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Spiritains en Suisse  
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Fribourg. Spiritains au service de l’Église locale

 

Ils assurent une présence pastorale dans le canton de Fribourg. Le chapitre de 2011 a souhaité que cette présence prenne la forme d’une communauté de type apostolique engagée dans la pastorale auprès des marginalisés, des associations et dans l’évangélisation au sein de l’Église locale.

 

Au 18, rue du Botzet

 

L’ancien séminaire spiritain réhabilité il y a quelques années est aujourd’hui en partie utilisé par le canton comme clinique psychiatrique de jour. Les malades n’ont cependant pas de lien direct d’accompagnement avec les spiritains sauf s’ils expriment une demande spirituelle personnelle. L’autre partie de la maison est occupée par une communauté spiritaine et par la congrégation des Sœurs de la Sainte-Croix-d’Ingenbohl (Suisse). Ces religieuses s’occupent de femmes en situation de détresse et de personnes malentendantes. 4 appartements y sont en location. La clinique offre un service de santé précieux pour les personnes en psychiatrie et les jeunes, victimes du burn-out (état d’épuisement).

Pour rendre service à l’Église locale, les PP. Francis Zufferey, 69 ans, et Jean-Claude Pariat, 75 ans, se sont engagés au service de personnes avec handicap.

Après plusieurs années de mission au Sénégal et en Suisse, le P. Zufferey se lance, dès 2005, au service de l’aumônerie du Centre œcuménique de la pastorale spécialisée (COEPS) qui œuvre auprès des personnes handicapées psychiques et mentales. En collaboration avec les communautés Foi & Lumière et l’Arche de Fribourg, il est chargé de préparer et d’assurer les célébrations auprès des ces personnes dont certaines sont sourdes ou malentendantes. Il accompagne également les Équipes Notre-Dame, l’Acat et le Mouvement chrétien des retraités (MCR) comme conseiller de la vie montante. « À travers ces activités, je continue à donner un témoignage de vie et d’Évangile. Aussi, la rencontre avec d’autres cultures m’a permis d’avoir un regard souple. Je m’ouvre plus facilement à ce que disent les autres. J’ai beaucoup reçu et témoigne de ce qui est important. Pour moi, le missionnaire c’est celui qui s’ouvre au dialogue, capable de donner ce qu’il est et de recevoir ce qui fait la vie de l’autre », souligne le P. Zufferey.

Au sujet des vocations sacerdotales, le dĂ©fi actuel de l’Église, dit-il, ne se trouve pas dans le manque de prĂŞtres mais dans l’engagement du baptĂŞme. Il nous faut des baptisĂ©s engagĂ©s. Ce sont eux qui font la vie d’une communautĂ©. Sans nĂ©gliger le rĂ´le du prĂŞtre, il ne faut pas construire la communautĂ© Ă  partir de sa personne mais de celle des baptisĂ©s eux-mĂŞmes. « L’Église a toujours cĂ©dĂ© une responsabilitĂ© aux laĂŻcs au lieu de la leur confier dès le dĂ©part. Elle n’arrive pas Ă  reconnaĂ®tre un vĂ©ritable ministère de laĂŻcs car il y a toujours une rĂ©fĂ©rence aux prĂŞtres. Pas d’autonomie dans les prises de dĂ©cisions. Les responsables laĂŻcs devraient s’engager par mandat, pour un temps et il ne faut pas en faire des petits curĂ©s », prĂ©cise le P. Zufferey.

Le P. Pariat, quant à lui (mécanicien de formation, ancien provincial, professeur et formateur au Congo, au Sénégal, en France et en Suisse), est actuellement engagé auprès de ceux qui, à Fribourg, souffrent d’un handicap mental, d’autisme, d’un retard de développement physique ou de troubles de la parole. En collaboration avec une centaine des laïcs, il forme des adolescents handicapés de moins de 18 ans à la communion et à la confirmation. Il accompagne aussi des anciens avec handicap en fin de vie. Ces personnes se trouvent dans des établissements adaptés, équipés d’ateliers, avec des éducateurs spécialisés. Certaines, parmi elles, sont en même temps aveugles ou sourdes-muettes. « Compte tenu de leur état, notre langage n’a pas de sens pour elles. C’est à nous d’apprendre le leur », souligne le P. Pariat. La transmission de la culture religieuse dans ces structures est demandée et reconnue par le canton de Fribourg qui rémunère les catéchistes.

Le P. Pariat exerce aussi la pastorale du SEDES (service, écoute et délivrance spirituelle) dans le diocèse de Lausanne, Genève et Fribourg. Le SEDES est un groupe de chrétiens bénévoles – accompagné par un prêtre aumônier – qui s’engage à assurer une écoute téléphonique, à prier et, si nécessaire, à soutenir les personnes en mal-être et en recherche d’une libération spirituelle.

Le P. Roland Bugnon, 73 ans, fait également partie de la communauté. En Centrafrique, où il avait été missionnaire, il s’était attaché à faire découvrir la Bible aux villageois au-delà d’une vision scolaire de type questions/réponses, et pour en finir avec le système qui consistait à remettre des livres aux paroissiens sans se soucier réellement de leur éducation. Il a également mis en place une catéchèse à partir d’un point de vue humain et reposant sur le quotidien des gens. De retour en Suisse, il a animé entre autres des groupes de réflexion sur la foi chrétienne, et de lecture suivie de la Bible. Cela lui a ouvert une porte pour écrire. Voici ce qu’il dit au sujet de son livre, Voyage de Marc en Galilée : « J’ai choisi une écriture facile, à la portée de tous, avec des récits, des dialogues et l’évocation de questions concrètes posées par l’action et les paroles de Jésus. »

 

Maison provinciale

 

Trois autres confrères forment une deuxième communauté au 9, rue du Botzet.

