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  Dossier      Claude-François Poullart des Places - Devenir pauvre pour suivre le Christ 


Un jeune riche entre au séminaire



Fondateur de la congrégation du Saint-Esprit, Claude Poullart des Places n’a vécu que 30 ans. Mais il lui a été donné d’aller au cœur de l’Évangile pour se consacrer aux plus pauvres à la suite du Christ. Une intuition évangélique source de fécondité fondatrice
"ce qui peut fonder une vie pour toujours, ce ne sont pas les idées reçues, ce sont les valeurs de la foi à partir de l'Évangile"
Voici un jeune Rennais en début d’année 1700, au temps de Louis XIV. Il a 20 ans. Il est toujours chez ses parents, sans y avoir une fonction précise. Il est connu de tous comme la dizaine de familles les plus distinguées de la ville. Il a fait de bonnes études de philosophie et de droit, ce qui en fait un des jeunes les plus instruits de Rennes. Il n’a pas de poste équivalent à cette formation. Il n’est ni étudiant, ni employé du parlement avec son père, ni homme d’affaires, ni orienté vers la fondation d’une famille. Quel est donc ce jeune homme, élégant sans être mondain, libre en ses manières sans être libertin, de bonne famille sans être de la noblesse ? Claude-François Poullart des Places.

Une année de recherche intérieure
L’année 1700-1701 est pour Claude une année de travail aux affaires de son père. Ses parents envisagent une grande carrière pour lui. Claude ne semble pas vouloir trop les écouter, il a bien quelques idées sur son avenir, mais elles ne concordent pas avec ce que voudrait son père.
Claude envisage son avenir. Les possibilités ne lui manquent pas, il a reçu la plus haute formation générale supérieure qui lui permet d’entrer dans les carrières les plus recherchées et les plus lucratives. Mais ce n’est pas ce qu’il veut. Le temps est pourtant venu de se fixer une orientation.


Depuis plusieurs années, il se sent appelé à une vie de service de Dieu et service des autres, sans en voir la forme précise. Il a essayé d’étouffer cette pensée, mais elle revient en lui de façon persistante. Il va donc faire comme il a appris durant sa formation auprès des jésuites : il commence une retraite pour une ou deux semaines afin de discerner une bonne fois ce que vaut cet appel intérieur. Une semaine de révision de vie à la façon de saint Ignace et une semaine d’élection et de choix d’un état de vie.
Nous n’avons pas à inventer ses intentions à ce moment de sa vie : il a rédigé quelques pages sous le titre bien explicite : « Réflexions […] au cours d’une retraite pour une âme qui cherche à se convertir » et il analyse avec discernement les orientations qui se présentent à lui, donnant les raisons qu’il accepte et celles qu’il refuse. Il nous a permis d’entrer ainsi en retraite avec lui et de suivre en lui les avancées de la grâce. « Vous me cherchiez, Seigneur, et je vous fuyais »
(D. M., p. 279) 1.

Il décide d’entrer au séminaire, à Paris
À la fin de ces jours de réflexion, Claude Poullart a découvert l’appel de Dieu. C’est Dieu qui attend sa décision et son engagement dans un mode de vie qui se précise de plus en plus. Il choisit le Dieu de l’Évangile, révélé dans la personne et les attitudes de Jésus. Il découvre, en relisant sa vie, l’appel à une vie de sainteté, et s’engage dans un projet de vie de perfection.
Il décide d’être prêtre non pas en Bretagne, où il est si connu, mais à Paris en se préparant avec les jésuites, ouvert à tout service dans l’Église. Il s’exprime devant Dieu comme celui qui l’a convaincu et vaincu même, qui l’a libéré de lui-même, qui a mis à terre son ambition et sa recherche de gloire, pour l’envoyer vers sa nouvelle mission. « Ô mon Dieu, j’ai recours à votre divine Providence, je m’abandonne entièrement à elle. Je renonce à mon inclination, à mes appétits et à ma propre volonté pour suivre aveuglément la vôtre. Daignez me faire connaître ce que vous voulez que je fasse » (D. M., p. 300).

Les premiers mois à Paris sont une découverte
En octobre 1701 Claude entre à Louis-le-Grand à Paris. Il vit un 1er trimestre comme une « entrée en religion ». En quelques semaines, il change de comportement, de nourriture, d’activités, d’occupation de ses temps libres. La raison et la source de ce changement, c’est la découverte qu’il vient de faire que ce n’est pas à lui de fixer les conditions de son service, c’est Dieu qui a l’initiative. Ce qui peut fonder une vie pour toujours, ce ne sont pas les idées reçues de son milieu ou de sa formation, ce sont les valeurs de la foi à partir de l’Évangile. « Remplissez mon

cœur et mon esprit de la grandeur de vos jugements, de la grandeur de vos bienfaits et de la grandeur des promesses que je vous ai faites par votre sainte grâce, pour qu’il m’en souvienne à jamais
» (D. M., p. 315).
En 1702, ses confrères de Louis-le-Grand notent ce changement qui fait de lui un homme nouveau : « On le vit tout d’un coup, au milieu de ce collège si nombreux et où il était si connu, quitter tout l’éclat et les manières du siècle pour se revêtir en même temps de l’habit et de la simplicité des ecclésiastiques les plus réformés. Il ne se mit point en peine de ce qu’on en pouvait dire […]. Combien de fois l’a-t-on vu faire les actions les plus humiliantes aux yeux des personnes qui le connaissaient le mieux, quand il s’agissait de procurer aux pauvres écoliers qu’il avait rassemblés leur subsistance. On l’a vu souvent au milieu des rues de Paris, accompagné de quelques-uns de ces pauvres écoliers, la plupart fort mal habillés, avec lesquels il paraissait s’entretenir comme avec ses égaux » (Pierre Thomas).
Ainsi en quelques mois, au séminaire Louis-le-Grand, Claude Poullart est devenu un tout autre homme, prêt à donner sa vie pour le service qui lui sera demandé. Il ne vit plus selon sa classe sociale, et c’est le signe d’une profonde conversion, mais selon l’Évangile à l’écoute de sa propre vocation. Il a compris que Dieu avait besoin de lui « pour le service de son Église ». Il ne tardera pas à avoir des détails sur cette mission.

1 Les initiales D. M. correspondent au livre du P. Christian de Mare, Aux racines de l’Arbre spiritain, 1998.

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