérés
et manquant de sérieux, élèves privés de moyens. La nuit tombe à 18 heures Comment faire ses
devoirs sans électricité lorsqu’on habite à 8 par pièce ? Et quand il faut, très jeune, prendre part
aux tâches ménagères ?
Dans les provinces reculées, les élèves s’entassent à 100 dans des salles prévues
pour 30. Les écoles publiques devraient être gratuites. Mais beaucoup de
familles ne peuvent y envoyer leurs enfants en raison de coûts annexes : uniformes obligatoires,

fournitures scolaires, transport… Les revenus de la plupart des familles
suffisent tout juste à nourrir leurs nombreux enfants…
Mindanao, au sud des Philippines.
À en croire les Philippins du Nord, journaux et guides touristiques, Mindanao
est l’île de tous les dangers. Un analyste franco-américain, expatrié à Iligan
depuis plus de 15 ans, explique :
au nord, le parti communiste se bat sous le nom de la New People Army. But
avoué : la terre et la
propriété. Au sud-ouest, le Moro Islamic Liberation Front (MILF), mouvement
nationaliste musulman, auteur de nombreux attentats et enlèvements, se bat au nom
de l’islam. Idéologique l’un, religieux l’autre, ces 2 mouvements luttent
contre le même gouvernement. Menaçant plusieurs fois de s’unir, ils ne sont
jamais passés à l’acte. Pour ne pas avoir à partager le butin ! Les vraies raisons
motivant ces 2 mouvements au nom du communisme ou de l’islam sont en partie
factices. Les petites gens enrôlées dedans marchent d’abord pour nourrir leur
famille. L’argent est l’une des grandes raisons pour lesquelles on se bat. Pour
arrêter les hostilités, le 1
er mouvement musulman avait reçu, à une
époque, 8 milliards de
pesos. Ceux qui n’ont pas rien touché ont créé le MILF et attendent la même
générosité de la part du gouvernement. D’où le terrorisme des enlèvements et
des exécutions de chrétiens.
Si Mindanao est autant l’objet de
convoitises, c’est à cause de ses richesses naturelles : sols fertiles, productions de qualité et
nombreux minerais. Une compagnie minière travaille dans les montagnes non loin
d’Iligan. De fortes pluies ont lavé les montagnes et emporté de la poudre d’or.
Les habitants de la vallée ont passé la rivière au peigne fin, réussissant à
gagner quelques pesos en revendant leur trouvaille à la ville !