Le P. Noël Tinguely, 82 ans – parfois appelé « Père Caricaturiste » –, actuel rédacteur de PSM version suisse. Il a été missionnaire au Cameroun, en France et en Haïti. Marqué par la soif de savoir qu’avaient les jeunes Camerounais, la profondeur du sens que portent les proverbes en ewondo au Cameroun ou l’authenticité de la foi du peuple haïtien, il se dit satisfait du fait que la mission lui a donné une nouvelle culture, un esprit d’ouverture et une foi plus solide qu’avant. Il explique, par exemple : « Plusieurs années après avoir quitté Haïti, je lis encore la Bible en créole. Il y a des symboles et des images qui me parlent mieux que de simples mots. Ou alors, un proverbe ewondo bien placé au cours d’une célébration vaut plus qu’un sermon. Tout cela est pour moi un trésor, un puits sans fond. »

Au sujet de la place de l’Église dans la société suisse, il affirme que « son avenir ne pourra se faire que par les baptisés engagés et qui se sentent réellement concernés. Le nombre de prêtres diminue sensiblement, mais nous sommes appelés à nous adapter et non pas à regretter. La société évolue. Nous ne pouvons pas toujours prendre le contre-pied même s’il ne faut pas tout avaler. »

Le P. Werner Arnold, 72 ans, est l’actuel supĂ©rieur provincial de Suisse, pour un 3e mandat. Ancien missionnaire au Cameroun (13 ans) oĂą il a travaillĂ© en ministère paroissial, aumĂ´nier de jeunes, de prison et d’hĂ´pital, puis en HaĂŻti (14 ans). Il affirme l’engagement de la province de Suisse Ă  soutenir la mission dans le monde. « MĂŞme si nous n’avons plus de confrères Ă  envoyer, les besoins en personnel et en solidaritĂ© sont toujours d’actualitĂ©. Nous souhaitons rester ouverts, faire des efforts pour changer ici afin que cela change lĂ -bas. Nous encourageons la rĂ©ciprocitĂ© parce nous croyons que la mission ne doit pas ĂŞtre Ă  sens unique », souligne le P. Werner Arnold.

Enfin, le P. Jean-Marc Sierro, 55 ans, ancien missionnaire en République centrafricaine, puis professeur à la faculté des lettres à Fribourg. Il est actuellement économe de la province de Suisse. En 1994, il a participé à la fondation du Réseau foi et justice Afrique-Europe (AEFJN-antenne Suisse). Il s’est également engagé à travailler à l’animation des jeunes en lien avec le service « Voyage-Partage » des communautés missionnaires romands catholiques. Fondé en 1991 en Suisse, ce service propose des séjours en Amérique latine, Asie et Afrique dans le cadre de la mission et du développement. Elle permet à des jeunes de 20 à 30 ans de partager le quotidien de missionnaires engagés dans les pays du Sud, en vivant et en travaillant avec eux dans une grande simplicité. Cela permet un échange culturel et religieux dans un respect mutuel, et ouvre vers une vision responsable du monde.

 

Une Église ouverte sur le monde

 

Lors de notre passage Ă  Fribourg, nous avons participĂ© Ă  une rencontre de reprĂ©sentants de Missio â€“ un organisme d’échange et de partage entre Églises qui assure un service de communion avec les Églises d’Afrique, d’AmĂ©rique latine, d’Asie et d’OcĂ©anie, et gère un fonds international de solidaritĂ© oĂą chacun verse selon ses moyens et reçoit selon ses besoins.

En Suisse, cet organisme s’engage à relier la mission au développement, à la solidarité, au témoignage et au travail d’animation. « Nous reconnaissons qu’en tant que citoyens suisses, nous pouvons apprendre beaucoup des autres missions dans le monde. Nous tendons donc vers l’universel. En 2012-2013, par exemple, l’Église en Suisse organise des actions de solidarité pour la Tanzanie et fait découvrir chez nous la qualité de la vie des communautés chrétiennes là-bas », affirme M. Brunner-Artho, diacre permanent, directeur de Missio. Les catholiques suisses deviennent ainsi une Église ouverte au monde.

Pour être efficace, Missio a fixé des lignes directrices. En tant qu’organisme chrétien d’entraide, il reconnaît que l’amour de Dieu et l’amour du prochain ne font qu’un, ce qui lui permet de soutenir l’homme dans toutes ses dimensions. Missio se laisse interpeller par la vie et le témoignage de ses partenaires. Il soutient les enfants et les jeunes qui, à travers le monde, souffrent de la misère (orphelins, enfants de la rue, réfugiés, malades du sida, handicapés). Il soutient aussi des projets pastoraux et sociaux dans plus de 1 200 diocèses sans grands moyens, par exemple la construction et l’entretien d’écoles, salles communautaires, dispensaires, orphelinats, la contribution aux salaires d’enseignants, d’infirmiers et d’agents pastoraux. Enfin, cet organisme apporte son savoir-faire pour la formation de laïcs engagés, de catéchistes, de religieux, de religieuses, de séminaristes et de prêtres.




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